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POIL, subst. masc.
I.
A.− ANAT. HUM. ET ANIM. ,,Phanère cutané ayant l'aspect d'un filament flexible et résistant, dont l'extrémité libre est plus ou moins effilée, alors que celle qui est enchâssée dans la peau est légèrement renflée (bulbe) et excavée en son milieu pour loger une papille dermique`` (Méd. Biol. t. 3 1972). Les paupières sont bordées de cils, poils raides qui arrêtent les poussières (Camefort, Gama, Sc. nat.,1960, p. 232).Le poil se compose de trois couches distinctes : l'épiderme, la substance corticale et la moelle (Quillet Méd.1965, p. 298).V. formation II A 1 ex. de Bergson.
B.− Au sing. ou au plur.
1. [Chez l'homme]
a) Filament apparaissant sur la peau de certaines parties du corps humain (à l'exception des cheveux, des cils et sourcils). Sur les jambes de la victorieuse (...) de petits poils blonds brillaient, minuscules fibrilles d'or pur (Montherl., Songe,1922, p. 38).La chemise se rabattit, et la foule eut une espèce de ricanement, parce qu'on voyait le sexe et les poils (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 321).V. glabre A ex., féminiser ex. 4, follet ex. 1 :
1. « Vraiment, tu commences à piquer! » Hubert n'avait que sept poils au menton et quatre poils sous le nez. Mais il les rasait une fois par semaine, pratique persévérante qui donnait de la vigueur à cette précieuse végétation sans toutefois la déterminer à l'exubérance. Duhamel, Suzanne,1941, p. 187.
En partic., dépréc. Cheveu isolé sur un crâne (partiellement) dégarni. Tandis que le vent agitait les poils follets de son crâne, il fit une grimace affreuse qui crispa sa maigre face toute coupée par la balafre (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Père Milon, 1883, p. 217).
SYNT. Les poils de la barbe, de la moustache; poils des bras, du pubis, dans les oreilles, aux aisselles, sur les jambes; corps, bras, poitrine couvert(e) de poils; poils et cheveux.
b) Loc. [Poil peut inclure dans sa désignation les cheveux ou être employé avec le sémantisme de cheveu]
Ne pas (plus) avoir un poil de sec (fam.). Être trempé de sueur (à la suite d'un effort ou d'une peur intense). Synon. ne pas (plus) avoir un fil* de sec.Ouf! gémit l'autre; y n'était qu'temps! J'en ai pus un poil de sec, moi! (Courteline, Train 8 h 47,1888, 2epart., v, p. 150).
Ne pas (plus) avoir un poil sur le caillou (pop.). Être chauve. (Dict. xixeet xxes.).
[Avec une intention plais. ou iron. plus ou moins marquée] Faire dresser les poils sur + subst. désignant une partie du corps; les poils (de qqn) se dressent, se hérissent. (Faire) éprouver de l'exaspération, de l'horreur, de la peur. Synon. faire dresser les cheveux* sur la tête; donner la chair* de poule.Deux ou trois fois je sentis tous les poils de mes bras se hérisser sur moi, croyant reconnaître le capitaine (Stendhal, Souv. égotisme,1832, p. 71).Si cette phraséologie ne te fait pas dresser les poils sur le gras des jambes, je ne te reconnais plus (Duhamel, Combat ombres,1939, p. 191).
c) Poil(s) à (suivi d'un subst. désignant une partie du corps et rimant avec le dernier mot de la phrase précédente).[Rengaine utilisée (par les enfants, les adolescents) par jeu ou pour se moquer d'une personne qui parle] . Maintenant, il hurlait : − Ce ne sont pas des manières de princesse! − Poils aux fesses! − Maintenant, c'est fini! − Poils au kiki (H. Bichonnier,Le Monstre poilu,1982,non paginé).
2. [Chez l'animal]
a) Filament apparaissant sur la peau de certains animaux (les mammifères) et constituant le pelage. Les poils de la crinière, de la queue; poil, soie et crin. Dans quelques mammifères, ce renouvellement de l'épiderme a lieu à une certaine époque de l'année, en même temps qu'ils changent de poils (Cuvier, Anat. comp.,t. 2, 1805, p. 544).Les chiens, les loups, les chats et généralement toutes les bêtes à poils (Flaub., Corresp.,1854, p. 33).V. hérissement A 2 ex. de Quillet :
2. ... il y avait toujours de l'herbe grasse pour elles [les bêtes] et l'eau accoutumée, et la nature les couvrait de poils épais l'hiver et de poils neufs, fins et légers l'été. Pesquidoux, Livre raison,1932, p. 98.
b) Poil détaché de la peau entrant dans la fabrication de divers objets. Les poils d'un pinceau; pinceau en poils de martre. On passe un pompon (sorte de large blaireau aux poils raides) sur le zinc (Arts et litt.,1935, p. 28-16).
