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ÉTAT, subst. masc.
I.− Manière d'être (soit stable, soit sujette à des variations) d'une personne ou d'une chose. Synon. caractère, degré, situation; anton. devenir, action, mouvement.
A.− Manière d'être d'une personne.
1. [État phys., psychique] S'enquérir de, être rassuré sur l'état (de santé) de qqn; un état alarmant, satisfaisant, stationnaire :
1. Je m'étonnais parfois que ma santé revînt si vite. J'en arrivais à croire que je m'étais d'abord exagéré la gravité de mon état; à douter que j'eusse été très malade, à rire de mon sang craché, à regretter que ma guérison ne fût pas demeurée plus ardue. Gide, Immor.,1902, p. 401.
SYNT. État de faiblesse, de fatigue; état nerveux; état normal, pathologique; l'état de ce malade nous cause (inspire) les plus vives inquiétudes; mon état ne me permet pas de me déplacer actuellement; ce malade est dans un état désespéré.
État général. Équilibre de la santé d'une personne, considéré en dehors de toute atteinte pathologique particulière. Faiblesse, troubles de l'état général; bon état général :
2. L'âge de l'individu peut, pour certaines vaccinations, être une contre-indication; son état de santé intervient également : un mauvais état général doit en principe faire surseoir à la vaccination; de même l'existence d'une infection en cours... QuilletMéd.1965, p. 273.
MÉD., PSYCHOL., PSYCH.
État de mal. Crises en série sans intervalle ou retour à la normale perceptible entre elles. État de mal épileptique, hystérique. En cas d'accès subintrants (état de mal) une saignée peut être tentée (Codet, Psych.,1926, p. 129).Il se crée un véritable état de mal rhumatismal (Barbier dsNouv. Traité Méd.,fasc. 2, 1928, p. 851).
État second. Trouble temporaire au cours duquel le sujet se livre à des actes (parfois antisociaux) sans rapport ou en opposition avec sa personnalité. Le malade, dans un véritable état second, part au hasard, se comportant extérieurement d'une façon qui peut sembler normale et, soudain, se retrouve, tout surpris, en un lieu inconnu (Codet, Psych.,1926p. 125).
Période d'état. Il est d'usage, depuis Hippocrate, d'admettre trois périodes dans l'évolution des maladies aiguës : la période de début, la période d'état, la période de déclinaison (Roger dsNouv. Traité Méd.,fasc. 1, 1926, p. 83).
Rem. Les dict. techn. récents et la docum. enregistrent également : état d'absence (cf. avoir des absences*), état de besoin ou de manque* (en partic. chez un drogué), état de choc*, état crépusculaire*.
État d'ébriété, d'ivresse; conduite en état d'ivresse :
3. Bachelard, à table, se conduisit d'une façon particulièrement malpropre. Il était arrivé dans un état d'ivresse avancé; car, depuis la perte de Fifi, il tombait aux écarts des grandes passions. Zola, Pot-Bouille,1882, p. 345.
Expressions
Souvent fam. Être dans un bel état (par antiphrase), dans un triste état, dans un état horrible (surtout physique). Ma bête l'envoie rouler [le sieur Grange], et l'escadron, quoi, lui passe dessus. Il paraît qu'on l'a relevé en triste état (Pourrat, Gaspard,1925, p. 179).Piteux*, piètre* état; être, (se) mettre dans un (tel, pareil) état.
[En parlant d'une femme] (Être) dans un état intéressant. Être enceinte. On les a pris dans le grenier (...) en considération de ce que le mari est malade et la femme dans un état intéressant (France, Bonnard,1881, p. 273).
2. [État affectif] État d'excitation, de sérénité, de tristesse; état d'accablement. [État intellectuel] État extatique, méditatif; l'état supérieur du yogi :
4. Les secours extérieurs paraissent bien nécessaires à l'homme, pour persister dans un certain état moral ou intellectuel donné, malgré toutes les variations organiques ou sensitives. Maine de Biran, Journal,1818, p. 149.
Expr. et loc.
Ne pas être dans son état normal. Agir d'une façon qui n'est pas conforme à sa manière d'être. Lucie, peux-tu parler ainsi de ton mari (...). Enfin, Dieu merci, tu n'es pas dans ton état normal (Aymé, Quatre vérités,1954, p. 70).
Être, se mettre dans tous ses états. Être, se mettre dans un état d'agitation extrême; s'affoler. La mère, dans tous ses états, le menace [le gamin] de le fouetter (E. de Goncourt, Faustin,1882, p. 81).
SYNT. État d'âme*, état de conscience*, état d'esprit*. Spéc., relig. État de grâce*; les âmes en état de péché mortel.
