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JETER, verbe trans.
I. − Qqn jette qqc.
A. − Envoyer à quelque distance.
1. Envoyer (dans une direction), le plus souvent de manière violente ou agressive et pour atteindre un but. Synon. lancer.
a) [L'obj. désigne un inanimé concr.]
α) Qqn jette qqc.Julien de Médicis (...) est loué par son biographe (...) pour son habileté à manier le cheval, à lutter et à jeter la lance (Taine, Philos. art, t. 1, 1865, p. 198).
Qqn jette qqc. + compl. locatif.Des grandes-duchesses en haillons dont on avait assassiné (...) les fils en jetant des pierres dessus (Proust, Temps retr.,1922, p. 854).
Qqn jette qqc. + compl. d'obj. second.Les soldats repoussent le peuple, qui leur jette des cailloux (Musset, Lorenzaccio,1834, III, 3, p. 175).
Emploi pronom. réciproque indir. Ils se dépêchaient, s'en jetant [des seaux d'eau] dans les jambes, dans le dos (Loti, Mon frère Yves,1883, p. 374).Ces nymphes couraient, bavardaient, combattaient, se jetaient des fleurs, inventaient mille jeux pour se divertir (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 231).
β) Jeter qqc. à la face, à la figure, au nez, à la tête, au visage de qqn. Synon. envoyer, balancer (fam.), flanquer (fam.).Il nous a jeté de la boue au visage (Flaub., Tentation,1856, p. 548).Alban hors de lui roula en boule le beau programme qu'il comptait garder comme souvenir, et le jeta à la tête de l'infâme (Montherl., Bestiaires,1926, p. 386).
Emploi pronom. réciproque indir. Lantier avait voulu une soupe à l'huile (...); et, comme Adèle trouvait ça infect, ils se sont jeté la bouteille d'huile à la figure (Zola, Assommoir,1877, p. 549).
Au fig.
Dire sans ménagement ou reprocher brutalement. À toute occasion, il lui jetait au front de sèches vérités (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 252):
1. − Je vous en prie, dis-je, ne me jetez pas ainsi ma jeunesse à la tête. Je m'en sers aussi peu que possible; je ne crois pas qu'elle me donne droit à tous les privilèges ou à toutes les excuses. Je n'y attache pas d'importance. Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 157.
Emploi pronom. réciproque indir. À tous instants, ils se jettent à la face l'affaire Dreyfus (Barrès, Cahiers, t. 5, 1907, p. 105).
Offrir quelque chose (parfois quelqu'un) à quelqu'un, sans qu'il l'ait demandé. Il s'imaginait que j'allais lui jeter ma fille à la tête (Ac.).
Faire un étalage déplaisant de. Jeter ses richesses à la tête de qqn.
γ) Loc. verb. fig.
Jeter son bonnet* par dessus les moulins; jeter des fleurs* à qqn; jeter de l'huile* sur le feu; jeter la (première) pierre* à qqn; jeter des pierres* dans le jardin de qqn; jeter de la poudre* aux yeux.
Pop. N'en jetez plus (la cour est pleine). N'ajoutez rien, ni reproches ni compliments, cela suffit. Soyons, s'il te plaît, toi, coquette, moi, bien mis, Mangeons comme de droit, buvons comme permis (...) Toi : N'en jetez plus, la cour est pleine! (Verlaine, Œuvres compl., t. 3, Élégies, 1893, p. 67):
2. Gabrielle : Je n'y peux rien! Je ne la trouve [votre bouche] ni très jolie, ni très fraîche, ni très appétissante!... Ponta Tulli (...) : Ça va! Ça!... N'en jetez plus! Bernstein, Secret,1913, II, 6, p. 20.
b) [L'objet désigne un animé]
Qqn jette qqn + compl. locatif.Le capitaine Colette n'embrassait pas les enfants (...). S'il m'embrassait peu, du moins il me jetait en l'air, jusqu'au plafond que je repoussais des deux mains et des genoux, et je criais de joie (Colette, Sido,1929, p. 82).
FAUCONN. Jeter le faucon (du poing). Le lancer sur sa proie. (Dict. xixes., Lar. Lang. fr.).
Loc. verb. fig. Jeter le chat* aux jambes de qqn.
2. En partic. Envoyer (vers le bas), laisser ou faire tomber.
a) [Le suj. désigne une pers.; l'obj. désigne un inanimé]
Qqn jette qqc.Le jeune Châteaubedeau faisait grand vacarme dans sa tour et jetait des moellons par les meurtrières (Boylesve, Leçon d'amour,1902, p. 110).
[P. méton. du suj.] Le passage d'une escadrille jetant des bombes ou mitraillant le sol (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 311).
α) BOXE. Jeter l'éponge*.
β) MAR. Jeter l'ancre*, une bouée, le grappin*, un filet, le loch, la sonde.
Qqn jette qqc. + compl. locatif.Jeter (à) bas*. C'est (...) de toutes ces vieilles baraques vermoulues et penchées (...) que des balles pleuvaient. (...) on leur jetait sur la tête meubles, fourneaux, pots de fleurs, armoires; on les écrasait comme dans des mortiers (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 252).Le soldat a jeté son fardeau par terre et regarde le Rhin (Claudel, Feuilles Saints,1925, p. 666).Dans la nuit, sa mère et sa sœur l'avaient assassiné à coups de marteau pour le voler et avaient jeté son corps dans la rivière (Camus, Étranger,1942, p. 1180).
[P. méton. du suj.] Des tombereaux jetaient leur charge à terre (Zola, Ventre Paris,1873, p. 628).
b) [Le suj. et l'obj. désignent une pers.] Qqn jette qqn + compl. prép.Pénétrant dans la prison, les assassins jetaient les prisonniers par les fenêtres (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 181).La femme, la Juive, levait toute droite sa jambe; (...) Dodoche flatté d'être regardé par les trois seuls hommes en chapeau du bal, l'a prise à bras-le-corps et l'a jetée dans l'orchestre (Goncourt, Journal,1863, p. 1229).
Emploi pronom. réfl. Quand on se jette d'un trait du haut de la tour Eiffel on doit sentir des choses comme ça. On voudrait se rattraper dans l'espace (Céline, Voyage,1932, p. 48).Une fusée rouge éclate soudain dans le ciel (...). Aussitôt les deux compagnons se jettent au sol (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 239).Nada court sur la jetée, et se jette à la mer (Camus, État de siège,1948, p. 300).
Loc. verb. fig. Se jeter à l'eau*.
c) [Le suj. et l'obj. désignent un inanimé concr.] Littér. Rien n'est plus douloureusement calme qu'un crépuscule d'automne. Les rayons pâlissent dans l'air frissonnant, les arbres vieillis jettent leurs feuilles (Zola, Th. Raquin,1867, p. 68).
3. CONSTRUCTION
a) Disposer, établir un pont (dans l'espace, d'un point à un autre).
