SONGER, verbe
Étymol. et Hist. A. Voir en rêve
ca 1100 trans. (
Roland, éd. J. Bédier, 725);
id. sunjier que (
ibid., 719: Carles se dort [...]
Sunjat qu'il eret as greignurs porz de Sizer [Syrie]);
ca 1165 empl. abs. (
Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 2557, 2564); 1530
songer de [quelque chose] (
Palsgr., p. 528b).
B. 1176-81 « s'abandonner à la rêverie, demeurer oisif » (
Chrétien de Troyes, Chevalier au lion, éd. M. Roques, 2505), v. aussi
songe-creux.
C. Penser
1. xiiies. trans.
soigner aucune rien « penser à quelque chose » (
Lancelot en prose, éd. A. Micha, XLIXa, 14, t. 8, p. 11);
id. sougnier a aucune rien (
Jean de Grieviler, Entre raison et amour grant tourment, éd. L. Passy ds
Bibl. Éc. Chartes, 4
esérie, t. 5, p. 16); 1538
songer a + inf. (
Est., s.v. cogito);
2. mil.
xiiies. trans. « entrevoir, imaginer » (
Poire, éd. Chr. Marchello-Nizia, 457);
3. 1280
songier que « penser, s'imaginer que » (
Philippe de Beaumanoir, Jehan et Blonde, 4138 ds T.-L.);
4. ca 1263 trans. « imaginer, inventer » (
Rutebeuf, Chans. des Ordres, 8 ds
Œuvres, éd. E. Faral et J. Bastin, t. 1, p. 331: Tant d'Ordres avons ja, Ne sai qui les
sonja). Du lat.
somniare intrans. « rêver, avoir un songe », trans. « voir en rêve ». Sur la similitude, en a. fr., de certaines formes de
songier et de
soignier (
soigner*) d'une part, et de
songe* et
soigne « souci » d'autre part [
cf. T.-L.,
s.v. soignier et
soigne] (
somniaresongier, songnier, soignier; songe*, autres formes:
soinge, soigne, soingne) et sur la proximité sém. de
songier a « penser à, s'occuper de » et de
soignier a « s'occuper avec attention, avoir soin de » (
cf. FEW t. 17, p. 281b, note 8), v. U.
Joppich-
Hagemann ds
Rom. Forsch. t. 90 1978, pp. 35-47.