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DÉCROCHER, verbe trans.
I.− Emploi trans.
A.− [Le compl. désigne gén. une chose]
1. Détacher (une chose qui était accrochée). Décrocher un tableau, une tapisserie, un vêtement. Anton. accrocher, attacher, pendre.C'est assez, dit-elle en se levant et décrochant le manteau du mur (Erckm.-Chatr., Conscrit 1813,1864, p. 22).J'ai fait décrocher les photographies et les estampes hideuses qui couvraient les murs (Gide, Journal,1918, p. 656).En un clin d'œil elle se leva, décrocha un parapluie, sortit de sa chambre (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 150).
TÉLÉCOMM. Décrocher le récepteur, le combiné, le téléphone; p. méton. décrocher l'appareil; absol. décrocher. Enlever de sa position de repos le combiné microphone-écouteur (supposé, comme au début de la téléphonie, accroché à un côté de l'appareil ou au mur pour le faire fonctionner en appel ou empêcher le fonctionnement en réception d'appel). Décrocher avant de faire le numéro. Anton. raccrocher.Richard, décrochant l'appareil. − Allô... Allô... Vous demandez? (H. Bataille, Maman Colibri,1904, I, 2, p. 5).Il jeta précipitamment sa cigarette, et courut décrocher le récepteur (Martin du G., Thib., Épil.,1940, p. 759):
1. Une source de courant continu, placée au central alimente tous les circuits d'abonnés. Lorsqu'on décroche, on ferme le circuit, un signal s'allume au central... A. Leclerc, Manuel de télégraphie et téléphonie,1924, p. 227.
a) Emploi pronom.
α) Se détacher. Il fait très beau. Il a un peu gelé cette nuit, et les premières feuilles se décrochent (Renard, Corresp.,1883-1910, p. 195):
2. ... je crois que les ressemblances entre l'art de la Chine archaïque et celui de la côte nord-ouest, peut-être même avec celui d'autres régions américaines, sont trop marquées pour que nous ne conservions pas toujours cette possibilité présente à l'esprit. Mais même s'il y avait lieu d'invoquer la diffusion, cette diffusion ne saurait être celle de détails, de traits indépendants voyageant chacun pour son compte, se décrochant à volonté d'une culture pour venir s'agréger à une autre, mais d'ensembles organiques où le style, les conventions esthétiques, l'organisation sociale, la vie spirituelle, sont structuralement liés. Lévi-Strauss, Anthropol. struct.,1958, p. 294.
P. ext. Commencer à ne plus fonctionner. J'ai senti que la vie se décrochait dans ma carcasse (Zola, Œuvre,1886, p. 288).
[En parlant du cœur] Quand elle lui eut répondu qu'elle allait fondre bien sûr, et qu'elle se sentait le cœur qui se décrochait, il répliqua furieusement : − Bête, fais comme nous, ôte ta chemise! (Zola, Germinal,1885, p. 1387).
[En parlant d'un avion] Tomber en plein vol. Les avions auraient pris feu, et se sont décrochés en pleine vitesse (Queneau, Pierrot,1942, p. 140).
β) Faire entendre un bruit sec (comme quelque chose qui explose et va tomber de haut). Quelque chose se décrocha dans l'air et une guêpe, au milieu d'eux, fit sa longue chute (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 47).
Pop. [En parlant des heures] Sonner. V'là qu'il se décroche deux plombes moins cinq broquilles! (Méténier, Lutte pour amour,1891, p. 190).
b) P. anal.
α) [Le compl. désigne une partie du corps]
Loc. fam. Bâiller à se décrocher la mâchoire, p. ell. se décrocher la machoire. Bâiller jusqu'à la désarticuler, s'ennuyer à mourir; p. ext. ouvrir la bouche toute grande. [Armand :] − Elle [MlleMerquem] reçoit donc? [Erneste :] − Oui, et même assez grandement; mais des gens si graves, qu'on se décroche la mâchoire à ses petites soirées (Sand, MlleMerquem,1868, p. 15).Est-ce que je vous ennuie? demanda-t-il, voyant la Grise qui bâillait à se décrocher la mâchoire (Montherl., Pitié femmes,1936, p. 1129).Eusèbe et Léonie, renversés en arrière sur leur chaise, se décrochaient la mâchoire tellement ils trouvaient ça prodigieux (Queneau, Pierrot,1942, p. 37).Riant à se décrocher les mâchoires devant les dindes et les gigots (Zola, Nana,1880, p. 1310).
Région. Avoir, se sentir l'estomac tout décroché. Avoir l'estomac (tout) malade (cf. Sand, Maîtres sonneurs, 1853, p. 81; cf. également Canada 1930).
β) [Le compl. désigne une pers. considérée comme un obstacle]
Arg. milit., fam. Tuer d'un coup de fusil (d'apr. Delvau 1883). Synon. descendre.Wagner demandait un fusil pour décrocher le marabout, à ce qu'il disait (Mérimée, Dern. nouv.,1870, p. 74).
