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* Dans l'article "JARDIN,, subst. masc."
JARDIN, subst. masc.
A. − Terrain, plus ou moins étendu, planté de végétaux.
1. Terrain généralement clos, attenant ou non à une habitation, planté de végétaux utiles ou d'agrément. Allées, arbres d'un jardin; beau jardin. Il me montra donc ses cours et ses bâtiments, les jardins d'agrément, les vergers et les potagers (Balzac, Lys,1836, p. 66).C'était (...) aux environs de Pâques, alors qu'au jardin, en même temps que les giroflées et les tulipes, s'épanouissaient suavement les lilas (Coppée, Bonne souffr.,1898, p. 24).
Entre cour et jardin :
1. Mon oncle Aymar habitait (...) un grand hôtel, entre cour et jardin. Mais le jardin était petit, et il avait loué, pas loin de chez lui, près de la porte Désilles, un grand jardin potager où sa nombreuse famille pouvait s'ébattre en liberté. Gyp, Souv. pte fille,1928, p. 74.
SYNT. Jardin fleuriste, fruitier, maraîcher, verger; jardin abandonné, charmant, fleuri, intérieur; jardin de l'hôtel, d'une villa; jardin de rapport; jardin de buis, de roses; jardin en friche; jardins du casino, de la ville; banc, cabane, chaise, chapeau de jardin; grille, haie, mur, porte, terrasse d'un jardin; amateur de jardins; à l'entrée, au bout, au fond du jardin; traverser le jardin; jouer, travailler au jardin, dans le jardin; aller, descendre, se promener au jardin, dans le jardin; entraîner quelqu'un au jardin, dans le jardin; donner, ouvrir sur le jardin; faire un tour de jardin, dans le jardin.
Jardin anglais*, à l'anglaise*, pittoresque.
Jardin français*, à la française*, classique, régulier.
Jardin familial. Terrain dont la location est soumise à des lois spéciales ayant leur origine dans la législation sur les H.B.M. (habitations à bon marché) et qui est cultivé personnellement par son locataire pour sa propre consommation et non à des fins commerciales. L'opportunité de jardins familiaux (...) s'appréciera en fonction du niveau social présumé (Gds ensembles habit.,1963, p. 26).
Jardin ouvrier. Terrain mis à la disposition d'un père de famille dans le cadre d'une œuvre sociale ou d'une initiative privée pour subvenir aux seuls besoins du foyer. Il eut faim, traîna, erra, sans logis, dormant au hasard dans les baraques des jardins ouvriers (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 186).
Jardin suspendu. Jardin disposé en terrasses. Les jardins suspendus de Babylone, les vastes palais des rois (...) attestent le règne des beaux-arts dans l'empire de Cyrus (Chateaubr., Essai Révol., t. 1, 1797, p. 330):
2. Il flâna dans Rome, et autour. La lumière romaine, les jardins suspendus, la campagne, que ceint, comme une écharpe d'or, la mer ensoleillée, lui révélèrent peu à peu le secret de la terre enchantée. Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1450.
Jardin de curé. Petit jardin bien entretenu, cultivé de façon rationnelle et comprenant une grande variété de plantes :
3. Le jardin, d'environ un arpent et clos de murs, était un jardin de curé, c'est-à-dire plein d'espaliers, d'arbres à fruits, de treilles, aux allées sablées et bordées de quenouilles, à carrés de légumes fumés avec le fumier provenant de l'écurie. Balzac, Paysans,1844, p. 246.
Jardin d'hiver. Pièce vitrée, serre dans laquelle poussent ou sont conservées des plantes sensibles au froid. Les feuillages immobiles du jardin d'hiver paraissaient pris dans un cristal transparent (Gracq, Syrtes,1951, p. 175).
[P. oppos. à la nature non domestiquée] Victorine (...) en avait fait quatre [des couronnes] (...) avec des fleurs des prés et les premières fleurs des jardins (Ramuz, Gde peur mont.,1926, p. 47).Les fraises de jardin et celles des bois (Pourrat, Gaspard,1930, p. 96).
2. [En tant que lieu d'un intérêt plus général, collectif ou destiné à des études particulières]
Jardin (public). Espace d'une certaine importance ménagé dans une ville, agrémenté d'arbres, de fleurs, de pelouses et destiné à la promenade, aux jeux des citadins. Le jardin du Luxembourg, des Tuileries :
4. Il se trouva dans un jardin public. Un enfant vint lui poser des gâteaux de sable sur les pans de sa redingote; d'autres, enhardis, s'approchèrent avec des audaces de moineaux. Puis, peu à peu interdits, (...) ils se mirent à regarder peureusement et doucement (...) ce grand monsieur si triste... M. Mauperin se leva et sortit du jardin. Goncourt, R. Mauperin,1864, p. 288.
Jardin botanique, jardin des plantes. Terrain d'une certaine importance où des végétaux sont cultivés et étudiés. Je tenais dans ma main la reine des Malvacées! (...) comment l'envoyer de si loin au Jardin des Plantes de Hambourg? (About, Roi mont.,1857, p. 132).Nos rêveries louvoyaient souvent aux abords du jardin botanique de Baillon (Duhamel, Jard. bêtes sauv.,1934, p. 61).
