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LIEUE, subst. fém.
A. − Mesure de distance approximativement égale à quatre kilomètres, en vigueur avant l'adoption du système métrique et variable selon les régions ou les domaines dans lesquels elle était usitée. Lieue de Paris, lieue royale d'Espagne. La terre est à dix millions de lieues de Vénus, et à trente-quatre millions du soleil (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 351).De Lorch à Bingen il y a deux milles d'Allemagne, en d'autres termes, quatre lieues de France, ou seize kilomètres dans l'affreuse langue que la loi veut nous faire (Hugo, Rhin,1842, p. 154):
1. On avait gardé l'usage de compter les distances itinéraires en lieues gauloises et non en milles romains. Le mot leuga « lieue », transformé en legua, devint lègue dans le Midi et en Bourgogne lieue [it. ds le texte] ou lève dans le Nord de la France. L'Hist. et ses méth.,1961, p. 693.
Lieue carrée. Aire d'un carré ayant une lieue de côté. Sept cent mille hommes sur un espace de deux lieues carrées (Chamfort, Max. et pens.,1794, p. 47).Il faut, pour une association de 1500 à 1600 personnes, un terrain contenant une forte lieue carrée, soit une surface de six millions de toises carrées (Fourierds Doc. hist. contemp.,1821, p. 159).
Lieue de pays. Lieue différant le plus souvent de la lieue commune (v. infra) et qui était en usage dans le pays ou la contrée dont il est question. Il ne nous restait que quatre lieues à faire, mais des lieues de pays sur un chemin détestable (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 31).Le soleil était déjà assez haut monté sur l'horizon qu'on n'avait fait que deux lieues, des lieues de pays, il est vrai, aussi longues qu'un jour sans pain (Gautier, Fracasse,1863, p. 49).V. infra ex. 2.
Lieue de poste. Mesure de distance valant 3.898 mètres. À partir de Semlin, les lieues de poste s'appellent lieues de chameau; pour quelques sous par jour, on peut monter sur ces animaux (Nerval, Lorely,1852, p. 38):
2. ... je leur ai répondu (...) que la comète ne leur ferait aucun mal, non plus qu'à l'univers : je leur ai donné, au surplus, ma parole la plus sacrée qu'elle était éloignée de la terre de plus de cinquante-quatre millions de lieues de poste (car nous avons nos lieues de pays qui sont le double plus longues); et je me suis trouvé d'accord sur ce point, à une demi-lieue près, avec M. Burkhart, membre de l'Institut de France. Jouy, Hermite, t. 1, 1811, p. 212.
Bottes* de sept lieues.
MAR.-GÉOGR.
Lieue commune (Littré), lieue de terre (Lar. Lang. fr., Lexis). Vingt-cinquième partie du degré terrestre soit 4 445 mètres. À cinq heures du soir, nous n'étions qu'à trois lieues de terre, par quarante brasses, fond de vase (Voy. La Pérouse,t. 2, 1797, p. 141).De Fécamp à Virville on comptait au moins vingt lieues; et vingt lieues de terre pour des paysans sont plus difficiles à franchir que l'océan pour un civilisé (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Mais. Tellier, 1881, p. 1184).
Lieue marine ou lieue géographique. Vingtième partie du degré terrestre et valant trois milles soit 5.555 mètres. Ce pirate colombien n'avait plus que quelques centaines de lieues marines à faire pour être à jamais à l'abri des représailles (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 34).Je savais (...) le nombre exact de verstes ou de lieues marines que donneraient ses cheveux noués bout à bout (Giraudoux, Siegfried et Lim.,1922, p. 130):
3. ... traverser ensuite, le plus promptement possible, le grand océan sur un espace de plus de 120 degrés de longitude, ou près de deux mille quatre cents lieues marines, parce qu'entre les tropiques, les degrés diffèrent peu de ceux du grand cercle. Voy. La Pérouse,t. 2, 1797, p. 215.
Adverbialement. Une/plusieurs lieue(s) à la ronde. Dans un rayon d'une/plusieurs lieue(s). Autrefois la chapelle était au milieu de la forêt (...) on y venait en pèlerinage de cent lieues à la ronde (Feuillet, Scènes et com.,1854, p. 214):
4. ... il en jouait [du biniou] du moins avec une violence telle, il en tirait des sons si longuement prolongés, si perçants, et qui déchiraient avec tant d'aigreur l'air sonore et calme de la nuit, que je ne m'étonnais plus, en l'écoutant, que le bruit d'un pareil instrument nous fût parvenu de si loin; à une demi-lieue à la ronde, on pouvait l'entendre... Fromentin, Dominique,1863, p. 12.
