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ABAISSER, verbe trans.
I.− Sens propre [En parlant d'une descente dans l'espace] et p. ext. ou anal. [d'une baisse de l'importance, de la quantité, de l'intensité, de la valeur phys., physiol. ou écon.]
A.− Emploi trans. [L'obj. est normalement un nom de chose; le suj. est le plus souvent un nom d'être animé, plus rarement un nom de chose] Faire descendre (une chose) à un niveau inférieur (considéré comme un terme provisoire ou définitif).
1. Accept. gén. :
1. Pour en revenir à ce que nous disions, il s'était adossé à la fenêtre ouverte, et dans le cadre rond de sa glace, qu'il haussait, abaissait, puis rehaussait encore, de façon que pas un seul trait de son sympathique physique n'échappât à son inspection, il se renvoyait des grimaces. G. Courteline, Le Train de 8 h 47,1888, p. 12.
2. Appuyer et charger (les rideaux, plafonds, herses, etc.) appartiennent à la technologie du machiniste; le premier terme signifie : enlever; le second : abaisser. G. Moynet, La Machinerie théâtrale,1893, p. 40.
3. Au surplus, un moraliste moderne, et des plus révérés, a nettement approuvé les juges qui, bons gardiens des intérêts de la terre, ont condamné Socrate; chose qu'on n'avait pas encore vue chez les éducateurs de l'âme humaine depuis le soir où Criton abaissa les paupières de son maître. J. Benda, La Trahison des clercs,1927, p. 131.
4. Elle [Sara] recule de nouveau pas à pas, la tête cachée entre ses bras. Puis elle tourne lentement sur elle-même, relevant et abaissant ses deux bras croisés comme pour un geste d'exorcisme, comme si elle était entourée d'un cercle de figures menaçantes. P. Claudel, L'Histoire de Tobie et de Sara,1940, II, 3, p. 1244.
Rem. 1. Abaisser s'emploie notamment pour exprimer une action plus décidée ou plus calculée. 2. Parmi les groupes associatifs le plus fréquemment rencontrés dans les textes des xixeet xxes. et dont l'existence est déjà attestée dans les dict., il y a lieu de noter ceux où l'obj. du verbe est un n. désignant la direction des yeux, du regard (cf. aussi l'ex. 3) :
5. Ne bougeant pas volontiers ma tête en ce moment et éprouvant un grand plaisir à garder une position une fois que je l'avais prise, je restai à tenir le volume de Mmede Sévigné sans l'ouvrir, et je n'abaissai pas sur lui mon regard qui n'avait devant lui que le store bleu de la fenêtre. M. Proust, À la recherche du temps perdu,À l'ombre des jeunes filles en fleurs, 1918, p. 652.
6. Alors j'abaissai moi-même les yeux vers le pied du mur, et je fis un bond! A. de Saint-Exupéry, Le Petit prince,1943, p. 486.
2. Accept. techn. et domaines d'application partic. [Sert de 1erterme à diverses loc. dans de nombreuses sc. ou techn. : arithm., chir., mar., jard., pâtiss. On donnera qq. échantillons de loc. pour lesquelles la docum. fournit des ex.; pour les autres, cf. hist.]
GÉOMÉTRIE :
7. On nomme distance d'un point à un plan, la longueur de la perpendiculaire abaissée de ce point sur le plan ... J. Hadamard, Leçons de géométrie élémentaire,Géométrie dans l'espace, t. 2, 1921, p. 23.
Cf. abaisser, hist. II A 1 b.
MÉD. Diminuer la résistance phys.
Emploi trans. :
8. Peut-être qu'en coupant les [nerfs] vagues à des animaux déjà abaissés physiologiquement on aurait moins de chance de les faire mourir. C. Bernard, Cahier de notes,1860, p. 161.