GÉNIE MILIT. De façon provisoire et souvent à la hâte. Les Prussiens avaient jeté des ponts à Baccarach et dans plusieurs autres endroits (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 91):
3. Il fallut donc se placer sur la rive droite de l'Alpon, de manière à pouvoir tomber sur les derrières de l'ennemi qui attaquerait Vérone, et par là soutenir cette place par la rive gauche, ce que l'on n'eût pu faire si l'on eût jeté le pont sur la rive gauche de l'Alpon... Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 548.
TRAV. PUBL. De façon durable. De la ville neuve où je suis logé, on passe dans la vieille ville en traversant un pont jeté sur le North Loch, marais jadis profond, aujourd'hui desséché (Michelet, Chemins Europe,1874, p. 110).C'était en 1878, quand la province foisonnait dans les hôtels, sur les boulevards et ce pont gigantesque jeté entre le Champ-de-Mars et le Trocadéro (A. Daudet, Trente ans Paris,1888, p. 140).
b) Littér. [Aspect accompli] De la rade, un pont (...) jette ses arches, élevées en ogives, sur la rivière de Bayruth (Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 150).
B. − Envoyer quelque chose à (un animé), pour la lui donner. Synon. fam. balancer.
1. [L'obj. second désigne un animal] Jeter un os à un chien, des miettes aux oiseaux. Les corps [des chefs français] furent jetés aux vautours (Baudry des Loz., Voy. Louisiane,1802, p. 52).Elle [une pie] prenait tout ce qu'on lui jetait, comestible ou non, et, selon le caprice de l'heure, le mangeait ou le cachait dans quelque coin (Pergaud, De Goupil,1910, p. 246).
Loc. verb. fig. Jeter sa part aux chiens*; cela n'est pas bon à jeter aux chiens*; jeter des perles* aux pourceaux; jeter sa langue aux chats*, aux chiens*.
2. [L'obj. second désigne une pers.] Une jeune femme s'avança en jetant une bourse à un écuyer vert (Flaub., MmeBovary, t. 2, 1857, p. 66).
Loc. verb. fig. Jeter son gant*, son mouchoir* à qqn.
3. Littér. [L'obj. second désigne un inanimé] La terre est immobile quand elle reçoit la graine que lui jette le laboureur (Barrès, Cahiers, t. 11, 1917, p. 228).
C. − Lancer ou rejeter (une chose usagée, encombrante, inutile).
1. Qqn jette qqc.Les blessés redressés jetaient leur fusil, l'équipement, la musette, et partaient en courant (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 286).
Qqn jette qqc. + compl. prép. introduit par à.Jeter à la poubelle. Il retourne à l'instant chez lui, jette au feu tous ses certificats de service (Chateaubr., Génie, t. 2, 1803, p. 509).Le Kaani, pittoresque? Ce qu'a de pittoresque une vieille paire de bottes éculées et crottées. Jetez-moi ça au fumier (Barrès, Cahiers, t. 11, 1914, p. 49).Je jette au panier ce document périmé (Sartre, Mots,1964, p. 201).
Loc. verb. fig. Jeter l'argent* par les fenêtres; jeter les/ses armes*; jeter le froc* aux orties; presser l'orange et jeter l'écorce*; jeter du lest*; jeter le manche après la cognée*; jeter le masque*; jeter au vent*, en l'air*.
2. [Le suj. désigne un cervidé] Jeter sa tête. Perdre naturellement ses bois. (Ds Ac., Littré, Lar. Lang. fr.).
D. − P. ext.
1. Qqn jette qqc. (+ compl. prép.).
a) Mettre, déposer (le plus souvent avec vivacité ou à la hâte, et/ou de façon désordonnée). La petite mère, dit-il à la femme, en espagnol, en jetant son manteau dans un coin, on ne bavarde pas chez vous? (Ponson du Terr., Rocambole, t. 5, 1859, p. 155).Le soir même il prenait le train après avoir jeté à la poste une lettre adressée à M. le comte André de Jussat (Bourget, Disciple,1889, p. 223):
4. Soudain, on l'appelle du dehors : « Patron! On repêche un macchab.. Amenez-vous! On sera aux premières! « Vite, Lecouvreur jette son tablier; le père Deborger gardera la boutique. Dabit, Hôtel Nord,1929, p. 90.
[L'obj. désigne un animal] Le petit cochon noir fut livré pour quarante-cinq francs cinquante (...). Aussitôt, l'animal fut soulevé, jeté en travers sur le cou de Braunens, les pattes de chaque côté (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 74).
En partic.
α) [L'obj. désigne un vêtement] Mettre sommairement, à la hâte. Jeter un châle sur ses épaules, sur le dos de qqn. S'étant jeté un manteau sur les épaules, elle mena ses amies et le graveur dans le jardin (France, Dieux ont soif,1912, p. 312).
BEAUX-ARTS. Jeter une draperie. La disposer de manière élégante, avec une négligence étudiée. Les draperies [du buste du Piron] sont largement jetées (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 7, 1867 [1864], p. 464).
Loc. verb. fig. Jeter un manteau*, le manteau* de Noé; jeter un voile* sur qqc.
β) [L'obj. désigne un aliment] Mettre rapidement, déposer vivement. Prenez six gros oignons, trois racines de carottes, une poignée de persil; hachez le tout et le jetez dans une casserole, où vous le ferez chauffer (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 340).
Loc. verb. pop. Se jeter qqc. dans le gosier. Le manger, le boire; [p. ell. de verre] s'en jeter un (derrière la cravate). Boire un verre. Y a Gabriel (...) qui nous invite tous (...) à venir s'en jeter un en le regardant faire son numéro. S'en jeter un et j'espère bien plusieurs (Queneau, Zazie,1959, p. 186).
γ) [L'obj. désigne des signes d'écriture, un dessin] Jeter (sur le papier). Écrire, tracer à la hâte. Malgré lui, il traçait ces lignes (...). Il avait d'abord jeté les croquis rapidement; il s'appliqua ensuite à conduire le fusain avec lenteur (Zola, Th. Raquin,1867, p. 172).Le peintre-né, le coloriste, jette à peine une esquisse de traits généraux. Tout de suite il veut colorer (Mauclair, De Watteau à Whistler,1905, p. 72).Je ne sais plus à la suite de quelle lecture, de quelle conversation ou de quel rêve, j'ai jeté ces lignes sur le papier? (Martin du G., Souv. autobiogr.,1945, p. cxxvii).[P. méton.] Jeter ses idées sur le papier. (Dict. xxes.).
δ) [L'obj. désigne un poids] Déposer (avec plus ou moins de force et de vivacité). Jeter un poids dans le plateau d'une balance. (Dic. xxes.).
Au fig. Jeter son épée* dans la balance; jeter son autorité* dans ce débat.