P. anal. (de forme et de fonction). Les poils d'un balai. Je découvris, dans la remise aux outils, une brosse à poils métalliques (Gide, Journal,1916, p. 553).
SYNT. Poils épais, épars, frisés, hérissés, drus, durs; bouquet, houppe, mèche, touffe, pinceaux de poils.
C.− Au sing. coll.
1. [Chez l'homme]
a) Ensemble des poils (au sens supra B 1) qui apparaissent sur une partie du corps humain. Synon. partiel toison.Cette partie du cou où est le partage de la barbe et du poil de poitrine (Giono, Gd troupeau,1931, p. 122).Il avait le tronc assez noueux, et le poil qui dessinait une palme régulière de l'abdomen au thorax (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 284).V. gazonner A ex. de Boylesve :
3. Déjà, les formes s'arrondissent, la gorge croît sensiblement, les parties de la génération se resserrent et se couvrent d'un poil naissant. Laclos, Éduc. femmes,1803, p. 438.
Qqc. (fait) hérisse(r) le poil de qqn; le poil de qqn se hérisse (var. de la loc. supra B 1 b). Voici la lettre (abrégée cependant de près d'une moitié) qui fera hérisser le poil des diplomates de salon (Chateaubr., Mém.,t. 4, 1848, p. 315).Cette fois, avant même d'en avoir déchiffré le premier mot [d'un article de M. Robbe-Grillet], j'ai pourtant senti mon poil se hérisser (Mauriac, Mém. intér.,1959, p. 208).V. hérisser B 1 a ex. de Maupassant.
b) En partic.
α) Chevelure. Son crâne énorme et sphérique, hérissé d'un poil d'argent dur et ras (...) ses sourcils rudes (...) la forte moustache (Valéry, Variété II,1929, p. 218).
β) Barbe. L'homme barbu, vraiment barbu, celui qui porte tout son poil (oh! le vilain mot) sur les joues n'a jamais de finesse dans le visage, les traits étant cachés (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Moustache, 1883, p. 618).
Poil follet (vieilli). Barbe naissante. Synon. duvet.Un poil follet au-dessus d'une bouche (Sainte-Beuve, Poés.,1829, p. 122).
Faire le poil à qqn, se faire le poil (vieilli). (Se) raser. Ce n'est pas leurs barbiers et leur savon moderne Qui nous feront le poil, et le cuir et la peau (Péguy, Ève,1913, p. 894).
Avoir, prendre du poil au menton. Cette demoiselle de Gournay (...) d'une trop forte complexion et d'une trop verte allure, finit par prendre du poil au menton en vieillissant (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t. 9, 1865, p. 393).
[En parlant d'un adolescent] Être suffisamment mûr (pour faire quelque chose). Attendez qu'Omer ait du poil au menton... Alors, vous le conseillerez pertinemment (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 121).
c) [Dans des constr. à valeur d'adj.; poil inclut les cheveux]
Au poil, de poil (rare) + adj. descriptif (gén. de couleur).Marianne est très vieille et court sur ses cent ans, La voici radoteuse, au poil rare, et sans dents (Verlaine, Œuvres compl., t. 3, Invect., 1896, p. 346).Un bel adolescent de dix-neuf ans (...) le cou taurin, de poil ardent, entre cuivre et carotte (Arnoux, Paris,1939, p. 204).
Adj. de couleur + de poil.Celui-là [le Bordelais pur] trapu, « pot à tabac », noir de poil et de peau; en dépit du rasoir, une barbe drue dévore souvent le visage jusqu'aux admirables yeux d'antilope (Mauriac, Écrits intimes,Du côté de chez Proust, 1947, p. 47).
Poil (de) carotte*.
Rem. Dans ces accept., l'empl. de poil connote une idée (dépréc. ou méliorative) d'animalité, de force brutale et virile, ou un jugement dépréc. sur la couleur, l'apparence des cheveux, de la barbe, des poils apparents.
SYNT. Poil argenté, blanc, blond, brun, noir, poivre et sel, roux; poil frisé, raide; poil de bête; avoir du poil aux jambes, sur la poitrine; se raser le poil.
