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MALADE, adj. et subst.
I. − Emploi adj.
A. −
1. [En parlant d'une pers.] Dont la santé est altérée; qui est atteint d'une maladie, qui éprouve un malaise. Synon. indisposé, souffrant, en mauvaise santé; anton. bien portant, en bonne santé.Elle avala un verre d'eau où elle avait fait tremper une poignée d'allumettes, ce qui la rendit horriblement malade , sans la tuer (Zola, Nana, 1880, p. 1452).Je sortais d'un dispensaire, j'avais joué avec des enfants malades, sans répugnance pour leurs plaies, toute douce et toute attendrie (Bernstein, Secret, 1913, iii, 3, p. 35).Sa voisine de chambre était gravement malade, (...) elle avait un cancer (...), elle allait mourir (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p. 38):
1. L'Amiral n'avançait guère, il se traînait plutôt, en ronronnant, d'un roulis vers l'autre. Ce n'était plus un voyage, c'était une espèce de maladie. Les membres de ce concile matinal, à les examiner de mon coin, me semblaient tous assez profondément malades, paludéens, alcooliques, syphilitiques sans doute... Céline,Voyage,1932, p. 144.
SYNT. Être incurablement, légèrement, réellement, sérieusement malade; être bien malade; être trop malade (pour faire qqc.); être malade comme une bête, comme un chien, à mourir; avoir l'air malade; se croire, se rendre, se sentir malade; manger, rire à s'en rendre malade.
Tomber malade. Devenir malade. − (...) Si tu te voyais! Tu es blême!Tu me fais peur, tu vas tomber malade... − C'est des idées que tu te fais, je vais très bien. Évidemment, je suis fatiguée (Triolet,Prem. accroc,1945, p. 72).
ARM. Se faire porter malade. Se faire inscrire comme malade. Synon. fam. se faire porter pâle.Pendant l'hiver de 1917, quand j'étais prisonnier, la nourriture était si mauvaise que tout le monde est tombé malade. Naturellement, je me suis fait porter malade comme les autres: mais je n'avais rien (Sartre,Nausée,1938, p. 137).
Fam. Se déclarer malade (sans l'être forcément). Elle crut que Paul l'avait prise en grippe et la fuyait. Le lendemain, elle se fit porter malade, se coucha et dîna dans sa chambre (Cocteau,Enfants,1929, p. 144).
Expr. iron., fam. et vieilli
Le voilà, vous voilà bien malade. ,,Il se plaint, vous vous plaignez injustement`` (Ac., Littré).
Est bien malade qui en meurt. ,,Pour se moquer d'un danger qui menace plusieurs personnes et dont on croit pouvoir se tirer sans peine`` (Ac. 1878).
Il ne mourra que les plus malades. ,,Pour nier ou narguer un danger`` (Ac. 1878).
Malade + compl. prép.
[Le compl. désigne ce qui rend qqn malade]
Malade + subst. déterminé ou non.Malade de/par suite de (la) chaleur, de/du froid. Il a été trois jours malade du plaisir qu'il avait pris à cette soirée (Dumas père, Lorenzino,1842, ii, 4, p. 239).Ma femme étant dans son lit, malade par suite des fatigues que je lui ai données, je veux vous envoyer moi-même de mes nouvelles (Tocqueville,Corresp. [avec Gobineau], 1850, p. 104).Françoise dépensait dans ces allées et venues une telle ardeur que maman voyant sa figure enflammée craignait que notre vieille servante ne tombât malade de surmenage (Proust,J. filles en fleurs,1918, p. 445).
Malade + inf.La moitié des dames qui ont assisté au bal du prince sont dans leur lit, malades d'avoir eu froid en sortant (Flaub.,Corresp.,1865, p. 168).
[Le compl. désigne la nature de la maladie] Malade de la grippe, d'une dysenterie. Je suis inquiet de Théo. Je trouve qu'il vieillit étrangement. Il doit être très malade, d'une maladie de coeur, sans doute. Encore un qui s'apprête à me quitter (Flaub.,Corresp.,1872, p. 356).Au cas où il tomberait malade de la peste et en mourrait (Camus,Peste,1947, p. 1306).
