Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
ANNIHILER, verbe trans.
I.− Emploi trans.
A.− DR. [L'obj. désigne un acte, une donation, un testament, une loi] Rendre de nul effet. Synon. abroger :
1. Lorsque la législation des douze-tables, tombée trop tôt en désaccord avec les mœurs, se trouva, sinon abrogée, du moins presque annihilée par le droit prétorien, la jurisprudence dut acquérir une plus grande complication en perdant de sa régularité. Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 407.
B.− Domaine matériel ou moral.[Le compl. désigne une pers. ou une chose] Réduire à néant, détruire radicalement :
2. ... la matière est, comme l'esprit, indestructible et éternelle; (...) Les machines les plus formidables ne pourront pas anéantir un grain de sable. Dieu lui-même n'annihile rien, car il est éminemment créateur; il transforme, mais il ne détruit jamais. Du Camp, Mémoires d'un suicidé,1853, p. 239.
3. On ne transporta pas l'École Normale en Sorbonne. Non. Il eût fallu y transporter Brunetière. Non, mes enfants, on supprima l'École Normale; on annula, on annihila l'École Normale. Ne pâlissez point, mes enfants, on devait la rétablir quelques instants après. Péguy, L'Argent,1913, p. 1179.
4. Maintenant? Que veux-tu? Que veux-tu, dis-moi? Me supprimer à mon tour? Mais c'est évident! Voilà! C'est simple! Profiter! ... Attendre! ... Saisir le moment favorable! ... Détente ... Confiance ... et m'occire! ... m'abolir! ... m'annihiler! ... Voilà ton programme! ... Où avais-je l'esprit? Ah! décidément Ferdinand! Ta nature! ton destin sont plus sombres que le sombre Érèbe! ... Ô tu es funèbre Ferdinand! sans en avoir l'air! Céline, Mort à crédit,1936, p. 453.
5. Souvent je me suis dit, messieurs, que si la critique avait le pouvoir magique d'effacer, d'abolir ce qu'elle condamne, et que si ces arrêts, s'exécutant à la rigueur, pouvaient annihiler ce qu'elle juge déplorable ou nuisible, les destins de la littérature en seraient fâcheusement affectés. Valéry, Variété 4,1938, p. 41.
En partic. Réduire à rien la volonté ou la personnalité de quelqu'un, par une paralysie des facultés, un engourdissement moral ou intellectuel :
6. Les eaux du Niger sont à leur étiage, et le vaste fleuve ne présente plus qu'une quantité de minuscules bras peu profonds que franchissent à gué les troupeaux, à la tombée du jour. L'été s'étale sur la plaine. Incapable de mouvement, de volonté, de pensée, je me laisse annihiler devant cette profuse splendeur. Gide, Journal,1944, p. 267.
7. Hier soir, dîner chez MmeMuhlfeld (...) Sentiment d'horrible tristesse : fuir ces gens arrivés, ces personnalités dévorantes qui vous annihilent, vous acculent au néant. Souffrance dans le désert. Une seule lumière : du côté de Dieu. Mauriac, Écrits intimes,Du côté de chez Proust, 1947, p. 160.
II.− Emploi pronom. réfl. [Le suj. désigne une pers. explicite ou implicite] Réduire à néant sa personnalité, en diminuant volontairement son amour-propre, son activité, etc. :
8. Sainte Catherine expose aussi que Jésus n'interdit le ciel à personne, que c'est l'âme même qui, s'estimant indigne d'y pénétrer, se précipite, de son propre mouvement, dans le purgatoire, pour s'y modifier, car elle n'a plus qu'un but, se rétablir dans sa pureté primitive; qu'un désir, atteindre à ses fins dernières, en s'anéantissant, en s'annihilant, en s'écoulant en Dieu. C'est une lecture probante, grogna Durtal, ... Huysmans, En Route,t. 1, 1895, p. 262.
9. ... le plus remarquable dans sa manière [de Mmede Loynes] un des secrets de son art amical consistait à s'effacer, à s'annihiler, à devenir, pour ceux qui la fréquentaient, une auditrice infiniment compréhensive... L. Daudet, Salons et journaux,1917, p. 18.
