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ALOURDIR, verbe trans.
I.− Emploi trans.
A.− Sens physique. Rendre lourd, plus lourd :
1. ... l'humidité des murs semblait alourdir ses vêtements, qui devenaient plus pesants à ses épaules. É. Zola, Thérèse Raquin,1867, p. 82.
B.− P. anal. et au fig.
1. [Le compl. désigne une pers., une partie de son être physique ou moral] Rendre moins alerte, engourdir :
2. Au fond, il était un peu hébété, la fatigue alourdissait ses membres et ses pensées. Il rentra et s'endormit profondément. É. Zola, Thérèse Raquin,1867p. 79.
3. Il prit ainsi l'habitude de la brasserie où le coudoiement continu des buveurs met près de vous un public familier et silencieux, où la grasse fumée des pipes endort les inquiétudes, tandis que la bière épaisse alourdit l'esprit et calme le cœur. G. de Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Monsieur Parent, 1886, p. 612.
2. [Le compl. désigne une chose]
a) Rendre oppressant, pénible à supporter physiquement :
4. Un fort parfum d'alcool, de houblon, de tabac et de sueur alourdissait l'atmosphère de l'estaminet. M. Van der Meersch, L'Empreinte du dieu,1936, p. 107.
En partic. [Le compl. désigne un aliment] Rendre lourd, indigeste :
5. Vous ne vous doutez pas combien, dans une existence, privée d'exercice, la santé se débilite surtout lorsque la nourriture est peu succulente, privée de viandes saignantes et alourdie par l'abus des farineux. J.-K. Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 218.
b) Rendre oppressant, pénible à supporter moralement :
6. L'impatience, l'attente déçue, l'incertitude du désastre alourdissaient l'angoisse. Chacun cherchait à s'aggraver encore l'avenir, et la proximité de la destruction semblait imminente. Ph.-A.-M. de Villiers de L'Isle-Adam, Contes cruels, Impatience de la foule, 1883, p. 168.
3. [Le compl. désigne une chose appréciée d'un point de vue esthétique] Rendre plein de lourdeur, inélégant :
7. ... lorsque nous le retrouvons vingt ans après, méconnaissable à première vue, il suffit de s'attarder un peu pour suivre en pensée les métamorphoses qui alourdirent ses traits. Le front est devenu immense, au-dessus des yeux qui expriment une infinie tendresse et où l'étonnement de jadis se nuance de mélancolie. L'abus de la bière et du vin ont beau empâter toute la partie inférieure de la face et environner le sourire d'une pesante matière, l'impression générale reste celle d'un homme qu'habite une croyance spirituelle d'une singulière candeur et qui reporte sur le monde visible le rayonnement d'une lumière intérieure. Tout le monde a été touché par l'émouvante beauté des traits de Novalis... A. Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 152.
En partic., dans le domaine de la crit. artistique, musicale et littér.Donner une impression de lourdeur, surcharge :
8. C'est [dans la musique de piano de Fauré] (...) la crainte parnassienne des redoublements qui alourdissent et empâtent, la sobriété dans l'emploi des registres extrêmes. A. Cortot, La Musique française de piano,1resérie, 1930, p. 145.
9. Fini la première partie de mon roman. Il y a tant de dialogues que cela ressemble à du théâtre, mais c'est ainsi que le livre s'est présenté à moi. Je ne veux à aucun prix l'alourdir d'explications. La page trop dense m'ennuie. Il faut qu'il y ait de l'air. J. Green, Journal,1949, p. 251.
[Le compl. désigne une action] Entraver :
10. Ces fidèles de la nouvelle religion s'opposeront à ce que plusieurs mineurs risquent leur vie pour le sauvetage d'un seul mineur enseveli. Car le tas de pierres, alors, est lésé. Ils achèveront le grand blessé, s'il alourdit l'avance d'une armée. Le bien de la communauté, ils l'étudieront dans l'arithmétique − et l'arithmétique les gouvernera. A. de Saint-Exupéry, Pilote de guerre,1942, p. 381.
II.− Emploi pronom.