B. − P. ext., et souvent p. hyperb.
1. Petite distance indéterminée, mais qui paraît grande. Je vois comme un ver luisant, à une lieue de nous (Mérimée, Théâtre Gazul,1825, p. 88).De chapiteaux massifs où des bêtes hybrides Sur leurs trompes en l'air tenaient des pyramides. Des frontons d'une lieue allaient se prolongeant (Dierx, Lèvres cl.,1867, p. 171):
5. la baronne : Cécile, venez donc un peu ici; vous vous tenez à une lieue. Cécile approche son fauteuil. Est-ce que vous n'avez rien à me dire, ma chère? Musset, Il ne faut jurer,1840, II, 2, p. 139.
2. Souvent au plur. Distance grande ou indéterminée, mais qui paraît grande. Je vis lever le soleil sur le golfe, sur la campagne et sur la ville éblouissante de Naples. Je fus insensible et froid à ce spectacle que tant de voyageurs viennent admirer de mille lieues (Lamart., Confid., Graziella, 1849, p. 240).Ce terrible artiste [Le Tintoret] a couvert des lieues murales de sa peinture (Michelet, Chemins Europe,1874, p. 477):
6. Le brouillard était épais comme une soupe. Dans ce haut quartier désolé de bois sauvages et de terres vagues, on se sentait à cent lieues des personnes. Pourrat, Gaspard,1931, p. 230.
C. − Au fig.
Être à cent lieues/à mille lieues. Ne pas être présent par l'esprit; être comme absent. Il n'écoute pas, il est à mille lieues d'ici (Ac.1835-1935).
(Être) à cent/mille lieues de + compl. (Être) très éloigné de.
[Le compl. est un subst.] Les événements de la nuit étaient à mille lieues de sa mémoire (Stendhal, Abbesse Castro,1839, p. 159).Gabrielle : Je ne dois pas être à cent lieues de la vérité! (Bernstein, Secret,1913, I, 6, p. 8).Tout cela était chimère, un rêve de fou, à mille lieues du possible (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 77).
[Le compl. est un inf.] Et il s'en fut dans la tour carrée où je le suivis. J'étais à cent lieues de deviner à quoi il pensait (G. Leroux, Parfum,1908, p. 85).Même quand je regardais les choses, j'étais à cent lieues de songer qu'elles existaient : elles m'apparaissaient comme un décor (Sartre, Nausée,1938, p. 162):
7. Christophe, entraîné par les ouvriers, s'était jeté dans la bagarre, sans savoir qui l'avait causée. Il était à cent lieues de penser qu'Olivier s'y trouvait mêlé. Il le croyait bien loin déjà, tout à fait à l'abri. Rolland, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p. 1324.
Sentir, flairer qqn, qqc. d'une lieue. Deviner, pressentir la présence, l'arrivée de quelqu'un, de quelque chose à une certaine distance. Il n'oubliait point les renards... Ceux-ci étaient ses ennemis jurés. (...) il les pourchassait avec acharnement. De la cuisine même, toutes portes fermées, le soir, occupé à broyer un os, il les devinait, il les sentait d'une lieue (Pesquidoux, Chez nous,1923, p. 169):
8. Le docteur dit : « Ah! je l'avoue, personne n'a l'esprit plus sybarite que moi. J'endurerai avec patience la conversation d'un paysan idiot, d'un crocheteur ivre, d'un matelot à l'hôpital, d'une vieille femme malade, enfin une bête tant qu'il vous plaira, mais un sot, jamais! je flaire le sot d'une lieue ». Vigny, Journal poète,1844, p. 1220.
Sentir le, la, son, sa (...) d'une lieue. Laisser deviner facilement ses origines, sa nature, ses desseins par son aspect, son comportement. À qui diantre en veut ce baragouineur d'Italien? Le voilà qui nous quitte pour aborder un autre groupe. Il sent l'espion d'une lieue (Musset, Fantasio,1834, I, 2, p. 184).L'aînée, qui était muette, babille maintenant sans cesse, mord et jappe sous l'aile de son mari : personne n'a le compliment plus venimeux; ses répliques sentent d'une lieue Figaro et Dorine (Taine, Notes Paris,1867, p. 80):
9. Ses jambes grêles, mais nerveuses, s'épanouissaient dans de magnifiques bas de coton mouchetés, qui sentaient d'une lieue la contrebande anglaise. Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 46.
Prononc. et Orth. : [ljø]. Homon. lieu. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 liue « mesure de distance » (Roland, éd. J. Bédier, 688); 1704 lieue marine (Trév.); 2. 1671 sert à indiquer une grande distance (Mmede Sévigné, Corresp., 18 févr. éd. R. Duchêne, t. 1, p. 163 : Ce qui a rapport à vous de cent lieues loin m'est plus agréable qu'autre chose); 3. 1775 p. exagér. « distance inférieure à une lieue, mais qui paraît très grande » (Beaumarchais, Le Barbier de Séville, III, 11 ds Littré). Du lat. leuca, leuga, donné comme mot gaulois par les auteurs latins, v. TLL t. 7, 2, col. 1196, 76. Fréq. abs. littér. : 3 869. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 11 511, b) 6 311; xxes. : a) 2 876, b) 1 518.