P. ext. Quand un remède ne produisait pas l'effet attendu, il [le Dr Vivier] passait à un autre, cherchant avant tout à décrocher le mal en une fois, sans lui laisser le temps de s'aguerrir (L. Daudet, Salons et Journaux,1917, p. 220).
Renverser (un homme au pouvoir). Je sais, par Sauvignet, que Rohner a mis tout en œuvre pour décrocher Clemenceau (Duhamel, Maîtres,1937, p. 207).
SP. (courses). Dépasser un partenaire ou un adversaire en luttant de vitesse avec lui. Synon. décramponner.Il décroche un Italien qui lui colle à la roue et gagne (J. Cau, La Pitié de Dieu,p. 55 d'apr. Rob. Suppl. 1970).
Arg. Faire avorter une femme. Se faire décrocher. Se faire avorter (cf. Delvau 1883).
2. Décrocher qqc. de qqc.Séparer une chose d'une autre à laquelle elle était accrochée. L'attelage de la locomotive avec les berlines s'effectue au moyen d'un câble d'acier, (...) ce qui permet de décrocher rapidement la machine du train (Haton de la Goupillière, Exploitation mines,1905, p. 789).Une très faible impulsion étant suffisante pour décrocher le vaisseau de son orbite et provoquer son retour sur la Terre (A. Ducrocq ds Guilb.Astronaut.1967).
Au fig. Minne décroche enfin son regard de la fenêtre ouverte (Colette, Ingénue libert.,1909, p. 28).
P. anal., rare. [Le compl. désigne une pers.] Emploi pronom. réfl. Se détacher, se dégager de quelque chose, d'un lieu. Il [Plagnard] (...) se décroche de ses béquilles, se laisse tomber en tas plutôt qu'il ne s'assied (Genevoix, Assassin,1948, p. 64).
Au fig. Se décrocher d'un engagement, d'une activité, d'une habitude (infra II A 2); emploi abs. À chaque homme s'offre deux ou trois fois (...) l'occasion de se décrocher, de s'envoler et de s'accomplir (Arnoux, Solde,1958, p. 125).
B.− Emplois pop. et fam.
1. JEUX (jeu du mât de cocagne). Décrocher la timbale et plus rarement le coquetier. Atteindre l'objet suspendu en haut du mât. P. anal. L'esprit se croit sur un carrousel; on tourne, on tourne, on repasse vingt fois au même endroit; à certains tours on décroche un anneau (Gide, Journal,1932, p. 1115).
P. métaph. :
3. Et voici où serait le nœud du roman que j'imagine : cet homme totalement libéré des passions serait, en fait, plus ligoté que ne le fut Gulliver à Lilliput, par les obligations auxquelles il se serait laissé asservir durant une longue existence où tout ce qui se décroche au haut du mât de cocagne lui serait venu dans la main, sans qu'il ait eu à faire aucun autre effort que d'être lui-même et que de plaire. Mauriac, Mémoires intérieurs,1959, p. 250.
Décrocher la lune, les étoiles. Obtenir une chose impossible. Sur les tréteaux l'arlequin blême Salue d'abord les spectateurs Des sorciers venus de Bohême Quelques fées et les enchanteurs Ayant décroché une étoile (Apoll., Alcools,1913, p. 64).L'enfant veut décrocher la lune, boxer contre la pluie ou chausser des bottes de sept lieues (Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 34):
4. ... Marguerite sera parfaitement heureuse (...) car enfin (...) je ne lui refuserai rien (...) Mais si elle me demande la lune et les étoiles, je ne peux pas aller les décrocher pour lui être agréable... O. Feuillet, Le Roman d'un jeune homme pauvre,1858, p. 269.
2. P. ext., fam. Obtenir un succès par un effort soutenu; atteindre un but réputé difficile. Décrocher une bonne note, le baccalauréat de justesse. Je compte m'absenter, j'ai, non sans peine, décroché mon congé (Estaunié, Ascension M. Baslèvre,1919, p. 174).Alors je me mis au travail et décrochai plus d'un diplôme (Queneau, Si tu t'imag.,1952, p. 41).
Décrocher une bonne situation, la fortune, une décoration; représentant qui décroche une commande (cf. accrocher I A 1 c). Le député (...) espérait bien réussir (...) à décrocher le portefeuille des Affaires étrangères (Maupass., Bel-Ami,1885, p. 234).
3. P. anal. [Le compl. désigne une pers. considérée comme un bien difficile à trouver] De La Porcheraie, lorgnant Aubin. − Où diable avez-vous été décrocher ce valet de chambre? Dutrécy. − Il est bien, n'est-ce pas? C'est un Breton (Labiche, Moi,1864, I, 4, p. 18).Il [Robert] était irrité contre elle [Rose] et lui prêtait des pensées de triomphe : « J'ai tout de même décroché un mari, malgré nos malheurs » (Mauriac, Chem. mer,1939, p. 80).