3. P. ext. Situation, condition d'une personne. État de dépendance, de misère; être réduit à l'état de mendicité :
5. Lorsqu'un homme cède à un autre le droit de disposer de ses bras ou de sa pensée asservie, il se trouve sur le plan social dans un état d'infériorité, de soumission ou d'esclavage. David, Cybern.,1965, p. 78.
Spéc., DR. Être, mettre, placer en état d'arrestation*. Un des membres a proposé que les administrateurs [des subsistances] fussent mis en état d'arrestation. Après une heure de discours, ils se sont réduits à arrêter qu'on nommerait six commissaires qui ne les perdraient pas de vue, qui les suivraient pas à pas dans toutes leurs opérations (Recueils textes d'hist.,1792, p. 61).
P. ext. Le 16 janvier 1820, Birotteau fut déclaré en état de faillite, par un jugement du Tribunal de Commerce de la Seine (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 408):
6. La Chambre, de son autorité, impose à une circonscription un représentant qu'un arrêt ayant la force de chose jugée déclare criminel. Cet arrêt dit que Malvy a méconnu, trahi les devoirs de sa charge, ce qui le constitue en état de forfaiture, et la Chambre impose à une circonscription ce député. C'est inouï. Barrès, Cahiers,t. 11, 1917-18, p. 390.
Rem. Qq. dict. enregistrent, avec la mention ,,class.``, le sens anc. de état « condition de vie, situation concrète dans laquelle s'est trouvée une personne ». Il, elle a traversé bien des états; des états extraordinaires.
4. Locutions
Être en état de + inf. Pouvoir, être capable de. Être en état de supporter qqc. Il était parfaitement en état de m'étrangler avec ses mains, s'il faisait un mauvais rêve (Mérimée, Dern. nouv.,1870, p. 132).Être en mesure de. Nous sommes dès à présent en état d'affirmer telle chose. Je suis en état de vous prouver que le matin du 10 août 1792 le peuple de Paris était encore royaliste (France, Bergeret,1901, p. 168).
Mettre en état de + inf. Rendre capable de, préparer à. Nous leur [aux populations] avons promis de les mettre en état de gérer elles-mêmes leurs propres affaires (Doc. hist. contemp.,1954, p. 199).
Être hors d'état de + inf. Sa blessure le met hors d'état de marcher pendant plusieurs semaines; être, mettre qqn hors d'état de nuire; être hors d'état de payer ses dettes.
Rem. 1. Pour la loc. en état de, qq. dict. gén. donnent, avec la mention ,,class.`` a) Disposé à. b) De manière à. Cf. en partic. Lar. Lang. fr. et Lexis 1975. 2. Les dict. enregistrent également l'emploi de état en gramm. : verbe d'état exprimant un état du suj. p. oppos. à verbe d'action. 3. On rencontre ds la docum. et ds qq. dict. spéc. l'emploi de état en philos. chez Comte, Philos. posit., t. 4, 1839-1842, p. 522 : loi des trois états. Système d'après lequel l'évolution de l'homme depuis sa petite enfance et celle de l'humanité dans son ensemble passeraient par : l'état théologique (ou fictif), l'état métaphysique (ou abstrait) et l'état positif (ou réel), ce dernier étant celui de la maturité et de la science. Quant à la nécessité de l'évolution, Auguste Comte en donne, avec la loi des trois états, qu'il formule en 1822, la définition la plus systématique. Les conclusions de Comte ressemblent curieusement à celles que le socialisme scientifique devait accepter (Camus, Homme rév., 1951, p. 241).
B.− Manière d'être d'une chose. Une marchandise en bon état; état de fraîcheur d'une chose. L'homme traversa la foule, se glissa sous l'auto, et la mit séance tenante en état de repartir (Radiguet, Bal,1923, p. 39):
7. Article 4 − Lors du départ du locataire ou du concessionnaire du droit au bail, les lieux sont restitués au propriétaire dans l'état où ils se trouvent, sans que celui-ci puisse exiger la remise des lieux dans leur état antérieur. Jocard, Tour. et action État,1966, p. 106.
SYNT. État d'abandon, de dégradation, de délabrement; un objet en parfait état de conservation; constater, faire l'état des lieux (cf. infra); vérifier l'état d'une charpente; l'état d'une fortune; l'état du ciel, de la mer, des routes, du temps.
Hors d'état de + inf. ou empl. absol. Un appareil, un véhicule hors d'état (de fonctionner). Hors d'usage, de service :
8. Il convient de visiter et de nettoyer (...) les clapets de cet appareil [niveau d'eau], sinon des incrustations pourraient les mettre hors d'état de fonctionner au moment opportun. Ser, Phys. industr.,1890, p. 145.