2. [Chez l'animal]
a) Ensemble des poils (au sens supra B 2) recouvrant le corps de certains animaux. Synon. pelage, toison (partiel), fourrure.Les chèvres ont le poil long et fin; elles ont le menton garni d'une espèce de barbe pointue (Cuvier, Anat. comp., t. 2, 1805, p. 602).Le long poil d'hiver des chevaux pendant sous leurs ventres en petites stalactites de glace (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 282):
4. ... d'autres [chevaux] (...), d'un gris très-clair et dont la peau se laissait voir à travers leur poil humide et rasé, se veinaient de tons humains... Fromentin, Été Sahara,1857, p. 232.
[Dans des constr. à valeur d'adj.]
Au poil + adj. descriptif (gén. de couleur).Chien au poil ras. Chiens fauves, au poil vil tirant sur le roux (Hugo, Rhin,1842, p. 207).
De poil + adj. descriptif (gén. de couleur).Cheval de poil alezan, bai. De quel poil milord désire-t-il son attelage? (Dumas père, Laird de Dumbiky,1844, i, 12, p. 33).Une chatte noire, de poil ras, qui avait deux yeux d'un jaune éclatant (Boylesve, Leçon d'amour,1902, p. 209).
De tout poil, de tous les poils. De toute couleur de pelage. Les étalons de tous les âges et de tous les poils (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 337).
Rare. Adj. descriptif + poil (non précédé d'une prép.)Un chien errant, ras poil, l'œil toujours étonné (Guèvremont, Survenant,1945, p. 49).
De bon, de mauvais poil. Qui a un pelage présentant une bonne, une mauvaise apparence, ce qui est l'indice d'une bonne ou d'une mauvaise santé. Cham [un cheval], en 1900, était un animal encore très jeune, de bon courage et de bon poil (Duhamel, Terre promise,1934, p. 91).
À contre-poil*, à rebrousse-poil*.
SYNT. Poil brillant, fauve, luisant, terne, sec; poil doux, court, frisé, laineux, lisse, serré, rude, soyeux, touffu; beau poil; poil sain; poil rongé de gale; lisser, lustrer le poil d'un cheval; perdre ses poils.
b) Spécialement
α) ÉQUITATION
Faire le poil (d'un cheval). Tondre, tailler, brosser le pelage (d'un cheval). (Dict. xixeet xxes.).
Monter un cheval à poil (vieilli). Monter un cheval sans selle. Synon. monter à cru*.Il monte à poil, et n'a point par conséquent d'étriers (Baudry des Loz., Voy. Louisiane,1802, p. 211).
β) VÉNERIE
Gibier (ou terme équivalent) à poil, de poil. Gibier dont le corps est recouvert de poils, essentiellement lapin et lièvre (d'apr. Duchartre 1973). Anton. à plume, de plume.Pendant ce temps, Nab, Harbert et le marin (...) feraient main-basse sur toute bête de plume ou de poil qui passerait à leur portée (Verne, Île myst.,1874, p. 78).Du gibier, gibier d'eau ou gibier à poil (Guèvremont, Survenant,1945, p. 75).
[P. ell. du déterminé et de la prép.] Chien pour poil. Elle ne se gêne pas pour suivre son gibier, poil ou plume, mort ou vif, sur votre propriété (Feuillet, Morte,1886, p. 153).V. fournir ex. 5, hélas ex. 4.
Le grand poil. Le gros gibier dont le corps est recouvert de poils. Il poursuivait aussi le grand poil, le sanglier et le loup (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 124).
[En parlant d'un chien, d'un oiseau de chasse] (Être) au poil et à la plume. (Être) dressé pour gibier à poil et gibier à plume. Vous avez là un beau chien, il est au poil et à la plume (Mérimée, Mosaïque,1833, p. 215).
Lapin, lièvre en poil. Lapin, lièvre tué auquel on n'a pas retiré la peau. (Dict. xixeet xxes.).
c) P. méton. Peau d'animal garnie de ses poils utilisée dans l'habillement. Synon. peau.Des cheveux énormes, chauds et bouffés, lui couvrent tout le corps jusqu'aux pieds comme un vêtement fait en poil d'animal (Flaub., Champs et grèves,1848, p. 362).Le caraco banal, bordé de poil de lapin, qui servait, tour à tour, à toutes les filles de la maison (E. de Goncourt, Élisa,1877, p. 93).
Rem. Poil est substitué à fourrure dans le cas de peau de peu de valeur.
Bonnet, chapeau à poil. Les bonnets à poil des gendarmes survinrent avec leurs panaches blancs selon la mode de Henri IV (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 327).
