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CROUPIR, verbe intrans.
A.− [En parlant de l'état matériel d'une substance]
1. [Le suj. désigne un liquide] Rester immobile et subir une décomposition faute d'écoulement. Près de là croupissait une vieille mare à purin, toute couverte de moisissure jaune (Richepin, Miarka,1883, p. 319).Aucun drainage n'était possible; l'eau stagnante croupissait au ras des maisons (Maurois, Byron,t. 2, 1930, p. 277).
Emploi pronom., rare. L'eau sanglante se croupit... on brûle!... nous sommes en hiver, c'est tout profit!... (Sardou, Patrie!1869, I, tabl. 1, 2, p. 12).
P. anal. (avec l'immobilité des flaques d'eau stagnantes). L'ombre, entre les hauts murs, croupissait comme au fond d'une cave. Elle était froide, inerte, morte dans toute son épaisseur (Genevoix, Rroû,1931, p. 151).Il reste un peu de nuit dans un angle à croupir (Genet, Poèmes,1948, p. 33).
2. P. ext.
a) [Le suj. désigne une matière solide] Subir une décomposition en séjournant dans une eau stagnante, dans des ordures, dans une atmosphère humide. Les pluies finies, toute sorte de détritus croupissaient, fermentant et pourrissant sous les premiers soleils (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 114).Des détritus croupissent dans les ruisseaux, mêlés aux enfants chétifs, aux chats eczémateux (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 104).
b) [Le suj. désigne du fluide dégagé par une matière solide] Des odeurs de légumes croupissent gentiment dans l'air humide (Romains, Hommes b. vol.,1939, p. 40).
Rem. Ac. 1798-1932 et la plupart des dict. gén. (à l'exception de Dub. et Lar. Lang. fr.) attestent l'emploi de croupir, en parlant d'un enfant ou d'un malade, au sens de « rester immobile et couché dans un état de malpropreté ». Cet enfant croupit dans ses langes. Il ne faut pas laisser croupir un malade dans la saleté (Ac. 1798-1932). Cet emploi n'est pas attesté par la documentation.
B.− Au fig., péj. [Gén. avec un compl. circ.]
1. [Le compl., gén. introd. par la prép. sur ou dans, désigne un lieu]
a) [Le suj. désigne une pers. ou un groupe de pers.]
Mener une existence morne et en particulier rester inactif, improductif, dans une stagnation intellectuelle. Croupir sur place, sur terre. Synon. s'ennuyer.Maintenant on croupit chez soi, c'est un événement quand on sort de la ville (Erckm.-Chatr., Ami Fritz,1864, p. 157).Quelques tribus extrêmement disséminées croupissaient çà et là entre leurs puces et leurs mouches, abruties par les totems (Céline, Voyage,1932, p. 197).
Rester dans une même situation et y perdre son temps. Vous vous figuriez que j'allais rester à croupir ici entre vos rombières et vos vieux croûtons? (Aymé, Mouche,1957, p. 143).
Spéc. Être maintenu, contre sa volonté, dans un lieu dégradant pour l'individu. Synon. pourrir.Croupir en prison, dans un cachot. D'après les conclusions rédigées par Scriassine, quinze à vingt millions d'hommes y croupissaient [dans les camps de concentration] dans des conditions atroces (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 333).
b) [Le suj. désigne une chose] Rester dans un lieu fermé, caché, sans utilité aucune. Synon. moisir.L'exposition de l'Orangerie (...) nous a révélé la splendeur de certaines toiles (...) qui croupissent (...) dans les petites cabines, si souvent fermées (Lhote, Peint.,1942, p. 41).
2. [Le compl. introd. par la prép. dans désigne un état socialement ou psychologiquement déconsidéré; le suj. désigne gén. une pers.] Demeurer longtemps dans un état moral considéré comme dégradant, sans désirer ou sans pouvoir en changer. Croupir dans le péché, le vice. Les prêtres ont toujours croupi dans une ignorance turpide, où ils s'efforcent d'engloutir avec eux les populations (Flaub., Mme Bovary,t. 1, 1857, p. 88).
[Le suj. désigne un groupe de pers. ou une caractéristique d'une pers. ou d'un groupe] La Bretagne est condamnée à croupir éternellement dans l'ignorance et la stupidité (Sandeau, Sacs,1851, p. 52).Il n'y a qu'une façon de faire un peuple, de créer des hommes, c'est de les instruire, c'est de développer par l'instruction cette force immense et perdue, qui croupit aujourd'hui dans l'ignorance et dans la paresse (Zola, Rome,1896, p. 103).
Prononc. et Orth. : [kʀupi:ʀ], (je) croupis [kʀupi]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1178 soi cropir « s'accroupir » (Renart, éd. Martin, br. III, 15); 2. 1549 p. ext. croupir long temps en ung lieu (Est.); av. 1650 fig. (Vaugelas, Quinte Livre, V ds Littré : Croupir en une extrême misère); 3. 1545 eau croupie (Est.). Dér. de croupe*; dés. -ir. Fréq. abs. littér. : 141.
DÉR. 1.
Croupissoir, subst. masc.Lieu où des matières fétides croupissent; avec valeur symbolique. J'ai beau patauger, depuis vingt ans, dans les immondices de Paris, je n'arrive pas à découvrir de quels amalgames de résidus sébacés, de quelles balayures excrémentielles marinées dans les plus fétides croupissoirs, purent être formés les sales enfants de bourgeois que l'événement de la Salette scandalise (Bloy, Femme pauvre,1897, p. 76). 1resattest. 1835 « excavation remplie d'eau où l'on fait pourrir les herbes usées du sarclage afin d'obtenir un liquide fertilisant » (Maison rustique du XIXes., I, p. 234b); 1897 (Bloy, loc. cit.); du rad. du part. prés. de croupir, suff. -oir*. Fréq. abs. littér. : 1.
2.
Croupissure, subst. fém.a) Liquide croupi; lieu où des choses croupissent. Le passage, c'est pas croyable comme croupissure (...) entre l'urine des petits clebs, la crotte (...) c'est plus infect qu'un dedans de prison (Céline, Mort à crédit,1936, p. 79).b) Au fig. Croupissures secrètes (Sartre, Mort âme,1949, p. 79). 1reattest. 1886 fig. (Bloy, Désesp., p. 142); du rad. du part. prés. de croupir, suff. -ure*. Fréq. abs. littér. : 2.