Mettre qqc. en état de + inf. Préparer. Les premiers ferronniers devaient préparer leur fer eux-mêmes, c'est-à-dire le mettre en état d'être forgé (Arts et litt.,1935, p. 2203).
Loc., absol. En état; en l'état (sous-entendu en état normal ou antérieur). Tenir une maison en état. Je fais une promenade (...) en attendant que ma chambre soit en état pour me remettre au fameux Poussin (Delacroix, Journal,1853, p. 41).Remettre en état. Réparer. Autour de lui [Patrice Hennedyck], le Nord se réveillait. On travaillait à remettre en état les usines. La ville grouillait d'activité (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 476).Rester, rendre en l'état; vendre en l'état; consommer qqc. en l'état (où la chose se trouve). Tel quel. Faites les morts, mes bons amis; tâchez que les choses restent en l'état, et attendez que nous soyons les maîtres... (Zola, E. Rougon,1876, p. 41).Après la mort de mon pauvre père... et le départ de MlleMorissot... tout était resté en état... Il vaut mieux que quelqu'un en profite (Hermant, M. de Courpière,1907, p. 4).
Rem. Qq. dict., et en partic. Ac., enregistrent l'expr. tenir une chose en état. a) ,,La tenir ferme de manière qu'elle ne se dérange pas. Il faut mettre des liens de fer pour tenir cette poutre en état``. b) ,,La tenir prête. Tenir un compte en état``.
Synon. de stade.L'état larvaire, embryonnaire :
9. Au contraire, un autre insecte, qui, chenille, a fatigué, tissé, filé, n'aura rien à faire plus tard qu'à conter fleurette aux roses. C'est monsieur le papillon. Pour la grande majorité, le dur travail est pour l'enfance, pour l'état de larve ou chenille. Michelet, Insecte,1857, p. 60.
Loc. À l'état + adj.; à l'état de + subst. Le soufre à l'état naissant; à l'état naturel; à l'état adulte, fœtal. Le plan de l'abbaye de Saint-Gall, exécuté vers l'année 820 (...) est un projet à l'état d'esquisse (Lenoir, Archit. monast.,1852, p. 24).Le besoin à l'état pur (Traité sociol.,1968, p. 372):
10. La science des êtres vivants en général, et de l'individu humain en particulier, n'a pas progressé aussi loin [que les sciences de la matière inerte]. Elle se trouve encore à l'état descriptif. Carrel, L'Homme,1935, p. 2.
SYNT. À l'état isolé, latent; à l'état endémique; à l'état vivant; consommer le poisson à l'état frais; une pierre à l'état brut; une plante qui croît à l'état sauvage.
L'état des choses, plus couramment état de choses. Une situation dans son ensemble à un moment donné. Aggraver, améliorer un état de choses; se plaindre d'un, remédier à un état de choses; il faut que cet état de choses cesse :
11. La science a tout à gagner elle-même à cette œuvre sociale [développement de la culture scientifique pendant les loisirs]. On se plaint partout de l'indifférence des pouvoirs publics à son égard, on dénonce la crise des laboratoires et celle des vocations désintéressées. Le moyen de changer cet état de choses, préjudiciable à la recherche, est de se concilier l'opinion publique en favorisant la vulgarisation scientifique. Civilis. écr.,1939, p. 2612.
État de fait*. Situation de fait.
État d'un pays, d'une économie :
12. Littéralement, nous avions fini par nous trouver en état permanent de crise politique. Dans la période de vingt et un ans qui sépara la fin de la Grande Guerre de l'irruption mécanique allemande, 20 hommes différents ont été à la tête du Gouvernement de la France. De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 600.
SYNT. État de guerre, état de paix; déclarer, décréter, proclamer l'état de siège, l'état d'urgence; mettre une ville en état d'alerte.
État des connaissances, de la science; dans, en l'état actuel, présent, de la production, des recherches, des travaux. Nous sommes si éloignés de connaître tous les agens de la nature, qu'il serait peu philosophique de nier l'existence des phénomènes, uniquement parce qu'ils sont inexplicables dans l'état actuel de nos connaissances (Laplace, Théorie analyt. probabil.,1812, p. 358):
13. La psychologie attend son Claude Bernard ou son Pasteur. Elle est dans l'état de la chirurgie à l'époque où les chirurgiens étaient des barbiers, de la chimie avant Lavoisier, au moment des alchimistes. Carrel, L'Homme,1935, p. 185.