P. méton.
Poils détachés de la peau, utilisés dans la fabrication de différentes étoffes. Poil, duvet et jarre. Manteaux arabes tissés d'or et de poil de chèvre (Lamart., Voy. Orient,t. 2, 1835, p. 408).Le poil de chameau est (...) difficile à filer, fin et dur au feutrage : il s'emploie pour la chapellerie commune et quelques grosses étoffes (Comm.t. 21839).
Étoffe tissée avec des poils (autres que les poils de mouton). Le baigneur s'arme d'un gant de poil de chameau qu'il vous promène sur tout le corps (About, Grèce,1854, p. 411).
MÉGISSERIE
Peau en poil. Peau brute séparée du corps de l'animal. Une fois séparée du corps de l'animal, la peau brute est dénommée « peau en poil », quel que soit son état (Bérard, Gobilliard, Cuirs et peaux,1947, p. 19).
Côté poil. Synon. côté fleur*; anton. côté chair*.[Le procédé du salage] consiste à empiler les cuirs bruts côté poil en dessous, en recouvrant le côté chair de chacun d'eux par une couche de sel (Stocker, Sel,1949, p. 90).V. côté ex. 6.
D.− Loc., fam. et pop.
1. Loc. adj.
a) [Loc. correspondant, par leur forme à C 2 a et b), supra]
De tout poil, de tous les poils (rare), de tous poils (dépréc.). De toute espèce, de toute sorte (en parlant de pers.). Synon. de tout acabit*.Les embrassades généreuses des pacifistes et des socialisants de tous poils (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 103).Il y en avait de tous les poils et même de ces hommes de derrière le mur du Chantal qui ont des yeux verts et des figures jaunes (Audiberti, Ampélour,1937, p. 98).Les profiteurs de guerre, les mercantis de tout poil, et sur le même rang les patriotes professionnels (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 216).
P. anal. [En parlant de chose] Annette, toujours imprudente, laisse, sans y penser, à la disposition de l'enfant, une quantité de livres (...). Il en est de tout poil (Rolland, Âme ench.,t. 2, 1925, p. 186).
Du même poil, de ton (...) poil. C'est toujours flatteur [pour un chef], ces pétitions-là [de passer sous son commandement], surtout quand elles viennent d'un homme de ton poil (D'Esparbès, Guerre sabots,1914, p. 43).Laisse-moi encore trouver quarante gaillards du même poil! (Claudel, Soulier,1929, 4ejournée, 8, p. 902).
De bon, de mauvais poil. De bonne, mauvaise humeur. Un client de mauvais poil met sous enveloppe avec des récriminations amères la fiche identificatrice qui permet de faire retomber sur les épaules de l'ouvrier négligent une inattention déjà ancienne (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 11).Il pensait qu'on pouvait tout expliquer à Mathieu, si seulement il était de bon poil (Sartre, Âge de raison,1945, p. 223).V. compartiment ex. 2.
À poil. Nu. (Se) mettre, (se) foutre* à poil. Il nous faisait rigoler parce qu'il croyait qu'« une femme à poil », ça voulait dire « une femme à barbe ». Georges s'est fichu de lui (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1237).Un homme à poil n'a pas d'âge (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 8).
P. anal. [En parlant d'une chose] Le taquoir à poil est de bois nu; le taquoir habillé a un revêtement de molleton (Coston, A.B.C. journ.,1952, p. 199).
À poil! [Invective que l'on emploie pour huer qqn] Des huées terribles l'accueillirent (...). − À bas Pommard! − À poil! (R. Fallet, Le Triporteur,1951, p. 357 ds Rob. Suppl. 1970).
À poils (var. plus rare avec le même sens) Je suis toujours sur le pont À poils Et je suis toujours seul à les admirer [les levers de soleil] (Cendrars, Du monde entier,Couchers de soleil, 1957, p. 186).
Au poil et à la plume
Vx. Qui excelle en toute chose (Ac. 1798-1878).
Vieilli. Bisexuel. Synon. fam. à voile* et à vapeur.Un château de son père, où il s'enterra quelques jours, avec des filles et des garçons, − car il était au poil et à la plume, disait M. d'Oels (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 164).
Caresser, prendre qqn dans le sens du poil. Traiter quelqu'un et/ou lui parler de manière à lui plaire, à le flatter.