[Le compl. désigne l'organe, la partie du corps atteinte] Malade du coeur, du foie, de la moelle, des reins. Elle est malade de la poitrine et (...) elle a presque toujours la fièvre (Dumas fils, Dame Cam.,1848, p. 78).Madame, qui est malade du ventre et ne peut avoir d'enfants, ne veut plus entendre parler de la chose (Mirbeau,Journal femme ch.,1900, p. 41).Tout est revenu. Des années venaient de passer d'un seul coup. J'avais été bien malade de la tête (Céline,Mort à crédit,1936, p. 215).
Pop. Malade du pouce. Avare ou paresseux (d'apr. France 1907). Fam. Il est malade du cerveau! Il est fou!
En partic. Dont les fonctions psychiques sont perturbées; p. ext., qui n'agit pas raisonnablement, qui ne parle pas, ne juge pas avec bon sens. Ah! ça, est-ce que tu es malade? Des femmes, il te faut des femmes, maintenant, et avec une gueule comme la tienne! (Courteline,Train 8 h 47,1888, 1repart., v, p. 54).− C'est affreux ce que vous dites là, Monsieur Georges. Il continue encore, tandis que je me tordais les mains: − Pourquoi est-ce affreux?... Mais non, ce n'est pas affreux... C'est juste. Tu me crois malade... Tu crois qu'on est malade, quand on a de l'amour (Mirbeau,Journal femme ch.,1900p. 141).
Malade d'esprit. V. âme ex. 118.
Qui est perturbé, dégoûté, attristé, qui éprouve un malaise plus moral que physique. Ça me rend malade de voir ça. Je hais le mensonge. Le moindre mensonge me rend malade (Cocteau,Parents,1938, ii, 1, p. 231).
Malade + compl. prép. indiquant la cause du malaise.
[Le compl. est un subst.] Malade d'anxiété, de chagrin, de colère, de dégoût, d'envie, de fureur, de haine, d'incertitude, de jalousie, de peur, de tristesse. Charles d'Este, malade d'impatience allait faire quelque folie, lorsque la nouvelle de Sadowa bourdonna, grandit, éclata enfin (Bourges,Crépusc. dieux,1884, p.38).Pourquoi ai-je consenti, puisque je ne vous aimais point?... Je ne puis pas me souvenir, j'étais si triste, si malade du départ d'Honoré (Zola,Débâcle,1892, p. 527).Il a vu une fois à Paris un film soi-disant andalou exécuté à Hollywood. Il a été obligé de quitter la salle, il n'a pas pu dîner, il était malade de souffrance, de rage, physiquement malade; il ne pouvait plus parler (Montherl.,Bestiaires,1926, p. 462).
[Le compl. est un inf. introd. par de ou plus rarement par à] L'homme, par la fenêtre ouverte, montre tout Au roi pâle et suant qui chancelle debout, Malade à regarder cela! «C'est la crapule, Sire. Ça bave aux murs, ça monte, ça pullule (...)» (Rimbaud,Poés.,1871, p. 55).Il se remit à rôder, malade de ne point la voir (Zola,Rêve,1888, p. 92).Avec toi j'ai rencontré l'amour. Je l'aimais assez pour le lui cacher (...). Je l'aime assez pour être malade d'avoir à lui tirer ce coup de revolver à bout portant (Cocteau,Parents,1938, ii, 1, p. 234).
2. [En parlant d'une partie du corps, d'un organe] Qui est atteint d'une maladie, dont la fonction est perturbée; qui est le siège d'une douleur. Corps, organisme malade; bras, épaule,jambe malade; coeur, estomac, foie, gorge, poitrine, poumon malade; bronches, dents malades. Vent d'est. Elle a été moins bien aussi. D'abord, la tête malade; puis son ventre enfla un peu et elle eut des hoquets (Michelet,Journal,1858, p. 392).Il a besoin de moi pour ne pas penser qu'il va mourir. Il a les reins très malades (Aragon,Beaux quart.,1936, p. 310).V. acoquiner ex. 13:
2. Paul Alexis (...) a toujours les yeux bien malades: il ne peut plus lire et est maintenant obligé de dicter ses articles. Goncourt,Journal,1894, p. 599.
