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ACROBATE, subst.
I.− [En parlant de pers.]
A.−
1. SPECTACLES. Artiste de cirque, de music-hall, etc., qui exécute, en hauteur ou sur le sol, des exercices difficiles, plus ou moins périlleux. P. ext. Toute personne qui accomplit des prouesses du même ordre :
1. On continuera par les brillants exercices du jeune enfant Louis, âgé de quatorze ans; un prodige, Messieurs, des plus intéressants, qui fait le saut de carpe, et jongle avec des balles! (...) Enfin, ascension sur un câble de fer très-fin, par la vieille et célèbre acrobate Eugénie! à trente pieds de haut! costumée en génie de Mentana!... A. Glatigny, Le fer rouge,1870, p. 26.
2. C'était l'établissement de l'honorable Batulcar, sorte de Barnum américain, directeur d'une troupe de saltimbanques, jongleurs, clowns, acrobates, équilibristes, gymnastes, qui, suivant l'affiche, donnait ses dernières représentations (...). Cette représentation fut ce que sont toutes ces exhibitions d'acrobates. Mais il faut bien avouer que les Japonais sont les premiers équilibristes du monde. (...) Inutile de décrire ici les prodigieux exercices des acrobates et gymnastes de la troupe. Les tours de l'échelle, de la perche, de la boule, des tonneaux, etc., furent exécutés avec une précision remarquable. J. Verne, Le Tour du monde en quatre-vingts jours,1873, p. 131-133.
3. Les danseuses ne dansaient plus. Une jeune acrobate venait d'entrer, qui jonglait avec des poignards et marchait sur les mains entre des lames dressées. (...) l'attention des convives était tout entière attirée par le jeu dangereux de l'enfant (...). Cependant, la jeune acrobate continuait ses tours subtils et périlleux. Elle marchait sur les mains, la jupe retournée, les pieds pendants en avant de la tête, entre des épées tranchantes et de longues pointes aiguës. P. Louÿs, Aphrodite,1896, p. 143-144.
4. Plus loin, la promeneuse fut arrêtée par ceux qu'amusait un petit Pierrot debout sur le ventre d'une acrobate dont le corps à la renverse formait un arc. On regardait grossir les veines au front de la saltimbanque court-vêtue et haleter sa poitrine dans la guimpe sale. Sur les paillettes et le velours de ce maigre ventre tendu, Pierrot, leste, souriait et se trémoussait. En haut d'une chaise, Jocrisse battait le tambour. P. Adam, L'Enfant d'Austerlitz,1902, p. 474.
5. ... Baldi m'avait, par horreur du « mort », appris le whist et à tricher. « Jongleur, escamoteur, prestidigitateur, acrobate; les premiers temps que celui-ci vint chez nous, (...) j'étais affamé de merveilles, crédule et de tendre curiosité. Plus tard Baldi m'instruisit de ses tours; mais de pénétrer leur secret ne put effacer la première impression du mystère lorsque, le premier soir, je le vis tout tranquillement allumer à l'ongle de son petit doigt sa cigarette, puis, comme il venait de perdre au jeu, extraire de mon oreille et de mon nez autant de roubles qu'il fallut, ce qui me terrifia littéralement, mais amusa beaucoup la galerie, ... A. Gide, Les Caves du Vatican,1914, p. 740.
6. D'autres considèrent de préférence les acrobates, équilibristes et jongleurs, en qui, tout au contraire, on saisit la force des muscles jointe à la grâce et au naturel. Ainsi il est vrai que le maître de danse est maître de peinture, sculpture et mimique; mais aussi c'est l'acrobate qui est le vrai maître de danse; ... Alain, Système des beaux-arts,1920, p. 55.
7. L'acrobate symbolise à merveille la position de l'homme vis-à-vis de l'univers à ordonner. Il trompe la pesanteur qui l'entraîne, et la pesanteur même accroît, par un sublime paradoxe, l'aisance, la légèreté, la liberté de ses jeux. É. Faure, L'Esprit des formes,1927, p. 105.
