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ENTENDEMENT, subst. masc.
A.− PHILOSOPHIE
1. [P. réf. à la théorie de Descartes] Faculté de comprendre, de saisir l'intelligible par opposition aux sensations. Je vois une imagination déréglée, mais un entendement réglé (Chateaubr., Génie,t. 1, 1803, p. 247).Pour saisir son objet, l'entendement le transforme en sa propre substance (Blondel, Action,1893, p. 117):
1. ... il [Corneille] le transpose [ce qui est accessible aux sens] de la sphère visuelle dans celle de l'entendement, mais d'un entendement net, étendu, sans vapeur, non nuageux, de cet entendement clairement défini, bien qu'un peu nu, tel que va le circonscrire et l'éclairer philosophiquement, dans son Discours de la Méthode et ailleurs, Descartes... Sainte-Beuve, Nouveaux lundis,t. 7, 1863-69, p. 262.
2. Spéc. [P. réf. à la théorie de Kant] Fonction mentale qui au moyen des catégories coordonne les données de l'expérience, l'interprétation finale étant l'œuvre de la raison (d'apr. Foulq.-St-Jean 1962). Les cadres de l'entendement; les lois de l'entendement. Mais unité et multiplicité ne sont que des vues prises sur ma personnalité par un entendement qui braque sur moi ses catégories (Bergson, Évol. créatr.,1907, p. 258).Le schéma kantien d'un entendement informant, ordonnant du dehors une matière qui lui serait fournie (Marcel, Journal,1914, p. 102).
3. P. ext. Ensemble des facultés discursives de l'esprit (d'apr. Lal. 1968). Ce qui est simple au regard de notre entendement ne l'est pas nécessairement pour notre volonté (Bergson, Deux sources,1932, p. 51).Dieu produit l'homme suivant des techniques et une conception (...). Ainsi l'homme individuel réalise un certain concept qui est dans l'entendement divin (Sartre, Existent.,1946, p. 20):
2. « ... Il vaudrait bien mieux raisonner correctement à la manière d'Euclide. Et, finalement, si votre entendement, comme vous dites, n'égale point le triangle d'Euclide, je ne puis que le regretter. » Alain, Propos,1922, p. 358.
B.− Cour. [Correspond à entendre II]
1. Faculté/action de comprendre, de saisir intellectuellement ou par le cœur la nature, la portée, la signification d'un être ou d'une chose.
a) Aptitude à comprendre. C'est fort intéressant. Cependant, cela dépasse mon entendement de femme (Camus, Caligula,1944, II, 6, p. 43).
Dépasser, passer l'entendement; échapper à l'entendement. Être incompréhensible à tout le monde ou, p. exagér., simplement extraordinaire, difficile à admettre. Impression de sécurité profonde, voisine de cette paix qui passe l'entendement et dont il est question dans la Bible (Green, Journal,1932, p. 119).La façon que je restais pour compte en dépit de tant d'efforts, de sacrifices extraordinaires, c'était pas imaginable!... Ça dépassait l'entendement! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 369).
b) Action de comprendre. Vous jouiez au bridge, interrompit Laetitia, et l'on voit briller sur son visage le miracle de l'entendement (Toulet, Almanach,1920, p. 114):
3. Ces êtres autour de lui qui avaient à moitié ou complètement perdu le sens commun, bredouillant, riant, criant, discutant, semblaient se comprendre hors de toute logique. Et lui était exclu de cet entendement. Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 75.
c) Compréhension de quelque chose.
[Suivi d'un compl.] Elle [Solange] lit très-bien, avec beaucoup d'entendement des règles que vous lui avez données (Sand, Corresp.,t. 1, 1832, p. 235).La psychologie de la forme définira simplement l'entendement des symboles par la capacité toute physique de transposer des réactions acquises d'un domaine de signes à un autre (J. Vuillemin, Être et trav.,1949, p. 149).
[Suivi d'un adj. précisant le domaine] La sensible n'est pas, pour notre entendement musical, une note primitive, mais une note dérivée, par voie d'altération, de la tonique qu'elle remplace (Laloy, Aristoxène,1904, p. 370).
2. P. ext. Ensemble des facultés intellectuelles.
a) [L'esprit en tant que siège des facultés intellectuelles] Frapper l'entendement. − Si tu voulais être un peu plus comme les autres, on te saurait plus de gré de ce que tu as de plus qu'eux dans ton entendement (Sand, Pte Fad.,1849, p. 155).Cette façon de s'aimer ne pouvait lui entrer dans l'entendement (Zola, Joie de vivre,1884, p. 1123).Mettez-vous tout ça dans l'entendement (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 149).