État de la, d'une question. Point sur une question, à un moment ou un stade précis. Exposer l'état de la question :
14. Parce qu'on fait tous les jours de mauvais vers, faut-il condamner tous les vers? Et n'y a-t-il pas des épopées en vers, d'un ennui mortel? Si le Télémaque n'est pas un poëme, que sera-t-il? Un roman? Certainement le Télémaque diffère encore plus du roman que du poëme, dans le sens où nous entendons aujourd'hui ces deux mots. Voilà l'état de la question; je laisse la décision aux habiles. Chateaubr., Martyrs,t. 1, 1810, p. 24.
Rem. a) Qq. dict. enregistrent dans le domaine jur. affaire en état (pour désigner une affaire en état d'être jugée). Mettre un procès, une affaire en état (Ac.). b) Les dict. et la docum. enregistrent la loc. adv. en tout état de cause (cf. cause IB 2 b).
LING. État de langue. Moment déterminé dans l'évolution d'une langue. On a appliqué le terme de loi à des phénomènes particuliers qui ne sont valables que pour un état de langue déterminé ou pour un moment déterminé de l'évolution d'une langue donnée (Perrot, Ling.,1953, p. 124).Cf. également Saussure, Ling. gén., 1916, p. 143, 170.
SC. PHYS. État de la matière; état solide, liquide, gazeux; état critique d'un corps; état natif; état initial, final d'une réaction chimique; état pur :
15. La température de la planette que nous habitons se trouvant très-voisine du degré où l'eau passe de l'état liquide à l'état solide, et réciproquement, et ce phénomène s'opérant fréquemment sous nos yeux, il n'est pas étonnant que dans toutes les langues, au moins dans les climats où l'on éprouve une sorte d'hiver, on ait donné un nom à l'eau devenue solide par l'absence du calorique. Lavoisier, Chim.,t. 1, 1789, p. 51.
SYNT. État fondamental ou normal; état excité; état initial, final; état métastable, stationnaire d'un atome, d'un noyau.
Rem. Qq. dict. enregistrent en grav. : Conditions d'une planche aux différents états du travail, depuis le premier état jusqu'à l'état de tirage. État d'eau forte pure (avant retouche à la pointe sèche).
1. P. ext., souvent au plur. Constat écrit d'un état de choses en un lieu et à un moment donnés. Dresser, remplir des états journaliers, récapitulatifs; état de récettes et dépenses. Synon. inventaire, liste, contrôle.États nominatifs de pertes (blessés, disparus, tués) (Lubrano-Lavadera, Législ. et admin. milit.,1954, p. 86).État prévisionnel des dépenses de l'assemblée (Ginestet, Ass. parlem. europ.,1959, p. 117).
Contrôle (des personnes). État du personnel; cette personne ne figure plus sur nos états.
État(s) de services d'un employé (fonctionnaire, militaire). Ensemble des services accomplis par cet employé. Fournir de beaux, de brillants états de services. Quelques grognards vantaient leurs états de services (About, Roi mont.,1857, p. 153).M. le gouverneur a bien voulu oublier mes paroles un peu vives en souvenir de mes états de services (A. Daudet, Nabab,1877, p. 184).
État de lieux, plus couramment état des lieux. Inventaire à valeur juridique. Rédiger un état des lieux (supra IB).
Rem. Les dict. enregistrent également état estimatif des meubles, état liquidatif (des biens d'une communauté, d'une succession); état cadastral; état parcellaire [,,liste des propriétaires des parcelles touchées par le tracé d'une voie de communication`` (Barr. 1974)]; état de frais; état d'hypothèques.
2. [L'obj. désigne une pers. ou une chose] Faire état de.
a) Cour. Tenir compte de, mettre en avant le fait que, rapporter. Faire état d'un document, d'une information :
16. [Pour les gens « normaux »] rechercher l'amour d'un garçon, c'est évidemment vouloir abuser de lui. Leur imagination ne va pas plus loin! « Pervertir la jeunesse », cela veut dire, en clair : faire de jeunes invertis, profiter de leur complaisance, de leur passivité... (....). « Ah, si je pouvais tout dire, faire état d'expériences précises, donner des exemples, on verrait à quel point leurs accusations sont injustes! que de fois j'ai été retenu par le respect que m'inspire un être jeune! ... » Martin du G., Notes A. Gide,1951, p. 1399.
Montrer. Je sais qu'il est de profonds moralistes Qui font état d'être sombres et tristes (Meilhac, Halévy, Belle Hélène,1865, III, 7, p. 271).L'orgueil de faire état de sa richesse (Schneider, Charbon,1945, p. 139).