8. On distinguait en Grèce les acrobates proprement dits, les schoenobates, les oribates et les neurobates. Les premiers, bras et jambes tendus, glissaient le long d'une corde raide sur laquelle ils appuyaient leur poitrine; les seconds tournaient autour de la corde; les derniers exécutaient sur une corde horizontale des pas de danse, des sauts, etc. Au xviesiècle, les acrobates avaient joint à leurs exercices précédents le saut périlleux. Aujourd'hui, l'on englobe sous le nom d'acrobates tous ceux qui exécutent en public des tours de force ou d'adresse : gymnastes, clowns, hercules, équilibristes, jongleurs, disloqués, désarticulés, désossés, hommes-serpents, etc. Lar. 20e.
9. Ça t'amuse, toi, les clowneries? « J'aime, dit-elle, les acrobates. » Et elle ferma les yeux. Edmond sentit alors tout ce qu'est la jalousie. On irait pas à Médrano, décidément. Pourquoi? À cause des acrobates? Tu sais, quand ils sont tout là-haut, là-haut, sur les appareils, prêts à faire un numéro très difficile, mais alors, très difficile... et on leur a jeté un mouchoir, et ils s'essuient les mains, et ils se balancent, assis négligemment sur une barre d'acier, et ils s'élancent, l'orchestre s'arrête. (...) Ils sont beaux, tu sais, les acrobates. Un peu monstrueux, parfois : les muscles du dos. Ceux qui travaillent sans filet, c'est très horrible. Mais c'est plus crâne. Maintenant, quand ils se laissent tomber dans le filet, ceux qui travaillent avec un filet, naturellement, c'est toujours très extraordinaire, comme des balles, ... L. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 382.
10. Le nom de jongleur s'applique indifféremment à des espèces de gens très diverses. Un jongleur, c'est le montreur qui promène des ours, des singes et des chiens savants; c'est l'écuyer qui voltige sur des chevaux; c'est l'acrobate, danseur de corde, qui sait aussi marcher sur les mains, lancer des couteaux, traverser des cerceaux à la course, avaler du feu et se désarticuler. E. Faral, La Vie quotidienne au temps de saint Louis,1942, p. 109.
11. Un nouveau métier, ça ne me fait pas peur. Mais je ne voudrais pas être paillasse ou monstre. Acrobate, ça m'aurait assez plu. Fil de feriste : épatant. R. Queneau, Pierrot mon ami,1942, p. 197.
12. Elle prenait un enfantin plaisir au spectacle. Quant à moi je le suivais à peine, déconcerté par trop de nouveauté; mais ne laissai pas d'être surpris par la souplesse, la prestesse et l'agilité des acrobates qui se risquèrent dans l'arène après que les choreutes, les danseuses, puis les lutteurs eurent cédé la place. Devant bientôt moi-même affronter le Minotaure, je m'instruisis beaucoup à observer leurs feintes et leurs passades propres à fatiguer et éberluer le taureau. A. Gide, Thésée,1946, p. 1423.
13. ... Cabral fit sortir des fers la plus mauvaise tête de l'escadre, un forçat irréductible, mais acrobate et contorsionniste fameux à Lisbonne, et l'amiral chargea cet homme banni d'aller prendre langue avec les anthropophages, (...) l'amiral qui le suivait dans sa lunette vit le garçon aborder, faire la roue, marcher sur les mains, faire un double, un triple saut périlleux au plus grand ébahissement des sauvages... B. Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 181.
2. MANUTENTION, arg.
a) ,,Aide-déménageur employé à l'époque du terme dans les moments de presse.`` (Rossignol, Dict. d'argot, 1901, p. 3); cf. également : A. Bruant, Dict. français-argot, Suppl., 1905, p. 462; Esn. 1965, date de 1reattestation 1901 :
14. Qu'est-ce qu'un acrobate? (...) Vous ignorez sans doute que c'est (...) le terme par lequel on désigne, dans la langue des déménageurs, non pas un athlète, capable de décrocher un lustre, la tête en base, avec ses pieds, mais tout simplement un compagnon engagé en supplément, un extra, comme on dirait dans le langage de la cuisine ou de l'hôtellerie. La Langue des métiers, Vie Lang., no4, juill. 1952, p. 11.
b) ,,Déchargeur de wagons (pop. 1930).`` (Esn. 1965).
