Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
ÉPARPILLER, verbe trans.
A.− [L'idée dominante est celle de fractionner, de disperser au hasard]
1. [L'obj. désigne un inanimé concr. au sing. à valeur collective ou au plur.] Jeter, répandre çà et là. Synon. disperser.Le morceau de pain (...) était éparpillé en miettes (Baudel., Poèmes prose,1867, p. 79).Une poignée de monnaie, qu'elle éparpilla (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 43).Un courant d'air traversa la salle, éparpilla les détritus (Martin du G., Thib.,Belle sais., 1923, p. 1049):
1. Une poule ne flaire pas son grain; mais s'il lui est étranger, elle l'éparpille avec son bec et ses pattes, et le considère de tous côtés avant de l'avaler : c'est peut-être par cette raison qu'elle ne mange pas pendant la nuit. Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 89.
P. métaph. [Spencer] prend la réalité sous sa forme actuelle; il la brise, il l'éparpille en fragments qu'il jette au vent (Bergson, Évol. créatr.,1907, p. 364).
Emploi pronom. Se répandre de tous côtés. La poussière soulevée par la mêlée s'éparpillait dans l'air (Flaub., Champs et grèves,1848, p. 347).Les feuilles jaunissantes s'éparpillaient au souffle du vent (Du Camp, Mém. suic.,1853, p. 99).Un cône de papier, fort, résistant, qui empêche le lin de s'éparpiller (Pesquidoux, Chez nous,1923, p. 254).
P. métaph. Elle [la pensée] se fait troupe d'oiseaux, s'éparpille aux quatre vents, et occupe à la fois tous les points de l'air et de l'espace (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 218).
En partic. [L'obj. désigne des cheveux] Faire tomber, faire flotter librement. Elle ouvrait sa fenêtre, (...) éparpillait au vent sa chevelure (Flaub., MmeBovary, t. 2, 1857, p. 140).Ses cheveux blonds tombaient en boucles sur son cou, et le vent les éparpillait (Ramuz, A. Pache,1911, p. 159).
Emploi pronom. Les cheveux qui avaient tendance à s'éparpiller (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 62).
[Avec un compl. d'obj. à valeur d'obj. interne] Ses cheveux roulés en torsades éparpillaient leurs boucles dorées (Ponson du Terr., Rocambole,1859, p. 236).
2. P. ext. [L'obj. désigne un son] Faire retenir çà et là dans l'air. De ravissants carillons qu'elle [une horloge] éparpillait dans l'air (Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 614).Le vent éparpille le bruit des clochettes comme des gouttes d'eau (Giono, Regain,1930, p. 21).
P. métaph. Elle éparpilla dans l'ombre son rire joyeux (Barrès, Barbares,1888, p. 98).
Emploi pronom. :
2. Le premier coup de la messe sonna. Le carillon tombait gaiement dans le soleil, s'éparpillait en volées frémissantes dans les rues claires, courait dans les jardins plantés de groseillers épineux. Moselly, Terres lorraines,1907, p. 187.
P. métaph. Un rire strident qui s'éparpille dans le jardin, comme un vol de moineaux piaillants (Mirbeau, Journal femme,1900, p. 269).
3. Au fig. Éparpiller son argent, sa fortune. Les gaspiller. Druel-Dethieux avait fini par mourir, après avoir éparpillé, en diverses affaires magnifiques, la totalité de sa fortune, et une fraction notable de son honorabilité (Martin du G., Devenir,1909, p. 134).Gros joueur, il éparpillait sa fortune comme babioles de cotillon (Morand, Fin de s.,1957, p. 143).
B.− P. anal. [L'idée dominante est celle de répartir, de distribuer en plusieurs lieux; l'obj. désigne des pers. ou des inanimés concr.] Disposer irrégulièrement en plusieurs lieux. Sichem éparpille les cubes clairs de ses maisons (Rostand, Samaritaine,1897, p. 11).
Avec une valeur factitive. C'est cet amour du globe qui éparpille nos enfants sur chaque continent (Giraudoux, Siegfried et Lim.,1922, p. 149).
Emploi pronom. réfl. Les blessés se lèvent, s'éparpillent, cherchent à fuir (Barbusse, Feu,1916, p. 320).