Attacher de l'importance à quelque chose ou à quelqu'un; faire cas de. ,,Je fais beaucoup d'état, peu d'état de cet homme là. Je fais peu d'état de vos menaces`` (Ac.) :
17. Elle [Lauriane] se rappela qu'au moment de la quitter Mario, que l'on disait indisposé, avait haussé les épaules et détourné la tête en disant : « Vous faites trop d'état d'une crampe. Je ne me sens plus aucun mal ». Sand, Beaux MM. de Bois-Doré,t. 2, 1858, p. 257.
b) Vieilli. Compter sur quelque chose ou quelqu'un; être assuré de. ,,Faites état de cette somme. Faites état que vous aurez cette somme avant quinze jours`` (Ac.). Allons, Bernard (...) faites état de moi comme d'un ami (Mérimée, Chron. règne Charles IX,1829, p. 77).
Rem. Qq. dict. enregistrent les sens vx suiv. a) Se proposer de. Je fais état de partir tel jour (Ac. 1835-1932). b) Agir comme. Faire état de chef (d'apr. un ex. de Balzac, cf. en partic. Littré et Rob.). c) Présumer, penser. Je fais état qu'il y a là vingt mille personnes (Ac. 1835, 1878).
II.− Situation d'une personne du point de vue de l'ordre social.
A.− [Sur le plan pers., le plus souvent dans un cont. jur.] État d'une personne. Ensemble des qualités personnelles auxquelles s'attachent des effets juridiques. État d'époux, de Français. La filiation des enfants légitimes se prouve par les actes de naissance inscrits sur le registre de l'état-civil. Art. 320. À défaut de ce titre, la possession de l'état d'enfant légitime suffit (Code civil, Paris, Dalloz, 1977-78, p. 191).
État(-)civil. Ensemble des éléments constatant officiellement l'état d'une personne par rapport à la société; le service public qui établit les actes constatant cet état. Constituer un état-civil; déclaration, fiche d'état-civil; service central, officier de l'état-civil. Registres de l'état-civil. L'Assemblée législative sécularisa l'état-civil en confiant la tenue des registres aux municipalités (L 20 septembre 1792) (Baradat, Organ. préfect.,1907, p. 218):
18. Jean Valjean venait d'atteindre ses soixante ans, âge de l'exemption légale; mais il n'en paraissait pas plus de cinquante; d'ailleurs, il n'avait aucune envie de se soustraire à son sergent-major et de chicaner le comte de Lobau; il n'avait pas d'état civil; il cachait son nom, il cachait son identité, il cachait son âge, il cachait tout; et, nous venons de le dire, c'était un garde national de bonne volonté. Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 77.
Rem. Qq. dict. enregistrent question d'état. ,,Contestation dans laquelle on révoque en doute la filiation de quelqu'un`` (Ac. 1835-1932).
P. ext., lang. cour. L'état de célibat, de célibataire, de mari. Je m'accoutumais à continuer mon enfance et ma jeunesse dans l'état de mariage (Verlaine, Œuvres compl.,t. 4, L. Leclercq, 1886, p. 169).
B.− [Sur le plan soc.]
1. Place occupée dans la société par une personne du fait de sa fortune, de sa profession, de son rang. Vivre au-dessus de, selon son état; avoir un état dans le monde; les devoirs de son état; grâce d'état. Vous! jeune, possédant un état distingué, d'une famille honorable et riche, vous ne pouvez pas craindre un refus? (Dumas père, Mari veuve,1832, 10, p. 263):
19. − Entends-tu bien, Oscar, dit madame Clapart. Vois combien monsieur Godeschal est indulgent, et comme il sait concilier les plaisirs de la jeunesse et les obligations de son état. Balzac, Début vie,1842, p. 456.
Tenir un grand état, un état de prince. Vivre de façon somptueuse :
20. Artevelde se trouva alors comme souverain de la Flandre; il prit le titre de régent et tint état de prince, faisant sonner les trompettes au dehors à l'heure de ses repas, se servant de la belle vaisselle du comte, passant par les villes de Flandre, recevant partout de grands honneurs et des sermens de fidélité. Barante, Hist. ducs Bourg.,t. 1, 1821-24, p. 236.
État de maison. Train de vie luxueux d'une famille qui a de nombreux domestiques et qui reçoit beaucoup. On manquait d'argent pour tout au milieu de l'état de maison le plus splendide (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 24).
Rem. Les dict. gén. enregistrent les sens suivants a) Vieilli. Situation sociale élevée. b) Vx. Manière (somptueuse) de s'habiller, adaptée à son état.