ε) Vieilli. [L'obj. désigne une œuvre, un personnage] Au part. passé. Particulièrement réussi. Synon. pop. torché.Quant au don Juan de Namouna, à cette forme nouvelle du roué (...), il était si charmant, si hardiment jeté, il était l'occasion de si beaux vers (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 13, 1857, p. 367).Cette lettre de Marceau enflamma le régiment (...). − C'est jeté, hein! disait le brigadier-trompette (D'Esparbès, Tumulte,1905, p. 141).
b) Spécialement
ARCHITECTURE
α) Jeter les bases, les fondations, les fondements d'(un édifice). Commencer la construction de. Ce fut le calife Abdérame Ierqui jeta les fondements de la mosquée de Cordoue vers la fin du viiiesiècle (Gautier, Tra los montes,1843, p. 310).Ils [les premiers rapatriés] jetèrent les fondements du temple (...). Les travaux interrompus par la jalousie des samaritains, furent repris en la deuxième année de Darius et achevés la sixième (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 1002).
Au fig. Amorcer ou permettre le développement de, établir les grandes lignes de. Jeter les bases d'une science, d'une théorie. Peppin reprend l'Exarchat, le donne au pape, et jette les fondements de la royauté temporelle des pontifes (Chateaubr., Ét. ou Disc. hist., t. 3, 1831, p. 246).Avant la cinquantaine, il posséderait à son actif nombre de découvertes; et, surtout, il aurait déjà jeté les bases de cette méthode personnelle, encore confuse (Martin du G., Thib., Consult., 1928, p. 1130).Les mesures prises au cours des dernières années ont permis de jeter les bases de la nouvelle orientation que le gouvernement entendait donner à sa politique économique (Amén. terr.,1964, p. 22).
β) Au part. passé. Construit (sur un terrain en pente). Il y avait quelques beaux palais d'ambassadeurs jetés sur les terrasses en pente de Galata (Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 350).Il (...) passa devant le mélancolique cimetière de Pradeau, jeté au flanc de la colline (Sand, Jeanne,1844, p. 30).
FOND. Jeter (une figure) en moule; jeter (une statue) en bronze, jeter (un objet) en fonte. Couler dans un moule; couler dans un métal. Les Florentins (...) voulaient jeter en bronze les portes du baptistère (Stendhal, Hist. peint. Ital., t. 1, 1817, p. 123).
Au fig., littér. Couler. L'arme où l'on sert est le moule où l'on jette son caractère, où il se change et se refond pour prendre une forme générale imprimée pour toujours (Vigny, Serv. et grand. milit.,1835, p. 23).
Emploi pronom. réfl. à sens passif. Mais le goût et les mœurs ne se jettent pas d'une seule fonte. Le passé traîne ses restes dans le présent (Chateaubr., Rancé,1844, p. 12).
IMPR. Jeter un (du) blanc. Mettre une interligne entre deux lignes. Jeter une (des) espace(s). Mettre une espace entre deux mots. Il ne s'ensuit pas cependant qu'on doive jeter des espaces égales entre chaque mot, ou entre chaque lettre lorsqu'elles doivent être exceptionnellement espacées (E. Leclerc, Nouv. manuel typogr.,1932, p. 8).
JEUX
Jeter une carte. La jouer. Jeter des cartes. À certains jeux (comme le piquet ou l'écarté), se défaire de certaines cartes pour en prendre d'autres. J'ai jeté les piques (Ac.1878-1935).
Jeter les dés. Les lancer sur la table de jeu. Au fig. Les dés* sont jetés. P. anal. Le sort* en est jeté.
c) Au fig. [L'obj. désigne un inanimé abstr.] Placer en dernier recours. C'est dans un prêtre qu'on jette sa dernière confiance (Montherl., Malesta,1946, II, 4, p. 471).
2. Qqn (ou p. méton. qqc.) jette qqn (en un lieu).Vieilli et fam. Déposer sans s'arrêter longtemps. Il y a deux manières d'aller à Vitré (...) ou bien vous prenez la digilence de Rennes qui vous jette en passant sur la place (Nerval, Nouv. et fantais.,1855, p. 151).Vous n'avez pas quelque course pressée, docteur Roudine? Je vous jetterais, en route. J'ai une place pour vous dans mon auto (Bourget, Némésis,1918, p. 239).
E. − Jeter qqc. + compl. prép.
1. [L'obj. désigne une lumière ou une ombre] Jeter sur.Synon. de projeter.Les réflecteurs, qui jetaient toute la lumière sur le puits, éclairaient vivement les rampes de fer (Zola, Germinal,1885, p. 1151).Le maréchal et son ouvrier (...) jetaient sur le mur de grandes ombres brusques (Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 21):
5. ... quelques arbustes à large feuille, quelques jeunes touffes de platanes et de sycomores jetaient une tache d'ombre sur l'herbe, pour nous abriter et tenir les chevaux au frais. Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 21.
Au fig.
Jeter un éclairage, un jour, une clarté, une lumière (+ adj.) sur. Éclairer de façon nouvelle, expliquer de façon inédite. Ces phénomènes (...) jettent un grand jour sur ces mêmes propriétés qu'ils nous montrent en action (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. v).Elle [la classification de Gerhardt] a jeté une vive clarté sur l'étude de presque toutes les matières volatiles (Berthelot, Synth. chim.,1876, p. 153).Les recherches paléobotaniques poursuivies depuis un demi-siècle ont jeté une vive lumière sur l'évolution du règne végétal (Hist. gén. sc.,t. 3, vol. 2, 1964, p. 763).
Jeter une ombre sur. Assombrir, ternir. Le désir unanime des délégués socialistes au Parlement est (...) d'éviter tout ce qui pourrait jeter une ombre sur la visite officielle de l'Italie à la France (Jaurès, Paix menacée,1914, p. 13).
2. [L'obj. désigne un sentiment, une disposition d'esprit]
a) Synon. produire, susciter.Jeter l'effroi, l'épouvante, la terreur. Son rire franc jetait de la joie autour d'elle (Maupass., Une Vie,1883, p. 5).La baisse des assignats jette un trouble extrême dans toutes les transactions (Jaurès, Ét. soc.,1901, p. 113).
Loc. verb. Jeter un froid*.
b) Jeter sur.Faire tomber sur. Jeter le ridicule sur qqn. Je vois qu'il jette le plus terrible soupçon sur Rouvier (Barrès, Cahiers, t. 5, 1907, p. 184).En cinq ans une auto n'est plus qu'un vieux clou ruineux, qui jette le discrédit sur son propriétaire (J.-R. Bloch, Dest. du S.,1931, p. 143).
II. − Qqn/qqc. jette qqc./qqn + compl. prép.
A. − Pousser, diriger avec force ou violence (dans une direction donnée). Leur mère s'élança, furieuse, et, les prenant chacun par un bras, elle les jeta dans l'appartement en les secouant avec vigueur (Maupass., Contes et nouv., t. 1, En fam., 1881, p. 334).Tout à coup, une explosion formidable tombe sur nous. Je tremble jusqu'au crâne, (...) une odeur brûlante de soufre me pénètre les narines (...). La terre s'est ouverte devant moi. Je me sens soulevé et jeté de côté, plié, étouffé et aveuglé à demi dans cet éclair de tonnerre (Barbusse, Feu,1916, p. 184).Entre les phrases, les cahots jetaient les interlocuteurs l'un sur l'autre (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 327).