[P. méton.] Quant au mari, la vue de plus en plus malade, il avait dû cesser tout travail de peinture (Zola,Fécondité,1899, p. 471).
En partic. Qui n'a plus toute sa raison. Cerveau malade. Lord Rochester, la retenant par sa robe: Francis, ne me dis pas adieu! Lady Francis: Il me tutoie! (...) A-t-il la tête un peu malade? (Hugo,Cromwell,1827, p. 215).Ton esprit est tellement malade que tu ne t'en aperçois pas, et que tu crois être dans ton naturel, chaque fois qu'il sort de ta bouche des paroles insensées (Lautréam.,Chants Maldoror,1869, p. 159).Vous déparlez, je vous dis; vous avez la tête malade. Il n'y a pas de serpents dans votre main (Giono,Colline,1929, p. 32).
[P. méton., en parlant d'une faculté, d'un sentiment, d'une manifestation de la pers.] Qui dénote le manque de raison; qui a quelque chose d'anormal, d'excessif. Cette émotion flatta, démesurément Frédéric, dont l'orgueil était malade (Flaub.,Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 53).Elle m'aime, pensai-je. Que ce soit un caprice de cette imagination blasée et malade, c'est probable. Mais enfin elle m'aime (Gobineau,Pléiades,1874, p. 69).Elle se renversa sur sa chaise pour rire plus à son aise, mais d'un rire énervé, malade, un de ces rires qui tournent en attaques de nerfs (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Cri d'al., 1886, p. 1063):
3. Quelqu'un voyait M. Barrault, l'instituteur, le collègue de mon grand-père, sous l'aspect d'un vieux pauvre. Quelque part, dans une tête, rôdait cette pensée malade et criminelle. Sartre,Mots,1964, p. 63.
[En parlant d'un attribut de la pers.] Qui est inquiet, troublé, tourmenté. Esprit malade. La conscience de Hulot était si malade, qu'il trouva je ne sais quoi de sinistre et de froid dans la figure de Mitouflet (Balzac,Cous. Bette,1846, p. 301).Je vous envoie mon coeur gonflé de vous, avide De vous, mon coeur malade et triste à se briser. Je vous envoie ma peine, et ma vie insipide, Mon tourment, mon désir, mes soirs éternisés (Géraldy,Toi et Moi,1913, p. 105):
4.... Héloïse s'efforçait d'éteindre aux eaux de la piété des feux brûlants encore; mais la religion, impuissante à guérir cette âme malade, ajoutait à ses tourments. La tristesse, les regrets amers, les remords, un insurmontable amour, dévoraient les journées de cette pâle recluse... Toepffer,Nouv. genev.,1839, p. 91.
[P. méton.] Qui est le fait d'un esprit tourmenté. Jeunes gens qui dormez de ce sommeil malade, (...) qui vous penchez aux lucarnes des villes afin de déchiffrer les énigmes nocturnes et de surprendre une réponse à votre appel (...) ne renoncez pas à vous réunir par petits groupes et à vous exprimer par des organes modestes (Cocteau,Foyer artistes,1947, p. 60).
3. [En parlant de l'aspect, du comportement de la pers.] Qui dénote la maladie, la faiblesse. La câline noire et jaune, essayée chez les dames Colin, va parfaitement à sa charmante distinction, mais la jaunit beaucoup et lui donne le teint plus malade (Michelet,Journal,1858, p. 435).De loin en loin ils croisaient quelque visage étranger aux traits creusés, au regard morne, la démarche lente et malade (A. Daudet,Tartarin Alpes,1885, p. 202).