2. P. méton. Profession, travail, tâche. Apprendre, avoir, embrasser, prendre un état; faire son état; horloger de son état :
21. L'état de charpentier m'a toujours plu. « L'état de charpentier! s'écria mon oncle avec une sorte d'explosion de joie, tu n'es vraiment pas dégoûté. Je ne t'en aurais jamais indiqué un autre. Le charpentier, mon enfant, c'est dans ses chantiers que notre divin Maître a daigné choisir son père adoptif... » Nodier, Fée Miettes,1831, p. 72.
État ecclésiastique, militaire. Parmi les métaphysiciens françois qui ont professé la doctrine de Locke, il faut compter au premier rang Condillac, que son état de prêtre obligeoit à des ménagements envers la religion, et Bonnet, qui, naturellement religieux, vivoit à Genève dans un pays où les lumières et la piété sont inséparables (Staël, Allemagne,t. 4, 1810, p. 56).Il [l'oncle Edme] exaltait l'état militaire, l'honneur des officiers, la vertu des Jacobins et distribuait des pièces d'argent à ses jeunes auditeurs s'ils promettaient de combattre, plus tard, pour le roi de Rome (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 191).
C.− [Sur le plan pol.]
1. [Sous l'Ancien Régime]
a) Condition politique et sociale résultant de la division du corps social en clergé, noblesse et tiers-état. La France (...) reconnaissable à sa robe (...) ornée des emblèmes de la noblesse, du clergé et du tiers-état (...). Les trois états du royaume n'étaient pas assez unis pour former (...) un État (France, J. d'Arc,t. 1, 1908, p. lxxi):
22. Je prie qu'on fasse attention à la différence énorme qu'il y a entre l'assemblée du Tiers état et celle des deux autres ordres. La première représente vingt-cinq millions d'hommes et délibère sur les intérêts de la nation. Les deux autres, dussent-elles se réunir, n'ont de pouvoirs que d'environ deux cent mille individus et ne songent qu'à leurs privilèges. Sieyès, Tiers état,1789, p. 79.
b) P. ext., au plur. Les états. Représentants des trois états réunis en assemblée; l'assemblée ainsi formée. Assister aux états; réunion des états; les cahiers des états; États généraux (convoqués par le roi). Absol. Les États généraux réunis dans une ville. Les États de Blois, d'Orléans (Ac.). États provinciaux. Assemblée des trois états existant dans quelques provinces (p. ex. la Bourgogne, la Bretagne). Gaston. − (...) Les états de Bretagne (...). Le régent. − Les mécontents de Bretagne. (...) Gaston. − Les mécontents sont si nombreux qu'ils peuvent être regardés comme les représentants de la province! (Dumas père, Fille du régent,1846, III, 4, p. 214):
23. Les nobles, les ecclésiastiques et les bourgeois sont tenus d'abandonner au roi, durant une année, le dixième, par exemple, de tous leurs revenus. Ce que je dis là des impôts votés par les états généraux doit s'entendre également de ceux qu'établissaient, à la même époque, les différents états provinciaux sur leurs territoires. Tocqueville, Anc. Rég. et Révol.,1856, p. 181.
2. P. ext. Réunion plénière. Il y a eu, cet automne, sur les bords du lac Léman la réunion la plus étonnante; c'étaient les états généraux de l'opinion européenne (Stendhal, Rome, Naples et Flor.,t. 2, 1817, p. 285).Les États généraux du commerce et de l'industrie (Davau-Cohen1972).
III.− Manière d'être des personnes vivant en société.
A.− Gén. État civilisé, sauvage. Si nous demandions pour quel motif la liberté de l'état sauvage a été jugée fausse et détruite, le premier enfant venu nous répondrait ce qu'il y a réellement à répondre. La liberté de l'état sauvage n'était, en fait, qu'une abominable oppression, parce qu'elle se combinait avec l'inégalité des forces (L. Blanc, Organ. trav.,1845, p. xxi).
État de nature. La pensée de Rousseau, plus dynamique que celle de la plupart des philosophes du XVIIIesiècle, entrevoit dans l'histoire évolutive de l'humanité une étape pré-sociale correspondant à l'état de nature dans lequel l'homme, à l'abri des conventions, des préjugés et de la haine, est bon, pur et innocent (Hist. sc.,1957, p. 1563).
B.− Forme particulière d'un gouvernement; nature d'un régime politique. État populaire. Distinguons donc entre les prêtres dans un état monarchique et les prêtres dans une république (Chateaubr., Essai Révol.,t. 2, 1797, p. 355).Il [un moine nommé Agaric] jugeait l'état démocratique contraire à la société sainte à laquelle il appartenait corps et âme (France, Île ping.,1908, p. 199).
