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FALLOIR, verbe impers.
I.
A.− Faire besoin, faire défaut, manquer. Je me suis assuré de la manœuvre des embarcations. Il me faut encore trois jours (Peisson, Parti Liverpool,1932, p. 21).Il lui fallait cent francs. D'abord il crevait de faim. Puis Georgina, sa maîtresse, avait besoin d'argent (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 169):
1. Oui, certes, le sang et la chair Furent mes complices joyeux Dans le délice radieux D'avoir trouvé le maître cher, Le beau guide en ce monde laid, Le conseil franc et l'âme forte Et cette verve qui m'emporte Chez la femme qu'il me fallait! Verlaine, Œuvres compl.,t. 3, Livre posth., 1896, p. 139.
[Dans certains tours où le ton, la structure dénotent un souhait] C'est un manoir comme cela qu'il me faudrait! (Delacroix, Journal,1853, p. 45).
Spéc. [Comme substitut de réclamer, demander] Combien vous faut-il pour votre journée? Que vous faut-il pour votre peine? (Ac.1932).Combien vous faut-il? − Cent mille francs pour trois ans, dit le comte. − Possible, dit Gobseck (Balzac, Gobseck,1830, p. 413).
B.− (Dans le tour il s'en faut de, que, signifiant une différence en moins). Manquer.
1. [Suivi d'un syntagme nom. ou d'un adv. de quantité]
a) Il s'en faut de + subst. indiquant une quantité. Il s'en faut de moitié que ce vase soit plein (Ac.1932).Il s'en fallait donc de sept à huit cents piastres pour qu'à eux deux Franz et Albert pussent réunir la somme demandée (Dumas père, Monte-Cristo;t. 1, 1846, p. 537).C'est moi qu'étais responsable et répréhensible au cas qu'il se casserait la hure... il s'en fallait toujours d'un fil! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 452).
b) Il s'en faut (de) + adv. de quantité. Il s'en faut de beaucoup que ces deux hommes soient égaux (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb.,t. 1, 1821, p. 217).Il ne s'en fallait guère qu'un accident ne mît un terme à tous mes projets (Chateaubr., Voy. Amér. et Ital.,t. 1, 1827, p. 16):
2. Notre père, notre père qui êtes aux cieux, de combien il s'en faut que votre nom soit sanctifié; de combien il s'en faut que votre règne arrive. Péguy, Myst. charité,1910, p. 8.
2. [Suivi d'une prop. complétive]
a) Il s'en faut que + prop. au subj. Un jour, j'avais prôné « La Bûcheronne » eh bien, il s'en fallait que la pièce fût bonne (Ponchon, Muse cabaret,1920, p. 274):
3. ... bien que la physique ait deux grandes sections, l'optique et l'acoustique, dont les noms suffisent pour indiquer la dépendance où elles se trouvent de nos deux sens les plus élevés, il s'en faut que les liens de dépendance soient aussi étroits pour l'une que pour l'autre. Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 148.
Absol. Il s'en faut. Loin de là. Mais je ne sais pas l'arabe assez bien pour cela, il s'en faut (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1859, p. 302).Elle n'est pas la plus laide, il s'en faut (Colette, Naiss. jour,1928, p. 25):
4. Quant à avoir tous les vices, il s'en faut. Tout de même je m'en accorde quelques-uns. Mais j'ai pas de défaut. Tandis que toi, t'as pas un vice, pas un en tout. Seulement, tu possèdes tous les défauts. Guèvremont, Survenant,1945, p. 164.
b) Il s'en faut bien que + prop. au subj. Il s'en faut bien qu'elle soit sans agréments, et depuis peu elle voyait fort souvent un certain abbé Marquinot de Dijon (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 467).Il s'en faut bien que tout ce qui est dans l'esprit ne soit dans le cœur (Bremond, Hist. sent. relig.,t. 4, 1920, p. 508).
Rem. L'emploi de la négation ne dans la prop. introduite par que est facultatif.
3. Peu s'en faut, tant s'en faut que + prop. au subj.Peu s'en fallait que je ne déchirasse tout cela (Gide, Journal,1893, p. 39):
5. Le flot de la colonisation chinoise, après s'être avancé du nord vers le sud, (...) finit (...) par se diviser, se ramifier en filets de plus en plus amincis. Mais tant il s'en faut que sa force d'expansion soit éteinte. Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum.,1921, p. 99.