Emploi absolu (ex. unique dans la docum.) :
9. Au point de vue thérapeutique, abaissement de l'organisme et repos ou diminution des causes d'excitation; l'oxygène et la chaleur sont des causes d'action parce qu'ils affaiblissent le corps; alors la réparation organique revient. Les médicaments abaissent, c'est-à-dire rendent malade inversement. L'abaissement organique me paraîtrait le grand principe thérapeutique vital. C. Bernard, Principes de médecine expérimentale,1878, p. 165.
MUSIQUE :
10. Il [l'artiste] abaissera ou élèvera certains passages ... pour les ajuster à ses moyens ... M. Garcia, Traité complet de l'art du chant,1840, p. 70.
11. ... on appelle accidents ... des signes employés dans l'écriture musicale pour indiquer les différentes modifications ou altérations que l'on fait subir à l'intonation d'une note en l'élevant ou en l'abaissant ... Rougnon1935, p. 13.
PEINT. [Théorie et utilisation des coul.] :
12. Mettre du noir à côté d'une couleur, c'est en abaisser le ton; dans quelque (sic) cas, c'est l'appauvrir. Chevreul, De la loi du contraste simultané des couleurs,1839, p. 198.
13. Des vêtements de couleur proprement dite peuvent par contraste rehausser ou abaisser la couleur du visage. J. Ovio, La Vision des couleurs,1932, p. 381.
B.− Emploi réfl. [Le suj. est un nom de pers., except. un nom de chose] Descendre à un niveau inférieur (considéré comme un terme provisoire ou définitif) :
14. Les colons s'étaient encore abaissés d'une cinquantaine de pieds suivant la perpendiculaire, quand leur attention fut attirée par des sons éloignés qui venaient des profondeurs du massif. J. Verne, L'Île mystérieuse,1874, p. 165.
15. Selon les paroles du texte [de la neuvième symphonie], le thème s'abaisse, puis s'élève et plane longuement, immobile, à l'aigu des voix et des instruments. J. Chantavoine, Les Symphonies de Beethoven,1932, p. 270.
16. Que de forces ne pensions-nous pas assoupies pour toujours dans la nature, qu'une analyse plus minutieuse a prouvées être toujours en action! l'écorce terrestre n'a pas fini de se soulever ou de s'abaisser sous nos pieds. P. Teilhard de Chardin, Le Phénomène humain,1955, p. 100.
17. Le prix s'élevant ou s'abaissant, le nombre des firmes dans l'industrie s'élève ou s'abaisse aussi et l'offre est égalée à la demande par une adaptation automatique. F. Perroux, L'Économie du XXesiècle, 1964, p. 401.
II.− Au fig.
A.− Emploi trans. [Le suj. et l'obj. désignent une pers. ou l'activité, la qualité, etc., d'une pers.] Faire descendre à un niveau inférieur la valeur attachée à une personne, ou à son activité, aux qualités qu'elle s'attribue, etc. (l'accent est mis sur l'infériorité du niveau) :
18. Les vierges folles m'apparaissent ainsi : vers la porte et le passage, l'abaissée et abattue, dégradée, tourne à la bête; l'orgueilleuse, dressée sur la hanche, triste et satanique; ... J. Michelet, Journal,juin 1842, p. 418.
19. Ce n'est pas seulement notre force morale qui était amoindrie. Ce n'était pas simple affaire d'imagination. Nous étions réellement abaissés de valeur dans l'appréciation de l'univers. Un Allemand comptait plus que nous. Les Italiens, les Espagnols, les Argentins eux-mêmes, tous inclinés d'instinct vers la France, secouaient la tête, nous disaient : « Prenez garde, ces Allemands sont si forts ». M. Barrès, Mes cahiers,t. 11, juill. 1914-févr. 1917. p. 99.
20. Je voudrais que, dans mon récit, cette humilité resplendisse, comme elle resplendira devant Dieu le jour où seront abaissés les puissants, où seront magnifiés les humbles. A. Gide, Si le grain ne meurt,1924, p. 364.
21. Je comprends la signification profonde de l'humilité exigée de l'individu. Elle ne l'abaissait point. Elle l'élevait. Elle l'éclairait sur son rôle d'ambassadeur. A. de Saint-Exupéry, Pilote de guerre,1942, p. 375.