[L'obj. désigne un animal attelé ou monté ou un moyen de locomotion] Diriger de façon délibérée. Une malle-poste au grand galop se précipitait comme une trombe (...) d'une secousse de ses guides, il [le postillon] les jeta [les chevaux] dans le débord (Flaub., Cœur simple,1877, p. 59).Phil (...) jeta sa bicyclette d'un côté et son propre corps de l'autre, sur l'herbe crayeuse du talus (Colette, Blé en herbe,1923, p. 81).Il avait, presque sans ralentir, jeté la voiture dans un chemin de traverse. Ils roulèrent encore un moment puis il freina brusquement et rangea l'auto au bout du chemin sous un bouquet d'arbres (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 157).
Vx et région. Jeter une porte. La claquer. D'autres (...) disaient : je n'y tiens plus! et sortaient au milieu d'un acte d'Hernani en jetant la porte de leur loge avec violence (MmeV. Hugo, Hugo,1863, p. 132).Jansoulet s'arrêta, dégrisé de sa colère, puis avec un geste de dégoût s'élança dehors, en jetant les portes (A. Daudet, Nabab,1877, p. 136).
[Le suj. désigne une force naturelle] Qu'il était charmant! ce petit lac, où le vent jetait quelquefois les pommes de pin de la forêt (Krüdener, Valérie,1803, p. 50).Le fleuve vient de jeter encore un noyé sur sa rive (Dumas père, Tour Nesle,1832, II, 2, p. 28).Voici le vent, qui est la plus grande force de la nature, qui (...) soulève la mer en montagnes d'eau, (...) et jette aux brisants les grands navires (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Horla, 1886, p. 1103).
B. − En partic.
1. Littér. et vieilli. Jeter qqn à + inf.Envoyer quelqu'un pour. Cela ira à destination par mon fils. Jetez un de vos clercs à me le ramener (Druon, Reine étranglée,1955, p. 106).
2. Expressions
a) Jeter qqn + compl. prép. désignant un lieu de détention.Jeter au cachot, dans les fers, aux oubliettes, en prison. Dans beaucoup de kommandos des sous-officiers se croisaient les bras. On les jetait en cellule, on les rossait, on les faisait jeûner, ils n'en démordaient pas (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 262).
P. anal. Croyez-moi, faites la part du feu et assoupissez tout cela par un mariage. − Je jetterais plutôt ma fille au fond d'un couvent! répondit l'inflexible matrone (Theuriet, Mar. Gérard,1875, p. 206).
Emploi pronom. réfl. MlleAïssé (...) déclara que si on [le Régent] continuait de l'obséder, elle se jetterait dans un couvent (Sainte-Beuve, Portr. littér., t. 3, 1844-64, p. 143).
b) Jeter qqn + compl. prép. désignant un supplice.Jeter au feu; jeter les chrétiens aux lions.
c) Loc. verb.
Jeter dehors*, sur le pavé*, à la porte*, à/dans la rue*.
Pop. Jeter qqn. Mettre à la porte. Se faire jeter. Se faire mettre à la porte.
Jeter (une femme) à la rue*, au trottoir*.
Jeter une femme (à la tête, dans les bras, dans le lit d'un homme). La pousser avec insistance vers lui. Mademoiselle Merquem est la mère de l'enfant, M. de Montroger en est le père, et voilà ce qui l'empêche d'épouser les jeunes personnes qu'on lui jette à la tête? (Sand, MlleMerquem,1868, p. 78).Pourquoi Mohammed me l'avait-il donnée? (...) avait-il obéi à une pensée plus complexe, plus pratique, moins généreuse en jetant dans mon lit cette fille qui m'avait plu? (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Allouma, 1889, p. 1315).Un mois après, cet assureur à belle moustache lui jetait son amie dans les bras, friand de voir son trouble et son embarras en face des femmes (Montherl., Célibataires,1934, p. 856).
Jeter bas*, à bas, à terre. Faire tomber. Synon. abattre.
[L'obj. désigne un inanimé concr.] L'ouragan a jeté bas les tilleuls l'un après l'autre (Barrès, Cahiers, t. 6, 1908, p. 94).Vous ne sauriez imaginer (...) quelle horreur me saisit quand je vis s'accomplir ce crime [la démolition du château d'Issy]. Jeter à bas ce radieux édifice! (Rodin, Art,1911, p. 13).L'amas des cimes mi-rompues par le choc sur le sol fut tel qu'elles prenaient de loin l'aspect d'un édifice jeté bas par un tremblement de terre (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 48).
[L'obj. désigne une pers.] Le vent embusqué dans les saules l'avait assaillie à la gorge et quasiment jetée par terre (Guèvremont, Survenant,1945, p. 27):
6. Ils [les soldats] avaient tiré (...). Les cinq autres coups avaient jeté bas la Brûlé et le porion Richomme (...). La vieille, la gorge ouverte, s'était abattue toute raide et craquante comme un fagot de bois sec... Zola, Germinal,1885, p. 1509.
Au fig. [L'obj. désigne un inanimé abstr.] Synon. de détruire, ruiner.Dans l'intervalle il avait détruit la République romaine et restauré en 1849 cette papauté qu'il voulait jeter bas en 1831 (Hugo, Nap. le Pt,1852, p. 18).La réapparition de Larsan, en gare de Bourg, avait jeté bas tous les plans de voyage de M. et MmeDarzac (G. Leroux, Parfum,1908, p. 35).
3. ART MILIT.
a) Jeter qqn dans.Faire intervenir inopinément, en comptant sur un effet de surprise :
7. ... soit que, − ce qui (...) serait le projet du général Foch − nous jetions nos dernières forces dans une attaque sur tous les fronts, et prenions des gages sérieux, avant que les Américains se soient mis en branle. Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 809.
b) Jeter (un pays) contre (un autre). Faire entrer en conflit. La classe ouvrière allemande s'opposerait (...) à toute tentative criminelle pour jeter l'un contre l'autre les deux peuples voisins (Jaurès, Paix menacée,1914, p. 227).
4. ÉCON. Jeter sur le marché
a) Faire intervenir (un élément de capital) en vue d'une action efficace. Jeter des actions sur le marché. (Dict. xxes.).
b) Mettre dans les circuits économiques
pour être vendu. L'imprimerie a pu jeter rapidement sur le marché, moyennant des frais généraux réduits, de nombreux exemplaires, tous excellents, d'un même ouvrage (Civilis. écr.,1939, p. 14-5).
pour produire. Il était très supérieur aux jeunes gens que l'école hôtelière jette sur le marché par promotions (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 227).
