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AFFECTION2, subst. fém.
I.− Manière (particulière ou accidentelle) dont un être, une chose sont affectés ou modifiés (cf. affecter2; le compl. introd. par la prép. de indique ce qui est affecté).
A.− Vieux
GÉOM. Modification, propriété d'une ligne, d'une figure. Affection d'une courbe :
1. Les points singuliers imaginaires ou à l'infini font partie des affections particulières des courbes, ... M. Chasles, Aperçu historique sur l'origine et le développement des méthodes en géométrie,1837, p. 250.
Rem. Land. 1834 signale ce sens avec l'ex. : ,,cette courbe a telle affection``; il ajoute : ,,il a vieilli en ce sens``; Ac. Compl. 1842 précise que l'expr. était empl. ,,par les anciens géomètres``; Lar. 19eet Littré notent que cet emploi est ,,vieux``.
LINGUISTIQUE :
2. Affection. Toute modification subie par un phonème en vertu d'une loi phonétique : assimilation, dissimilation, apophonie, etc. Mar. Lex.1933, p. 19.
PSYCHOL. (anc.)
État modificatif du corps, sensation :
3. En philosophie, on nomme affections les différentes qualités et les différens changemens qui surviennent à quelque corps, et dont on dit qu'il est affecté. C.-M. Gattel, Nouveau dict. portatif de la langue française,1797.
4. Une odeur, comme une saveur, est une affection du sujet sentant, qui ne donne aucune représentation, qui n'implique ni ne détermine par elle-même aucune connaissance de l'objet senti. A. Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 146.
État modificatif de l'âme :
5. ... nous considérons ici les affections de l'âme, non point en tant qu'elles produisent des changemens dans l'état des organes, ce qu'en effet elles sont capables de faire, mais en tant qu'elles résultent elles-mêmes de ceux qu'ont déjà déterminés les habitudes physiques. P. Cabanis, Rapports du physique et du moral de l'homme, t. 2, 1808, p. 4.
6. La morale est la connaissance des règles auxquelles il nous importe de conformer non-seulement nos actions, mais encore nos affections. Celles-ci sont une portion si importante de notre manière d'être, que je m'étonne qu'aucun philosophe ne les ait comprises encore dans la définition de l'objet essentiel de la morale. Nos affections, en effet, sont à nos actions ce que les idées sont aux mots. Le point essentiel, en morale comme en logique, est que les premières soient bonnes. J. Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 266.
B.− PSYCHOL. (mod.). Modification qui affecte la sensibilité, sentiment, passion, etc. :
7. Comme les affections d'amour, de haine, de jalousie, d'enthousiasme, d'espérance, de regret, de joie et de tristesse sont les mêmes par les causes et le développement en tout homme, qu'il soit noir, blanc ou jaune, comme les lois de l'action, coutume, habitude, savoir-faire, travail, persévérance, sont les mêmes en tout homme, qu'il soit jaune, noir, ou blanc, ainsi l'intelligence est la même en tous, ... Alain, Propos,1921, p. 295.
8. Il n'y a pas de nom pour désigner le sentiment que nous avons d'une substance de notre présence, de nos actions et affections, non seulement actuelles, mais à l'état imminent, ou différé, ou purement possible, − quelque chose de plus reculé, et pourtant de moins intime que nos arrière-pensées : nous nous trouvons une capacité de modifications presque aussi variées que les circonstances environnantes. P. Valéry, Variété 5,1944, p. 70.
9. Affection : tout ce qui, dans nos pensées, dans nos projets, dans nos résolutions est marqué d'un degré quelconque d'amour ou de haine, de joie ou de tristesse. La mélancolie est une affection, l'envie est une affection, la déception est une affection. Alain, Définitions,[Les Arts et les dieux], Paris, Gallimard, 1961 [1951].