B. −
1. [En parlant d'animés non hum.] Qui est atteint de maladie.
a) [En parlant d'animaux] Si un de tes boeufs est malade, tu paieras les frais! (R. Bazin,Blé,1907, p. 299):
5. ... elle revint, portant la couvée malade dans une corbeille garnie de duvet, qu'elle glissa précieusement sous l'édredon. (...) D'instant en instant, elle allait regarder dans le nid fiévreux, enlever un nouveau poussin mort pour l'empêcher de faire mourir les autres. Alain-Fournier,Meaulnes,1913, p. 302.
b) [En parlant de plantes] Sur les hauteurs pierreuses croissent de maigres froments, gravement malades cette année, et dont le grain éclate en poudre noire (Sand,Prom. autour vill.,1860, p. 97).Il y avait un châtaignier malade d'une décortication, auquel on avait mis pour pansement une bande de zinc clouée (Hugo,Misér.,t. 1, 1862, p. 476).
[P. méton.] Le maître a ces deux arpents, trois aux Rosaies et deux encore sur la route de Villers. Terre ramassée, vigne répandue. Quand une pièce est malade l'autre est sauve (Hamp,Champagne,1909, p. 115).
P. ext. Qui n'a pas sa pleine vigueur. [Le] jardin (...) n'était qu'un petit enclos d'arbres grillés et d'herbe malade (Nizan,Conspir.,1938, p. 9).
2. [En parlant d'inanimés]
a) [En parlant du vin] Qui a subi une altération. Souvent les vins jeunes, au lieu de se clarifier, ont une tendance à prendre un aspect louche et à revêtir les caractères d'un vin malade (Brunet,Matér. vinic.,1925, p. 424).
b) [En parlant de perles, de pierres précieuses] Qui est altéré et, p. ext., qui n'a pas toutes ses qualités. Une bande d'un vert pâle comme celui des turquoises malades (Huysmans,Soir. Médan, Sac au dos, 1880, p. 113):
6. ... sa soeur, guérisseuse ou plutôt éplucheuse de perles, au doigté et au toucher prestigieux, renommée dans tous les ateliers, et on lui envoyait des tas de perles malades ou défectueuses de Paris, de Londres et de New-York. Cendrars,Bourlinguer,1948, p. 81.
c) P. ext. [En parlant d'un objet] Qui est en mauvais état, détérioré. Navire, voiture (bien) malade; livre malade. J'en étais quitte pour quelques contusions et deux ou trois écorchures. Le plus malade était mon paletot (About,Roi mont.,1857, p. 215).Un Grec de la grande époque n'eût pas compris la splendeur des arcs-boutants de Notre-Dame et n'y eût vu sans doute qu'un assez pauvre expédient destiné à sauver un édifice malade (Green,Journal,1938, p. 130).Se détachant en noir sur les façades lépreuses, et d'autant plus malades que le soleil du matin les éclairait en plein (...) j'aperçus le pauvre clocheton ajouré des Accoules (Cendrars,Homme foudr.,1945, p. 57).
C. − P. métaph. ou au fig. Qui n'est pas dans son état normal; qui est affaibli.
1. [Pour qualifier une époque, une société] Qui présente des signes de trouble, de désorganisation, qui a perdu le sens de certaines valeurs. Monde malade. Nous avons eu des orages nouveaux, des coups de pistolets, des velléités d'émeute! Notre société est de plus en plus malade. Et je n'entrevois plus de médecin (Sainte-Beuve,Corresp.,1841, p. 154):
7. ... il [Dieu] met à notre décharge, dans ses balances équitables, les superstitions et les incrédulités des époques où nous vivons. Nous vivons dans un temps malade: il le voit. Notre intelligence est blessée: il nous pardonnera, si nous lui donnons tout entier ce qui peut nous rester de sain. Joubert,Pensées, t. 1, 1824, p. 105.
[Malade + compl. indiquant la cause de la désorganisation]Si la France n'eût été malade du scepticisme, jamais assurément, dans son état normal, on ne lui eût fait accepter à elle, fille de Descartes et de Voltaire, l'amer breuvage des sibylles du Nord (Quinet,All. et Ital.,1836, p. 96).
En partic.