Jardin d'acclimatation. Endroit où l'on essaie d'acclimater des plantes et des animaux. Cette île était aussi à jour, pour les espèces à la mode, qu'un jardin d'acclimatation (Giraudoux, Suzanne,1921, p. 75).
Jardin zoologique (p. anal.). Vaste terrain regroupant toutes sortes d'animaux pour l'étude scientifique ou la curiosité du public. Un fossé (...) vous sépare [une chatte] de ceux qui vont, au jardin zoologique, narguer les félins (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 230).
3. Expr. fig.
a) Faire d'une chose comme des choux de son jardin. En disposer comme si c'était à soi (cf. Ac. 1798-1935).
b) Jeter une pierre, des pierres dans le jardin de qqn. Attaquer verbalement quelqu'un d'une façon allusive :
5. Au sortir de table (...), il [Charles X] me dit : « Chateaubriand, savez-vous que le National arrivé ce matin, déclare que j'avais le droit de faire mes ordonnances? − Sire, ai-je répondu, Votre Majesté jette des pierres dans mon jardin. » Le Roi indécis hésitait; puis prenant son parti : « J'ai quelque chose sur le cœur : vous m'avez diablement maltraité dans la première partie de votre discours à la Chambre des Pairs. » Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 251.
C'est (une chose est) une pierre dans le jardin de qqn. C'est une attaque voilée, indirecte, une chose désobligeante. Si le pauvre Germinal n'est pas joué, il aura été tout de même une fameuse pierre dans le jardin des imbéciles (Zola, Corresp.,1902, p. 647).
c) [P. allus. à la phrase de Voltaire qui termine Candide : « Il faut cultiver notre jardin », pour dire qu'il faut agir sans s'occuper de la marche du monde] :
6. − Le peuple? Il cultive son jardin. Il ne s'inquiète pas de nous. Chaque groupe de l'élite essaie de l'accaparer. Il ne se soucie d'aucun (...). Ils sont quelques millions qui n'usent même pas de leurs droits d'électeurs. Rolland, J.-Chr., Maison, 1909, p. 961.
B. − Domaine hist., littér. ou mythol.
1. Le dieu des jardins. Priape :
7. Grand'messe en l'honneur de saint Fiacre, patron des jardiniers. Quelqu'un sait-il, dans toute la Brie où il est particulièrement honoré, que ce saint, d'ailleurs authentique, a remplacé, très probablement, au viiesiècle, dans ces campagnes encore idolâtres, l'antique Priape, Dieu des jardins? Bloy, Journal,1901, p. 70.
2. Le jardin d'Éden, de délices, le premier jardin. Le paradis terrestre. On dirait véritablement que l'homme (...) se repent d'avoir choisi (...) dans le jardin de délices, d'Éden, le fruit qui donne la conscience du Bien et du Mal (Valéry, Variété IV,1938, p. 177).
3. Le jardin des Hespérides*.
4. Le(s) jardin(s) d'Épicure. Lieu où Épicure enseignait sa doctrine; secte correspondante. Des hommes voluptueux et corrompus se glissèrent souvent dans les jardins d'Épicure (Condorcet, Esq. tabl. hist.,1794, p. 74).
5. Les jardins de l'Académie*.
6. [P. réf. au jardin des Oliviers, lieu où commença la passion du Christ] Avoir vu pleurer mon cher Barrès, lui, si maître de soi!... Jardin des Oliviers dans Auteuil (Blanche, Modèles,1928, p. 67).
7. [P. réf. au Jardin des racines grecques, recueil des racines de la langue grecque élaboré par les grammairiens de Port-Royal] N'ayant, tout enfant, connu en fait de promenade et de jardin que le docte jardin des racines grecques (A. Daudet, Trente ans Paris,1888, p. 102).On le voit [A. France] au jardin des racines françaises attirant à soi la plus odorante et la plus rare, et quelquefois la plus naïve des fleurs (Valéry, Variété IV,1938p. 30).
8. THÉÂTRE. Côté* cour, côté jardin.
C. − P. anal. Ils vivent deux par deux, jouant, pêchant, allant regarder aux jardins de la mer les coquilles éclatantes, les anémones vivantes et fleuries (Mille, Barnavaux,1908, p. 127).Je m'enivrais des parfums somnolents exhalés par le jardin sauvage de sa chevelure (Milosz, Amour. initiation,1910, p. 95).
En partic.
1. Ce qui rappelle un jardin.
a) Jardin en réduction.
Jardins d'Adonis*. Je vous instruisais à faire avec ce sable (...) quelques fleurs des champs (...) ces jardins d'Adonis qui ne durent qu'une heure (France, Révolte anges,1914, p. 283).
Jardin japonais*.
b) Région, pays présentant certaines caractéristiques propres à un jardin (végétation abondante, fertilité, harmonie). Habiter, à l'ombre des villas, le jardin de l'Italie (Quinet, All. Ital.,1836, p. 161).