Emploi absolu :
22. Sachez que je suis là. J'abaisse et j'humilie; Je tiens, je tords, je courbe, et je lie et délie La vague adriatique et le vent syrien; Je suis celui qui prouve à tous qu'ils ne sont rien; ... V. Hugo, La Légende des siècles,t. 3, 1877, p. 332.
Rem. Domaine du sport (athlétisme). Abaisser un record « diminuer le temps d'une performance » et donc l'améliorer. D'où renversement de la valeur styl. du verbe.
B.− Emploi réfl. [Le suj. est un nom de pers.]
1. [Sans compl. indiquant une action] (Se décider, consentir, se laisser aller à) faire descendre à un niveau inférieur la valeur attachée à sa propre pers. :
23. Oh! Ne parlons pas de contempler; c'est l'état du ciel, des bienheureux. Nous, pauvres pêcheurs, c'est beaucoup de savoir nous abaisser devant Dieu pour gémir de nos misères et lui confesser nos fautes. E. de Guérin, Journal,1838, p. 216.
24. Qu'est-ce que ça leur fait, aux sociétaires? Je comprends l'idée de Thierry en sa qualité d'homme officiel, et, à sa place, j'en eusse fait tout autant. Mais en acceptant tu t'abaisses et, tranchons le mot, tu te dégrades. Tu perds ta balle de « poète pur », d'homme indépendant. Tu es classé, enrégimenté, capturé. Jamais de politique, n... de d...! Ça porte malheur et ça n'est pas propre. G. Flaubert, Correspondance,1860, p. 367.
25. 17 février. Les pages que j'écrivais hier indigneront certains (s'ils viennent à les lire). Ils taxeront de forfanterie ma franchise; mettons : mon cynisme, pour leur accorder quelques points. Mais je suis bien résolu à ne me laisser imposer par eux non plus hypocrisie que silence. Je ne veux ni m'abaisser, ni me surfaire et ne prétends qu'au naturel. A. Gide, Carnets d'Égypte,1939, p. 1062.
26. Il se rappelait un vieux mot de Josette et il pensait : « La célébrité aussi est une humiliation ». S'exhiber, c'est toujours se livrer, c'est s'abaisser. S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 369.
Rem. 1. Notamment dans l'emploi relig. (ex. 23), un compl. introd. par la prép. devant indique la pers. (Dieu) à laquelle on se compare et dont l'élévation est cause de l'abaissement en question. 2. Suiv. le cont., s'abaisser est pris en bonne ou en mauvaise part; un cont. mystique (gén. chrét.) en fait une vertu (ex. 23), un cont. humaniste (ex. 24, 25, 26) le rapproche de se dégrader.
2. [Avec un compl. subst., gén. d'action, ou inf., précédés de à ou jusqu'à] Consentir à (se laisser aller à) descendre du niveau (moral, intellectuel) auquel on se tient habituellement, pour faire une chose :
27. Dans le groupe de la famille (c'est-à-dire au milieu de ces relations que je ne me suis pas faites moi-même), j'ai péché : par pensée (les péchés par pensées sont les plus graves, car la pensée est l'homme même); c'est ainsi que je m'abaissai jusqu'à avoir des préjugés sur les situations sociales et que je respectai malgré tout celui qui avait réussi. M. Barrès, Un Homme libre,1889, p. 51.
28. On eût dit que son malheur remuant les profondeurs de son être, comme une eau vaseuse, en faisait sortir des choses informes, qui grouillaient. Jalousie d'abord, et révolte de tout son corps, de tout son cœur, quand elle le voyait au bras d'une autre, dépit d'être abandonnée, mais surtout une immense désillusion, car il s'abaissait jusqu'à cette fille à soldats. E. Moselly, Terres lorraines,1907, p. 95.