C.− Péj., MÉD. Modification qui affecte le corps en altérant la santé, maladie (considérée dans ses symptômes douloureux). ,,Affection nerveuse, hystérique, aiguë, chronique`` (Ac. 1835-1932) :
10. En ma qualité de beau-frère de la défunte (elle est la sœur de ma femme), je me permettrai de vous demander (ne pensant pas commettre d'indiscrétion), le nom de la maladie, de l'affection, du cas, si vous aimez mieux, qui vient de nous l'enlever si malheureusement? P. Reider, Mademoiselle Vallantin,1862, p. 189.
11. Il y a, murmura Laurent, des affections qui partent d'un petit furoncle ou d'une écorchure. Et elles s'étendent, elles s'étendent et on oublie le petit bouton qui se trouvait à l'origine. G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Combat contre les ombres, 1939, p. 222.
12. Sont considérées comme affections de longue durée la tuberculose, les maladies mentales, les affections cancéreuses, la poliomyélite et les affections entraînant une interruption de travail ou des soins supérieurs à six mois. Liaisons sociales,18 nov. 1955, no1613, p. 23.
II.− Manifestation du sentiment d'attachement d'un être (gén. hum.) pour un autre être (le compl. introd. par la prép. de indique l'être qui éprouve une affection).
A.− [L'obj. désigne une pers.] Attachement intime et durable qu'une personne éprouve pour une autre personne (sans considération d'âge ni de sexe) :
13. Que faites-vous donc, toute la journée, Madame? Quelle affaire si importante vous ôte le temps d'écrire à votre bien bon amant? Quelle affection étouffe et met de côté l'amour, le tendre et constant amour que vous lui avez promis? Quel peut être ce merveilleux, ce nouvel amant qui absorbe tous vos instants, tyrannise vos journées et vous empêche de vous occuper de votre mari? Napoléon Ier, Lettres à Joséphine,1796, p. 60.
14. ... Malek Adhel, en se voyant l'objet d'un zèle si ardent et si pur, verse des larmes plus tranquilles, et la douce affection que l'amitié répand dans son âme, y calme un moment les dévorantes ardeurs de la passion : depuis le départ de Mathilde, il goûte quelques instans d'un sommeil tranquille, et c'est à la bienfaisante amitié qu'il le doit. MmeCottin, Mathilde,t. 2, 1805, p. 16.
15. Affection. Sentiment désintéressé, moins vif que l'amour, et plus tendre que l'amitié. Dict. des gens du monde, 1818.
16. Un vieux malicieux domestique, très fort en l'art vétérinaire, servait les chevaux et pansait Godefroid, car il avait été à feu Monsieur Beaudenord, et portait à Godefroid une affection invétérée, cette maladie du cœur que les caisses d'épargne ont fini par guérir chez les domestiques. H. de Balzac, La Maison Nucingen,1838, p. 609.
17. ... le sentiment national devient un véritable intermédiaire entre l'affection domestique et l'amour universel. A. Comte, Catéchisme positiviste,1852, p. 306.
18. Il était lui-même d'ailleurs composé de deux éléments en apparence incompatibles. Il était ironique et cordial. Son indifférence aimait. Son esprit se passait de croyance et son cœur ne pouvait se passer d'amitié. Contradiction profonde; car une affection est une conviction. Sa nature était ainsi. V. Hugo, Les Misérables,t. 1, 1862, p. 784.
19. Une même affection féminine peut-elle cumuler les caractères des diverses affections filiale, fraternelle, conjugale et maternelle? Je le crois. H.-F. Amiel, Journal intime,20 avr. 1866, p. 253.
20. monsieur. − Mais ma reconnaissance pour vous... jean. − Mais je n'en veux pas. monsieur. − Pourquoi? jean. − Mais parce que votre reconnaissance deviendrait vite de l'amitié... et, de l'amitié à l'affection, il n'y a qu'un pas. monsieur. − Nous le franchirons. jean. − Non, Monsieur! Jamais! ... Je ne veux pas devenir votre ami. S. Guitry, Le Veilleur de nuit,1911, III, p. 23.
