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INDIGO, subst. masc. et adj.
Étymol. et Hist. 1544 indico (J. Fonteneau, La Cosmographie, p. 379 ds Arv., p. 272 : En ces terres [de la côte occidentale de l'Inde] y a forces gynjambre et sandart, laquabre, indico et mirabolanes); 1578 indigo (doc. ds G. Fagniez, L'économie sociale de la France sous Henri IV, p. 378 d'apr. M. Höfler ds Cah. Lexicol. t. VI, 1965, p. 93 : les teinturiers de drap usent pour le present plus que la moitié de l'anil de Barbarie et de l'indigo de Port-Ingade). Prob. empr., en raison de la localisation géogr. des 1resattest. et malgré l'écart chronol., au port. indigo (cité comme mot port. en 1695 dans le traité lat. de Rumphius, v. Dalg.) : Fonteneau, dans le même passage que celui cité supra 1544, souligne en effet la puissance et le rôle commercial des Portugais aux Indes (v. Arv., loc. cit.). L'ital. indaco, très anciennement attesté (vénit. indego en 1246; ital. indaco en 1334 d'apr. Batt.; v. aussi Dalg.) est à l'orig. des deux formes éphémères indaco (1556) et indacum (1575) citées ds Arv., pp. 272-273. Ces mots sont issus du lat. indicum « indigo » (Pline), neutre substantivé de l'adj. indicus « indien ».

Mise à jour de la notice étymologique par le programme de recherche TLF-Étym :

Histoire :
I. A. Subst. masc. « colorant bleu ». Attesté depuis 1544 (Fonteneau, Cosmographie, page 379 = Arveiller, Voyage, page 272 : Et en cette coste [de Goa], cens lieues au dedans de la terre, sont les grandz villes de Barangalle et Brajail […] Et aussi est celle de Comparurye et celle de Dely qui sont toutes grandes […] En ces terres y a forces gynjambre et sandart, laquabre, indico, et mirabolanes, aspico et toutes choses d’apothicairye). Première attestation de la forme actuelle : 1578 (Fagniez, Économie, page 378 [lettre de J. Yvon à S. Lecomte (négociant à Toulouse)] les teinturiers de drap usent pour le present plus que la moitié de l'anil de Barbarie et de l'indigo de Port Ingade que fet un grand mal à pastel). Première attestation lexicographique : 1690 (Furetière1: indigo. s. m. Plante que les Anciens n'ont pas bien connuë, comme Pline l'avouë. Il croit que c'est une escume de roseaux qui s'attache avec un limon, qui est noir quand on le broye, & qui fait un beau bleu meslé de pourpre quand on le delaye. Il le nomme indicum. Isidore & Dioscoride disent la mesme chose; & celui‑cy nomme l'indigo une pierre, en quoy il se trompe […] La plante qu'on appelle en Grec Isatis, en Latin glastum, & en François guesde, ou pastel, en Italien guado, est celle qui sert à contrefaire l'Indigo chez les Teinturiers). On relève les formes indigue en 1611, indaco en 1556 et indacum en 1575 (cf. Arveiller, Voyage, pages 272‑274) ; les deux dernières formes sont toutefois des emprunts occasionnels à l'italien. - 
I. B. Subst. masc. « plante (légumineuse papilionacée), indigotier (Indigofera Linné) ». Attesté depuis 1604 (Martin, Description, pages 100‑101, in Arveiller, Voyage, page 273 : De la gomme Lacque, de Lindigo ou Annil… Ceux de Guzaraté nomment lindigo Galli. ou Nil, c'est une herbe qui croist comme le Romarin aiant ses fleurs de couleur celeste resemblant a celle du Barba iouis). - 
II. Adj. « qui a la couleur bleue de l'indigo ». Attesté depuis 1734 (Voltaire, Lettres philosophiques, volume 2, page 45 : le premier [rayon de lumière] est couleur de feu, le second citron, le troisiéme jaune, le quatriéme verd, le cinquiéme bleu, le sixiéme indigo). - 

