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DIVINISER, verbe trans.
A.− Attribuer la nature divine à; reconnaître pour divinité. Diviniser la nature. Synon. plus rare déifier (v. ce mot A) :
1. ... Virgile, dans l'Énéide, divinise toutes les puissances de la nature, (...) Le soleil, c'est Apollon; l'air, Junon; l'eau, Neptune; la terre, Cybèle; (...) La puissance animale est sous l'empire de Pan; mais celle des hommes est, elle seule, sous celui de plusieurs divinités. Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 123.
En emploi abs. Faire (de quelque chose) un dieu :
2. ... le platonisme populaire, à l'œuvre dans la religion romaine primitive, (...) consiste à diviniser, à doubler d'un absolu la réalité de chaque être. (...) l'esprit mystique qui déifie chaque chose a du bon, et même, en un certain sens, du vrai. Ruyer, Esquisse d'une philos. de la structure,1930, p. 224.
Spécialement
1. [Dans certaines religions polythéistes (cf. dieu, 1resection I A spéc.); le compl. d'obj. désigne un être humain ou un animal] Élever au rang d'un dieu. Chaque canton divinise un animal, en honore et sert un représentant qu'on momifie à sa mort (Barrès, Cahiers,t. 6, 1907-08, p. 220).Une religion fut inventée, les morts furent divinisés, les tombeaux furent leurs temples et leur culte fut réglé suivant des rites (Gaultier, Bovarysme,1902, p. 146):
3. Son esprit naturellement religieux avait été d'instinct aux deux premières bêtes divinisées par l'homme : le chat et le taureau. Montherlant, Les Bestiaires,1926, p. 490.
2. [Dans une perspective monothéiste, en particulier dans la dogmatique chrétienne (cf. dieu 1resection IB; le compl. d'obj. désigne un être hum. ou un attribut de la pers. hum.)] Faire participer de la nature divine, associer à la vie divine, sanctifier. Synon. déifier (v. ce mot A spéc.).Elle [la mort] satanise ou divinise l'homme, et le rend à la mort ou à la vie éternelles (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 261):
4. ... il [l'homme] veut la joie sans l'ascèse; c'était vouloir porter du fruit sans être émondé, ni vivifié dans sa sève par celui dont la grâce et les dons peuvent seuls diviniser l'homme. Maritain, Humanisme intégral,1936, p. 33.
En emploi pronom. à sens passif. Ainsi dans l'ordre céleste, où nos affections nous suivent, sans doute, et se divinisent et participent de l'amour de Dieu pour les hommes (E. de Guérin, Journal,1840, p. 321).
P. oppos., en emploi pronom. réfl. [Le suj. désigne un être hum.] Se faire dieu, se donner un caractère divin. Synon. déifier (v. ce mot A emploi pronom. réfl.)
5. Ou bien il [l'homme] se divinise lui-même, libre et tout puissant, joyeux et déjà glorieux dans sa fin. Ou bien angoissé, il accroche sa destinée future au sacrifice d'un Dieu, en la mort duquel il renonce à sa destinée présente. J. Vuillemin, Essai sur la signification de la mort,1949, p. 314.
B.− P. ext. [Dans le domaine relig., le compl. d'obj. désigne une chose abstr.] Donner un caractère sacré à... Les payens ont divinisé la vie, et les chrétiens ont divinisé la mort; tel est l'esprit des deux cultes (Staël, Corinne, t. 1, 1807, p. 153).Ce rôle de la femme divinisé dans la Vierge Marie éclatait dans sainte Menne (Barrès, Cahiers, t. 7, 1908-09, p. 302).
Emploi pronom. à sens passif. − « Mon père, la parole de Dieu se divinise encore en passant par votre bouche » (Péladan, Vice supr.,1884, p. 253).
C.− Au fig., souvent péj.
