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ADMIRER, verbe trans.
I.− Considérer quelqu'un ou quelque chose avec un sentiment d'étonnement mêlé de plaisir exalté et d'approbation, le plus souvent motivé par la supériorité qu'on lui reconnaît dans divers domaines de la vie intellectuelle, esthétique, morale, etc.
A.− Emploi abs.
1. [L'obj. est indéterminé quant à son extension] :
1. Sa tête est d'un ton cendré. Il a l'air d'avoir brûlé. Il admire ou déteste avec gaminerie. Il dit : − Il n'y a rien de plus beau au monde que le théâtre chinois. Quand on a vu ça, on ne peut plus rien voir. J. Renard, Journal,1895, p. 269.
2. [L'obj. reste implicite quoique précis] :
2. Quelques pas de plus, j'atteins le sommet. Dès-lors j'oublie la fatigue, les dangers, et jusqu'à mes plantes chéries. Oui, je les oublie pour regarder autour de moi, pour contempler et admirer. Quel spectacle! Le Pic du Midi en faisait le plus bel ornement. J'avoue qu'en songeant que j'avais gravé mon nom sur sa cîme majestueuse, j'en ressentis un mouvement de vanité. J. Dusaulx, Voyage à Barège et dans les Hautes-Pyrénées,t. 1, 1796, pp. 322-323.
B.− Emploi trans. Admirer + subst. compl. d'obj.[Désignant une pers. ou un inanimé abstr. ou concr.]
1. Admirer qqn :
3. Vous comprendrez ce mot, il doit vous suffire et dissiper toutes vos craintes. Il est vrai, reprit Isambard, j'admire Béatrix avec enthousiasme, et peut-être bientôt l'aimerai-je passionnément; mais ce sera sans aucune espérance, je n'en pourrois avoir. Mmede Genlis, Les Chevaliers du Cygne,t. 2, 1795, p. 287.
4. C'étoit une telle école qu'il falloit à M. de Voltaire. Il est bien à plaindre d'avoir eu ce double génie qui force à-la-fois à l'admirer et à le haïr. F.-R. de Chateaubriand, Génie du Christianisme,t. 1, 1803, p. 306.
5. fabio. − Mais, m'a-t-elle vu seulement? M'a-t-elle remarqué à la place où je suis assis tous les soirs pour l'admirer et l'applaudir, et puis-je penser que mes présents ne seront pas la seule cause de sa démarche? G. de Nerval, Les Filles du feu,1854, p. 662.
6. Les Grecs n'avaient pas pour Rome cette haine que l'on porte ordinairement à un maître étranger; ils l'admiraient, ils avaient pour elle de la vénération; d'eux-mêmes ils lui vouaient un culte, et lui élevaient des temples comme à un dieu. N.-D. Fustel de Coulanges, La Cité antique,1864, p. 507.
7. Et les jours succédaient aux jours, les saisons aux saisons, les années aux années... Et je me voyais, dans mon rêve obscur (...) admiré, flatté, fêté en tous lieux, et cependant plus misérable, dans la solitude de mon cœur, que le vieux gueusant accroupi au seuil du cimetière. O.-V. Milosz, L'Amoureuse initiation,1910, p. 117.
2. Admirer qqc. :
8. Déistes et athées, grands et petits; tous, attirés par je ne sais quoi d'inconnu, ne laissent pas de feuilleter sans cesse l'ouvrage que les uns admirent, et que les autres dédaignent. F.-R. de Chateaubriand, Génie du Christianisme,t. 1, 1803, p. 534.
9. Ce spectacle de Carthage irritait les barbares. Ils l'admiraient, ils l'exécraient, ils auraient voulu tout à la fois l'anéantir et l'habiter. G. Flaubert, Salammbô,t. 1, 1863, p. 59.
Iron. Quand il y a, p. ex., disproportion entre le sentiment et son objet :
10. M. Godeau aimait jusqu'à l'admiration, admirait jusqu'à l'adoration son état d'âme le plus actuel, quel qu'il fût : Dieu y avait sa place et M. Godeau la sienne. M. Godeau aimait, admirait, adorait jusqu'à l'étonnement, jusqu'à l'enthousiasme des larmes son état d'âme « actuel », comme le dernier royaume de Dieu. M. Jouhandeau, Monsieur Godeau intime,1926, p. 181.
C.− Emploi pronom. à valeur réfl. :
11. Un juge sourcilleux épiant mes ouvrages, tout à coup à grands cris dénonce vingt passages traduits de tel auteur qu'il nomme; et les trouvant, il s'admire et se plaît de se voir si savant. A. Chénier, Épîtres,Épître sur ses ouvrages, 1794, p. 205.
12. Et puis, un soir... Je sortais d'un dispensaire, j'avais joué avec des enfants malades, sans répugnance pour leurs plaies, toute douce et toute attendrie... J'étais contente, je m'admirais un peu... H. Bernstein, Le Secret,1913, III, 3, p. 35.
II.− Fam. ou iron. Trouver étonnant, étrange.
A.− Admirer + compl. d'obj. nominal :
13. Jean-Théodore donna un coup de poing violent sur son bureau et fit sauter ce qui était dessus. − Tenez! Je ne sais qu'admirer le plus ou de votre bassesse ou de votre ineptie! J.-A. de Gobineau, Les Pléiades,1874, p. 112.
B.− Admirer + compl. d'obj. verbal.Admirer qqn de faire qqc.; admirer que + subj.; admirer comme(nt) + ind.Constater avec étonnement, trouver étonnant que.