Anton. caresser, prendre à contre-poil*, à rebrousse-poil*.Ce retour en force de « l'école de papa », voire de grand-papa caresse, dit-on, l'opinion dans le sens du poil (Libération,14 févr. 1985, p. 3, col. 1).
b) [Poil connote une idée de force virile; v. avec la même connotation, les loc. verb. en infra D 2 b]
À poils. Qui a de la force, du courage. Il trouvait Lantier un peu fiérot, l'accusait de faire sa Sophie devant le vitriol, le blaguait parce qu'il savait lire et qu'il parlait comme un avocat. Mais, à part ça, il le déclarait un bougre à poils (Zola, Assommoir,1877, p. 618).
À tout poil (vieilli, var. avec le même sens). J'aurais besoin (...) de quelques braves à tout poil pour une expédition qu'on me propose (Gautier, Fracasse,1863, p. 323).
Brave (ou un terme équivalent) à trois poils (gén. dépréc. ou iron.). Qui fait montre de courage. Synon. partiel matamore.Dans le duel arrangé avec M. Raindre, colonel ou chef d'escadron d'artillerie légère. Ce brave à trois poils ne le fut guère! (Stendhal, H. Brulard,t. 1, 1836, p. 460).Un gaillard à trois poils, un mastard pour qui la vie des autres compte pas plus que celle d'un pou (Queneau, Loin Rueil,1944, p. 39).V. brave ex. 15.
2. Loc. verb.
a) [Poil désigne de façon vague, p. méton., le corps, une partie du corps]
Faire, refaire le poil à qqn (vieilli)
Dépouiller, tromper quelqu'un. Jamais personne n'a fait le poil à Gaudissart, à l'Illustre Gaudissart. Oui, jamais personne ne m'a enfoncé (Balzac, Gaudissart,1834, p. 15).Car vous êtes allé chercher des écus à Paris (...). Ce sera drôle à vous de refaire le poil à un pair de France (Id, Début vie,1842, p. 378).
P. ext., vieilli. Être supérieur à quelqu'un en quelque chose. Tu n'as pas besoin de rigoler (...) c'est encore pas toi, avec tes airs malins, qui lui feras le poil pour l'instruction (Courteline, Linottes,Gora, 1917, p. 217).
Avoir le poil, du poil à qqn (vieilli). Même sens. (Ds Ac. 1798).
Rem. On rapprochera ces deux loc. de faire, refaire la peau* à qqn; avoir la peau* de qqn.
Tomber sur le poil de qqn
[Le suj. désigne une pers.] Attaquer par surprise. Synon. tomber* sur qqn, sur le dos*, le paletot*, le rable* de qqn.Le Raboliot et lui, ils sont cousins, un peu trop d'accord à mon gré... Quand vous tomberez sur le poil du gars, au bon moment, il faudra bien que Tournefier verbalise (Genevoix, Raboliot,1925, p. 97).
[Le suj. désigne un événement défavorable] Survenir par surprise. Synon. tomber* sur qqn, sur le coin* de l'œil, sur le coin du nez (région.).Si, maintenant, après la fontaine, après le mal, après le feu, il y a encore quelque saloperie qui nous tombe sur le poil, qu'est-ce qu'on va faire? (Giono, Colline,1929, p. 176).
Avoir qqn sur le poil. Devoir supporter quelqu'un. Synon. avoir qqn sur le dos*.À Paris, quand on dort, on est jamais poissé. À Paris on a pas des gradés su l'poil (Benjamin, Gaspard,1915, p. 26).
Laisser du poil (dans une affaire). Essuyer une perte. Synon. (y) laisser, perdre des plumes*.On a laissé du poil. On a gagné encore ce coup-là, mais, le coup d'après? (Giono, Colline,1929p. 170).
Rem. Poil a la même valeur dans des expr. moins lexicalisées : a) Se tarder* le poil (v. Rolland, C. Breugnon, 1919, p. 23). Se tirer le poil (v. Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 249), au sens de « se battre » (v. se tirer les cheveux*). b) Mettre la main sur le poil (v. Maupass., Contes et nouv., t. 1, Vente, 1884, p. 143), au sens de « mettre la main au collet ». c) En venir au poil (v. P. Rézeau, Notes sur le lexique d'Ernest Pérochon ds R. Ling. rom. 1978 t. 42, p. 114) au sens de « en venir aux mains ». Rey-Chantr. Expr. 1979 fait remarquer que poil (et plume) ,,se substituent à la peau humaine quand il s'agit d'exprimer les coups reçus``.
b) [Poil connote une idée de force (virile)]
Avoir du poil (vieilli), avoir du poil aux yeux, au cul (vulg.).
