Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
CONSERVER, verbe trans.
I.− Emploi trans.
A.− [Avec une idée d'intentionnalité plus ou moins prononcée, selon la nature du complément] Maintenir hors de toute atteinte destructive, s'efforcer de faire durer, de garder en bon état ou dans le même état.
1. [Le compl. exprime une qualité ou propriété de l'obj. directement exprimée ou non; l'action est le plus souvent nettement intentionnelle] Garder, sauvegarder. Conserver qqc. à qqc. ou à qqn; conserver qqc.
a) [Le compl. désigne un inanimé] :
1. Le froid semble conserver aussi les propriétés physiologiques du sang; il l'empêche de se coaguler, c'est-à-dire qu'il reste comme s'il était vivant. C. Bernard, Cahier de notes,1860, p. 126.
2. Un silence angoissé s'était fait. Puis un frémissement parut courir sur toutes ces nuques ployées; et Jacques vit ceux qui avaient conservé leur chapeau se découvrir. R. Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 550.
SYNT. Conserver précieusement : Le général français avait fait présent, à cette occasion, d'une cocarde tricolore, conservée précieusement depuis dans la famille (Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène, t. 1, 1823, p. 244). Conserver une lettre.
En partic.
Entreposer :
3. La famille conservait cette huile, selon l'usage du pays, au fond d'un petit puits creusé dans le rocher tout près de la maison, et fermé d'une grosse pierre où l'on avait scellé un anneau de fer. Lamartine, Les Confidences,1849, p. 186.
4. ... nos aïeux Devenant plus ingénieux, Ils imaginèrent la cave, Pour conserver le vin au frais. Ponchon, La Muse au cabaret,Préambule, 1920, p. 4.
♦ Domaine du travail.(Se) confirmer dans son emploi :
5. ... il m'est impossible de conserver comme garçon de laboratoire une personne qui ne possède aucune des qualités requises pour cet office. G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Combat contre les ombres, 1939, p. 98.
Spécialement
MAR. Conserver une flotte, un bâtiment. Suivre la direction d'un autre bateau sans le perdre de vue.
Rem. Attesté ds Will. 1831, Soé-Dup. 1906, Bonn.-Paris 1859.
TYPOGR. Conserver une forme, une lettre. La mettre de côté en vue d'emplois ultérieurs. Si la lettre doit être conservée en magasin, il est bon de la désinterligner (É. Leclerc, Nouveau manuel de typogr.,1932, p. 297).
b) [Le compl. désigne un animé] :
6. Pour conserver à un enfant l'égalité d'humeur et la rectitude de jugement, si nécessaires aux devoirs de la morale et à son propre bonheur, il ne faut l'appliquer à aucune étude qui puisse étouffer sa sensibilité ou l'exalter : ... Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 306.
7. Je veux bien garder ce que j'ai, mais je tiens d'abord à conserver mes enfants. Becque, Les Corbeaux,1882, p. 212.
En partic. Protéger, sauver, guérir, faire vivre. Je prie Dieu qu'il vous conserve (A. Dumas Père, La Tour de Nesle,1832, III, 2, p. 48):
8. ... il faut accorder, qu'en nombre de cas particuliers, des malades auraient succombé, que l'intervention des médecins a conservés. Gaultier, Le Bovarysme,1902, p. 192.
Emploi abs. (relatif à a, b) :
9. On était là pour conserver, pour réprimer, pour arrêter; mais ce sont les fonctions d'un gouvernement, et non pas celles d'un club. Mmede Staël, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr.,t. 1, 1817, p. 313.
2. [Le compl. exprime une qualité ou une propriété intrinsèque au sujet; l'action n'est que partiellement intentionnelle] Conserver qqc. :
10. Ils paraissaient plus occupés de conserver en eux la pureté de leur flamme intérieure que de la communiquer aux autres. On eût dit qu'ils ne tenaient pas à faire vaincre leurs idées, mais seulement à les affirmer. R. Rolland, Jean-Christophe,Dans la maison, 1909, p. 978.
En partic. Entretenir, soigner son état physique, son aspect extérieur :
11. ... les anciens peuples de l'antiquité conservaient leurs chevelures par l'emploi de l'huile céphalique. Balzac, César Birotteau,1837, p. 257.
SYNT. Conserver intact : Il n'est qu'une seule façon de conserver intact avec certitude son caractère : c'est de n'avoir jamais besoin d'argent (Tocqueville, Correspondance [avec Gobineau], 1851, p. 190). Conserver le droit : Les principaux d'entre eux avaient conservé le droit d'avoir des juges qui décidaient certains procès en leur nom (Tocqueville, L'Ancien Régime et la Révolution, 1856, p. 92). Conserver son équilibre : Pour conserver son équilibre, elle plaquait son corps contre le buste de Paterson (R. Martin du Gard, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, p. 450). Conserver le fil de sa pensée : Pour ne pas l'entendre, pour conserver le fil de ma pensée, il me faut boucher mes oreilles. Toute l'activité de mon âme en serait suspendue et tout mon nerf brisé (Michelet, L'Oiseau, 1856, p. 105). Conserver sa tête, rester maître de soi : Malgré les rugissements de l'eau qui bouillonnait au-dessous de moi, je conservai ma tête et je parvins à une quarantaine de pieds du fond (Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 1, 1848, p. 306).