Le jardin de la France. La Touraine :
8. Dans ma géographie, j'ai vu qu'on appelait ce pays le jardin de la France. Jardin de la France! oui, et je l'aurais appelé comme ça, moi gamin!... ces parfums, ce calme, ces rives semées de maisons fraîches, et qui ourlent de vert et rose le ruban bleu de la Loire!... Vallès, J. Vingtras, Enf., 1879, p. 237.
2. Jardin d'enfants. Établissement privé recevant de jeunes enfants de moins de six ans (comparés à des plantes par Fröbel, instigateur de cette formule) dans un but d'éducation, de développement de leurs capacités par des exercices, des jeux appropriés. L'attachement à l'entreprise est mieux assuré par les « réalisations sociales » : cantines et restaurants (...), jardins d'enfants (Univers écon. et soc.,1960, p. 44-12).
D. − P. métaph. ou au fig.
1. Lieu, chose abstraite, harmonieuse que l'on apprécie, où s'épanouissent certaines richesses (sentiments, éléments culturels); personnalité pleine de chaleur humaine. Schumann, ô confident des âmes et des fleurs, (...) Jardin pensif, affectueux, frais et fidèle (Proust, Plais. et jours,1896, p. 139).Ma joie est un jardin dont vous êtes la rose (Noailles, Éblouiss.,1907, p. 81).Il ne faut jamais revenir au jardin de son enfance qui est un paradis perdu, le paradis des amours enfantines! (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 96).
2. En partic.
a) Jardin secret. Domaine propre à quelqu'un.Tout cela [la Porte Étroite, l'Immoraliste, les Nourritures] a formé un jardin secret, attentivement cultivé, dont nous avons aujourd'hui la clef (Thibaudet, Hist. litt. fr. de 1789 à nos jours,1936, p. 443).La liberté, c'est son jardin secret. Sa petite connivence avec lui-même (Sartre, Âge de raison,1945, p. 54).
b) [P. allus. au Cantique des Cantiques IV, 12-16, V, 1 où la femme, son sexe sont comparés à un jardin] :
9. On a même ajouté (les hommes, c'est si rosse) Que tu n'es plus qu'un porche où l'on entre en carrosse Une route, un jardin mal clos., Toulet, Vers inéd.,1920, p. 14.
REM.
Jardinerie, subst. fém.,,Établissement commercial, souvent de dimension importante, offrant tout ce qui concerne le jardin, principalement, pour les résidences situées à proximité des grandes agglomérations`` (J.O., 1974 ds Clé Mots).
Prononc. et Orth. : [ʒaʀdε ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 2equart du xiies. « terrain, généralement clos, où l'on cultive des végétaux utiles ou d'agrément » (Grand mal fit Adam, éd. H. Suchier, 88); b) 1732 jardin botanique « jardin où l'on cultive des plantes médicinales » (Nouv. maison rustique d'apr. FEW t. 16, p. 19b); 1798-99 « jardin où sont rassemblées des plantes de différentes espèces, classées de façon à en permettre l'observation scientifique » (E.-P. Ventenat, Tableau du règne végét. selon la méthode de Jussieu, t. 1); c) 1771 jardin anglais (L'Art de former les jardins modernes, ou l'art des jardins anglois, Paris, Jombert d'apr. le Cours complet d'agriculture... par une société d'agriculteurs, 1781-96, t. 6, p. 69); d) 1814 jardin français (Jouy, Hermite, t. 5, p. 259); 1859 jardin à la française (Du Camp, Hollande, p. 248); e) 1866 jardin d'hiver (Goncourt, Journal, p. 292); 2. 1532 « région riche, fertile » (Rabelais, Pantagruel, IX, 121, éd. V.L. Saulnier, p. 54 : jardin de France); 3. 1834 jardin zoologique (Michelet, Journal, p. 126); 4. 1859 jardin d'enfants (Id., ibid., p. 465). Remonte prob. à un gallo-rom. *hortus gardinus (gardinium attesté au ixes. en lat. médiév. ds Nierm.) « jardin entouré d'une clôture », dont le second élém. est issu de l'a. b. frq. *gart ou *gardo « clôture », cf., pour le sens, le got. garda « clôture » ainsi que, pour la forme, l'a. h. all. gart, garto « jardin », all. Garten, et le m. néerl. gaert (attesté dans des composés, boomgaert « jardin; verger », wijngaert « vignoble »), ainsi que l'a. fr. et le m. fr. jart, gart « jardin » (dep. le xiies. ds T.-L.; Gdf.). Du fr., jardin s'est répandu dans les autres lang. rom. (v. FEW t. 16, p. 21a; G. Rohlfs, Romanische Sprachgeographie, p. 110-111, 285) et en angl. (à partir de l'agn. gardin), cf. garden-party. Au sens 4, calque de l'all. Kindergarten, cette institution ayant été ainsi nommée par son fondateur, Fr. Fröbel, en 1840 (v. Brockhaus Enzykl.). Fréq. abs. littér. : 12 350. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 14 601, b) 22 473; xxes. : a) 21 691, b) 14 975. Bbg. Archit. 1972, p. 180. - Colomb. 1952-53, pp. 369-370. - Quem. DDL t. 17. - Walt. 1885, p. 67.