21. Renée, écoutez-moi. Écoutez-moi, mon petit. Nous avons repris notre... notre intimité, c'est cela, le mot est bon, nous avons repris notre intimité au point où nous l'avions laissée il y a trois ans. Mais aujourd'hui vous êtes mariée. Et notre... affection ne peut pas être la même qu'alors, ne doit pas... c'est cette pensée qui nous gêne, n'est-ce pas? M. Arland, L'Ordre,1929, p. 298.
22. Il avait en outre une authentique peine du cœur, l'amour intéressé qu'il professait pour son oncle comportant une part d'affection véritable. On ne comprend rien à la vie, tant qu'on n'a pas compris que tout y est confusion. H. de Montherlant, Les Célibataires,1934, p. 895.
23. De l'attachement. Dès le second jour, de la confiance (elle vagabondait seule dans l'appartement, tous tiroirs ouverts). Dès le troisième jour, de l'estime. Puis de la sympathie. Puis quelque chose entre l'attachement et l'affection, où il s'était stabilisé. Pas d'amour, bien entendu, et pas la moindre jalousie pour ses nombreux usagers. H. de Montherlant, Les Lépreuses,1939, p. 1438.
24. La plupart des affections ne sont que des habitudes ou des devoirs qu'on n'a pas le courage de briser. H. de Montherlant, La Reine morte,1942, II, 3, p. 185.
25. Il pensait à moi, à mon « amour » qui, à son gré, durait trop; il me disait même que la chose la plus grave qui pût m'arriver serait que cet amour se transformât en affection, et se trouvât ainsi tisser entre Gina et moi des liens moraux. « On a assez de choses à trancher dans la vie sans se créer encore des devoirs d'affection ou des scrupules de morale. L'amour, au moins, ne se crée pas de devoirs. » R. Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 141.
P. méton. La personne objet de l'affection :
26. Je t'aime par toutes les racines qu'il y a dans mon cœur. Je t'aime par nos quatre enfants. Écoute bien ceci, c'est la vérité devant Dieu, mon Adèle. Tu as été la première et tu seras la dernière affection de ma vie. V. Hugo, Correspondance,1836, p. 548.
27. − Ma maman, ma protection, mon admiration et mon affection, ma maman à moi, tout petit, elle est absente pour cause de démêlés avec la police... L. Frapié, La Maternelle,1904, p. 298.
THÉOL., au plur. Élans de l'âme vers Dieu dans la prière. ,,L'oraison consiste plus dans les affections que dans la connaissance.`` (Ac. Compl.1842) :
28. Mais toutes ces croyances et toutes ces tendres affections qui s'élançaient du cœur de l'homme de ces temps-là vers le ciel, se rencontraient et se fixaient toutes sur une image suprême. Toutes ces pieuses traditions, les unes locales, les autres personnelles, s'éclipsaient et se confondaient dans celles que le monde entier répétait sur Marie. Ch. de Montalembert, Hist. de sainte Élisabeth de Hongrie,introd., 1836, p. ci.
B.− [L'obj. désigne une chose] Prédilection manifestée pour une chose :
29. Gavarni nous emmène tous trois dîner à son restaurant d'affection et d'habitude, la poissonnerie anglaise, où l'on est si mal et où il se trouve si bien, parce que le maître lui raconte toutes les ruses des voleurs de plats d'argent et lui sert un dîner sans qu'il le demande. E. et J. de Goncourt, Journal,juin 1857, p. 361.
30. − Écoutez-moi, Ski, attendez, je vais vous dire « une bonne chose », dit Cottard qui avait pris en affection cette expression usitée dans certains milieux médicaux. M. Proust, À la recherche du temps perdu,Sodome et Gomorrhe, 1922, p. 892.
