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MORTEL, -ELLE, adj. et subst.
I. − Adj. et subst.
A. − Adj. Qui est sujet à la mort.
1. [En parlant d'un être vivant (gén. un homme)] Il y avoit là devant nous une créature mortelle, convaincue de notre immortalité (Staël,Allemagne, t.5, 1810, p.82).Je connais, monsieur, toute l'étendue de la perte que vous avez faite; mais, enfin, nous sommes tous mortels (Jouy,Hermite, t.5, 1814, p.108):
1. L'homme vint le dernier des animaux, parent de tous, et proche de quelques-uns. Les termes dont on le désigne encore aujourd'hui marquent son origine: on l'appelle humain et mortel. A. France,Vie fleur, 1922, p.498.
2. [P. méton.]
[En parlant du corps de l'homme] Cette fièvre qui (...) gonflait à la briser chaque veine, et disséquait chaque point de ce corps mortel en des millions de souffrances (Dumas père, Monte-Cristo, t.2, 1846, p.680).Avec ces griffes légères que la moindre douleur imprime sur un visage mortel (Mauriac,Journal 1, 1934, p.30).
[P. oppos. à la partie immatérielle de l'homme (l'âme, l'esprit)]
RELIG. Corps mortel, chair mortelle. Et, maudissant Don Juan, lui jeta bas Son corps mortel, mais son âme, non pas! (Verlaine, Œuvres compl., t.1, Jadis, 1884, p.393).
Littér. Dépouille mortelle, restes mortels. Cadavre. Prêt à déposer sa dépouille mortelle dans la terre étrangère (Chateaubr.,Mém., t.4, 1848, p.217).Le char emportant au Père-Lachaise les restes mortels de Charles Hugo (Verlaine, Œuvres compl., t.5, Vingt-sept biogr. (E. de Goncourt), 1896, p.319).
Quitter sa dépouille, son enveloppe mortelle. Mourir. Quand l'âme aura quitté son enveloppe mortelle (Maine de Biran,Journal, 1815, p.81).
[P. oppos. à des êtres immatériels (dieux, anges)] Si les anges daignoient revêtir une forme mortelle pour apparoître aux hommes, ce seroit sous les traits de Maria (Genlis,Chev. Cygne, t.2, 1795, p.54).S'il est vrai qu'un vers d'Homère ait subitement doué Phidias du sentiment de la majesté des dieux, lui ait appris à la représenter vivante à des regards mortels (Dusaulx,Voy. Barège, t.1, 1796, p.15).
La race mortelle. La race humaine. Je veux être par toi présent et favorable à la race mortelle (Valéry,Variété III, 1936, p.101).
[En parlant de la condition de l'Homme] Existence, vie mortelle. Qu'il étoit étonnant d'oser trouver des conformités entre nos jours mortels et les éternels destins du maître du monde! (Chateaubr.,Génie, t.2,1803, p.166).29 jeudi. Ascension − Quelle belle fin de la vie mortelle de Notre-Seigneur Jésus-Christ! (Dupanloup,Journal, 1851, p.142):
2. Par là, la phrase de Vinteuil avait, comme tel thème de Tristan par exemple, qui nous représente aussi une certaine acquisition sentimentale, épousé notre condition mortelle, pris quelque chose d'humain qui était assez touchant. Proust,Swann, 1913, p.350.
3. Au fig. [En parlant d'un inanimé] Qui peut périr, disparaître. Il y avait tout l'amour dans leurs sourires: mais ce n'était qu'un pauvre amour mortel (Beauvoir,Tous les hommes mort., 1946, p.47):
3. Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles; nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d'empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins descendus au fond inexplorable des siècles... Valéry,Variété III, 1936, p.201.
B. − Subst. Être humain.
1. Littér. Ranime-toi, foible mortel, à ce spectacle actif de la nature (Saint-Martin,Homme désir, 1790, p.398):
4. Quelle est cette étoile qui file, Qui file, file, et disparaît? − Mon enfant, un mortel expire; Son étoile tombe à l'instant. Béranger,Chans., t.2, 1829, p.200.
SYNT. Audacieux, aveugle, chétif, faible, grossier, humble, insensible, fortuné, malheureux, misérable, pauvre, perfide, vil mortel.
2. [En constr. dans des loc. figées]
Un(e) simple mortel(le). Une personne comme les autres. Après tout, Marie n'avait-elle pas été une simple mortelle, une faible femme qui avait connu toutes les misères de la vie (Montalembert,Ste Élisabeth, 1836, p.ciii).
Un heureux mortel. Une personne qui a de la chance. Je vous félicite, mon cher, vous êtes un heureux mortel (Taine,Notes Paris, 1867, p.189).
Les mortels. L'ensemble des humains, l'humanité. La lumière du jour si chère aux mortels (Chateaubr.,Martyrs, t.3, 1810, p.207).
Le commun des mortels. Le plus grand nombre des hommes. M. Godeau ne pouvait plus respirer l'air du commun des mortels qui lui était départi (Jouhandeau,M. Godeau, 1926, p.245).
II. − Adjectif
A. − Qui cause la mort. J'ai eu la bêtise de consulter un médecin (...) et bien entendu il m'a trouvé trois ou quatre maladies mortelles (Mérimée,Lettres ctessede Montijo, t.2, 1841, p.47):
5. Quelle, et si fine, et si mortelle, Que soit ta pointe, blonde abeille, Je n'ai, sur ma tendre corbeille, Jeté qu'un songe de dentelle. Valéry,Charmes, 1922, p.118.