[En parlant de certains principes, de certains organes soc., de manifestations soc., de pers. représentant un certain pouvoir, de nations] Qui a perdu sa puissance, son autorité. Gouvernement, pouvoir malade; la gauche malade. La République avait le dessus partout, et l'on commençait à voir que, lorsqu'un peuple se lève pour défendre la justice, les despotes et ceux qui les soutiennent sont bien malades (Erckm.-Chatr.,Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 67).Toute la terreur bourgeoise apparut, car l'antique et sainte propriété était bien malade, si les fils des durs paysans d'autrefois en arrivaient à mettre en commun leurs lopins de terre (Zola,Travail, t. 1, 1901, p. 272).Ça commence à aller assez mal, là-bas aussi. L'esprit des sympathisants est moins bon, des domestiques retournent à la niche (...). Les grèves malades, ça se soigne avec des victoires (Malraux,Conquér.,1928, p. 59).
[En parlant d'une entreprise, de la pers. qui la représente] Dont les affaires vont mal. Léonce: Dites donc, mon père, hier, à la Bourse, il courait de mauvais bruits sur votre banquier, M. Turneps... On le dit malade... Blandinet: Ah! le pauvre homme!... j'irai lui porter ma carte. Léonce: Non!... malade... dans ses affaires! (Labiche,Pts oiseaux,1862, i, 2, p. 187).On cause que la banque Corcenet est malade (L. Daudet,Médée,1935, p. 120).
2. [Pour qualifier une pers., une faculté de la pers., certaines valeurs individuelles]
a) Qui a perdu sa force. Ma première idée fut d'user de mes jambes tandis que j'en avais encore la libre disposition. Mais il faut croire que ma volonté était bien malade, car il me fut impossible de mettre un pied devant l'autre (About,Roi mont.,1857, p. 230).Puisque mes chefs jugent mon projet opportun, exécutable avec les moyens dont ils disposent, pourquoi ne passe-t-on pas à la réalisation? - Et il racontait ses démarches inutiles, le retour au Soudan avec son illusion malade, brisée, vivace quand même (Vogüé,Morts,1899, p. 260).Ces soldats dans mon genre dont l'idéal patriotique était simplement compromis ou tout à fait malade (Céline,Voyage,1932, p. 77).
b) Qui a quelque chose de dénaturé, de perverti. Par l'acte seul de son amour immense, le verbe unit à lui notre nature malade, déchue, proscrite (Ozanam,Philos. Dante,1838, p.199).La Civilisation, dit Gandhi, l'est seulement de nom (...). Le vrai ennemi de l'Inde, c'est elle, bien plus que les Anglais qui, individuellement, ne sont pas méchants, mais malades de leur civilisation (Rolland,Gandhi,1923, p.45).Surtout il [le jeune homme] n'ose regarder en face une bête forcenée en lui; il ménage, il flatte en secret cette chair malade qui communique de sa frénésie aux passions intellectuelles de l'adolescent (Mauriac,Trois récits,1929, p.22).
[En parlant de manifestations de l'activité intellectuelle] C'est le langage de 1940 que Parain étudie, non la langue universelle. C'est le langage aux mots malades, où «Paix» signifie agression, où «Liberté» veut dire oppression (Sartre,Sit. I,1947, p. 194).
3. [Pour qualifier une couleur, la lumière et, p. méton., ce qui a une telle couleur, une telle lumière] Qui n'a pas tout son éclat, pâle, faible. Vingt heures de nuit, quatre heures de jour, et d'un jour malade! Comment peindre? (Sainte-Beuve,Nouv. lundis, t. 6, 1863, p. 115).Ô Soleil! (...) À présent, nous voyons Un disque safrané, malade, sans rayons, Qui meurt à l'horizon (Laforgue,Poés.,1887, p. 38).Les volets verts − d'un vert déteint − alternaient avec les petits pavillons d'un ocre malade, les murs labourés d'inscriptions (Carco,Équipe,1919, p. 29).
[Pour parler du mauvais temps, d'un temps humide] Le jour était malade. Les gouttes longues sifflaient en passant (Valéry,Corresp.[avec Gide], 1891, p. 90).C'est un soir malade. Le vent s'est élevé du Rhône. Un orage doit boucher le défilé de Mondragon (Giono,Colline,1929, p. 28).