A.− Sens plus rare. Devenir lourd :
11. L'oie engraisse et s'alourdit. Au bout d'un mois, elle ne marche plus qu'à peine. Son foie démesurément gros l'encombre. Elle souffle à grand bruit. J. de Pesquidoux, Chez nous,t. 1, 1921, p. 48.
B.− P. anal. et au fig.
1. [Le suj. désigne une pers. ou l'un des aspects de la pers. humaine] Devenir moins alerte, s'engourdir :
12. ... ma tête épuisée s'alourdissait. Je fis quelques pas et allai m'asseoir devant un secrétaire ouvert, près d'une autre croisée. A. de Musset, La Confession d'un enfant du siècle,1836, p. 144.
2. [Le suj. désigne une chose].
a) Devenir oppressant, pénible à supporter physiquement :
13. Tout près, tombés dans leurs propres fils de fer, des Allemands sont couchés, le corps en boule, et l'on dirait les grains d'un funèbre rosaire. (...) Dans l'ombre qui s'alourdit, le petit bleu râle toujours. C'est effrayant ce gamin qui ne veut pas mourir. R. Dorgelès, Les Croix de bois,1919, p. 212.
b) Devenir oppressant, pénible à supporter moralement :
14. Les bruits vagues se mouraient, des larmes étouffées, des jurons perdus; et, dans le silence qui s'alourdissait peu à peu, on entendait venir le sommeil de la faim, l'écrasement des corps jetés en travers des lits, sous les cauchemars des ventres vides. É. Zola, Germinal,1885, p. 1360.
3. [Le suj. désigne une chose appréciée d'un point de vue esthétique] Devenir plein de lourdeur, inélégant :
15. Écrivez, dès que vous aurez quelques minutes d'affilée, écrivez, ne laissez pas se rouiller, s'alourdir ce joli stylet de poète. P. Loti, Journal intime,t. 1, 1878-1881, p. 176.
Prononc. : [aluʀdi:ʀ], j'alourdis [ʒaluʀdi]. Enq. : /aluʀdi, aluʀdis/. Conjug. agir.
Étymol. ET HIST. − 1. xiies. d'apr. Dauzat 1964; 1219 d'apr. Bl.-W.5, réf. et sens non précisés, prob. fig., lourd* au sens propre n'étant attesté que dep. 1538; 1364 part. passé adjectivé, fig. « étourdi, stupide » (Guill. de Machault, Le Voir-dit, 90 ds Quem. t. 1 1959 : Car j'estoie tous estourdis, Tous pesans et tous alourdis) rare jusqu'à Fur. 1690 qui le qualifie de vieux; Ac. 1694 note : Il n'a guere d'usage qu'au participe; d'usage plus fréq. fin xviiie-xixes.; 1767 (Diderot, Salon de 1767, Lagrenée ds Dict. hist. Ac. fr. t. 3 1888, p. 8 b : il n'en est pas ainsi d'un art où le moindre intervalle mal ménagé fait un trou, où une figure trop éloignée ou trop rapprochée des deux autres allourdit ou rompt une masse); 2. 1831 propre « rendre lourd, pesant » (H. de Balzac, La Peau de chagrin, p. 63 : [...] les liens puissants enchaînent les pieds, alourdissent les mains). Dér. de lourd*; préf. a-1*; la rareté du mot av. le xviies. s'explique moins par l'existence de alorder (ca 1330 « abuser, tromper », B. de Seb., XIV, 931, Bocca ds Gdf., xvies. « étourdir, importuner » ds Hug.) et de eslorder « abêtir » (fin xiie-début xiiies., Gerv., Best., Brit. Mus. add. 28 260, fo99c ds Gdf.) que par la vitalité du verbe grever* et à un moindre degré des composés agrever et engrever (cf. la même situation des adj. grief et grevos en face de lourd); cf. aussi le verbe lordoiier « être, devenir lourd » xiiies. (Péan Gastineau, Vie de Saint Martin, éd. Söderhjelm, 5944 ds T.-L.).
STAT. − Fréq. abs. litt. : 252. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 49, b) 333; xxes. : a) 452, b) 578.
BBG. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Boiss.8. − Caput 1969. − Dup. 1961. − Fér. 1768.