29. chatov. − Elle peut du moins être utile à l'espion et au coquin que tu es. Sois donc satisfait. Je ne m'abaisserai pas à répondre à ton ignoble question. A. Camus, Les Possédés,adapté de Dostoïevski, 1959, p. 1053.
Stylistique − Le verbe abaisser se prête facilement à des jeux de mots Jeu de mots sur le sens : 30. Qu'elles sont vite réprimandées d'un geste sec de la main ou d'un froncement de sourcils les petites bourdes que je m'accorde! Enfin je m'en tire et reviens à ma place, emportant un : « pas de traits d'esprit ici, n'est-ce pas? », parce qu'à son observation : « vous oubliez d'abaisser les zéros », j'ai répondu : − il faut toujours abaisser les zéros, ils le méritent. Colette, Claudine à l'école, 1900, p. 47. Jeu de paronomase : 31. Mais, si vous ne saisissez pas ce premier bonheur de génération mentale, et que vous laissiez sans produit ce sublime paroxysme de l'intelligence fouettée, pendant lequel les angoisses de l'enfantement disparaissent sous les plaisirs de la surexcitation cérébrale, vous tombez soudain dans le gâchis des difficultés : tout s'abaisse, tout s'affaisse; vous vous blasez; le sujet s'amollit; vos idées vous fatiguent. H. de Balzac, Théorie de la démarche, 1833, p. 617. Calembour : 32. La Cougourde s'ébauchait à Aix; il y avait à Paris, entre autres affiliations de ce genre, la société des amis de l'ABC. Qu'était-ce que les amis de l'ABC? une société ayant pour but, en apparence, l'éducation des enfants, en réalité le redressement des hommes. On se déclarait les amis de l'ABC. − L'Abaissé, c'était le peuple. On voulait le relever. Calembour dont on aurait tort de rire. V. Hugo, Les Misérables, t. 1, 1862, p. 771.
Prononc. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [abεse] (1) ou [abese] (2), j'abaisse [ʒabεs]. Timbre. − D'apr. Warn. 1968, la prononc. en [ε] (cf. 1) relève du lang. soutenu, la prononc. en [e] (cf. 2) du lang. cour. Passy 1914, Goug. 1958, Harrap's 1963, Pt Lar. 1968 notent [ε], Dub. Pt Rob. [e]. Pour l'alternance [ε], [e], cf. Fouché t. 1 1959, p. 71 : ,,L'harmonisation vocalique peut entraîner une alternance [ε]-[e] au cours de la conjugaison, suivant le timbre de la voyelle accentuée finale; cf. il éclaire, il baisse (...) avec [ε] accentué, et en face (...) éclairer, éclairé, baisser, baissé (...) avec [e] inaccentué...`` Cependant, Fouché précise : ,,L'harmonisation vocalique (...) caractérise le parler de la conversation. Plus la prononciation est soutenue, moins elle joue.`` Durée. − Passy 1914 note la durée longue de [ε] en position accentuée [ʒabε:s], mi-longue en position inaccentuée [abε ˑse], cf. aussi [bε:s], [bε ˑse] ou [beˑse] ainsi que [abε ˑsaˑbl], [abε ˑsɑ ̃], [abε ˑsmɑ ̃] et [abε ˑsœ:r]. Cf. G. Straka, Système des voyelles du fr. mod., 1950, p. 33 : ,,... à l'heure actuelle, tous ces è sont sensiblement abrégés...`` Cependant ,,la prononciation soignée s'applique encore à maintenir la longueur dans beaucoup de cas où l'on écrit ai : aide, aile, aigre, baisse, caisse, maigre.`` Enq. : /abe2s, D/ ou /abe2s/. Conjug., parler. 2. Homon. − Abécé, subst. masc. (cf. Darbois 1830), homon. de abaisser [abese], prononc. cour. 3. Dér. et composés : abaissable, abaissant, abaisse (-langue, etc.), abaissé(e), abaissement, abaisseur. Cf. baisser. 