PEINT., souvent péj. Gâter l'intérêt d'un tableau en dispersant les personnages, les lumières. Il est malheureux que l'idée baroque d'assigner à chaque peuple sa place géographique ait nui à l'ensemble de la composition [un tableau de Robert], au charme des groupes, et ait éparpillé les figures comme un tableau de Claude Lorrain, dont les bonshommes s'en vont à la débandade (Baudel., Salon,1845, p. 31).
C.− Au fig. [Le suj. désigne une pers.]
1. [L'obj. désigne gén. une faculté intellectuelle ou une qualité physique] Diriger (ses possibilités) sur plusieurs objets à la fois, disperser inefficacement dans plusieurs directions. Éparpiller son esprit. Il n'éparpille point les forces de son âme, il les concentre sur une seule idée (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 27).Daumier a éparpillé son talent en mille endroits différents (Baudel., Curios. esthét.,1867, p. 193):
3. Au lieu de disperser l'intérêt sur plusieurs personnages, de l'éparpiller en mille aventures, il [le roman moderne] le resserre au contraire, le concentre parfois dans un seul fait, une seule figure... A. Daudet, Pages inéd. de crit. dram.,1897, p. 202.
Emploi pronom. réfl. Cf. capter ex. 1 :
4. Toutes mes lectures, mes heures de travail, mes volontés s'émiettent, s'éparpillent, s'égrènent, sans réussir à faire une pyramide ou même un collier. Les bagatelles me dévorent. Je ne vis qu'au jour le jour, comme on fait en voyage, dans l'intérim entre deux situations réglées, ou dans une courte vacance d'écolier. Amiel, Journal intime,1866, p. 89.
2. Emploi pronom. Se disperser sans efficacité, sans résultat positif. Je m'éparpille en vaines réflexions (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1906, p. 241):
5. Le P. Lacordaire n'a pas lu assez. Il ignorait trop. Il ne s'est pas fortifié par autrui, par l'histoire. Mais il méditait, réfléchissait, toujours puissant esprit, par sa fécondité personnelle. Il ne s'éparpillait pas, ne se dispersait pas comme je l'ai fait. Il écrivait à peu de personnes, mais des lettres où il mettait son esprit, son âme, son cœur. Dupanloup, Journal intime,1869, p. 317.
Prononc. et Orth. : [epaʀpije], (j')éparpille [epaʀpij]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1remoitié xiies. « jeter, répandre çà et là des choses au hasard » nubele si cume cendre esparpeilled (Psautier Oxford, 147, 5 ds T.-L.); 2. av. 1719 « diriger ses forces, ses efforts, son attention dans diverses directions; les disperser inefficacement » ici pronom. (Maintenon, Lett. à d'Aubigné, t. 1, p. 171 ds Littré). Orig. discutée. L'étymon le plus probable semble être un lat. vulg. *disparpaliare « éparpiller » qui aurait pour point de départ le syntagme [etiamsi hoc anno tempestas] dispare pallavit (Pétrone, 46, 2 ds TLL s.v.) que Stefenelli, Die Volkssprache im Werk des Petron, p. 97 traduit « [bien que cette année la tempête] ait tout dispersé çà et là » et explique par le b. lat. dispalare trans. « répandre, disperser » (TLL s.v.) devenu *dispallare par gemination expressive, *disparpallare soit par altération expressive de dis- en dispar(e), adv., d'apr. l'adj. dispar, soit par croisement avec spargere « répandre, éparpiller », une infl. de palea (paille*) pouvant expliquer *disparpaleare, source des formes romanes. Fréq. abs. littér. : 407. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 253, b) 555; xxes. : a) 911, b) 667. Bbg. Catach (N.), Mettas (O.). Encore qq. trouvailles ds Nicot. R. Ling. rom. 1972, t. 36, p. 366. − Kohlm. 1901, p. 41. − Mat. Louis-Philippe 1951, p. 315. − Regula (M.). Disparpellare, ein Substrat : romanische Formen? Z. fr. Spr. Lit. 1960, t. 70, pp. 199-204. − Sain. Sources t. 2 1972 [1925], p. 277.