Absolument
α) Peu s'en faut. Presque. Il a fini son travail ou peu s'en faut (Ac.1878-1932).
β) Tant s'en faut. Loin de là, bien au contraire. Bien que M. et MmeDe Cambremer ne fussent plus, tant s'en fallait, de la première jeunesse (Proust, Sodome,1922, p. 1087):
6. Vois-tu, dans ta caricature, C'est l'air dur que tu m'as prêté. Il n'est du tout dans ma nature. D'abord, je n'ai pas, tant s'en faut, La moustache aussi provocante; Avec ces crocs à la prévôt, J'ai l'air d'en défier cinquante. Ponchon, Muse cabaret,1920, p. 214.
II.− Être nécessaire, indispensable, utile, convenable, bienséant.
A.−
1. Il faut + subst. Après la messe, il fallut encore trois quarts d'heure pour atteindre le cimetière (Flaub., Cœur simple,1877, p. 44).S'il se mêle de conter une vieille histoire, il lui faudra (...) la naïveté des foules humaines qu'il fait revivre et la critique la mieux avertie (France, J. d'Arc,t. 1, 1908, p. lxxvi):
7. Il paraît qu'il y a dans le cerveau des femmes une case de moins, et, dans leur cœur, une fibre de plus que chez les hommes. Il fallait une organisation particulière, pour les rendre capables de supporter, soigner, caresser des enfants. Chamfort, Max et pens.,1794, p. 65.
2. Il faut + inf.Mais où personne ne serait capable de se procurer en vingt-quatre heures un de ces livres qu'il « faut » avoir lus (France, Vie littér.,1891, p. 259).Il faut me pardonner, père (Mauriac, Mal Aimés,1945, III, 1, p. 223):
8. ... j'eus le sentiment qu'un devoir m'était dicté : réparer l'injustice des hommes à l'égard de Silbermann. Il me fallait non seulement l'aimer, mais prendre son parti contre tous. Lacretelle, Silbermann,1922, p. 69.
[À l'imp., avec valeur de cond. passé] Il fallait me précipiter dans les flots de la Baltique, comme Mentor précipita Télémaque (Krüdener, Valérie,1803, p. 53).Orian. − C'est vrai, il a voulu absolument que je vous parle. Pensée. − Il fallait refuser, Orian (Claudel, Père hum.,1920, I, 3, p. 504).
Emploi emphatique. Il faut voir. Il est intéressant, il est bon, il est curieux de voir.
[Avec valeur exclam.] La carriole se remplissait, il fallait voir! (A. Daudet, Pt Chose,1868, p. 204).Après six mois de tels assauts, il fallait voir le cargo, il ne restait plus un pied carré de peinture sur la coque (Peisson, Parti Liverpool,1932, p. 46).
[Exprime une réticence ou un défi] C'est ce qu'il faut voir! Le duc. − (...) nous le sauverons! Dubois. − C'est ce qu'il faudra voir! (Dumas père, Fille du régent,1846, III, 11, p. 232):
9. Madame de Vaubert, qui ne répondait à toutes ses questions que par ces mots : − il faut voir, il faut attendre, − n'était rien moins que rassurante. Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 232.
3. Il faut que + prop. au subj. Il faut que jeunesse se passe. Il faut que toute influence cléricale cesse d'agir sur son esprit (Massis, Jugements,1923, p. 48).Il faut donc qu'un pouvoir nouveau assume la charge de diriger l'effort français dans la guerre (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 303):
10. Il fallait, pour qu'il reprît son élan, que la notion de nature recouvrât consistance et autonomie, que les apparences visibles recommençassent à valoir par elles-mêmes. Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 134.
Spéc. S'il faut que. S'il doit arriver que. Ce pauvre garçon est amoureux de vous. − S'il fallait que j'écoutasse tous ceux qui sont amoureux de moi, je n'aurais seulement pas le temps de dîner (Dumas fils, Dam. Cam.,1848, p. 87):
11. knock. − Ce n'est pas en soignant les morts subites que vous avez pu faire fortune? le docteur. − Évidemment. (...) Il nous reste... d'abord la grippe. Pas la grippe banale, (...) non, je pense aux grandes épidémies mondiales de grippe. knock. − Mais ça, dites donc, c'est comme le vin de la comète. S'il faut que j'attende la prochaine épidémie mondiale! ... Romains, Knock,1923, I p. 3.