B.− Au fig.
1. [En parlant des pers. considérées notamment dans l'exercice de leur spécialité : lettres, art oratoire, mus., plus rarement sc., pol.] Individu qui, par sa versatilité d'opinion, de conduite, ou par son habileté à manier les choses et les êtres, à jouer avec les difficultés, à travestir la vérité, etc. suscite le blâme, l'étonnement ou l'admiration :
15. − Ha! ça, mon cher, apprends ton métier, dit en riant Lousteau. Le livre, fût-il un chef-d'œuvre, doit devenir sous ta plume une stupide niaiserie, une œuvre dangereuse et malsaine. − Mais comment? − Tu changeras les beautés en défauts. − Je suis incapable d'un pareil tour de force. − Mon cher, un journaliste est un acrobate, il faut t'habituer aux inconvénients de l'état. H. de Balzac, Les Illusions perdues,1843, p. 402.
16. ... Hume ou tout autre acrobate réussira mieux en se faisant passer pour sorcier, possesseur d'un don surnaturel, que de dire que par l'étude il est arrivé à faire illusion; on aime toujours [mieux] croire au merveilleux qu'au réel. C. Bernard, Cahier de notes,1860, p. 156.
17. À table l'Astre noir était admirable (...). Jongleur de mots, acrobate d'idées. Il lançait à tour de bras des boules merveilleuses. L. Daudet, L'Astre noir,1893, p. 175.
18. À cet « âge d'or » du Double [de la Suite] succéda l'inévitable empiètement du virtuose sur le musicien, (...) de l'acrobate sur l'artiste : véritable « âge d'argent » contre lequel les compositeurs réagirent en écrivant eux-mêmes leurs variantes, ... V. d'Indy, Cours de composition musicale,1897-1900, p. 114.
19. Certainement il se fait un échange entre l'acrobate et le public; car d'un côté il met le spectateur en confiance, mais en retour ce jugement le porte; il ne se tiendrait point au milieu d'une panique; un cri le ferait tomber peut-être; mais aussi il a tellement disposé le public par sa danse arrondie et liée qu'un tel cri ne puisse plus sortir. Ainsi est l'homme du monde dans sa danse propre, sûr d'être agréable aux autres et à lui. Acrobate plus d'une fois, et bon acteur de vraie tragédie; ... Alain, Système des beaux-arts,1920, p. 56.
2. Pop., fam. Fantaisiste :
20. Bref, je suis exactement le contraire d'un acrobate, d'un évaporé. Je suis ce que l'on appelle un fils de famille. Et je m'en glorifie. J. Audiberti, Quoat-Quoat,1946, 2etabl., p. 66.
Loc. Bon dieu d'acrobate, ,,(...) vocatif(s) atroce(s) employé(s) communément de bonne amitié (pour reprocher) l'inhabileté et l'inutilité`` (Esn. Poilu 1919, p. 564); ,,espèce d'nœud, bon dieu d'acrobate``. (H. Barbusse, Le Feu,1916, p. 336)Faire l'acrobate, ,,avoir peu de sérieux quand il le faut`` (Ch.-L. Carabelli, [Lang. pop]).
II.− ZOOL. Mammifère marsupial, appartenant à la famille des phalangéridés, muni d'une membrane lui permettant de se suspendre, caractérisé par sa très petite taille et ses mœurs nocturnes, vivant essentiellement en Australie et en Nouvelle-Guinée (appelé aussi voltigeur, souris volante) :
21. J'avais admiré surtout chez M. Priest un petit acrobate sciurien, vivant, d'une espèce très rare; ses formes étaient si jolie, sa fourrure si belle que je ne pouvais me lasser de le regarder. Cet officier s'empressa de me l'envoyer; longtemps il fut mon compagnon de voyage, mais sans jamais s'apprivoiser. Dumont d'Urville, Voyage au Pôle Sud et dans l'Océanie,1842, p. 68.