C. − Au fig. Qqc./qqn jette qqn + compl. prép.
1. Pousser avec force. Jeter qqn dans qqc.Il résistait aux offres de la vicomtesse qui lui voulait faire vendre sa charge et le jeter dans la magistrature (Balzac, Gobseck,1830, p. 381).Madeleine (...) ne pouvait ressentir aucun intérêt pour un étranger que le hasard avait jeté dans sa vie comme un accident (Fromentin, Dominique,1863, p. 112).Belombre, qu'une vie fort agitée avait jeté dans le théâtre (Gautier, Fracasse,1863, p. 167).
Emploi pronom. réfl. S'élancer. Se pénétrer des exercices de saint Ignace tout en se jetant dans la mêlée des intrigues politiques, n'est-ce point la perfection et comme la sainteté de la perversion? (Blondel, Action,1893, p. 9).
2. [Le compl. prép. désigne une pers.] Pousser vers. C'est cela que j'ai fait en l'épousant, j'ai obéi à cet imbécile emportement qui nous jette vers la femelle (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Cas de div., 1886, p. 1069).J'ai honte. Une brusque franchise me jette vers elle (Colette, Cl. s'en va,1903, p. 50).Deux amants que l'amour jetait l'un vers l'autre, par-dessus la souffrance (Camus, Peste,1947, p. 1273).
3. [Le compl. prép. désigne un sentiment, une attitude] Jeter qqn dans, à (rare) qqc.Mettre brusquement dans. Synon. plonger.Jeter dans le désespoir, dans l'embarras, dans le trouble. Ce spectacle grotesque jetait les deux guerriers à des transports de joie bruyante (Courteline, Train 8 h 47,1888, 2epart., I, p. 90).Ce bavardage jette mes voisines dans une gaîté immodérée (Colette, Cl. à l'école,1900, p. 212).Elle voyait bien que Samuel élevait Christophe autrement qu'elle n'était élevée. Et cela la jetait dans une grande incertitude (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 199):
8. ... le soir livide qui descendait, les feuillages noirs du jardin, les meubles presque indistincts dans l'ombre, jetaient Otto dans une telle extase, qu'il ne songeait pas à avancer. Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 247.
Loc. verb. Jeter hors de soi, hors de ses gonds*. Mettre brusquement dans une colère folle. Il y avait encore les récits des abominations de la commune, qui le jetaient hors de lui, en blessant son respect de la propriété et son besoin d'ordre (Zola, Débâcle,1892, p. 600).
III. − Qqn/qqc. jette qqc.Mouvoir (une partie de son corps); faire sortir de soi.
A. − Diriger vivement (dans une direction donnée).
1. Jeter les coudes en arrière, les jambes en avant. Comment t'appelles-tu? Pour me regarder le gars jette la tête trop en arrière (Vercel, Cap. Conan,1934, p. 48).Il m'aperçoit, (...) change de visage et jette les bras au ciel (Sartre, Mots,1964, p. 22):
9. − Et à ton idée, comment est-ce qu'il marche, le gendarme à pied? − Il jette son pied en claquant la route. C'est bien connu. Au lieu de moi... Tenez, regardez-moi marcher... Aymé, Jument,1933, p. 196.
Jeter les bras autour du cou de qqn. Entourer de ses bras le cou de quelqu'un avec vivacité, pour l'embrasser ou lui marquer son affection. Si tu t'étais éveillée, tu aurais jeté les bras autour de son cou, et peut-être ne serait-elle pas partie (Mauriac, Mal Aimés,1945, I, 1, p. 161).
Emploi intrans. , CHORÉGR. , rare Exécuter un jeté (v. ce mot II A). Lancée en l'air par son danseur, elle [une danseuse] « jette » en tournant (Levinson, Danse,1924, p. 264).
2. Jeter un regard, un (coup d') œil; jeter les yeux, les regards (éventuellement suivi d'un compl. prép.). Poser un regard plus ou moins rapide (sur); parcourir du regard. Elle ne jetait cependant les yeux ni à droite ni à gauche, de crainte de voir des choses dans les branches (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 467).Ne laissez pas amortir le feu, les enfants! Et Maria (...) ouvrait la petite porte du foyer, jetait un coup d'œil et s'en allait vers la pile de bois sans tarder (Hémon, M. Chapdelaine,1916, p. 116).Rhadidja prenait l'argent que Costals lui fourrait dans la main, sans jamais y jeter un regard (Montherl., Lépreuses,1939, p. 1437).
Au fig. Jeter les yeux, son regard, ses vues (sur qqn). Avoir sur lui des vues particulières. On lui cherche un époux (...). Il ne s'en est pas présenté encore, parce que tout le monde a des engagements; moi-même j'ai jeté mes vues autre part (Dumas père, Noce et enterrement,1826, I, 5, p. 82).
3. Jeter un sourire (+ adj.), un regard (+ adj.), un coup d'œil à qqn. Lui faire un signe d'intelligence; lui sourire, le regarder de telle ou telle façon. Au coude des rues, elle tournait un peu la tête, jetait un fin sourire à Coupeau (Zola, Assommoir,1877, p. 435):
10. « ... Il y a même un moment, tout au début, où il faut sauter par dessus un précipice : si on réfléchit, on ne le fait pas. Je sais que je ne sauterai plus jamais. » « Pourquoi? » Elle me jette un regard ironique et ne répond pas. Sartre, Nausée,1938, p. 183.
Emploi pronom. réfl. indir. Toutes les dames parurent se consulter en se jetant le même coup d'œil (Balzac, Femme aband.,1832, p. 264).
B. − Faire sortir de soi; émettre.
1. [Le suj. désigne un animé] Jeter des larmes. Le reptile jetait son venin (Ac.). En m'échappant à quelques pas de mes marmots, (...) secrètement, j'eusse jeté quelques pleurs bien amers (Balzac, Modeste Mignon,1844, p. 103).
Littér. Jeter (bas) qqn. Mettre au monde, accoucher de. On peut compter dans Paris beaucoup de mères de famille qui sont sur la paille et qui jettent un enfant au monde sans linge pour le recevoir (Balzac, Modeste Mignon,1844, p. 152).[Albret, à sa fille enceinte :] si tu accomplis ce que je t'ordonne, (...) tu jetteras bas un héros, un homme, et non un enfant « peureux et rechigné » (D'Esparbès, Roi,1901, p. 12).
[Avec un compl. d'obj. second] Les locataires de l'hôtel lui marchaient presque sur les pieds, en lui jetant des bouffées de tabac au visage (Zola, M. Férat,1868, p. 63).Marroca reprit, en me parlant dans la bouche, me jetant son haleine chaude au fond de la gorge (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Marroca, 1882, p. 791).
Jeter un baiser à qqn. Lui donner un baiser rapide. Jetant un baiser à son père, sur cette joue mal rasée qu'une heure auparavant il croyait abhorrer sans retour, il se leva vivement (Drieu La Roch., Rêv. bourg.,1939, p. 238).
a) Loc. verb. fig.
Jeter (tout) son feu*, feu* et flammes; jeter du jus*; jeter son venin*.
