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MARIONNETTE, subst. fém.
A. −
1. Figure de bois, de carton, de tissu ou d'autre matière, représentant une personne ou un animal, qui est articulée ou non, actionnée à la main (marionnette à gaine) ou à l'aide de fils (marionnette à fils) par une personne généralement cachée et à laquelle on fait jouer un rôle parlant ou muet. Spectacle de marionnettes. Les marionnettes articulées remontent à la plus haute Antiquité; ainsi, au temps de Périclès, les enfants faisaient usage d'une sorte de marionnette en bois, dont les membres se mouvaient au moyen de fils (D'Allemagne,Hist. jouets, 1902, p. 239).
Au plur. Théâtre de marionnettes et, p. ell., marionnettes. Théâtre où l'on donne un spectacle de marionnettes. Je te mènerai aux marionnettes, à la meilleure place (Flaub.,Tentation, 1849, p. 352).Un théâtre de marionnettes se dresse et toutes les femmes s'asseyent et se rangent en corbeille, autour de l'estrade où se joue la parodie du Bossu (Goncourt,Journal, 1863, p.1235).
[Dans le refrain d'une vieille chanson française destinée aux enfants, que l'on mime gén. avec les mains] La Voix de la Nourrice: Ainsi font, font, font les petites marionnettes, Ainsi font, font, font Trois petits tours et puis s'en vont (H. Bataille, Maman Colibri, 1904, iv, 9, p. 32).
Loc. Faire les marionnettes. Faire tourner les mains de droite à gauche et de gauche à droite, les doigts dressés en l'air, pour imiter les mouvements des marionnettes. Elle la faisait danser une minute, amusait son regard incertain en faisant les marionnettes avec les doigts (Van der Meersch,Empreinte dieu, 1936, p. 172).Pierre s'est lavé les mains, mais il n'a naturellement pas pris le temps de les essuyer et il les sèche en faisant les marionnettes (Morand,Homme pressé, 1941, p. 59).
2. P. anal.
a) Personne dont les gestes ou les attitudes évoquent l'automatisme, l'exubérance ou l'exagération des mouvements des marionnettes. Synon. pantin.En chaire, il y a une espèce de petite marionnette, se démenant à froid en une langue très basse, très ampoulée et très vulgaire (Goncourt,Journal, 1864, p. 33).La silhouette démantibulée de la servante défunte s'agitait et se trémoussait, marionnette funèbre, au milieu du vestibule désert (Lorrain,Contes chandelle, 1897, p. 88):
1. ... pour qui ces deux marionnettes jouaient-elles la tragédie? Les attitudes et les gestes de la fille me paraissaient aussi exagérés, aussi faux que ceux de la mère... Gide,Isabelle, 1911, p. 656.
b) Personne sans caractère, qu'on manoeuvre à son gré, à qui l'on fait faire ce que l'on veut; personne qui n'est pas libre d'agir et qui doit obéir à une autre. Synon. pantin.La nature est pour moi une décoration dont la durée est insolente, et sur laquelle est jetée cette passagère et sublime marionnette appelée l'homme (Vigny,Journal poète, 1835, p. 1028).Un vieux monsieur (...) fort entouré, car il payait à boire; parlant beaucoup, casquant, servant de marionnette à tous (Gide,Journal, 1902, p. 127):
2. C'est un poëte [Dieu]; et l'homme est sa marionnette. La naissance et la mort sont deux coups de sonnette, L'un à l'entrée, et l'autre au départ du pantin, Je ris avec le vieux machiniste Destin. Hugo,Légende, t. 6, 1883, p. 285.
c) Loc., vx. Jouer les grandes marionnettes. Employer les grands moyens pour réussir. Ce fut à Arnouville que l'on commença à jouer les grandes marionnettes (Mmede Chateaubr., Mém. et lettres, 1847, p. 96).
B. − MAR. ,,Réunion de poulies tenues, verticalement, par deux traverses, entre lesquelles elles peuvent pivoter pour se prêter à diverses directions de force`` (Bonn.-Paris 1859). On monte les poulies de pied de mât en marionnettes, maintenues verticales entre deux traverses en bois entre lesquelles elles tournent et pivotent librement (Galopin,Lang. mar., 1925, p.45).
Prononc. et Orth.: [maʀjɔnεt]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1479 «instrument de musique, probablement un rebec» flayos, lutz et marionnettes (Jean Molinet, La journée du Therouenne, 23 ds Faictz et dictz, éd. N. Dupire, I, 128) − 1549 (Entrée de Phil. II, Reg. de cuir noir, A. Tournai ds Gdf. Compl.); b) 1517 «espèce de danse» danssant maryonetes (Fragments d'une sottie par Maitre Georges, 48 ds Recueil général des sotties, éd. E. Picot, II, 258); 2. a) 1556 «petite figure d'homme ou de femme qu'on fait mouvoir par des fils, des ressorts ou avec la main» (Cardanus, Subtiles invent., I, 18, p. 352 ds Gay); b) au plur. 1584 «endroit où l'on fait jouer les marionnettes; jeu de marionnettes» aux badineries ... bastelleries et marionnettes (G. Bouchet, Sérées XVIII, éd. C. E. Roybet, t. 3, p. 177); d'où 1738 «personne sans caractère, qu'on manoeuvre à sa guise» (Voltaire, Lettre à Frédéric, Prince royal de Prusse, 23 janv. ds Œuvres complètes, éd. L. Moland, t.34, p.397); c) 1787 «personne dont les gestes saccadés évoquent les mouvements d'une marionnette» (Fér. Crit.); 3. 1831 mar. (Will.). Forme dissimilée d'un dimin. de mariole désignant la Vierge, ca 1223 (G. de Coinci, Mir. Vierge, éd. Koenig, I Mir. 13, 39), puis une «petite image de la Vierge» 1306 (G. Gautier, Royaux Lignages, I, 7736 ds T.-L.), les marionnettes étant ainsi appelées par un dimin. de Marie parce qu'aux fêtes de l'Assomption on donna, pour remplacer les Mystères, des jeux de marionnettes; d'ailleurs, marionnette a désigné, en 1489 en Cambrésis, une monnaie portant l'image de la Vierge (Jean Molinet, Le Cri des monnaies, 32, op. cit., II, 767), en 1566 une statue, une image de la Vierge (Henri Estienne, Apologie pour Hérodote, au lecteur, éd. P. Ristelhuber, I, p. 14). Fréq. abs. littér.: 212. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 259, b) 365; xxes.: a) 374, b) 259.
DÉR.
Marionnettiste, subst.Personne qui crée des marionnettes et imagine des spectacles où elles entrent en scène; personne qui fait mouvoir les marionnettes, qui leur prête sa voix. Un bon marionnettiste est amoureux de sa marionnette (...). Il prête à la marionnette sa voix et son souffle et, ce faisant, celle-ci devient un peu son propre enfant (M. Esclapez, Cah. d'illustrations, [p. III] ds Collodi, Les Aventures de Pinocchio, Paris, Gallimard, 1979). [maʀjɔnεtist], [-ne-]. 1reattest. 1852 (Gautier, Souv. de théâtre..., Marionnettes ds Rob.); de marionnette, suff. -iste*.
BBG.Goddaert (D.). Marionnettes et congénères, ét. de lexicol. hist. Thèse, Gand, 1962/63. _ Hotier (H.). Le Vocab. du cirque et du music-hall en France. Paris, 1973, p. 117. _ Mack. t.2 1939, p.134. _ Migl. Nome propr. 1968 [1927], p. 124, 213, 239. _ Sculpt. 1978, pp. 521-522.