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SYLLABE, subst. fém.
A. −
1. Voyelle ou groupe de lettres qui se prononcent d'une seule émission de voix. Syllabe chantante, initiale, finale; première, dernière syllabe; nombre de syllabes; mot d'une syllabe. Ce langage enfantin composé de redoublements de syllabes identiques dont se servent les nourrices avec les enfants au berceau (Champfl., Bourgeois Molinch., 1855, p. 48).Tout ce qui brille voit. Rimbaud a dit en trois syllabes ce théorème cosmique: « Nacre voit » (Bachelard, Poét. espace, 1957, p. 48).V. escamoter B 3 b ex. de Abellio.
2. PHONÉT., PHONOL. Unité phonétique fondamentale intermédiaire entre le phonème et le mot. La syllabe n'a de valeur qu'en phonologie. Une suite de sons n'est linguistique que si elle est le support d'une idée (Sauss.1916, p. 144).L'impression de « rythmé » peut être obtenue au moyen d'édifices sonores dont les briques sont les syllabes accentuées et atones (vers de Shakespeare); ou encore les syllabes longues et brèves (vers de Pindare) (Arts et litt., 1935, p. 50-7).V. bref1ex. 3.
Syllabe accentuée*, atone*, muette*; syllabe pénultième*, antépénultième*, désinentielle*.
Syllabe ouverte ou libre. ,,Celle qui se termine par une voyelle, ainsi les deux syllabes de fi-ni`` (Mar. Lex. 1951).
Syllabe fermée ou entravée. ,,Celle qui se termine par une consonne, ainsi les deux syllabes de par-tir`` (Mar. Lex. 1951).
Rem. Le critère de délimitation de la syllabe varie suivant les spécialistes. Il peut être fonctionnel: voyelle entourée de consonnes (Rousselot); acoustique: distance entre deux minima de sonorité (Jespersen); articulatoire: opposition de phonèmes implosif et explosif (Saussure); physiologique: tension croissante puis décroissante de l'appareil phonateur (Grammont, Fouché), intensité du souffle (Stetson, Straka).
3. MÉTR., VERSIF. Unité prosodique du vers français. Vers de douze syllabes. C'est la numération syllabique qui, orientée ou non dans ses distinctions par le contenu du texte, assure l'assise du vers. D'où l'importance du compte des syllabes dont les règles, usages et variations (diérèse, synérèse, élision, apocope, syncope) constituent la prosodie du vers français (Maz.-Mol.Styl.1989, s.v. syllabe).
B. − P. ext. Très petit élément de langage, mot, parole. Écouter sans perdre une syllabe; ne pas prononcer une syllabe; peser toutes ses syllabes. Il n'y a pas une syllabe de vrai dans tout ce que vous avez dit (Mérimée, Théâtre Cl. Gazul, 1825, p. 391).Horriblement défiguré, le larynx brisé, il bredouillait, crachait dans sa barbe des syllabes incompréhensibles (Guéhenno, Journal « Révol. », 1937, p. 26).
REM. 1.
Syllaber, verbe intrans.,rare. a) Assembler les lettres par syllabes. (Ds Littré). b) Prononcer, lire, syllabe par syllabe. Synon. syllabiser.Je redoutai que la comtesse me barbât exagérément (...) pour le signifier nettement à cette digne femme, je syllabai, calme:Oh! moi, vous savez, pourvu que mon ventre n'ait pas de plis, je me fous de tout le reste! (Colette, Cl. s'en va, 1903, p. 284).
2.
Syllabifier, verbe,rare. Composer avec des syllabes. Empl. part. passé. Les fous font partie d'une nation quelconque; et leur langage, pour incohérent qu'il soit dans les paroles, est toujours syllabifié (Baudel., Hist. extr.,1856, p. 37).
Prononc. et Orth.: [sil(l)ab]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et His. 1. Ca 1160 sillebe « voyelle ou ensemble de sons prononcés d'une seule émission de voix et entrant dans la constitution d'un mot » (Enéas, 8558 ds T.-L.); ca 1210 sillabe (Dolopathos, 48, ibid.); 1550 la syllabe ph (Ronsard, Odes, Au lecteur ds Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 1, p. 53, ligne 79); 2. 1690 p. ext. on n'en [du sermon] perd pas une syllabe (Fur.). Empr. au lat. class.syllaba « syllabe » puis au plur. « vers, poème », du gr. σ υ λ λ α β η ́ « id. », dér. de σ υ λ λ α μ β α ́ ν ε ι ν « rassembler, réunir », de σ υ ́ ν « avec » et de λ α μ β α ́ ν ε ι ν « prendre ». Fréq. abs. littér.: 934. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 071, b) 1 016; xxes.: a) 1 752, b) 1 459.
DÉR. 1.
Syllabation, subst. fém.Découpage en syllabes de la chaîne parlée. Synon. vx syllabisation. (dér. s.v. syllabiser).Les Latins (en Italie surtout) ont une technique à émission plus claire, entraînée par une syllabation à prédominance labiale (Arts et litt., 1935, p. 36-7). [sil(l)abasjɔ ̃]. 1reattest. 1840 (Garcia, Art chant, p. 90); de syllabe, suff. -(a)tion*.
2.
Syllabisme, subst. masc.a) Système d'écriture syllabique. (Dict. xixes. et XXes.). b) Système de versification fondé sur le vers syllabique. Les premiers poètes qui commencèrent à écrire chez nous en langue vulgaire adoptèrent le syllabisme (Jeux et sports, 1967, p. 750). [sil(l)abism̭]. 1resattest. a) 1862 « système d'écriture dans lequel on représente la syllabe par un signe unique » le syllabisme assyrien (Vivien de St-Martin, Les Fouilles de l'Assyrie et leus résultats pour l'Histoire ds R. germ. fr. et étr., t. 19, p. 500). b) 1897-1900 « théorie qui fonde le rythme des vers français sur le compte des syllabes » le syllabisme métrique (D'Indy, Compos. mus., t. 1, p. 73); de syllabe, suff. -isme*.
BBG.Chiron (Ph.). Types de syllabes du fr. BULAG. 1977, no5, pp. 75-97. − Clas (A.). Sons et lang. Montréal, 1983, pp. 138-141. − de Groot (A. W.). La Syllabe, essai de synthèse. B. Soc. Ling. 1926, t. 27, pp. 1-42. − Hála (B.). Autour du probl. de la synt. Phonetica. 1960, t. 5, pp. 159-168; 1961, t. 7, pp. 240-245; 1964, t. 11, pp. 39-50. − Marchal (A.). Élém. pour une phonét. ling. plus adéquate: introd. à une phonol. de la syllabe. Phonetica. 1978, t. 35, no6, pp. 340-370. − Nandris (O.). Sur la syllabe et la struct. du fr. Fr. mod. 1962, t. 30, pp. 35-51. − Nique (Ch.). Phonie/ graphie. Fr. auj. 1974, no25, p. 63. − Quem. DDL t. 35 (s.v. syllabifier). − Wioland (Fr.). Struct. syllabiques du fr. Genève, 1985, p. 356 p.