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GRENIER, subst. masc.
A. − Bâtiment rural ou partie élevée d'un bâtiment rural où l'on conserve des céréales, du fourrage ou de la paille. Grenier à blé, à mil, à foin; grenier sur pilotis. L'étendue de nos prairies et de nos moissons, qui comblent chaque année nos greniers et nos granges (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 178).Qu'est-ce que tes fermiers qui serrent leur blé trois ans en grenier pour attendre qu'il hausse sur les marchés, au risque de le voir pourrir et germer? (Gozlan, Notaire,1836, p. 176) :
1. Eh bien! enfants, une forte journée devant nous! Si l'héritage est tout labouré ce soir, je paye une tournée de vin rouge!... Qui va me rentrer mes foins avant l'orage?... Qui portera le plus de sacs au grenier?... Qui est assez brave pour monter à la fine pointe du châtaignier et gauler les châtaignes? R. Bazin, Blé,1907, p. 51.
HISTOIRE
Le plus souvent au plur., ANTIQ. ROMAINE. Grenier public. Bâtiment servant en particulier à emmagasiner les denrées de l'annone, dont le blé, ou les approvisionnements militaires. Caligula : Pardonnez-moi, mais les affaires de l'État, elles aussi, sont pressantes. Intendant, tu feras fermer les greniers publics. Je viens de signer le décret (Camus, Caligula,1944, II, 9, p. 45).
Le plus souvent au plur. Grenier d'abondance. Grenier de réserve créé sous la Convention pour emmagasiner le surplus des années d'abondance. Les réserves, les greniers d'abondance, ne sont que des moyens subsidiaires d'approvisionnement, et pour les temps de disette seulement (Say, Écon. pol.,1832, p. 209) :
2. On a dû renoncer à Paris à l'accaparement des blés fait pour le bon motif; les greniers construits sous l'Empire (...) sont restés inachevés. Des greniers [it. ds le texte] d'abondance nous avons fait un hôpital, à l'époque du choléra... Stendhal, Mém. touriste, t. 1, 1838, p. 456.
P. métaph. Ces usuriers maltais qui trouvaient un grenier d'abondance dans la misère et la prodigalité arabes (Tharaud, Fête arabe,1912, p. 178).Grenier d'abondance de l'homme, la femme se sait à peu près inépuisable (Colette, Ces plais.,1932, p. 42).
Grenier (à sel). [Sous l'Ancien Régime] Dépôt de sel où les sujets du roi étaient tenus de s'approvisionner. L'impôt exécré, celui dont le souvenir grondait encore au fond des hameaux, c'était la gabelle odieuse, les greniers à sel (Zola, Terre,1887, p. 78) :
3. Pays de petite gabelle. − Ils comprenaient les provinces du Sud-Est qui étaient alimentées par les marais salants du Midi. L'impôt [la gabelle] atteignait cinq à dix fois la valeur du sel. Le devoir du sel n'existait pas et les habitants pouvaient acheter dans le grenier de leur choix la quantité qu'ils désiraient. Il leur était simplement délivré un récépissé prouvant que le sel avait acquitté les droits. Stocker, Sel,1949, p. 100.
P. ext. Juridiction compétente pour traiter les causes relatives à la gabelle. Le côté Sconin [de la famille de J. Racine] a plus de brillant : l'aïeul Pierre fut procureur du roi des eaux et forêts, et président du grenier à sel (Mauriac, Vie Racine,1928, p. 9).
Au fig.
Région, pays qui produit beaucoup de blé. La Beauce, l'antique grenier de la France, la Beauce plate et sans eau, qui n'avait que son blé (Zola, Terre,1887p. 151).C'est ici le Xaintois, que César disait un grenier (Barrès, Amit. fr.,1903, p. 117).
Expr. proverbiale. C'est du blé en grenier (cf. blé A 2 b).
Fam., vieilli
Souvent p. iron. Un grenier à + subst.Chose qui abonde en. Je ne me suis point sali les pieds dans ce bouge à commentaires, dans ce grenier à bavardages, appelé l'École de Droit (Balzac, Contrat mar.,1835, p. 211).Je sens les mots tomber de ce grenier à sottises [l'âme des causeurs de tables d'hôte] dans leurs bouches d'imbéciles (Maupass., Sur l'eau,1888, p. 266).
Grenier à coups de poings. Celui, celle que l'on bat sans cesse. Elle devenait un vrai grenier à coups de poing. Coupeau avait un gourdin qu'il appelait son éventail à bourrique; et il éventait la bourgeoise, fallait voir! (Zola, Assommoir,1877, p. 751).,,Enfant qu'on ne peut corriger, quelque châtiment qu'on lui inflige`` (Littré) :
4. ... le dégoûtant Bruzelin (...), celui que notre maître, qui n'était pas doucereux, appelait le grenier [it. ds le texte] à coups de poings. Michelet, Mémor.,1820-22, p. 191.
Grenier à lentilles. Celui, celle dont le visage est marqué par la petite vérole. Tous des portiers et des lampistes, clama-t-il, et avec cela des gonsesses en soie et des pommadins! Il n'y a dans tout le public qu'un Andalou qui reluise et encore il est grêlé, un vrai grenier à lentilles! (Huysmans, Marthe,1876, p. 57).
Grenier à puces. Animal malpropre (en particulier chien, chat). (Dict. xixeet xxes.).