Rem. Ces constr. s'associent aisément avec des adv. exprimant l'intentionnalité.
B.− [Avec une idée de passivité assumée par un suj. qui constate; le compl. désigne une qualité ou propriété du suj. et plus rarement de l'obj.] Avoir encore (en soi-même), laisser subsister telle chose dans son état antérieur.
1. [Le suj. désigne un être animé ou une chose personnifiée] :
12. Ce n'est pas en prenant ce qui est à autrui qu'on peut détruire la pauvreté : car comment, en faisant des pauvres, diminueroit-on le nombre des pauvres? Chacun a droit de conserver ce qu'il a, sans quoi personne ne posséderoit rien. Lamennais, Les Paroles d'un croyant,1834, p. 122.
13. On arriverait encore à s'entendre avec nos non-euclidiens hypothétiques, bien qu'ils ne soient plus des hommes, parce qu'ils conserveraient encore quelque chose d'humain. H. Poincaré, La Valeur de la sc.,1905, p. 245.
SYNT. Conserver des doutes : On avait conservé quelques doutes. À force d'être trompés, on n'osait plus croire à rien (Erckmann-Chatrian, Histoire d'un paysan, t. 1, 1870, p. 130). Conserver un espoir : Maintenant que je me suis dit qu'il serait insensé de conserver quelque espoir, la suite de cette aventure est pour moi une chose de curiosité, voilà tout (A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 290). Conserver ses habitudes : Le soleil (...) paraît avoir conservé l'habitude de s'entourer de nuages (Du Camp, En Hollande, 1859, p. 12). Conserver la mémoire de qqc. : Je ne conserverai que la mémoire de leurs efforts et de leur estime (Lamartine, Correspondance, 1832, p. 282). Conserver son sang-froid = garder ses aptitudes : Un des principes les plus fortement recommandés aux jeunes gens, est de conserver un sang-froid inaltérable dans toutes les circonstances de la vie. Ils le perdent cependant quelquefois (Crèvecœur, Voyage dans la Haute Pensylvanie, t. 1, 1801, p. 10). Conserver sa santé : Si vous étiez comme moi, resté au soleil, vous auriez conservé votre santé (Karr, Sous les tilleuls, 1832, p. 162).
2. [Le suj. désigne un inanimé] :
14. Long-temps avant l'équinoxe, les feuilles tombaient en quantité, cependant la forêt conservait encore beaucoup de sa verdure et toute sa beauté. Il y a plus de quarante jours, tout paraissait devoir finir avant le temps, et voici que tout subsiste par-delà le terme prévu; ... Senancour, Obermann,t. 1, 1840, p. 92.
15. La poussière, aussi éternelle en Egypte que le granit, avait moulé ce pas et le gardait depuis plus de trente siècles, commes les boues diluviennes durcies conservent la trace des pieds d'animaux qui la pétrirent. T. Gautier, Le Roman de la momie,1858, p. 173.
II.− Emploi pronom.
A.− Emploi pronom. réfl. Garder une propriété, une qualité physique ou morale :
16. ... pour me conserver toujours simple et toujours droit, au milieu des perpétuelles altérations et des bouleversemens que peuvent me préparer l'oppression d'un sort précaire et les subversions de tant de choses mobiles. Je dois rester, quoi qu'il arrive, toujours le même et toujours moi, ... Senancour, Obermann,t. 1, 1840, p. 27.
B.− En partic.
1. Emploi pronom. non réfl. ou emploi subjectif. Se réserver, garder pour soi :
17. En dehors des regains capricieux d'une tendresse fanée, il sut toujours se conserver, dans le cœur de la reine, une sorte d'affection bâtarde qui tenait plutôt du pacte que de la sympathie. Villiers de L'Isle-Adam, Contes cruels,La reine Ysabeau, 1883, p. 262.
2. Vieilli. Avoir, garder une position neutre entre deux avis opposés.
Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. du xixesiècle.
C.− Emploi pronom. passif. Être, rester à l'abri de toute altération :
18. Le vin ne se conserverait pas dans les outres si l'on n'y ajoutait une certaine dose de résine qui l'empêche de se corrompre. About, Le Roi des montagnes,1857, p. 108.
19. ... les personnages en faïence se conservent beaucoup plus longtemps que les vrais hommes; ... Loti, Pêcheur d'Islande,1886, p. 4.
Prononc. : [kɔ ̃sε ʀve], (je) conserve [kɔ ̃sε ʀv]. Enq. : /kõseʀv/ (il) conserve. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 842 « observer, tenir (un serment) » (Serments de Strasbourg ds Henry Chrestomathie, p. 1); 2. début xves. « garder soigneusement » (Arch. Nord, B 146, 3ecahier, fol. 15 rods IGLF); 3. 1530 « préserver, protéger de quelque chose » (Palsgr., p. 494 : Dieu vous conserve de tous maulx) − 1607, H. d'Urfé ds Gdf. Compl.; 4. 1530 « maintenir en bon état » (Palsgr. : conserver ung homme en sa santé). Empr. au lat. class. conservare « conserver, maintenir, observer », composé de servare « préserver, garder ». Fréq. abs. littér. : 5 435. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 12 842, b) 6 811; xxes. : a) 4 629, b) 5 722. Bbg. Gottsch. Revens. 1930, p. 133, 139, 365. − Goug. Lang. pop. 1929, p. 17.