C.− [Avec une majuscule] Autorité politique souveraine, civile, militaire ou éventuellement religieuse, considérée comme une personne juridique et morale, à laquelle est soumise un groupement humain, vivant sur un territoire donné. L'autorité de l'État; l'intérêt supérieur de l'État; conspirer contre l'État; États fédéraux; États-Unis d'Amérique. Chez les Grecs, l'État était une puissance absolue, et (...) aucun droit individuel ne tenait contre lui (Fustel de Coul., Cité antique,1864, p. 428):
24. ... en supprimant l'élection du Président de la République, le maréchal Pétain supprimait la Présidence de la République elle-même, comme, plus tard, il a supprimé la République en substituant au mot de « République » le mot de « État français », en faisant disparaître tous les insignes rappelant le régime qui nous est cher, en supprimant tout ce qui fait le fondement des lois de la République, en supprimant tout ce qui fait nos traditions républicaines. Procès Pétain,t. 1, 1945, p. 22.
SYNT. a) La défense de l'État; cour de sûreté de l'État; police d'État. b) Enseignement, lycée d'État; diplôme, doctorat d'État. c) Église, religion d'État; la séparation de l'Église et de l'État. d) Chef, homme d'État; ministre, secrétaire d'État; raison*, secret d'État; conseil d'État. e) Conception de l'État; État bourgeois, capitaliste, prolétarien. f) L'État-nation, l'État-parti, l'État-patron, l'État-providence. Super-État.
Affaire d'État (dans le domaine pol.). Dans la mesure très étroite où un simple écrivain, qui ne se soucie pas d'usurper, peut donner son avis sur une affaire d'État dont il n'a pas en mains les pièces, il est permis de regretter les conditions dans lesquelles cette alliance [avec la Russie] disproportionnée a été conclue (Maurras, Kiel et Tanger,1914, p. 16).Au fig. Ce n'est pas la peine d'en faire une affaire d'État.
Coup d'État (dans le domaine pol.). Le coup d'État du 18 Brumaire. Au fig. Action, décision soudaine et spectaculaire. Ce fut un coup d'État dans la ville de Laon; les uns blâmaient et les autres approuvaient; les vieillards ne se rappelaient pas avoir, même dans les souvenirs de la République, entendu parler de soumettre au régime militaire des enfants de huit ans (Champfl., Souffr. profess. Delteil,1853, p. 6).
[P. allus. littér.] Le vaisseau de l'État; le char de l'État.
[P. allus. hist.] :
25. Cependant nous voyons que rien ne semble plus juste aux peuples orientaux que le despotisme de leurs souverains (...); que Louis XIV pensait être dans le vrai lorsqu'il tenait ce propos l'État, c'est moi; que Napoléon regardait comme un crime d'État de désobéir à ses volontés. Proudhon, Propriété,1840, p. 153.
Loc. Créer, être, former un État dans l'État. Pour exprimer le fait qu'un groupe (parti, entreprise industrielle, corporation) acquiert un pouvoir tel au sein de l'État qu'il peut échapper à son autorité voire lui dicter ses volontés. La cooptation pure, c'est-à-dire le recrutement des juges par les juges eux-mêmes sans contrôle supérieur risque de faire du corps judiciaire un État dans l'État (Vedel, Dr. constit.,1949, p. 161).
Au fig. :
26. Son mari [de Madame Anserre] jouait le rôle de satellite obscur. Être l'époux d'un astre n'est point chose aisée. Celui-là cependant avait eu une idée forte, celle de créer un État dans l'État, de posséder son mérite à lui, mérite de second ordre, il est vrai; mais enfin, de cette façon, les jours où sa femme recevait, il recevait aussi; il avait son public spécial qui l'appréciait, l'écoutait, lui prêtait plus d'attention qu'à son éclatante compagne. Maupassant, Contes et nouv.,t. 1, Gâteau, 1882, p. 774.
P. méton. Administration suprême de l'État. L'État et le département; un agent de l'État; être à la charge de l'État :
27. Les hypothèses de développement et d'organisation de la vie urbaine engagent une conception de l'homme, les finances de l'État et celles des collectivités locales, définissent les droits et les obligations des particuliers, enfin fixent le rôle d'une ville. Belorgey, Gouvern. et admin.,1967, p. 353.
SYNT. a) Administration d'État; l'appareil, les rouages, le service de l'État. b) Budget, finances de l'État; remplir les caisses de l'État; les ressources de l'État; gaspiller les deniers de l'État; recevoir une subvention de l'État; l'aide financière de l'État; banque, bourse, emprunt d'État; rente de l'État; cet appareil est la propriété de l'État. c) Domaine, monopole de l'État; chemins de fers de l'État, d'État (vieilli); réseau (d')État. d) Capitalisme, socialisme d'État.