Être énergique, très courageux. Vous avez du poil et du cœur. Vous savez que la femme et les mômes ont besoin de soupe (La Petite lune,1878-79, no7, p. 2).Tu as juste assez d'énergie pour être hors d'état de défendre ta bourse contre l'invasion des barbares, juste assez de poil aux yeux (Courteline, Boubouroche,1893, i, 2, p. 28):
5. Rodin a du poil au menton, mais pas au c... car s'il en avait, il ne subirait pas toutes les humiliations qu'on lui fait subir à propos de son Hugo! Décidément, la colonne vertébrale d'un sculpteur est encore plus flexible, plus rentrante que celle d'un peintre. Goncourt, Journal,1891, p. 172.
Rare. Manquer de poil. Ne pas être courageux. Ses amis de l'atelier, qui étaient forcément au courant de la situation, le pressaient de brusquer la petite. − Vous manquez de poil, disait l'un (Huysmans, Sœurs Vatard,1879, p. 275).
Du poil! (vieilli). [Exclam. que l'on emploie pour exhorter au courage] Synon. du nerf!Tenez bon, mon petit, et comptez sur moi. Et du poil, crédieu! (Richepin, Césarine,1888, p. 6).
[Var. avec le même sens] Avoir du poil au cœur, aux couilles (vulg.), aux fesses, quelque part; avoir du poil aux pattes.
Reprendre du poil de la bête. Reprendre des forces, se ressaisir après une épreuve, un moment de faiblesse. Je reprends du poil de la bête; ce n'est pas comme le fils Pieuchon qui ne sort plus qu'en voiture et qu'on croit perdu, bien qu'un médecin de B... prétende le guérir (Mauriac, Baiser Lépreux,1922, p. 184):
6. J'avais vécu, pendant dix ans, tel l'ivrogne qui a peur de l'affaissement, au lendemain de l'ivresse et qui reprend du poil de la bête, saute sur le vin blanc dès son lever... Vallès, J. Vingtras,Insurgé, 1885, p. 15.
Rem. Les dict. attestent une accept. vieillie de cette loc. ,,chercher son remède dans la chose même qui a causé le mal`` (Ac. 1798-1878), en partic. « boire pour se remettre d'un excès de boisson ». L'ex. 6 illustre le passage entre cette accept. et l'accept. mod.
c) Donner, foutre (ou un verbe équivalent) un poil à qqn; recevoir (ou un verbe appartenant au même paradigme) un poil. Donner, recevoir des coups, une réprimande. Le « poil » qu'il eut à subir à sa rentrée [à l'atelier], la menace d'une expulsion à la première peccadille refroidirent pour quelque temps la folle gaieté d'Anatole et ses facétieuses imaginations (Goncourt, Man. Salomon,1867, p. 54).Grand-père m'a fichu un poil de première grandeur : − Dorénavant − m'a-t-il dit en finissant − tu resteras à côté de nous (Gyp, Souv. pte fille,1927, p. 93).
d) Avoir un poil dans la main (v. main 1reSection I H 3 d). [Var. avec le même sens] Avoir du poil dans la main, aux mains; avoir une forêt (ou un terme équivalent) de poils dans la main. Il a vu que je connaissais son métier mieux que lui, et que je n'avais pas du poil aux mains pour cet ouvrage-là! (Goncourt, Man. Salomon,1867p. 285).[Voir] Celui qui a un outil dans la main écouter celui qui n'a dans la main qu'une forêt de poils (Péguy, Argent,1913, p. 1113).
e) Chercher des poils sur un œuf; chercher du poil de grenouille. Chercher une chose introuvable. J'ai monté dans une noisette (...) chercher du poil de grenouille parce qu'il n'y en a pas en Espagne (Claudel, Soulier,1929, 1repart., 1rejournée, 14, p. 991).
E.− [Poil connote une idée de très petite dimension (en largeur) et, p. ext., de précision et de perfection] Fam. et pop.
1. Un poil. Une très petite distance, quantité, un très court espace de temps. Synon. un rien, un chouia (fam.).On n'ose pas tout à fait encore l'obscénité précise (...) mais il s'en faut d'un si petit poil qu'on peut bien dire que la chose est accomplie (Bloy, Journal,1903, p. 163).Je suis à un poil de l'échafaud. Voilà où que je me trouve! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 124).
Rem. Cheveu est substituable à poil dans les syntagmes suiv. : à un poil près, être à un poil de (faire qqc.), il s'en faut d'un poil, ne tenir qu'à un poil.
Un poil de qqc. Il voulait encore boire, dit-il. Non, il n'avait rien dit; pas un poil de ce qu'il aurait voulu dire (Giono, Batailles ds mont.,1937, p. 252).Un poil de mistral faisait frémir les magnifiques ombrages de Lamalou (L. Daudet, Qd vivait mon père,1940, p. 221).