Fam. et vieilli. Jeter un mauvais, un vilain coton; ne pas jeter un beau coton. Être mal en point (sous l'aspect de la santé, de la réputation ou des affaires). Édouard Fould ne jette pas non plus un très beau coton. Son affaire n'est pas bonne (Mérimée, Lettres Viollet-le-Duc,1869, p. 164).
Pop. et fam. En jeter un coup. Travailler avec ardeur, s'activer. Synon. usuel en mettre un coup (fam. et pop.).Allons, mes enfants, jetons-en un coup, c'est pas long quand tout le monde s'y met (Barbusse, Feu,1916, p. 149).
b) En partic.
[Le suj. désigne une colonie d'abeilles] Jeter (un essaim). Essaimer. Ces abeilles n'ont point jeté cette année (Ac.).
[Le suj. est un cheval] Jeter sa gourme*. Au fig., cf. ibid.
[Le suj. est un cerf] Jeter ses fumées. Fienter. (Dict. xixeet xxes.).
2. [Le suj. désigne un végétal] Produire, pousser. Les feuilles de pervenche sont opposées, ovales, pointues, à pétioles courts, portées sur des tiges rampantes et qui jettent par-tout des racines (Kapeler, Caventou, Manuel pharm. et drog., t. 2, 1821, p. 586).
Emploi abs. Les arbres commencent à jeter (Ac.).
P. métaph. Ses instincts (...) ont éclaté tout à coup (...) dans la serre chaude de la richesse. Et, à mesure que la température s'élève autour de lui, ses vanités jettent de nouvelles pousses, de nouveaux bourgeons (Augier, Pierre de touche,1854, p. 107).
3. [Le suj. désigne un animé ou littér., un inanimé]
a) Émettre (un son) avec plus ou moins de force et de brusquerie. Synon. pousser.Jeter une exclamation, des cris d'allégresse. Mais le coq matinal A jeté son chant clair (Dumas père, Hamlet,1848, I, 3, p. 174).Les cornets à pistons jetaient leurs notes claires (Zola, Curée,1872, p. 557).Dans les campaniles (...), les lourdes cloches se balançaient et jetaient leurs appels graves au large du ciel (Coppée, Bonne souffr.,1898, p. 24).Ils ont lâché un coup [de fusil] en l'air comme une femme nerveuse jette un cri (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 145).
Loc. verb., fam. Jeter les hauts cris*.
Emploi pronom. réciproque indir. Nous traînions de pied en pied, (...) nous hélant en passant devant les enclos comme des pâtres, avec ce cri qu'ils se jettent pour s'appeler (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 73).Sur les collines (...), les moulins surmenés se jetaient l'un à l'autre leur cri déchirant (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1379).
b) Dire avec vivacité et brusquerie [souvent en incise]. Il était sorti (...) et en rentrant, avait jeté à sa belle-mère : « Eh bien, voilà : en t'abandonnant un quart de la succession, je puis te mettre dehors! » (Goncourt, Journal,1894, p. 668).Mais c'est moi qui lui ai fait connaître tout cela, jette-t-elle avec un redressement colère de la tête, tout, vous entendez bien, tout (Proust, Temps retr.,1922, p. 714).
Emploi pronom. réciproque indir. :
11. Il sait ce que sont ces combats africains, ces deux lignes affrontées qui se voient et se jettent des insultes, au milieu des rafales formidables du feu, la joie, la haine, visibles sur tous les fronts... Psichari, Voy. centur.,1914, p. 85.
Au part. passé, en cont. exclam., pop. Bien jeté! Bien dit. Synon. bien envoyé.Je voudrais voir, émit-il simplement, − que je sois obligé de faire deux fois, chez moi, la même observation. − Bien jeté! admira Lampieur (Garco, Homme traqué,1922, p. 66).
4. Faire jaillir, répandre. Les petits dauphins de cuivre, qui jettent un fil d'eau par la gueule (Zola, Ventre Paris,1873, p. 718).La cheminée [de la masure] jetait sur le ciel un filet de fumée bleue (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Saut, 1882, p. 10).
En partic.
a) [L'obj. désigne une lumière] Grâce à la vive clarté que jetait un cabaret, il reconnut décidément Jean Valjean (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 568).La lanterne jetait une grande clarté devant nous (Maupass., Contes et nouv., t. 2, MllePerle, 1886, p. 634).Les épaisses lames d'acier des haches montaient de nouveau, jetaient un éclair au soleil, retombaient avec un bruit sourd sur les grosses racines (Hémon, M. Chapdelaine,1916, p. 64).
P. anal. Ses yeux ne jetaient plus qu'une grise lueur (Theuriet, Mar. Gérard,1875, p. 24).Quand Alban bougeait, l'œil jetait un éclair (Montherl., Bestiaires,1926, p. 526).
Au fig. Jeter de l'éclat, un vif éclat; p. ell. pop., en jeter. Faire beaucoup d'effet, jouir d'un brillante réputation. Synon. pop. jeter du jus*.Cette faveur, en harmonie avec l'éclat que jetait Birotteau dans son arrondissement (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 65).Byron jette toujours un vif éclat, tandis que Walter Scott n'est plus guère lu que par les pensionnaires (Zola, Romanc. natur., Balzac, 1881, p. 43).La juiverie de Babylone a jeté autant d'éclat que celle de Jérusalem (Tharaud, An prochain,1924, p. 297).
b) [L'obj. désigne une odeur] Synon. de exhaler.Non loin du bourg, j'entrais dans cette lande qui jette vers le soir une odeur de lavande (Brizeux, Marie,1840, p. 23).
IV. − Emplois pronom. spécifiques
A. − Qqn se jette + compl. prép.
1. Se précipiter, s'élancer. Se jeter au secours de qqn. Le 2 août 1914, en apprenant la nouvelle de ce jour, je me suis jeté sur ma grammaire allemande que j'ai mise en pièces (Green, Journal,1932, p. 98).Simon se jetait sur l'homme, tête en avant, le frappait en pleine poitrine et le rejetait en arrière (Peisson, Parti Liverpool,1932, p. 235).
P. anal. Si un loup se jette sur un troupeau, il ne le dévore pas tout entier sur le champ (Lamennais, Paroles croyant,1834, p. 99).
En partic.
Se jeter au cou, dans les bras de qqn. S'élancer vers lui pour lui témoigner son affection, pour l'embrasser. Elle se jetait dans mes bras (...), elle me disait : − C'est que tu ne sais pas combien je t'aime! (Dumas fils, Dame Camélias,1848, p. 194).Elle se jetait à son cou (...). Elle lui mordait les lèvres, le dévorait de baisers (Dabit, Hôtel Nord,1929, p. 68).
Emploi pronom. réciproque. Marguerite : Il y eut un temps, Emmanuel, où, en nous revoyant après deux mois d'absence, nous nous serions jetés dans les bras l'un de l'autre (Dumas père, P. Jones,1838, I, 5, p. 137).