4. Hist. − Le mot se rencontre sous sa forme actuelle dès le xives. (cf. ex. hist. I B 5, 6 et 7), mais n'apparaît régulièrement comme vedette de dict. qu'à partir de Rich. 1680; Nicot 1606 et Cotgr. 1611 renvoient de la forme abaisser sans redoublement de b à la forme abbaisser (cf. aussi ex. Hug.). Ac. ne préconise la forme abaisser qu'à partir de l'éd. de 1740. Pour les var. graph. abessier, au xiies. (cf. T.-L.), encore attestée chez Joinville, abesse (cf. Gdf.), (cf. Fouché t. 1, 1952, p. 260 : ,,L'usage orthographique actuel a été réglé surtout par les grammairiens du xvieet du xviiesiècles. Au Moyen Âge, la liberté était complète. On écrivait indifféremment mestre, repestre, fere, etc. pour maistre (< magistru), repaistre (< pascere), faire, etc. Inversement, on a écrit de bonne heure aile pour ele (< ala) et cette orthographe s'est conservée jusqu'aujourd'hui.`` Prononc. − Rich. 1680 est le 1erà recommander la prononc. avec [e] : ,,Prononcez abéssé.`` Fér. 1768 et 1787, Land. 1834, Gattel 1841, Nod. 1844 transcrivent [ε], tandis que Fél. 1851 et Besch. 1845 prescrivent la prononc. en [e], cf. Besch. : ,,Pr. ɑ-bé-cé et non ɑ bècé comme l'indique M. Landais.`` Littré transcrit [ε] mais note : ,,Quelques-uns disent a-bésé`` (cf. aussi DG). Fér. 1768 et 1787, ainsi que Littré, notent la 2esyllabe longue quand la syllabe qui suit contient un e muet (cf. aussi Passy 1914).
ÉTYMOL. − Corresp. rom. : a.prov. abaissar; n.prov. abeissa; ital. abbassare; esp. abajar; port., cat. abaixar. I.− Intrans. − Suj. inanimé 1120-1150 « descendre » (Li ver del Juïse, éd. von Feilitzen, 351 ds T.-L. : Li ciez abaisserat a la terre parfunt); 1155 « baisser (en parlant du ton) » terme mus. (Wace, Brut, éd. Arnold, 10 423 : Mult oïssiez orgues suner E clers chanter e orgoner, Voiz abaissier e voiz lever, Chanz avaler e chanz munter). II.− Trans. − 1. Obj. inanimé 1148 « apaiser, calmer », emploi fig. (Prise d'Orange, 1522 ds Guill. d'Orange, éd. Jonckbloet, I, 113 sq. ds T.-L. : Ne devez mie folie commencier; Tiex la commence, ne la puet abessier); mil. xiies. « rabattre (une somme) sur un prix », emploi fig. (Chrétien de Troyes, Guill. d'Angleterre, éd. Wilmotte, 3210 : Ja n'en quier denier abaissier); 1160-1170 « pencher, incliner vers le bas » (Béroul, Tristan, éd. Muret, 611 ds T.-L. : Son chief abesse vers la terre); 2. obj. animé 1155 « humilier », emploi fig. (Wace, Brut, éd. Arnold, 3485 ds Keller, Vocab. Wace, 126b : Les nobles homes abaisça E les non nobles aleva). III.− Réfl. − 1. Suj. animé 1remoitié xiies. « se pencher », sens propre (Voy. de Charl. à Jérusalem, éd. Koschwitz, 615 : ... Et reprendrai l'espiet, ainz qu'a terre s'abaisset); apr. 1160 « s'humilier », emploi fig. (Wace, Rou, éd. Andresen, III, 2609 ds Keller, loc. cit. : Alain ne se deigne abeissier); 2. suj. inanimé 1210-1230 « tomber, se calmer (du vent) » (G. Le Clerc, Marie-Madeleine, éd. Schmidt, 268 ds T.-L. : ... li venz ne s'abaisse pas En ses esforz). Dér. de l'a. fr. baissier; préf. a-1*. HISTORIQUE I.− Disparition av. 1789. − A.