1. Diviniser qqc.Lui accorder une grande importance; lui donner une valeur absolue, un caractère sacré; l'exalter, magnifier, vénérer. Synon. déifier (v. ce mot B).Diviniser la chose écrite, diviniser le malheur; diviniser la raison/déifier l'irrationnel (cf. déifier ex. 3).Il ne s'agissait pas de renoncer à l'égoïsme; il s'agissait de le relever, de l'élargir, de l'exalter, de le diviniser (Jouhandeau, M. Godeau,1926, p. 278):
6. ... ce mythe du rêve comporte de périlleuses tentations. On peut en venir à diviniser l'inconscient, à renier l'autre moitié de la vie... Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 399.
2. Diviniser qqn.En faire un dieu (par amour, par admiration, etc.) (cf. dieu, 1resection III).Vois ces penseurs que nous divinisons (Hugo, Contempl.,t. 1, 1856, p. 16):
7. ... l'amour véritable, tel à la vérité que le conçoivent bien peu d'hommes, cet amour qui est une religion, qui divinise l'être aimé, qui vit de dévouement et d'enthousiasme et pour qui les plus grands sacrifices sont les plus doux plaisirs. Hugo, Lettres à la fiancée,1821, p. 53.
Emploi abs. Faire Dieu. Marcher seul affranchit; penser seul divinise (Barrès, Cahiers,t. 1, 1896-98, p. 151).
Emploi pronom. réciproque, par dérision :
8. ... ils s'appelaient les disciples de l'art pour l'art. Selon ces naïfs, l'art pour l'art consistait à se diviniser entre eux, à ne point aider le hasard qui ne savait même pas leur adresse, et à attendre que les piédestaux vinssent se placer sous leurs pas. Murger, Scènes de la vie de bohème,1851, p. 7.
3. Diviniser qqc. ou qqn.L'idéaliser. L'âme enthousiaste, grande, belle, embellit, agrandit, divinise tout ce qu'elle touche (Amiel, Journal,1866, p. 73).Tandis que les vieux poètes tâchent à diviniser leurs figures, on a vu qu'il [M. Zola] animalise les siennes (Lemaitre, Contemp.,1885, p. 283).
Emploi abs. :
9. Figurez-vous la bacchante la plus insensée dans le dévergondage des poses les plus lubriques, folle de vin et de cantharides, mais sur le corps de qui, trahi de partout avec l'impudence du marbre et la chaleur de la vie, est drapé un vêtement lumineux, une tunique miraculeuse dont les plis ne savent rien cacher, mais divinisent. C'est Titien peignant des bas-reliefs antiques avec son pinceau trempé dans toutes les puretés de la lumière. C'est Lucrèce parlant si majestueusement de l'amour animal des êtres... Barbey d'Aurevilly, Memorandum 1,1837, p. 160.
Emploi pronom. réfl. :
10. ... elle sait bien, la femme, qu'elle n'a rien à te donner en échange de tant d'amour. Plus habile que les autres, elle ne se livre pas, elle se gaze. Elle se refuse, elle se divinise. Sand, Lélia,1833, p. 290.
Rem. On rencontre ds la docum. a) Divinisable, adj. Qui peut être divinisé ou se diviniser. La contemplation et la chasteté doivent tendre, ainsi, à dominer légitimement sur le travail agité et la possession directe. Ceci est la « dérive » générale de la matière vers l'esprit. Ce mouvement doit avoir son terme. Un jour, toute la substance divinisable de la matière aura passé dans les âmes (Teilhard de Ch., Milieu divin, 1955, p. 128). b) Divinisateur, trice, adj. Qui a la faculté, le pouvoir de diviniser. La mort du péché nous prive de la connaissance, au moment même où elle nous en annonçait les puissances divinisatrices (J. Vuillemin, Essai signif. mort, 1949, p. 244).
Prononc. et Orth. : [divinize], (je) divinise [divini:z]. Ds Ac. 1762-1932. Étymol. et Hist. 1. 1581 « mettre au rang des dieux, de Dieu » (P. de La Coste, Sermons, 153b, éd. 1598 ds Rom. Forsch. t. 32, p. 50); 2. av. 1660 « exalter » (Scarron, Poésies, s. réf. ds Le Roux : Que vous m'avez scandalisé Quand vous m'avez divinisé). Dér. de divin*; suff. -iser*. Fréq. abs. littér. : 245. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 447, b) 300; xxes. : a) 261, b) 339.