B.−
1. [Exprime une conjecture] Il fallait de l'audace et je ne sais quelle candeur passionnée pour concevoir et entreprendre un livre de cette sorte (Lemaitre, Contemp.,1855, p. 137).Dieu sait que les voitures ne manquaient pas à Luchon! Il fallait être une Fondaudège pour y avoir amené son équipage (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 44):
12. teissier. Vous êtes bien sûr que M. Vigneron au moment de son décès vous devait encore deux mille francs? dupuis. Oui, monsieur..., oui monsieur. Il faudrait que ma femme eût fait une erreur dans ses calculs, mais je ne le pense pas. Becque, Corbeaux,1882, IV, 10, p. 245.
2. [Dans un syntagme exprimant une restriction]
a) Encore faut-il. Le moi est l'unité des instants. Encore faut-il que le contenu de ces instants ne l'empêche pas de prendre conscience de cette unité (J. Bousquet, Trad. du silence,1935-36, p. 9):
13. Il [le cheval] ne sait point souffler. Il s'excite de son action. Au cavalier de ménager, d'utiliser, d'exploiter ces ressources. Encore faut-il être le maître... Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 204.
b) [Dans une prop. cond. introduite par la conj. si] S'il faut. S'il fallait en croire le mouvement de tic qui parcourut la joue d'Aurifaber, la chose était d'importance (Jouve, Scène capit.,1935, p. 157):
14. Hélas! cette scène de « bal » n'eut, je le crains, rien d'exceptionnel, s'il faut en croire divers témoins directs que j'interroge tour à tour. Gide, Voy. Congo,1927, p. 743.
3. [Renforce une exclam.] Pourquoi faut-il que vous m'aimiez? (Musset, Confess. enf. s.,1836, p. 336):
15. hugo. − Rends-moi ces photos. jessica. − Douze photos de ta jeunesse rêveuse. À trois ans, à six ans, à huit, à dix, à douze, à seize. Tu les as emportées quand ton père t'a chassé, elles te suivent partout : comme il faut que tu t'aimes. Sartre, Mains sales,1948, 3etabl., I, p. 69.
C.− [Employé avec le substitut neutre le] Il le faut. Cela est nécessaire. Je suis condamné à parler autour des autres! Et il le faut, mon ministère ne va pas fort (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1896, p. 259).Un autre que moi, à supposer qu'il eût vu si clair, n'eût pas osé vous parler comme je fais ce soir. Il le faut cependant (Bernanos, Soleil Satan,1926, p. 133):
16. Les spirales d'encens et les accords de Luth Signalent ton entrée au temple de mémoire Et ton nom radieux chantera dans la gloire, Parce que tu m'aimas ainsi qu'il le fallut. Verlaine, Œuvres compl.,t. 3, Dédic., 1890, p. 140.
III.− Loc. Comme il faut
A.− À valeur adj.
1. Convenable, bienséant. Ça serait bien sage et bien comme il faut de sa part (Sand, Mare au diable,1846, p. 153).
2. De bonne éducation, bien élevé. C'était un grand savant. Un homme très comme il faut et d'une rectitude de vie qui commandait le respect (Prévert, Paroles,1946, p. 31).Il était petit et roux, avec un air comme il faut (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 27):
17. ... vous, qui avez révélé au monde qu'il existoit des gens sans naissance, comme si tous les hommes qui vivent n'étoient pas nés, des « gens de rien » qui étoient des hommes de mérite, et « d'honnêtes gens, des gens comme il faut » qui étoient les plus vils et les plus corrompus de tous les hommes. Robesp., Discours,Marc d'argent, t. 7, 1791, p. 166.
B.− À valeur adv. Comme cela doit être; d'une manière convenable, appropriée. Il signale des allures de la liberté qui l'importunent, (...) qui pourraient l'empêcher de terrasser comme il faut les spiritualistes, les mystiques (Veuillot, Odeurs de Paris,1866, p. 322):
18. Ce sont des sauvages, bon, mais qui après tout nous laissent bien tranquilles. Note que je suis prêt comme tout le monde à les recevoir comme il faut, s'ils revenaient. Gracq, Syrtes,1951, p. 67.