− Emploi intrans. (dans le sens de « baisser, descendre »). − Attesté dès le xiies. (cf. étymol. I); subsiste jusqu'au xviies. : La riviere abbaisse. Nicot 1606. B.− Emploi trans. 1. « Apaiser, éteindre », au propre et au fig., 1reattest. au xiies. (cf. étymol. II 1); se maintient jusqu'au xives. : Maintien les bonnes coustumes de son royaume, et les mauvaises abesse. Joinville, 743, Wailly, (Gdf.). 2. « Rabattre (une somme) sur un prix » (cf. étymol. II 1). L'existence de ce sens n'est attestée que par cet ex. unique. 3. « Soumettre » : Et il l'avoit si abaissie (sa terre) Ke nus ne li faisoit enchaus. L'Escoufle, [xiie-xiiies.], 58, (T.-L.). 4. Avec de, « faire revenir sur, obliger à se modérer dans »; unique attest. au xiiies. : Le supplioit qu'il lui fist faire droit a son oncle et l'abaissast des outrages et des forfais qu'il lui faisoit. Chroniques de Saint-Denis I, fo246 ds Ste Pal., (Gdf.). 5. « Amaigrir », unique attest. au xives. : Un cuer de chievre ou de bouc abaisse, id est amaigrit (l'ostour). Le Ménagier de Paris, [xives.], II, 322, (T.-L.). 6. Abaisser honneur de « manquer de respect à », ex. unique au xives. Icelle femme desmenti pluseurs foiz le suppliant en abaissant honneur de sa personne et de son office. Arch., JJ 148, pièce 122, [1395], (Gdf.). 7. Abaisser la main « se modérer » (cf. C 1) ex. unique au xives. : En outre lui dist que s'il n'abaissoit sa main, qui estoit a dire s'il ne faignoit d'ouvrer, tellement qu'il n'ouvrast pas tant, ne si bien, il lui acoursiroit la vie. Arch., JJ 109, pièce 6, [1376], (Gdf.). 8. Inf. substantivé, « moment où l'on abaisse (une chose) » : A l'abaissier des lanches an chaïrent. III. mile. Gui de Bourgogne, [xiiies], (Gdf. Compl.). C.− Emploi pronom. 1. « Se modérer dans » (cf. ci-dessus B 7), unique attest. au xiies. : ... Dame taisiés; De vostre duel vos abaissiés. Perceval, Ms. Mons, p. 8a, Potvin, (Gdf.). 2. « Baisser, s'affaiblir » (en parlant d'un animé; méd.) : Sur les unze heures ... arriva un laquais, luy rapportant nouvelles que Cyrus s'abaissoit fort, et qu'il estoit besoin s'il le desiroit voir encore en vie ... qu'il s'en retournast promptement. Du Vair, Clodius contre Milon, (Hug.). 3. « Tomber, se calmer (en parlant du vent) », 1reattest. 1210-1230, cf. étymol. III 2; xviiies. : Le vent s'est abaissé. Trév. 1704. Selon Trév. 1771 cet emploi est contraire au bon usage qui demande : ,,le vent diminue``. 4. « S'exprimer avec beaucoup de simplicité ou avec trop de simplicité » 1reattest. au xviies. : Varier son style suivant les sujets, s'élever ou s'abaisser à propos. Fénelon, (Besch.). Cette accept. ne semble pas avoir survécu au xviiies., bien qu'elle soit attestée ds qq. dict. du xixeet du xxes. (La Châtre 1865, Quillet), où elle ne se trouve illustrée que par l'ex. ci-dessus. − Rem. C'est Ac. 1835 qui présente la 1rerecension lexicogr. de cette accept. dans un ex. illustrant le sens moral « s'avilir, se dégrader » : Il descend au style naïf sans jamais s'abaisser. II.− Sens et emplois attestés apr. 1789. − A.− Au sens propre (cf. sém. I). 