Se jeter aux genoux, aux pieds de qqn. Se précipiter à ses genoux, à ses pieds, pour le supplier. Tous ceux qui entourent Gessler (...) tâchent d'attendrir le barbare qui le condamne au plus affreux supplice; le vieillard, grand-père de l'enfant, se jette aux pieds de Gessler (Staël, Allemagne, t. 3, 1810, p. 12):
12. silvio : Pouvais-tu espérer qu'il me pardonnerait jamais? lucciana : J'espérais que tu te jetterais à ses pieds, lui disant : « Mon père, j'aime Lucciana et je regrette ma folie ». Salacrou, Terre ronde,1938, I, 4, p. 159.
Au fig. Se jeter à la tête de qqn. Aller vers quelqu'un avec empressement sans être désiré; lui faire des avances. Il ne tiendrait qu'à moi d'être invité par ce monsieur (...) mais moi, je ne me jette pas à la tête des gens (Kock, Compagn. Truffe,1861, p. 133).Claudine, qu'est-ce qu'on va faire de vous, si vous vous jetez comme ça à la tête des gens? Voyons, voyons, contenez un peu cette expansivité désordonnée! (Colette, Cl. Paris,1901, p. 88).
Se jeter sur la nourriture/sur + subst. désignant un aliment. Se précipiter sur quelque chose et consommer avec voracité. Ils se jettent sur la nourriture (...) d'abord occupés tout entiers à avaler, la bouche et le tour de la bouche graisseux comme des culasses (Barbusse, Feu,1916, p. 29).
Se laisser tomber. Elle se jetait toute habillée sur son lit (...) et fermait les yeux (Dabit, Hôtel Nord,1929, p. 86).Trempé de sueur, il s'est jeté sur la banquette, du côté de l'ombre (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 684).
2. Au fig. S'engager dans, se consacrer à quelque chose avec une passion immodérée. Jetez-vous tête baissée dans le travail (Flaub., Corresp.,1862, p. 20).Il se jetait dans la chronique scandaleuse. En cinq minutes, je sus avec détails toutes les coucheries illégitimes de la semaine (Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 125):
13. Freud a nommé chez la mère « complexe de Jocaste » l'attachement passionné, jaloux et possesseur dont parfois elle agrippe son fils; dans certains cas, elle s'y jette inconsciemment pour n'avoir pas trouvé auprès de son mari la réalisation de l'idéal viril qu'elle s'était formé... Mounier, Traité caract.,1946, p. 98.
Loc. verb. fig. Se jeter dans la gueule* du loup.
B. − Qqc. se jette + compl. prép.
1. Littér. S'abattre, se précipiter. Synon. tomber.
a) [Avec mouvement] Un précipice de quatre-vingts pieds à peu près, du haut duquel se jette une cascade superbe (Dumas père, Angèle,1834, II, 5, p. 145).Le temps est devenu tout à coup mauvais, un orage s'est jeté sur ce beau pays, où il n'avait pas plu depuis huit mois (Hugo, Fr. et Belg.,1885, p. 206).Le fabricant d'archets fait entrer à force le bout carré de la vis dans le trou du bouton, en ayant bien soin que cette vis ne se jette pas de côté (Maugin, Maigre, Nouv. manuel luthier,1929, [1869], p. 160).
b) [Sans mouvement] Un rhumatisme s'est jeté sur mon articulation, de sorte que je boite et souffre toujours (Flaub., Corresp.,1879, p. 246).
2. [Le suj. désigne un cours d'eau] Se jeter dans.Se déverser dans. Il s'y jette [dans un port] une rivière de huit à dix pieds de largeur (Voy. La Pérouse,t. 1, 1797, p. 133).Une petite rivière qui se jette dans la Sarthe (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 250).Quittant le bassin de l'Oubangui, on rejoint à Batangafo les eaux qui se jettent dans le lac Tchad (Gide, Voy. Congo,1927, p. 733).
P. anal.
[Avec idée d'écoulement] Des canaux lactifères qui se jettent les uns dans les autres, pour déboucher dans le sinus unique pour chaque glande et situé à la base du trayon (Garcin, Guide vétér.,1944, p. 124).
[Sans idée d'écoulement] Les rues dans les villes européennes se jettent dans d'autres rues : fermées à chacune de leurs extrémités, elles n'ont pas l'air de mener vers le dehors de la ville, on y tourne en rond (Sartre, Sit. III,1949, p. 114).
REM.
Jeté, -ée, adj.,pop. Qui n'a pas la perception de la réalité, qui a perdu conscience de ce qui l'entoure; en partic., ivre. Dans la France d'avant la guerre, on ne boit pas pour se soûler, comme chez l'étranger. Mais pour montrer qu'on sait boire. On n'est jamais complètement jeté, on a un verre « de trop » (Le Nouvel Observateur,21 juin 1980, p. 44).
Prononc. et Orth. : [ʒ(ə)te], (il) jette [ʒ εt]. Ac. 1694 et 1718 : jetter; dep. 1740 : jeter. (Ac. 1740 : suppression par l'abbé d'Olivet d'étymologismes du type appeller, jetter). Conjug. Ac. 1694-1740 : ll, tt pour noter [ε] qui précède dans les adj. et subst. en -el/-elle, -et/-ette et dans les verbes en -eler, -eter : il appelle, il jette; dep. 1762 : introduction de l'accent grave : il harcèle, il achète, etc., à côté de : il appelle, il jette, etc. (D'où une impression d'incohérence). V. Beaulieux, Hist. de l'orth. fr., t. 1, 1927, p. 268 et 169, p. 321 et 322, t. 2, Préface VIII et t. 2, p. 64 et 65 et p. 69 à 96; N. Catach, Les Modifications orth. des dict. de l'Académie Française, 1 et 2, Thèse compl., Paris, 1968. Étymol. et Hist. I. Pronom. A. 1. 2emoitié xes. « se mettre, se porter précipitamment » (St Léger, éd. J. Linskill, 224); 2. 1560 spéc. « se porter avidement, âprement (sur) » (J. Grevin, L'Olimpe, éd. L. Pinvert, p. 273 ds IGLF : le lion [...] se jette sur la pree); 3. 1751 en parlant d'un fleuve atteignant la mer (Encyclop. t. 1, p. 700, s.v. Arno). B. 1. Ca 1050 « se mettre dans la situation, dans l'état, dans la position de » (Alexis, éd. Chr. Storey, 357); 2. 1549 « s'engager, se consacrer à » (Du Bellay, Deffense et Illustration, éd. H. Chamard, p. 109). II. Trans. A. 1. a) Ca 880 « pousser vivement, précipiter (dans) » (Ste Eulalie ds Henry Chrestomathie, no2, vers 19); b) ca 1100 « mettre, placer (vivement, sans soin) » (Roland, éd. J. Bédier, 481); 2. 