Rem. 1. Lorsque la pers. qui éprouve l'affection est explicitée, elle s'exprime par un adj. poss. (ex. 21; cf. aussi L.-E. Duranty, Le Malheur d'Henriette Gérard, 1860, p. 228), ou par un compl. déterminatif (prép. de). L'obj. de l'affection s'exprime le plus souvent par un compl. prép. (prép. pour, rarement à) notamment dans les loc. verbales : avoir de l'affection pour qqn, porter de l'affection à qqn, se prendre d'affection pour qqn ou qqc. Ac. 1798-1932 : Il n'a d'affection pour (ou à) rien. Avec obj. dir. : prendre qqn (ou qqc.) en affection (ex. 30) :
31. Quand je jette les yeux autour de moi, dans cette chambre où j'ai dévoré ma tristesse pendant les mortelles semaines de l'hiver dernier, je me sens pris d'une sorte d'affection pour ces murs qui m'ont abrité et qui ont vu ma peine. J. Green, Journal,1942, pp. 188-189.
Rem. 2. La double constr. affection de... à est vieillie (cf. affectionner I B 2, s'affectionner à qqn ou à qqc.) :
32. ... tu sais si je t'aime et si jamais affection plus grande a réuni deux âmes. Pour moi, je n'en crois rien; l'affection de mon cœur au vôtre est incomparable. J.-A. de Gobineau, Nouvelles asiatiques,L'Illustre magicien, 1876, p. 98.
Rem. 3. Les dict. signalent l'expr. d'affection au sens « avec chaleur, avec intérêt » : Il en parle d'affection (Ac. 1798-1932). Cet emploi est vieilli, de même que celui qu'illustre l'ex. 29. En revanche est vivant l'emploi aimer d'affection (sincère), où le compl. sert à particulariser la compréhension trop pauvre (et donc l'ext. trop large) du verbe aimer.
Prononc. : [afεksjɔ ̃]. Pour la prononc. de t dans -tion, cf. le suff. − Rem. Besch. 1845 transcrit la 2esyllabe avec [e] fermé. Enq. : /afeksiõ/.
Étymol. ET HIST. − 1. Fin xiies. « mouvement qui porte l'âme vers qqn » (S. Bernard, Serm., p. 563 ds Gdf. Compl. : Oyng donkes ton chief, retornanz a celuy ki desor ti est, tot ceu k'en ti est de devotion, de deleyt et d'affection); d'où 1609 « attachement, amitié pour un être humain » (Saint François de Sales, Introd. à la vie dévote, texte de l'éd. princeps, II, 36 ds Œuvres, publ. par les religieuses de la Visitation d'Annecy, t. 3, Annecy, Nierat, 1893, p. 127 ds Fr. mod., 21, p. 217 : Et S. Paul reprochant le detraquement des Gentils, les accuse qu'ils estoient gens sans affection : c'est-à-dire qui n'affectionnoient personne, ny n'avoient nulle sorte d'amitié); 2. 1539 méd. « modification physique, état maladif » (Canappe, 5elivre de la méthode thérap. ds Quem. t. 1 1959). Empr. au lat. affectio (attesté dep. Cicéron, Inv., 1, 36 ds TLL, 1177, 3 au sens de « modification, disposition de l'âme résultant d'une influence subie »), au sens 1 en lat. impérial, Pline, Tacite, Quintilien (TLL, loc. cit., 1178, 28) très fréq. en lat. chrét. (Blaise 1954).
STAT. − Fréq. abs. litt. : 5 243. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 11 063, b) 8 756; xxes. : a) 5 435, b) 4 900.
BBG. − Bailly (R.) 1969 [1946]. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Boiss.8. − Bonnaire 1835. − Bouillet 1859. − Bruant 1901. − Daire 1759. − Darm. Vie 1932, p. 71. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 16, 18. − Dup. 1961. − Fér. 1768. − Foulq.-St-Jean 1962. − Franck 1875. − Fromh.-King 1968. − Garnier-Del. 1961 [1958]. − Goblot 1920. − Guizot 1864. − Lacr. 1963. − Laf. 1878. − Lafon 1963. − Lal. 1968. − Lar. méd. 1970. − Lav. Diffic. 1846. − Littré-Robin 1865. − Mar. Lex. 1961 [1951]. − Miq. 1967. − Nysten 1814-20. − Pope 1961, § 647, 745. − Prév. 1755. − Sommer 1882. − Springh. 1962. − Synon. 1818.