Être mortel à, pour qqn, qqc. L'heure où l'ombre est mortelle Au voyageur suant qui s'arrête sous elle (Barbier,Ïambes, 1840, p.127).
SYNT. Accident, breuvage, choc, combat, coup, danger, mal, péril mortel; balle, blessure, dose, émanation, maladie, menace, morsure, plaie mortelle.
Proverbe. Plaie d'argent n'est pas mortelle. Plaie d'argent n'est pas mortelle, dit-on; mais ces plaies-là ne peuvent pas avoir d'autre médecin que le malade (Balzac,Illus. perdues, 1843, p.647).
RELIG. CATHOL. Péché mortel. Péché qui enlève à l'âme la grâce de la vie éternelle. Ils communient tous les dimanches! Je vous garantis qu'ils n'accepteraient pas de vivre en état de péché mortel (Beauvoir,Mém. j. fille, 1958, p.279).
B. − P. hyperb. [Caractérisant un subst. avec une valeur intensive]
1. Qui est pénible, désagréable ou ennuyeux à mourir.
[Le subst. désigne des circonstances, un événement auquel une pers. est confrontée] Il y a de cette ville à cette autre dix mortelles lieues (Ac.1798-1935).Deux heures, deux heures mortelles pour le pauvre amoureux se passèrent ainsi, sans que M. Müller vînt à bout de trouver l'étymologie de ranunculus (Karr,Sous tilleuls, 1832, p.25).Ce n'est pas de sa faute si je n'ai pas encore pris mal. Elle établit dans les wagons des courants d'air mortels (Mauriac,Génitrix, 1923, p.362).
[Le subst. désigne le sentiment éprouvé face à un événement pénible ou ennuyeux] Puisque nous voici ensemble, ma chère, dit-il en s'asseyant sur le sofa, au mortel déplaisir de Valentine, je suis résolu de vous entretenir d'une affaire assez importante (Sand,Valentine, 1832, p.278):
6. «Daïdha!!!» s'écria la foule... C'était elle. Qui, sous l'horrible poids d'une angoisse mortelle, Au vague bruit d'enfants, par son coeur entendu, Était sortie au jour à ses pas défendu... Lamart.,Chute, 1838, p.895.
SYNT. Dégoût, ennui mortel; inquiétude, tristesse mortelle.
2. [En parlant d'un sentiment hostile] Qui est si aigu qu'il pourrait être homicide. Antipathie mortelle; ressentiment mortel. En butte à la haine mortelle de ces hommes dont il dénonçait les crimes (Clemenceau,Vers réparation, 1899, p.184).
Ennemi mortel. Personne qui en hait une autre ou qui en est profondément haïe. Chacun y eût gardé la parole pendant vingt minutes et fût resté l'ennemi mortel de son antagoniste dans la discussion (Stendhal,Souv. égotisme, 1832, p.131).
3. Qui évoque la mort, qui a les caractéristiques propres à la mort. À ces mots, une pâleur mortelle couvrit le visage de Corinne (Staël,Corinne, t.2, 1807, p.339).Je n'entendais aucun bruit. Ce silence mortel finit par m'effrayer si bien que je me levai sur la pointe des pieds nus et marchai vers la clarté (Duhamel,Notaire Havre, 1933, p.188).
Prononc. et Orth.: [mɔ ʀtεl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Sens passif «sujet à la mort» 1. fin xes. om mortal (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 339); ca 1160 subst. plusor mortal (Eneas, 2285 ds T.-L.); 2. ca 1050 la mortel vithe (St Alexis, éd. Chr. Storey, 63); 3. 1269-78 richeces mortex (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 5227). B. Sens actif 1. ca 1100 «qui souhaite la mort, qui porte la mort» sun mortel enemi (Roland, éd. J. Bédier, 461); ca 1120-50 mortel serpent [Satan] (Grant mal fist Adam, I, 2 ds T.-L.); 1155 mortel tirant (Wace, Brut, 6131, ibid.); 2. ca 1100 une mortel bataille (Roland, 658); id. mortel rage (ibid., 747); 1155 mortel häine (Wace, op. cit., 14410, ibid.) 1erquart xiiies. relig. chrét. pekié mortal (Renclus de Molliens, Miserere, 71, 1, ibid.); 3. 1572 mortel poison (Amyot, Hommes illustres, Pompée, 50, éd. Gérard-Walter, t.2, p.261 ds Œuvres). C. «de mort, concernant la mort» 1130-40 cri mortel (Geoffroi Gaimar, Estoire des Engleis, éd. A. Bell, 4421: Li reis criad un cri mortel, L'aneme s'en vait ...); 1174-87 lit mortel (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 4816). Empr. au lat. mortalis «sujet à la mort, périssable; humain, mortel; des mortels» − subst. «être humain» − ; «mortel, qui donne la mort», spéc. mortale crimen, mortalia delicta «péché mortel» dans la lang. chrét. Fréq. abs. littér.: 3398. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 7739, b) 4143; xxes.: a) 3901, b) 3280. Bbg. Henning (G.N.). Mortel, ange et démon. Mod. Lang. Notes. 1938, t.53, p.119.