Rem. L'ell. du pron. il appartient à la lang. pop. S'il vient, vous le ferez attendre. Faut pas le faire passer dans ma chambre (T. Bernard, M. Codomat, 1907, p. 141). Mieux vaut rentrer. Faut être dispos demain (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 20). Ils barrent le chemin vers le pont... tire donc, bon dieu! Faut qu'on passe! (Genevoix, Raboliot, 1925).
Prononc. et Orth. : [falwa:ʀ]. Conjug. Verbe impers., 3 rad. : a) [fo-]. Ind. prés. : il faut; ind. fut. : il faudra; cond. prés. : il faudrait. b) [fal-]. Ind. imp. : il fallait; ind. passé simple : il fallut; ind. passé composé : il a fallu; ind. p.-q.-parf. : il avait fallu; ind. passé ant. : il eut fallu; ind. fut. ant. : il aura fallu; cond. 1reforme : il aurait fallu, 2eforme : il eût fallu; subj. imparf. : qu'il fallût; subj. passé : qu'il ait fallu; subj. p.q.-parf. : qu'il eût fallu; part. passé : fallu. c) [faj]. Subj. prés. : qu'il faille. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1160 petit en falt que « peu s'en faut que » (Enéas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 5436-37); 1176-81 molt po de chose s'an failloit (que) (Chr. de Troyes, Chevalier charrette, éd. M. Roques, 1434); 2. ca 1165 exprime le besoin, la nécessité (Chr. de Troyes, G. d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 900 : Et il plus a, et plus li faut); 3. mil. xves. impers. il faut que « il est inévitable que » (J. Régnier, Fortunes et adversités, éd. E. Droz, p. 99, 2756 ds IGLF : Ainsi fault que mon temps s'en aille); 4. 1548 (je dy) comme il faloit « comme il convenait » (N. du Fail, Baliverneries, éd. J. Assézat, p. 153 ds IGLF); 1790 loc. adj. (Le Rat du Châtelet, p. 9, ibid. : gens de bon ton, gens comme il faut); 5. 1657-62 exprime une supposition propre à expliquer un fait, une situation (Pascal, Pensées, éd. Brunschvicg, t. 14, p. 18, ibid. : et ce sens spirituel est si clairement expliqué en quelques endroits, qu'il fallut un aveuglement pareil à celui que la chair jette dans l'esprit quand il lui est assujetti, pour ne pas le reconnaître). Réfection de faillir* (pris au sens de « manquer, faire défaut ») d'apr. la 3epers. faut (lat. *fallit) sur le modèle de valoir*. Au sens 3 a évincé les plus anc. estovoir (xies. ds T.-L.) et estre mestier (xiies., ibid.). Fréq. abs. littér. Falloir : 88 211. Fallu : 3 820. Fréq. rel. littér. Falloir : xixes. : a) 114 821, b) 121 594; xxes. : a) 128 588, b) 134 700. Fallu : xixes. : a) 4 644, b) 4 620; xxes. : a) 5 555, b) 6 466. Bbg. Aymeric (J.). Ind. après craindre, falloir, vouloir. Z. fr. Spr. Lit. 1889, t. 11, p. 269. − Baarslag (A. F.). Falloir, essentiellement ou accidentellement impersonnel? R. des lang. vivantes. 1965, t. 31, pp. 149-157. − Cornulier (B. de). Sur une règle de déplacement de nég. Fr. mod. 1973, t. 41, pp. 44-56. − Fox (J.). Remarks on estuet and il faut. Fr. St. 1953, t. 7, pp. 56-58. − Leicht (H.). Morphologie und Semasiologie der französischen Verben faillir und falloir. Kiel, 1909, 63 p. − Rickard (P.). (Il) estuet, (il) convient, (il) faut and their constructions in Old and Middle French. In : [Mél. Harmer (L. C.)]. London-Toronto-Wellington, 1970, pp. 65-92. − Togeby (K.). Il le faut. In : [Mél. Lombard (A.)]. Lund, 1969, pp. 220-226.