2. Au poil
Rem. Var. au petit poil, au quart de poil, au poil du cul (vulg.).
Empl. adv.
Tout juste, exactement (dans le temps ou l'espace). Je l'ai eu mon train de sept heures quinze, quand même, mais au poil. On s'est pas fait d'adieux (Céline, Voyage,1932, p. 508).
Avec beaucoup de précision, de soins minutieux; p. ext., parfaitement. Ajuster, régler qqc. au poil. On vérifiait au poil sa mitrailleuse. On choisissait son moment (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 258).La fenêtre donnait sur un jardin ratissé au petit poil (H. Bazin, Vipère,1948, p. 150):
7. Après ça on te dessinerait un de ces jolis petits mignons de pardingues bleu marine avec, en haut, juste en dessous de l'échancrure, un joli mignon bouton dessiné au petit quart de poil. Queneau, Exerc. style,1947, p. 111.
Arg. des Beaux-Arts, vieilli. Dessin au poil. ,,Dessin qui entre dans le plus petit détail`` (Hugues, Expr. atelier, s.d.).
Empl. adj. Qui convient parfaitement, parfait. J'ai un endroit de tout repos et au poil (Giono, Gds chemins,1951, p. 109).Pas question de changer la politique étrangère. Celle qu'on a choisie est au poil (Aymé, Tête autres,1952, p. 28).
[En parlant d'une pers.] Elle est au poil, cette fille-là (Rob.).
[Empl. dans une exclam.] Synon. chic! parfait!Salut, fit l'arrivant. Ça va le boulot? − Au poil. Tu peux regarder (R. Dorgelès, Le Marquis de la Dèche,1971, p. 29 ds Cellard-Rey 1980).
II.− P. anal. (de forme)
A.−
1. Filament apparaissant à la surface de certains organes végétaux. Les platanes ont changé de peau et dispersé leurs pelotes aux poils crochus (Arnoux, Paris,1939, p. 104).Le chêne pubescent est caractérisé (...) par les poils courts et serrés qui couvrent la partie inférieure de ses feuilles et justifient son nom de chêne pubescent (Cochet, Bois,1963, p. 32).
2. BOT. Production de l'épiderme des plantes, unicellulaire ou pluricellulaire, de formes diverses et remplissant différentes fonctions. Les poils en forme de plateau que supporte un pédicelle central s'appliquent sur l'épiderme foliaire par la sécheresse et obstruent les stomates, qu'ils protègent ainsi contre le vent desséchant (Bot.,1960, p. 1277 [Encyclop. de la Pléiade]).Poil absorbant, collecteur, sécréteur, urticant. V. absorbant ex. 3.
B.−
1. Petit filament apparaissant à la surface d'un tissu, d'un papier. Feutre à longs poils. Il s'était (...) fait expédier de Londres (...) des papiers à poils, des papiers reps (Huysmans, À rebours,1884, p. 187).Elle gratte la crème avec sa cuiller, en rebroussant les poils du tapis (Queneau, Loin Rueil,1944, p. 118):
8. La moquette est un tissu à surface endroit velue qui se tisse soit à poils coupés, soit à poils bouclés. Le liage des fils se fait selon les qualités soit sur simple duite, soit sur double duite. Thiébaut, Fabric. tissus,1961, p. 114.
Au sing. coll. L'homme de l'éternel, Renouant sur ses reins sa robe de poil rude (Leconte de Lisle, Poèmes barb.,1878, p. 36).
2. INDUSTR. TEXT.
a) Poil de chèvre (vieilli). Étoffe dont la trame est en laine et la chaîne en coton. Il venait au Bureau habillé fort simplement (...) il portait des souliers et des guêtres, un gilet en poil de chèvre (Balzac, Employés,1837, p. 107).
b) Fil de soie grège qui n'a reçu qu'une torsion. On peut obtenir trois sortes de fils de soie : a. Le poil, formé par un seul fil de soie grège, tordu sur lui-même; il est utilisé comme fil de chaîne pour les étoffes légères et pour la passementerie; b. La trame (...); c. L'organsin (Blanquet, Technol. mét. habill.,1948, p. 86).
c) Surface du velours. Les fibres destinées à la formation du poil sont apportées sous forme de fils de chaîne, qui sont coupés sur le métier même. La fixation de la touffe de poils peut être « à cheval » (...) ou « liée » (Thiébaut, Fabric. tissus,1961p. 111).