1. [Sans idée de blâme] :
14. Admirez-vous que je ne vous aie point encore parlé peinture? Il existe cependant un musée à Rotterdam, et vous me connaissez assez pour savoir que j'y ai vite couru. M. Du Camp, En Hollande,1859, p. 20.
15. J'admire encore que ma mère m'ait laissé faire; soit qu'elle ne se rendît pas nettement compte des risques que couraient les murs, le plancher et moi-même, ou peut-être estimant qu'il valait la peine de les courir s'il devait en sortir pour moi quelque profit, ... A. Gide, Si le grain ne meurt,1924, p. 440.
2. Avec une nuance d'iron. amusée en présence d'une situation contradictoire :
16. Ils font des difficultés, de telle sorte que la musique, au lieu de parler à l'âme en passant par les oreilles, a besoin d'être vue et parle aux yeux; il faut s'étonner et admirer que le musicien joue sans balancier; on a peur de le voir tomber. « Comme si les arts devaient étonner plus qu'émouvoir... » A. Karr, Sous les tilleuls,1832, pp. 186-187.
[Avec en outre une idée de blâme (antiphrase)] :
17. Je vous admire de vouloir qu'on suive aveuglément vos conseils. Ac.1798-1932.
18. Je traduis toujours mot à mot. Ici c'est Virgile amplifié à proportion du sujet; car ce que le poète avait dit du massacre de tout un peuple a paru trop faible à M. Furia pour un pâté d'encre. N'admirez-vous point, Monsieur, qu'un homme écrivant de ce style attache tant d'importance au texte de Longus, qui est la simplicité même? P.-L. Courier, Lettres à Monsieur Renouard,1810, p. 257.
19. J'admirais qu'il pût y avoir des lois si contraires au bon sens. P.-L. Courier, Pamphlets politiques,À Messieurs du Conseil de préfecture à Tours 1820, 1824, p. 52.
Rem. 1. Pour les assoc. paradigm. (synon. et anton.), cf. les mots en italique dans les ex. 2. Le sens II (idée d'étonnement) est gén. considéré comme influencé par le lat. (cf. étymol.). Sans nier une telle influence, le point de départ a pu être le fr. lui-même : un verbe affectivement aussi marqué et par lui-même orienté vers des emplois hyperboliques, a pu − et peut toujours − s'employer ironiquement ou par antiphrase; lorsque l'intention laudative est contestée ou disparaît, il ne reste de l'admiration que l'étonnement, lequel peut être une expression atténuée du blâme. Outre la rhétorique, le changement de ton et d'intonation joue, dans la lang. parlée, un rôle non négligeable dans ce renversement d'abord styl., puis sém. des valeurs.
Prononc. − 1. Forme phon. : [admiʀe], j'admire [ʒadmi:ʀ]. Passy 1914 transcrit la pénultième longue. − Rem. Fér. 1768 remarque : ,,Il faut prononcer le d dans ce mot et c'est une faute de prononcer : amiré``. Enq. : / admiʀ /. Conjug. parler. 2. Dér. et composés : admirable, admirablement, admirant, admirateur (-trice), admiratif, admiration, admirativement, admiromane, admiromanie.
Étymol. ET HIST. − 1. a) 1360 trans. emploi avec adv. de prix « faire cas de, estimer (qqn) » (Froissart, Chron., éd. Luce, I, 51 ds Gdf. : Et a ce temps de donc il amiroient et prisoient assez petit les Engles); b) 1566 « éprouver de l'admiration (pour qqn) » (Rivaudeau Complainte, 3, éd. Mourain de Sourdeval ds Hug. : Au moins en amirant la personne que j'aime, Sauroy-je regarder quelquefois à moi-mesme); 2. 1468 réfl. « se demander avec étonnement » (G. Chastellain, Chron. du D. Phil., VI ds Gdf. : Et s'ammiroient comme povoit naistre en ung si jeusne corps une telle gravité). Dans la lang. class. « considérer, constater avec surprise »; 1644 (Corneille, Pomp., 508 ds Œuvres, éd. Marty-Laveaux, t. XI, p. 31 : Achilles même, épouvanté d'horreur De ces quatre enragés admire la fureur). Du lat. admīrari; réfection étymol. coexistante à partir du xves. (soy admirer ds Heillemann, Der Wortschatz von G. Ch., 122); concurrence puis supplante a. fr. merveillier et esmerveillier, trans. et réfl., de même sens. Lat. admirari trans. au sens de « éprouver de l'admiration pour », + obj. inanimé dep. Térence (Eun., 250 ds TLL s.v., 741, 33), + obj. animé dep. Cicéron (ds TLL s.v., 742, 44 sq); sens 1 a semble affaibli par rapport au lat.; 2 « se demander avec étonnement (+ interr. indir.) » dep. Cicéron (Inv., 2, 125, ibid., 744, 3 : ipsum secum admirantem, quidnam contra dici possit); « s'étonner devant qqc. » Cicéron (de Orat., 1, 237 ds Gaff. : impudentiam alicujus).
STAT. − Fréq. abs. litt. : 6 971. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 10 613, b) 9 135; xxes. : a) 9 816, b) 9 787.
BBG. − Bailly (R.) 1969. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Bruant 1901. − Caput 1969. − Foulq.-St-Jean 1962. − Laf. 1878. − Lasnet 1970. − Miq. 1967. − Thomas 1956. − Timm. 1892.