Pop. Décrocher un enfant. Avoir un enfant, en particulier un garçon. Puis, quand il [Octave] sut qu'elle [Marie] venait d'avoir une troisième fille, il s'écria : − Son mari ne peut donc pas décrocher un garçon! (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 364).
II.− Emploi intrans.
A.− [Le suj. désigne une pers. ou un ensemble de pers.]
1. Se détacher de quelque chose.
a) [En parlant d'un lieu] L'hôtel d'où les cordées, après y avoir passé la nuit, décrochent avant l'aube pour l'escalade du Matterhorn (Peyré, Matterhorn,1939, p. 113).Le long martyre de l'infanterie, « décrochant » au crépuscule et marchant toute la nuit (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 59).
b) PSYCHOL. Décrocher de qqc. Se détacher de, se dégager de. Le vrai déprimé, lui, n'arrive pas à décrocher de son échec (Mounier, Traité caract.,1946, p. 452).
c) RADIO. [Le suj. désigne un organisme] Procéder à un décrochage (cf. ce mot C 3). En France, à certaines heures, les émetteurs régionaux décrochent du réseau national pour transmettre des programmes régionaux (Radio1972).
2. TECHN. MILIT. Rompre le contact avec l'adversaire, se replier devant la pression ennemie :
5. Si lors de la bataille de la Somme, les colonnes blindées allemandes purent percer vers Forges-les-Eaux et Rouen, c'est que les deux dernières divisions anglaises alors demeurées sur le continent « décrochèrent » sans ordre au sud d'Abbeville. L'Œuvre,27 avr. 1941.
P. ext. Abandonner une activité, une compétition, s'en désintéresser. Synon. laisser tomber.À François Zénon Collombet. (...) Je ne suis pas plus avancé pour de Maistre : pas un document de ceux que j'attendais ne m'est venu (...) Un beau jour, de guerre lasse, je décrocherai; mais il n'y a pas de presse (Sainte-Beuve, Corresp. gén.,t. 4, 1818-69, p. 105).Encore le faisait-il [riposter] sans aigreur, en employant la boutade ou les formules vagues, qui lui permettaient [à Maurice] de décrocher aussitôt, de conserver le bénéfice de la sérénité (H. Bazin, Qui j'ose,1956, p. 72):
6. ... il convient d'accorder une attention spéciale aux faibles qui ne peuvent que décrocher de plus en plus, et finir par éprouver un véritable dégoût de l'école, s'ils sont soumis au même régime que leurs camarades plus forts. Capelle, L'École de demain reste à faire,1966, p. 60.
B.− [Le suj. désigne une chose]
1. AÉRON. [En parlant d'un avion] Ne plus disposer d'une sustentation suffisante pour continuer à voler, commencer à ne plus pouvoir voler (cf. supra I A 1 b).
2. ÉLECTR. [En parlant de deux alternateurs accouplés dont le synchronisme est rompu, ou d'un moteur synchrone surchargé] Cesser de fonctionner (cf. accrocher III B 1 a ex. 35).
Rem. On rencontre ds la docum. a) Décrochable, adj. Qui peut être décroché. Il [Érard] s'arrêtait sur certains meubles afin de savoir si la chose était décrochable ou avait été repérée (La Varende, Bric-à-brac, 1953, p. 36). b) Décroche, subst. masc. (supra I A 1 b β : bâiller à se décrocher la mâchoire). Et sûrement qu'il ronfle à c't'heure (...) car, dès le premier service, il bâillait déjà au décroche! (Id., Manants du Roi, 1938, p. 25). Ce terme n'est attesté ds les dict. consultés qu'au sens de « annonce non rectangulaire » en impr. (cf. Cham. 1969).
Prononc. et Orth. : [dekʀ ɔ ʃe], (je) décroche [dekʀ ɔ ʃ]. Ds Ac. 1694 et 1718 sous l'anc. forme descrocher; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. 1. a) Mil. xiiies. [ms.] intrans. « se détacher » (Aymeri de Narbonne, éd. L. Demaison, 1965, variante du ms. A2); 1855 rire à se décrocher la mâchoire (Sand, Hist. vie, t. 3, p. 98); 1879 décrocher la timbale au fig. (Vallès, J. Vingtras, Enf., p. 174); b) av. 1869 fig. et fam. « abandonner une position » (Sainte-Beuve, loc. cit). 2. 1868 fig. « obtenir après un effort » (A. Daudet, P. Chose, p. 187). Dér. de croc*; préf. dé-*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 408. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 103, b) 721; xxes. : a) 699, b) 838. Bbg. Dub. Dér. 1962, p. 43 (s.v. décrocheuse).Gottsch. Redens. 1930, p. 4, 400. − Pauli 1921, p. 45. − Slack (A.). Le Coin du pédagogue. Fr. R. 1971, t. 45, no2, p. 410.