B. − P. ext. Partie la plus haute d'une maison, située immédiatement sous les combles, servant le plus souvent de débarras ou de logement. Mettre qqc. au grenier; être relégué dans un grenier; vivre dans un grenier; habiter un grenier. Va, va, un écrivain public est plus estimable que toi. Je finirai par te couper les vivres, et tu mourras dans un grenier (Musset, Il ne faut jurer,1840, I, 1, p. 98).Pour un bon bout de temps encore, j'ai mon petit grenier rue Racine et mes habitudes de quartier Latin (Sand, Corresp.,1862, p. 323).V. enchevêtrement ex. 1 :
5. Bravant le monde et les sots et les sages, Sans avenir, riche de mon printemps, Leste et joyeux je montais six étages. Dans un grenier qu'on est bien à vingt ans! Béranger, Chans., t. 3, 1829, p. 165.
PSYCHANAL. [À propos de la rêverie dans le grenier] L'escalier du grenier plus raide, plus fruste, on le monte toujours. Il a le signe de l'ascension vers la plus tranquille solitude. Quand je retourne rêver dans les greniers d'antan, je ne redescends jamais (Bachelard, Poét. espace,1957, p. 41).
SYNT. Grimper, monter au grenier; explorer, ranger un grenier; dormir, loger dans un grenier; servir de grenier; faux grenier; misérable, triste grenier; grenier d'artiste, d'étudiant, de peintre, de poète; lucarne, mansarde, soupente du grenier; richesses, trésors d'un grenier.
Loc. fam. De la cave au grenier. De bas en haut, de fond en comble; à fond, complètement. Courir, errer de la cave au grenier; faire visiter une maison de la cave au grenier. De longs couloirs étroits à travers les murs, qui vont de la cave au grenier, de la chambre de la servante à la chambre du seigneur (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Chats, 1886, p. 1065).Ellen fut touchée parce qu'il lui ôta l'aspirateur des mains et qu'il nettoya la maison de la cave au grenier : mais cette rage ménagère était suspecte (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 453) :
6. Elle décidait de l'entrée au logis et de la mort des cochons, grondait le jardinier, arrêtait le menu du déjeuner et du dîner, allait de la cave au grenier, du grenier à la cave, en y balayant tout à sa fantaisie sans rien trouver qui lui résistât. Balzac, Méd. camp.,1883, p. 31.
Loc. proverbiale. Aller de la cave au grenier (cf. cave3A 1).
[P. allus. littér. à la célèbre chanson de Béranger (cf. ex. 5)] Je n'ai jamais compris que dans un grenier on fût bien à vingt ans. Et dans un palais, y sera-t-on mal? (Flaub., Corresp.,1847, p. 67).L'accoutumance ainsi nous rend tout familier. D'ailleurs un grenier a son charme : dans un grenier qu'on est bien à vingt ans! (Amiel, Journal,1866, p. 235).
HIST. LITTÉR. Étage élevé de la maison des Goncourt à Auteuil où avaient lieu des réunions littéraires; p. méton., les habitués de ces réunions. Venir au Grenier; les amis, les familiers, les habitués du Grenier; les causeries, les conversations du Grenier. Zola vient chercher les impressions du Grenier sur sa pièce de Renée, qui va être jouée au Vaudeville (Goncourt, Journal,1887, p. 657).Dimanche 8 avril. Voici Paul Margueritte qui pousse la porte du Grenier, bien vivant, bien portant (Goncourt, Journal,1894, p. 550) :
7. Je me rappelle comment Leconte de Lisle passait ses après-midi à faire des bouts-rimés. Je me rappelle les fastidieuses conversations de métier du grenier Goncourt, de tous les cénacles. Barrès, Cahiers, t. 10, 1913, p. 181.
Rem. La docum. enregistre l'emploi de grenier pour désigner un lieu de spectacle (théâtre, cabaret, café-concert) situé à un étage élevé d'une maison. L'échelle de Jacob montant de la rue au grenier de Lampourde. À cette heure, le cabaret présentait un aspect lamentablement ridicule (Gautier, Fracasse, 1863, p. 325). Des coulisses du café-concert le « Grenier-Mondain » en face au 96, voilà qu'il débouche un orchestre de parfaits solistes (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 105).
C. − MAR. Plancher mobile constitué de claies, recouvert ou non d'une bâche, servant à protéger les marchandises chargées à même le fond du bateau. (Dict. xixeet xxes.).
Loc. En grenier. Synon. en vrac.Charger un navire, un bateau de grains en grenier; charger en grenier du blé, du sel, du charbon. Les blés, les avoines de cette province nous arrivent en grenier (Ac.).
Prononc. et Orth. : [gʀ ənje]. Ds Ac. dep. 1694. Cf. égrener. Étymol. et Hist. 1. 1160-74 guernier « endroit où l'on entrepose le grain » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, 2epart., 4188); 1erquart xiiies. grenier (Reclus de Molliens, Charité, 129, 5 ds T.-L.); 2. 1570 « partie située sous le toit d'une maison et servant de débarras » (Archives hist. de la Gironde, 31, 163 ds R. Ling. rom. t. 20, p. 81). Du lat. granarium (plus souvent employé au plur. granaria) « endroit où l'on conserve le grain, grenier ». Fréq. abs. littér. : 1 396. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 021, b) 1 960; xxes. : a) 3 116, b) 2 139. Bbg. Brüch (J.). Franz. grenier, menottes und ramer. Rom. Forsch. 1941, t. 55, pp. 207-209. - Kemna 1901, p. 94.