[Dans des expr. fig., assimilé à un organe] Brouiller, détraquer l'entendement. Réfléchissez, ne fermez pas vos oreilles et votre entendement, quand vous êtes animée par la passion (Goncourt, Journal,1892, p. 300):
4. ... sur l'instant, j'étais fort loin de tout comprendre. Mais ces mots et ces cris bizarres n'eussent-ils pas suffi pour m'ouvrir l'entendement qu'y seraient parvenus, sans doute, les commentaires chuchotés que j'en percevais chez nous. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Notaire du Havre, 1933, p. 81.
Rem. On rencontre ds la docum. le synon. pop. entendoir (cf. comprenoir, comprenette) : [Baptiste] avait l'entendoir bouché de nature sur certaines pratiques secrètes [des femmes] (M. Stéphane, Ceux du trimard, 1928, p. 126), avec la graphie entendouère : − « Ah! quelle tête tu as, toi! Quelle entendouère! (Bourget, Monique, 1902, p. 48).
b) Capacités intellectuelles d'une personne. Un entendement borné, vif. Je donne mon avis, sire, timidement : je suis d'église, et n'ai que l'humble entendement d'un pauvre clerc (Hugo, Légende,t. 2, 1859, p. 501):
5. ... Napoléon avait des lacunes dans le génie : son entendement ressemblait au ciel de cet autre hémisphère sous lequel il devait aller mourir, à ce ciel dont les étoiles sont séparées par des espaces vides. Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 2, 1848, p. 648.
Un homme d'entendement, de bon entendement (vieilli). Synon. un homme intelligent, entendu.Il [le drogman] est très expérimenté et de bon entendement (Flaub., Corresp.,1850, p. 188).Personne, au temps de saint Louis, n'aurait eu l'idée d'envoyer à la bataille un homme de savoir et d'entendement (France, Lys rouge,1894, p. 106).
SYNT. Entendement obscurci, obtus, sain, subtil; faible, petit entendement; les ténèbres d'un entendement.
P. méton. Personne (cf. cerveau I A 3, esprit).La science [au XVIIesiècle] était regardée comme une révélation qui ne descendait que dans quelques entendements privilégiés (Jouffroy, Mél. philos.,1833, p. 21).
En partic. Aptitude à raisonner, bon sens. Avoir perdu l'entendement (Ac. 1798-1932). ... Quelque affreux délire A-t-il à mon époux ravi l'entendement? (Moréas, Iphigénie,1900, III, 4, p. 100).Il fallait avoir peu d'entendement pour rire à tout bout de champ comme je faisais (France, Pt Pierre,1918, p. 219).
Rem. Dans ce sens entendement a été remplacé dep. le mil. du xixes. dans la lang. cour. par intelligence (cf. Taine, Intellig., t. 1, 1870, p. 1). Le mot est resté vivant dans qq. expr. et on le rencontre également chez des aut. à tendance régionaliste (p. ex. Sand), archaïsante (p. ex. Hugo) ou class. (p. ex. France). L'arch. produit parfois un effet com. Dehors, dans le jardinet (...), nous entonnâmes une bonne prise d'air afin de nous rafraîchir l'entendement (Arnoux, Rêv. policier amat., 1945, p. 205).
C.− Régionalismes
1. Régionalismes : Berry, Vendômois, Canada. [Correspond à entendre II A 2 b] Entente, accord, pacte. La famille Fadet était réputée avoir tel entendement avec le diable, qu'on ne pouvait pas être bien assuré qu'il n'en fût rien (Sand, Pte Fad.,1849, p. 78).
2. Régionalismes : Normandie. [Correspond à entendre III] Volonté. Il [Matthieu] se toucha le bras en souriant. « Ça ne fait mal que trois jours, » répondit Hopsor, comme ragaillardi par les souvenirs, « à ton entendement, mon gâs! » (La Varende, Amours,1944, p. 74).
Prononc. et Orth. : [ɑ ̃tɑ ̃dmɑ ̃]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Début du xiies. « intelligence » (Psautier d'Oxford, CXVIII, 125, éd. F. Michel, p. 193). Dér. du rad. de entendre* au sens de « comprendre »; suff. -(e)ment1*. Fréq. abs. littér. : 999. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 431, b) 793; xxes. : a) 876, b) 1 220. Bbg. La Charité (R.C.). The Concept of judgement in Montaigne. The Hague, 1968, X-149 p. − Lew. 1960, p. 75.