1. Emploi trans. : « faire descendre (une chose) à un niveau inférieur ». a) Accept. gén. − 1reattest. au xiies. (cf. étymol. II 1); xviies. : abaisser un pont-levis; abaisser une muraille de deux piez. Rich. 1680. b) Accept. techn. et domaines d'application partic. − La naissance des nombreuses loc. relevant de domaines d'application partic. a lieu à des dates variées; ces loc. continuent à figurer ds les dict. du xxes., à l'exception de celle qui a trait au jard., dont on ne trouve plus d'attest. lexicogr. au delà du xixes. Est donnée ci-apr. la 1rerecension ds les dict. de quelques-unes de ces loc., suivie de la signif. corresp. : Mar. Abaisser les voiles, etc. xiies., d'apr. Jal, d'où est extrait l'ex. suiv. du xviies. : Les antennes sont attacheez au mast, en sorte qu'on les peut elever, ce qu'on appelle isser, ou les abaisser ou amener. Fauconn. Abaisser l'oiseau, « lors qu'étant trop en bon point on luy ôte quelque chose de son pât ordinaire pour le mettre en état de bien voler » (Fur. 1690). Jard. Abaisser une branche « couper une branche près du tronc » (Fur. 1690). Math. Abaisser une équation [algèbre], « la réduire au moindre degré dont elle soit susceptible » (cf. abaissement, hist. I B); à partir d'un point abaisser une perpendiculaire (sur une droite ou un plan) [géom.] (Encyclop. t. 1 1751); plus tardivement abaisser un chiffre [arithm.] : « au cours de l'opération de division (autant de fois que nécessaire) faire descendre du dividende initial le 1erchiffre non encore employé et le noter à droite du reste partiel précédemment obtenu de manière à pouvoir continuer l'opération ». Pâtiss. Abaisser (de) la pâte « aplatir la pâte avec un rouleau de bois, et la rendre aussi mince que l'on veut » (Encyclop. t. 1 1751) (cf. abaisse, hist.) d'où semble procéder la loc. verbale. Encore en usage dans les manuels mod. de cuis. Chir. Abaisser la cataracte « faire descendre le cristallin devenu opaque au fond de l'œil, afin de rendre la vue à un malade affecté de la cataracte » (Ac. 1835). Déjà ds Trév. 1752. Cf. aussi abattre, hist. II B 5 et récliner. 2. Emploi réfl. : « descendre à un niveau inférieur » (suj. animé ou inanimé).− 1reattest. au xiies. (cf. étymol. III 1); xviies. : Je passe comme l'ombre qui s'abaisse vers le soir. Rich. 1680. − Rem. Pour certains cont. attestés dans l'anc. lang. et exclus de la lang. mod., I C 2 et 3. B.− Au sens fig., dans le domaine moral (cf. sém. II). 1. Emploi trans. : « diminuer l'élévation morale d'une pers. ou d'une chose ». − 1reattest. au xiies. (cf. étymol. II 2); xviie-xviiies. : Les Romains se vantoient d'abaisser l'orgueil des superbes et de pardonner aux humbles. Fur. 1690. − Rem. L'emploi absolu, encore en usage de nos jours, apparaît au xviies. : Il y a dans le monde une puissance supérieure à celle des hommes qui élève et qui abaisse. Bourdaloue (Besch.). 2. Emploi réfl. : « perdre de son élévation morale » (en bonne et en mauvaise part). − 1reattest. au xiies. (cf. étymol. III 1); xviie-xviiies. : L'humilité n'est souvent qu'un artifice de l'orgueil qui (ne) s'abaisse (que) pour s'élever. Rich. 1680 et Trév. 1771.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 1 459. Fréq. rel. litt. : xixes : a) 2 621, b) 2 429; xxes. : a) 1 646, b) 1 671.
BBG. − Ac. Gastr. 1962. − Baudr. Chasses. 1834. − Fromh.-King. 1968. − Grandm. 1852. − Jal. 1848. − Mont. 1967.