4. [Pour qualifier une chose] Qui est malsain. Ils avaient vu laver des rougets dans l'eau malade des petits canaux si mornes et si doux (Barrès,Enn. Lois,1893, p. 127).Les ruelles malades et nauséabondes (Milosz,Amour. initiation,1910, p.220).J'peux pas. J'suis d'colombins! Il montre la pelle et le balai à l'aide desquels il accomplit le long des murs, penché dans une atmosphère malade, sa tâche de boueux et de vidangeur (Barbusse,Feu,1916, p. 86).
II. − Emploi subst. Personne atteinte d'une maladie, d'un traumatisme:
8. ... pour beaucoup de médecins, la médecine n'est qu'une industrie. Le but, c'est d'avoir le plus de malades possible. Pinel disait: «Une maladie étant donnée, trouver sa place dans un cadre nosologique»; ces médecins disent: «Une malade ou un malade étant donnés, en tirer le meilleur profit possible.» Cl. Bernard,Princ. méd. exp.,1878, p. 181.
Malade + adj.À l'hôpital les médecins faisaient passer l'arme à gauche aux malades trop détériorés, histoire de ne pas se donner l'embêtement de les guérir (Zola,Assommoir,1877, p.483).Oh! je serai une malade très docile, docteur, soumise comme un petit chien. Je passerai partout où il faudra, surtout si ce n'est pas trop douloureux (Romains,Knock,1923, ii, 5, p. 13).Les dyspeptiques, bien étudiés par Régis, sont des malades chagrins, anxieux, hypocondriaques, passionnés (Mounier,Traité caract.,1946, p. 220).
SYNT. Un grand malade; malade condamné, incurable, intransportable, perdu, mortellement atteint; malade abattu, affaibli, agité, amaigri, épuisé; malade contagieux, fiévreux; malade angoissé, capricieux, courageux, exigeant, patient.
Malade imaginaire. Personne dont la maladie n'existe que dans son imagination. Au fig. Les négociants de Gênes voulurent voir quelque préméditation dans l'attitude du jeune consul, à qui l'héritière eût peut-être échappé s'il n'eût pas joué ce rôle de malade imaginaire en amour (Balzac,Honorine,1843, p. 316).
Malade mental. Personne dont les facultés psychiques sont perturbées. On présente au sujet des photographies très étudiées, dont chacune porte le visage d'un malade mental caractéristique d'une des «pulsions» de base dégagées par Szondi (Mounier,Traité caract.,1946p. 21).
Absol. Malade mental et, p. ext., personne qui ne se conduit pas raisonnablement. Ceux qui avaient connu Nathalie à Limoges et à Barbazac la considéraient comme une femme un peu légère, soudain touchée par la grâce (...) ou simplement comme une malade hantée d'idées fixes (Chardonne,Dest. sent., iii, 1936, p. 173).À Sainte-Anne, un malade criait de son lit: «Je suis prince! Qu'on mette le Grand-Duc aux arrêts» (Sartre,Mots,1964, p. 173).
Malade + verbe ou loc. verb.
[Malade est suj. du verbe] Le petit malade touchait alors à la fin de sa convalescence, et, quoique privé de promenades, il déployait la gaieté d'un enfant en train de renaître à la vie (Bourget,Disciple,1889, p. 200).Le malade se lamenta: des élancements dans la nuque, des étouffements, l'envie de rendre (Mauriac,Baiser Lépreux,1922, p. 155):
9. Un malade avait manqué trépasser d'une typhoïde que le médecin n'avait pas su reconnaître à temps. Il guérit néanmoins, puis d'aventure, s'alita de nouveau. Le médecin d'accourir (...) il entama une vigoureuse offensive contre la typhoïde. Malheureusement, ce coup-là, c'était l'appendicite, et le pauvre malade en creva. J.-R. Bloch,Dest. du S.,1931, p. 181.
SYNT. Le malade a des convulsions, des troubles digestifs, des frissons, une syncope, des nausées, la fièvre; le malade éprouve des douleurs, de la difficulté à respirer, un mal de tête; le malade est atteint de pneumonie, de tuberculose; le malade consulte (un médecin); le malade guérit, se remet; le malade délire, crache du sang, étouffe; le malade sombre dans le coma, dans le gâtisme; le malade agonise, périt, succombe.