Origine :
Transfert linguistique : emprunt au portugais índigo subst. masc. « substance colorante » (attesté depuis le 14e siècle [Houaiss]). La date d'attestation en portugais dissipe les doutes émis dans le TLF quant à l'origine portugaise du lexème. Le colorant était connu dès l'Antiquité, mais la plante n'était pas identifiée (cf. André, Botanique ; Furetière1, ci‑dessus I. A.). Le nom servant à désigner la substance est entré en français par la voie commerciale, les Portugais étant, au 16e siècle, les principaux importateurs de ce produit venu des Indes. Ils connaissaient déjà l'anil*, matière tinctoriale très similaire, voire identique, extraite d'une plante de la même famille que l'indigotier, mais poussant en “Barbarie”, c'est‑à‑dire en Afrique du Nord (d'où l'origine arabe du mot portugais). Le rôle joué par les Portugais dans l'introduction de ces deux produits, l'indigo et l'anil, et l'origine portugaise des deux termes français servant à les désigner expliquent peut‑être la confusion qu'on observe dans la lexicographie, mais aussi dans les textes, et sans doute, en fin de compte, dans l'usage courant, entre ces deux mots. Les teinturiers, eux, savaient les distinguer (cf. Fagniez, Économie, ci‑dessus I. A.). Dès 1578, indigo devait être couramment utilisé par ces professionnels, comme en témoigne aussi le Règlement des teinturiers de Sedan édicté en 1603, qui leur interdisait l'usage de ce colorant (cf. Gay, 2, 392a, s.v. teinture), probablement parce qu'il faisait une concurrence féroce aux teintures produites en France comme la guède (cf. De Poerck, Draperie, 1, pages 150‑151) et le pastel (cf. ci‑dessus Fagniez, Économie). L'emploi de indigo dans des documents de l'époque, en particulier dans l'ouvrage à succès de Martin, a pu contribuer à sa diffusion et à l'éviction du terme concurrent, anil, probablement utilisé à l'origine pour le produit venu d'Afrique. Indigo serait dès lors devenu le terme générique désignant ce colorant bleu, quelle que soit son origine géographique (il est aussi courant aux Antilles où la plante est cultivée au 17e siècle, cf. Arveiller, Voyage, pages 277‑278). Contrairement à anil*, pour lequel le sens de « plante » a évincé celui de « colorant », pour indigo, les deux sens I. A. et I. B. ont coexisté dès Furetière1 dans les dictionnaires. Toutefois, indigo « plante » s'est trouvé très vite en concurrence avec indigotier (a) (cf. indigo*), attesté depuis 1731 (cf. FEW 4, 645a). Dans le courant du 18e siècle, indigo subit une évolution sémantique, par ellipse de bleu d'indigo, en même temps qu'il devient aussi adjectif (cf. supra II.) et supplante ainsi également l'ancien lexème inde* « bleu foncé tirant sur le violet » (FEW 4, 645a ; DEAF I 2 ; DMF2), bien attesté du 12e au 16e siècle, mais par la suite disparu de la langue courante dans la première moitié du 17e siècle. Cf. von Wartburg in FEW 4, 645a, indĭcum, qui considère à tort qu'il s'agit d'un emprunt à l'espagnol, par l'intermédiaire du néerlandais. Le néerlandais est aussi évoqué comme intermédiaire par Arveiller, Voyage, page 279, qui, ne disposant comme document de première attestation de la forme indigo que d'un texte de 1598 rédigé par un Hollandais, postule, pour cette seule forme, un emprunt au néerlandais, tout en donnant indico, attesté en 1544, comme un emprunt au portugais et les formes de la première moitié du 17e siècle comme remontant “directement ou non à la source portugaise”. L'attestation de 1578 (cf. supra I. A.) montre que le passage par le néerlandais n'est pas nécessaire : indigo est bien entré en français directement du portugais.


Rédaction TLF 1983 : Équipe diachronique du TLF. - Mise à jour 2007 : Myriam Benarroch. - Relecture mise à jour 2007 : Nadine Steinfeld ; Jean-Pierre Chambon ; Gilles Petrequin ; Thomas Städtler ; Éva Buchi ; Jean-Paul Chauveau.