Rem. 1. Acrobate est plus fréq. au xxes. qu'au xixes., notamment par son emploi dans le domaine des spectacles; ce qui pourrait s'expliquer par un renouvellement du goût esthétique (littér., pictural) avec l'apparition de l'école réaliste (l'acrobate devenant un sujet de l'art mod.). Il figure dans des œuvres présentant des reconstitutions hist. ou ayant un air d'antiq., dans des récits d'aventures, des romans pop., dans le théâtre de boulevard, ou même dans des ouvrages de crit. ou d'esthétique. 2. a) Assoc. paradigm. fréq. : acteur, artiste, baladin, bateleur, cavalier, cirque, clown, contorsionniste, danseur, écuyer, équilibriste, escamoteur, fantaisiste, fildefériste, funambule, gymnaste, hercule, homme-serpent, illusionniste, jongleur, loustic, lutteur, mammifère, marsupial, original, phalanger, phénomène, prestidigitateur, prodige, saltimbanque, sauteur, souris volante, trapéziste, troupe, ventriloque, virtuose, voltigeur; b) assoc. syntagm. fréq. : acrobate brillant, célèbre, extraordinaire, fameux, jeune, prestigieux, prodigieux, remarquable, etc.
Prononc. − 1. Forme phon. : [akʀ ̣ ɔbat]. Enq. : /akʀobat/. 2. Der. et composés : acrobatie, acrobatique, acrobatiser, acrobatisme.
Étymol. ET HIST. − 1. 1751 hist. anc. (Encyclop. t. 1 : Acrobates s.m. (Hist. anc.) espèce de danseurs de corde); 1835 terme gén. (Ac. : Acrobate, s. des deux genres. Danseur, danseuse de corde); 2. 1885 p. ext. « artiste qui fait des exercices au sol ou en hauteur » (Gde Encyclop. s.v. : Aujourd'hui, on englobe et l'on confond sous ce même nom d'acrobates, avec les danseurs de corde, les faiseurs de tours d'équilibre, les gymnastes, les clowns, les hercules forains, les faiseurs de trapèze, en un mot tous ceux qui font preuve de force ou d'adresse, de courage et d'agilité de quelque façon et par quelque procédé que ce soit, dans les exercices d'équilibre); d'où a) emploi fig. 1842 fam. péj. « personne habile » (A. Pommier, Crâneries et dettes de cœur, p. 153 : Mais vos auteurs, à vous, ce sont des acrobates, Des arlequins dansant et brandissant des battes...); b) p. anal. 1901 pop. « aide-déménageur » ds Esn. 1965; 1930 id. « déchargeur de wagons » ibid.; c) p. anal. 1820 zool., peu us. « mammifères marsupiaux », ainsi dénommés à cause de leurs qualités de grimpeurs et de voltigeurs. (Desmarest, Mammologie ou Description des espèces de mammifères, éd. Agasse, p. 37, 72egenre : 1oles pétauristes proprement dits, et 2oles acrobates). Empr. au gr. α ̓ κ ρ ο ́ ϐ α τ ο ς « qui marche sur la pointe des pieds ». Équivalent sém. du fr. acrobate : gr. σ χ ο ι ν ο ϐ α ́ τ η ς. [Dans le Ménagier de Paris, éd. Soc. Bibliogr. fr., t. 2, p. 124 : Menestrels huit francs, sans les cuillers et autres courtoisies; et feront le regart et les acrebades. Acrebade est obscur; représente-t-il une évolution pop. du même gr. α ̓ κ ρ ο ́ ϐ α τ ο ς? signifierait-il « évolution de funambule »?].
STAT. − Fréq. abs. litt. : 100.
BBG. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bouillet 1859. − Bruant 1901. − Esn. 1965. − Lacr. 1963. − La Langue des métiers. Vie Lang. 1952, p. 155. − Leloir 1961. − Mét. 1955. − Rey-Cottez 1968 t. 36, p. 144.