Chaîne de poil, fil de poil. Chaîne, fil utilisé pour confectionner cette surface. Les velours bouclés sont obtenus à l'aide de deux ensouples, la première portant les fils de fond (...), la seconde portant les fils de poil (Thiébaut, Fabric. tissus,1961p. 109).
Velours à trois, quatre, cinq, six poils. Velours dont la trame est formée de trois, quatre, cinq, six fils de soie ou de coton. (Dict. xixeet xxes.).
C.−
1. Fissure fine, défaut dans une pierre. Synon. fil.Certaines pierres portent des fissures appelées poils qui s'élargissent avec le temps en provoquant l'éclatement de la pierre (Bourde, Trav. publ.,1928, p. 92).
2. Poil noir, taché, roux. [Désigne différentes qualités d'ardoise] (Dict. xixeet xxes.).
REM. 1.
Poil à gratter, subst. masc.V. gratter.
2.
Poil-poil, loc. adv. ou adj.,pop., vieilli, var. par redoublement expr. de au poil. V. supra I E 2.Se baguenauder sur le front, en douce poil-poil (Barbusse,Feu,1916,p. 92).Là, sur des coussins « poil-poil », nous nous prélassons (La Pédale,22 déc. 1926, p. 5, col. 3 ds Esn. 1957).
3.
Poilaison, subst. fém.,hapax. Un vieillard tout couvert de poilaison blanche (Loti, Inde sans Angl.,1903, p. 148).
Prononc. et Orth. : [pwal]. Homon. poêle1, 2 et 3. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1100 anat. (Roland, éd. J. Bédier, 1012 : deit hum perdre e del quir e del peil); 2. ca 1170 « pelage (d'un cheval) » (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 2905); 3. a) fin xiies. (Raoul de Cambrai, 2314 ds T.-L. : Il prent trois pox de l'ermin qu'ot vesti); b) 1395 veluyau a long poil (La Tremoïlle, Les la Tremoïlle, t. 1, p. 57); 4. a) ca 1200 pol d'herbe (Aspremont, éd. L. Brandin, 8624); b) xves. « villosité (d'une plante) » (Grant Herbier, no146, Camus ds Gdf. Compl.); 5. xiiies. poil d'erbe désignant quelque chose de négligeable (Jubinal, Jonglères et Trouvères, 71 ds Möhren Négation); ca 1373 poil « id. » (Miracles de N.D., éd. G. Paris et U. Robert, XXXI, 774). B. Expr. 1. 1176-84 fig. encontre poil « à rebrousse-poil » (Gautier d'Arras, Ille et Galeron, éd. F. A. G. Cowper, 5330), sur les nombreuses expr. usitées en a. fr. (v. T.-L. et Gdf.); 2. a) 1532 à tout le poil [pour : avec tout le poil, l'abondance du poil étant considérée comme un signe de force physique] (Rabelais, Pantagruel, II, éd. A. Lefranc, t. 3, p. 37 : Il est né à tout le poil; il fera choses merveilleuses); b) 1659 un brave à trois poils « homme courageux » (Molière, Les Précieuses, IX), c) 1793 bougres à poil « hommes déterminés, courageux » (Père Duchêne, no298 ds Esn. Poilu, p. 428); d) 1836 avoir du poil au cœur « être courageux » (A. Lagarde, Le Bonhomme Popule ds Larch. 1872); 3. 1573 y laisser du poil « perdre quelque chose » (Négoc. de la France dans le Lev., III, p. 441 ds Gdf. Compl.); 4. 1671 gens de tout poil (La Fontaine, La Coupe enchantée, 145 ds Œuvres, éd. H. Régnier, t. 5, p. 111); 5. 1808 avoir un poil dans la main (Hautel); 6. 1833 être de mauvais poil (E. Corbière, La Mer et les marins, part. 4, ch. 1, 186 ds Quem. DDL t. 20); 7. 1849 donner un poil « réprimander » (Mérimée, Corresp. gén., V, 430, ibid., t. 2); 8. 1858 être à poil « tout nu » (Larch.); 9. 1918 atterrir au poil (Esn. Poilu 1919, p. 426); v. aussi Rey-Chantr. Du lat. pilus « poil », « partie velue de quelque chose » et au fig. « un rien ». Fréq. abs. littér. : 1 956. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 873, b) 2 921; xxes. : a) 3 449, b) 3 080. Bbg. Chautard Vie étrange Argot 1931, p. 492. − Lenoble-Pinson (M.). Le Lang. de la chasse. Bruxelles, 1977, p. 11, 14, 339, 343, 347. − Quem. DDL t. 2, 16, 17, 19.