DÉR.
Annihiliste, adj.Rare, dans un texte philos.[En parlant d'une doctrine] Qui enseigne l'anéantissement final de l'âme, son annihilation : ,,... leurs conclusions panthéistes, optimistes, annihilistes, ôtent tout intérêt à l'histoire réelle de la vie.`` (Renouvier, Essais de crit. gén.,3eessai,1864, p. 149).Suff. -iste*.
PRONONC. : [an(n)iile], j'annihile [ʒan(n)iil]. Passy 1914, Dub., Pt Rob. et Pt Lar. 1968 transcrivent le mot avec un seul [n]. Barbeau-Rodhe 1930, Harrap's 1963 et Warn. 1968 donnent la possibilité d'une prononc. avec [n] et [nn] (cf. aussi Fouché Prononc. 1959, p. 317). Passy 1914 est le seul à noter le mot avec un h aspiré : anihile. Fér. 1768 et Fél. 1851 transcrivent le mot avec un seul [n], les autres dict. notent 2 [n]; Ac. 1835 : ,,on fait sentir les deux n.`` Enq. : /aniil/.
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1302 dr. part. passé adjectivé annillee « réduire à néant, annuler » (Ch. des Comptes de Dole, O 124, A. Doubs ds Gdf. Compl. : Donacion enffrainte, quassee et annillee); 1315 anichiller (Jumieg., Vimout, A. S.-Inf., ibid.), qualifié de vieux ds Trév. 1752; 1484 annihiler « abolir (une institution) » (Juin 1484 Ord., XIX, 368, ibid.). Empl. princ. comme terme de dr. (cf. ex. ibid. et Brunot t. 4, p. 26), et usité au xviiies. par les philosophes ds les discussions sur le vide (Trév. 1752, 1771); 2. a) xives. anichiller « détruire (l'objet est un inanimé abstrait) » (Brun de la Montagne, éd. P. Meyer, 1040 ds T.-L. : Mais quant s'amour premiere ert a sa fin alee, Et que du tout en tout sera anichillee, La voulenté de moi sera renouvelee); b) 1370 adnichiller « id. (l'objet est un inanimé concret) » (A.N. K 49, pièce 444ds Gdf. Compl.); c) apr. 1350? s'anichiler « (en parlant d'une pers.) se détruire » (Hist. des trois Maries, ibid.). Empr. au b. lat. adnihilare (ann-) « réduire à rien » (dep. Ves., St Jérôme, Ep., 106, 67 ds Blaise), attesté au sens 1. lat. médiév. annichilare (de ad et nichil, transcription médiév. du lat. class. nihil), jur. (1214, Van den Bergh, OB. Holland, I no244 ds Nierm., p. 45); au sens 2 a obj. inanimé (551, Gete, 29, 146 ds TLL s.v., 780, 61); au sens 2 b propre (xiies., Bruno Magd, Bell., 34, p. 36, 3 ds Mittellat. W. s.v., 223, 59); au sens 2 c l'obj. est une pers. (1180, Annal. Ottenb., [MG Script. XVII, p. 315, 42], ibid., 224, 16). Rem. La 1reattest. fr. en 1280 (J. de Meung, Rose, v. 20677-680 ds Lacurne, s.v. adnichiler : Chloto qui la quenouille porte Et Lachesis qui les filz file : Mais Atropos si anichile ce que les deux peuvent filer) ne semble pas devoir être retenue, cette leçon n'étant pas mentionnée dans l'éd. E. Langlois (t. 5, vers 19770 : Mais Atropos ront e descrie), ni dans l'éd. F. Lecoy (t. 3, vers 1940 : mes Atropos ront et descire), et les manuscrits utilisés par Lacurne ne datant que des xives. et début xves. (Langlois, Manuscrits du roman de la Rose, Paris, 1910, p. 5, 61 et 71).
STAT. − Fréq. abs. littér. : Annihiler. 126. Annihiliste. 1.
BBG. − Fromh.-King 1968. − Laf. Suppl. 1878. − Le Roux 1752. − Noter-Léc. 1912.