[Malade est obj. du verbe] Après avoir tâté le malade dans tous les sens, le médecin déclara qu'il n'y avait rien de fracturé. La jambe seule était fortement contusionnée (Theuriet,Mar. Gérard,1875, p. 188).Il examinait le malade: «Voulez-vous déboutonner votre chemise? (...) Comptez trente et un, trente-deux, trente-trois...» (Mauriac,Baiser Lépreux,1922, p. 196).
SYNT. Hospitaliser, isoler, opérer, panser, purger, saigner, soulager, ranimer, veiller, visiter un malade; guérir, sauver, soigner, traiter un malade; donner des soins à un malade; prendre soin du malade; condamner un malade; répondre d'un malade; mettre un malade en observation, à la diète; faire suivre un régime à un malade; faire la tournée des malades; administrer (les sacrements à) un malade.
Subst. + malade.Pâleur d'un malade; (être, se tenir, veiller au) chevet d'un malade; salle des malades (dans un hôpital); fantaisie(s) de malade. Malgré tous nos soins, l'état de la malade empirait: des symptômes aigus avaient succédé au marasme chronique. La fièvre redoublait, la tête était prise; les médecins appelaient cela une méningite (Reybaud,J. Paturot,1842, p.443).La tante Antoinette n'en finissait pas de mourir. Elle avait la méchanceté raffinée des très grands malades; elle occupait son interminable agonie de paralytique à ronger l'existence de sa fille Jeanne, qui la soignait et ne la quittait pas (Nizan,Conspir.,1938, p.221).C'était là un caprice de malade, aisé à satisfaire (Queffélec,Recteur,1944, p.136).
RELIG. Sacrement des malades. Synon. de extrême-onction. (Ds Bouyer 1963).
Malade de + subst. indiquant la nature, la cause de la maladie ou l'organe atteint.Les malades de l'estomac, du poumon, des reins. Il y a certains défauts qui préservent de quelques vices épidémiques: comme on voit, dans un temps de peste, les malades de fièvre quarte échapper à la contagion (Chamfort,Max. et pens.,1794, p. 29).
Au fig. Les malades d'amour, les trahis, les jaloux doivent sentir la même odeur (Colette,Naiss. jour,1928, p. 12).
Prononc. et Orth.: [malad]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin xes. malabde «celui qui souffre d'une quelconque altération de la santé» (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 463); 1155 malade (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 8070); 2. 1357 malade de «rendu malade par» ici fig. (Guillaume de Machaut, Le Confort d'Am., 2140 ds Œuvres, éd. E. Hoepffner, III, 76: A cuers qui damours sont malades); 1471 malade de maladie (J. de Roye, Chron. scand., I, 760 ds IGLF); 3. 1549 «dont le fonctionnement est gravement compromis» ung proces bien malade (Est.); 4. 1552 «qui subit des perturbations» ma raison fut malade (Ronsard, Amours, LI, 5 ds Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 4, p. 54); 1580 esprit malade (Garnier, Antigone, 587 ds IGLF); 5. 1563 «(d'un animal ou d'une plante) dont l'organisme, les organes sont déficients» (B. Palissy, Recepte, p. 42: les arbres ... sont malades en produisant). Du lat. d'époque impériale male habitus «qui est en mauvais état, malade» (Masurius Sabinius, Fragm. ds Aulu-Gelle, 4, 20, 11 ds TLL s.v. malus, 239, 31: equum male habitum), du lat. male, v. mal adv. et habitus part. passé de habere «être dans tel ou tel état»; le lat. class. aeger (post-class. aegrotus) a complètement disparu (cf. ital. malat(t)o, a. esp. malato). Fréq. abs. littér.: 10939. Fréq. rel. littér.: xixs.: a) 13330, b) 18496; xxes.: a) 16362, b) 15396. Bbg. Foerster (W). Étymol. rom. Malade. Z. rom. Philol. 1879, t. 3, pp.573-574. _ Quem. DDL t. 19. _ Sain. Arg. 1972 [1907], p.92, 233, 314. _ Thomas (A.) Nouv. Essais 1904, p.22.