1568 fig. « mettre dans la disposition, la situation de, réduire à » (Garnier, Porcie, 969, Tragédies, éd. W. Foerster, I, p. 46 ds IGLF). B. 1. Fin xes. « pousser vivement (dehors), expulser, chasser » (avec un adverbe signifiant « dehors, à l'extérieur ») (Passion de Clermont, éd. d'A. S. Avalle, 72); 1130-40 id. sans adverbe donnant cette indication (Wace, Conception ND, éd. W. R. Ashford, 1104); 2. a) ca 1100 « tirer (de), extraire (au propre) » (Roland, éd. J. Bédier, 444); b) ca 1100 au fig. « tirer (de), faire échapper à » (ibid., 3787); c) 1540 « sortir d'un état, d'une situation, d'une disposition d'esprit » jeter hors de doute (Nicolas Herberay des Essars, Amadis, éd. H. Vaganay, 181 ds IGLF). C. 1. fin xes. « déterminer par le hasard (du jet des dés) » (Passion de Clermont, éd. d'A. S. Avalle, 270 : chi l'aura, Sort an gitad) a. fr. jeter sort différent du sens mod. de jeter un sort (cf. jeter son enchantement II E 3 b); 2. 1549 (Est., s.v. sort : jeter son sort sur aucun, et l'enchanter, voyez Enchanter et Ensorceler). D. 1. a) Ca 1050 « lancer » (Alexis, éd. Chr. Storey, 264); b) 1585 jetter à la face (Du Fail, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, II, 173 ds IGLF); 2. ca 1160 « lancer vers quelqu'un pour lui donner » (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 105); 3. a) ca 1100 « lancer, envoyer vers le bas, faire tomber » geter a terre (Roland, éd. J. Bédier, 464); b) 1160-74 spéc. ancres jeter (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 6484); 4. ca 1200 fauconn. « envoyer en vol libre pour chasser le gibier » (Renart, éd. E. Martin, XI, 1579). E. 1. Ca 1050 « faire jaillir hors de soi, produire » (ici, des larmes) (Alexis, éd. Chr. Storey, 584); 2. ca 1050 « id. » (des cris) (ibid., 73); 1690 jetter les hauts cris (Fur., s.v. cri); 3. a) 1176-81 « proférer, dire » (Chr. de Troyes, Chevalier lion, éd. M. Roques, 1356); b) fin xiiies./début xives. [date ms.] spéc. « proférer une parole magique » jeter (son) enchantement (Merlin, II, 223 ds T.-L.); c) 1350 geter sentensse (Hist. tirées de l'A.T., éd. H. Loh, p. 142, 15-18); 4. ca 1100 « répandre, émettre, rayonner de, diffuser » (Roland, éd. J. Bédier, 1809); 5. ca 1170 « fondre, couler dans un moule » (Rois, éd. E. R. Curtius, III, VII, 23); 6. a) 1322 bot. « engendrer (des tiges), faire croître à partir de soi » (Watriquet de Couvin, Dit de l'arbre royal, éd. A. Scheler, p. 99, 492); b) 1449 en parlant d'une colonie d'insectes, en emploi absolu (Archives du Nord, B 1684, fol. 34 rods IGLF : Pendant le temps que la dite chamberie sarcoit le dit Millot, ung brugon de mouches qui estoit la endroit jetta et tellement que, du pourpris du dit Pierre Besso ou il estoit, il arriva devant l'ostel d'un appelé Jehan); cf. 1636 (Monet, Abrégé du parallèle des langues fr. et lat. : Les abeilles ictent, Examen, emittunt apes). F. 1. a) Ca 1100 « disposer, mettre, placer » (Roland, éd. J. Bédier, 2652); b) 1684 « placer (une draperie) en disposant les plis d'une certaine manière » (Du Fresnoy, Art de Peinture, p. 32 ds Brunot t. 6, p. 732); 2. a) ca 1230 « établir, disposer solidement » jeter un fondement (au propre) (Eustache le Moine, 2148 ds T.-L.); b) début xviies. jeter les fondements au fig. (Larivey, Epistre, éd. Viollet-le-Duc, Anc. Théâtre fr., V, 2 ds IGLF); 3. 1280 « compter, calculer, répartir » (Mémorial des Finances de Robert II, éd. H. Jassemin d'apr. FEW t. 5, p. 15b); 4. a) 1387 « dessiner le projet de travaux de construction » (Compte des travaux Collège de Beauvais ds G. Fagniez, Documents relatifs à l'Histoire de l'Industrie et du Commerce en France, t. 2, p. 132 et 133); b) 1680 jetter sur le papier (Rich. : Quand on commence à composer, il faut jetter sur le papier tout ce qui vient en l'esprit). G. 1. Ca 1100 « lancer pour se débarrasser de » (Roland, éd. J. Bédier, 486); 2. ca 1215 au fig. « rejeter » (Raoul de Houdenc, Eles, 568 ds T.-L., s.v. puer). H. 1. 1130-40 « lancer pour répandre, semer » (Wace, Conception ND, éd. W. R. Ashford, 261); 2. 1604 au fig. jetter l'effroy (Montchrestien, Cartaginois, éd. Petit de Julleville, p. 134 ds IGLF). I. 1. a) Ca 1150 « faire mouvoir, avancer vivement une partie de son corps » (ici, le visage) (Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 3102); fin xiies. « id. » (les bras) (Orson de Beauvais, 174 ds T.-L.); b) 1580 au fig. « engager quelque chose de soi » (Garnier, Antigone, 1792, éd. W. Foerster, p. 52 ds IGLF : Jettant une ame aventureuse a travers les glaives pointus); 2. a) fin xiies. « brandir, frapper de (ici, une masse) » (Moniage Guillaume, 2613 ds T.-L.); b) fin xiies. « asséner (des coups) » (ibid., 2664, ibid.); c) ca 1450 au fig. (Vieil Testament, éd. J. de Rothschild, XXXIX, 37331, V, 32 : Dieu a jecté sur toy son ire); 3. a) ca 1220 « diriger (les yeux) vers » (J. Renart, Ombre, 913 ds T.-L.); 1erquart xives. [date ms.] (Chanson, ms. Oxford Bodl. Douce 308, Pastourelles, éd. J.-C. Rivière, I, 4, 15 : si me gete un dous regairt); b) 1564 jeter les yeux sur « avoir sur quelqu'un des vues particulières, choisir » (Indice et recueil universel de tous les mots principaux des livres de la Bible, p. 172 vo); c) 1604 jeter l'œil « considérer » (Montchrestien, David, éd. Petit de la Julleville, p. 282 ds IGLF : Jette l'œil seulement sur tes compassions). Du lat. vulg. jectāre; cette forme, attestée notamment en lat. chrét., est aussi à l'orig. des correspondants de jeter dans la plupart des autres lang. romanes et représente le lat. class. jactare, fréquentatif de jacere « jeter » (cf. FEW t. 5, pp. 12-24). Fréq. abs. littér. : 21 089. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 29 179, b) 37 620; xxes. : a) 33 565, b) 23 972. Bbg. Brüch (J.). Über zwei Punkte der romanischen Lautgeschichte... Arch. St. n. Spr. 1915, t. 133, pp. 354-365. - Chautard (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 105. - Quem. DDL t. 6, 14.