D.− P. ext. Ressortissant d'un État; un grand État; les jeunes États africains. Synon. nation, pays, puissance, royaume, empire :
28. ... qu'il est absurde et souverainement funeste que la terre soit divisée en vastes États, tandis que vos politiques eux-mêmes avouent que le peuple d'un petit État peut seul être libre et bon, parce qu'il peut seul connoître l'union et la simplicité. Senancour, Rêveries,1799, p. 197.
Vieilli. Les États de l'Église, d'un monarque. Elle [la duchesse] écrivit au comte dès qu'elle fut hors des États du prince (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 455).
Spéc., DR. INTERN. [Du point de vue des relations et modalités des relations entre États] Nation (ou groupe de nations) dotée d'un gouvernement (ou d'une autorité politique souveraine) reconnu par la communauté internationale :
29. Une Commission Européenne des Droits de l'Homme est prévue pour être saisie de requêtes collectives ou individuelles et enquêter sur les affaires en litige. Si sept États membres en expriment le désir, une Cour Européenne des Droits de l'Homme sera créée pour trancher les cas litigieux. Par cette Convention, les États signataires acceptent de soumettre à un contrôle international leurs actes relatifs aux plus importants droits de l'homme et aux libertés fondamentales. Pt manuel Conseil Europe,1951, p. 48.
Prononc. et Orth. : [eta]. Indications, en ce qui concerne la voyelle finale, d'un timbre autre que le timbre ant. : ,,Les finales en -at, -ac, -ap, etc., -a, -oi, sont moyennes`` (Rouss.-Lacl. 1927, p. 138); ,,les finales plurielles -a(t)s, -a(c)s, (...) sont moyennes`` (ibid., p. 136); ,,états rime avec las, appas, etc.`` (Littré). ,,Le t ne se lie pas dans le parler ordinaire`` (Littré). Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1213 subst. masc. estate « manière d'être à un moment donné d'une chose ou d'une personne » (Fet des Romains, L.-F. Flutre et K. Sneyders de Vogel, p. 14); 2. 1467 estat « liste énumérative constatant la condition des choses (ou personnes) à un moment donné » (Lettre de Louis XI, III, 172 ds Bartzsch, p. 107). B. 1. 1285 « situation sociale ou professionnelle, condition » (Rose, éd. F. Lecoy, 6233); fin xives. « charge, position » (E. Deschamps, Balade, éd. Queux de Saint-Hilaire, 195, 9, t. 2, p. 14); 2. ca 1376 estat « condition politique et sociale en France sous l'Ancien Régime » (Modus et Ratio, éd. G. Tilander, § 152 : trois estas); 3. [1549 « ensemble des qualités qui distinguent l'individu dans la cité et dans la famille » (Est. d'apr. FEW t. 12, p. 249a)]; 1756 état civil « condition des personnes d'après leur naissance » (Encyclop. t. 6, p. 19a). C. 1. Ca 1500 « nation soumise à une même autorité » (Ph. de Commynes, Mém., éd. J. Calmette, t. 3, p. 32); 2. [1549, Est. d'apr. FEW t. 12, p. 250a] spéc. 1594 Secretaire d'Estat (Satyre Ménippée, éd. Ch. Read, p. 68). Empr. au lat. class. statǔ « action de se tenir », « position, situation », souvent associé aux termes civitas, imperium d'où le b. lat. « état, forme de gouvernement » (Blaise) avec peut-être infl. de l'ital. stato « forme de gouvernement » (1300-13, Dante, Inf., 27 ds Tomm.-Bell., v. aussi FEW t. 12, p. 251, note 10) et « administration d'une société » (1537-40, Guicciardini, Stor., 9, 457 ds Tomm.-Bell.); b. lat. jur. « statut d'une personne », lat. médiév. « inventaire » (xiiies. ds Nierm.); cf. Gœlzer ds Arch. Lat. Med. Aev. t. 2, 1926, pp. 39-40. Fréq. abs. littér. : 30 573. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 58 818, b) 34 826; xxes. : a) 34 597, b) 40 365. Bbg. Baader (H.). Einige Bemerkungen zur Geschichte der Wörter cité, ville und état. München, 1968, pp. 35-48. − Bellet (R.). Formation et développement du vocab. chez Vallès journaliste (1848-1871). Cah. Lexicol. 1969, no15, pp. 5-20. − Gohin 1903, p. 307. − Jonard (N.). L'idée de patrie en Italie et en France au xviiies. R. de Litt. comp. 1964, t. 38, no1, pp. 61-100. − Pucheu (R.). Le Fr. « modéré ». Fr. Monde. 1971, no80, p. 46.