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BAGATELLE, subst. fém.
A.− Vieilli. Objet de peu de valeur ou de peu d'utilité.
1. Objet futile, bibelot, babiole :
1. Bien que la loi sur les accidents ne soit à ses yeux qu'une bagatelle, un bibelot de carton, il y voit une reconnaissance première de la pensée socialiste : ... Jaurès, Ét. socialistes,1901, p. 68.
Bagatelles de bouche. Amuse-gueules il touche du bout du doigt une de ces pâtisseries, puis une autre, et il fait envelopper ces bagatelles de bouche dans une feuille de papier(A. France, L'Orme du mail,1897, p. 37).
Spéc. (Canada). ,,Entremets composé de biscuits ou de morceaux de gâteau, et de crème. Manger de la bagatelle`` (Canada 1930).
Rem. Attesté ds Bél. 1957.
2. [Gén. au plur.] Parures, frivolités féminines. Synon. colifichets, fanfreluches :
2. − Mon cher père, dit-elle [Modeste] ... allez savoir des nouvelles de monsieur de La Brière et reportez-lui, je vous en prie, son cadeau. Vous pouvez alléguer que mon peu de fortune autant que mes goûts m'interdisent de porter des bagatelles qui ne conviennent qu'à des reines ou à des courtisanes. Balzac, Modeste Mignon,1844, p. 256.
SYNT. Coûteuses bagatelles (Balzac, Autre étude de femme, 1842, p. 391); bagatelles les plus riches (Balzac, Une fille d'Ève, 1839, p. 83); riche bagatelle (Murger, Les Nuits d'hiver, 1861, p. 93).
3. Somme d'argent dérisoire. Bagatelle de + indication de prix. Le tout pour la bagatelle de deux sous (Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 1, 1811, p. 283).
Souvent par antiphrase et iron. Somme fabuleuse :
3. − Je suis au bord de la ruine et vous me parlez de construire! une bagatelle qui me coûtera trois cent mille francs. Ma chère, vous devenez folle. G. Duhamel, Chronique des Pasquier,La Passion de Joseph Pasquier, 1945, p. 146.
B.− P. ext. et cour. [Gén. au plur.] Acte, parole, écrit de faible valeur, et plus généralement toute chose frivole ne méritant pas qu'on lui accorde une grande importance.
1. Préoccupations légères, divertissements futiles, propos souvent oiseux et dépourvus d'intérêt. S'arrêter, s'intéresser, s'occuper à des bagatelles. Synon. futilité, jeu, rien, vétille; baliverne, billevesée, fadaise, plaisanterie, sornette :
4. À quoi diantre s'en vont mes journées et mes saisons? Elles se consument en choses de néant, lectures sans trace, causeries sans objet, hésitations sans nécessité, visites sans nombre, commencements sans suite, rêveries sans profit, en somme bagatelles, fariboles, vanités, nugae de toutes sortes. Tout mon temps est donné à l'imprévu, aux sottises quotidiennes et, au bout d'un hiver, je me trouve plus vieux, mais non plus sage ni plus avancé. Amiel, Journal intime,1866, p. 199.
Spéc., au sing. et absol. La bagatelle. Ensemble des petits riens de l'existence qui ne méritent pas qu'on s'y arrête :
5. Je suis toute à votre service : il s'agit seulement de savoir, si vous êtes pour la bagatelle ou pour le solide! − Je n'entends pas cela? − Je veux dire, si vous êtes pour le plaisir ou pour l'argent? N.-E. Restif de La Bretonne, Les Contemporaines par gradation,1783, p. 154.
S'amuser à la bagatelle. Perdre son temps à des riens.
Rem. Expr. attestée ds presque tous les dict. depuis l'Ac. 1798.
2. LITT. et B.-A. Composition légère, petite pièce agréable et facile, destinée à plaire plutôt qu'à édifier. Synon. badinage, badinerie.
a) LITT., vieilli. Bagatelle littéraire. D'agréables madrigaux, de faciles et ingénieuses bagatelles (Sainte-Beuve, Portraits littér.,t. 2, 1844-64, p. 100).
b) MUS. ,,Morceau de musique de caractère léger et de courte durée, sans forme précise`` (Lar. encyclop.). L'intérêt musical de cette bagatelle est dans la mobilité perpétuelle des rythmes (R. Rolland, Beethoven,t. 2, 1928, p. 509).
c) PEINT. Un dessin, une bagatelle (E. Delacroix, Journal2, 1856, p. 232).
3. Au sing. Chose facile à accomplir, qui ne nécessite aucun effort. C'est pure bagatelle, c'est une bagatelle de... :
6. Cette issue était sans doute fermée à clef, mais pour lui c'était un détail de mince importance. Enfoncer une porte, crocheter une serrure, fausser un verrou, étaient pure bagatelle pour un homme que les pick-pockets de Londres avaient nommé jadis leur capitaine et qui avait fait merveille à New-York. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 3, Le Club des Valets de cœur, 1859, p. 215.
En partic. elliptiquement ou interjectivement. Bagatelle que cela, bagatelle!
a) P. iron. [Souvent pour exprimer que l'on ne croit pas ce qui vient d'être dit ou qu'on y attache seulement une importance relative] Bagatelles tout cela, (...), crottes de bique... (A. Arnoux, Roi d'un jour,1956, p. 131).
b) [Fonctionnant comme un adv. à valeur de négation] :
7. ... Vous savez ce qu'il en coûte à l'esprit pour se plier à des formes vulgaires, pour déroger, pour s'amoindrir. − Bagatelle! môsieur, bagatelle pure! Quand vous aurez fait un feuilleton avec cette couleur, cela coulera comme de source; vous en ferez vingt, trente, sans le moindre effort. Reybaud, Jérôme Paturot,1842, p. 65.
4. Vieilli. Les bagatelles de la porte.
a) Boniments que débitent les forains à l'entrée de leur baraque pour inciter les gens à assister au spectacle :
8. Le spectacle des bagatelles de la porte n'était-il pas le seul spectacle des pauvres gens, la consolation de leur soirée, l'attrait tout puissant qui les empêchait de porter leur dernier sol au cabaret? Nerval, Bohème galante,1853, p. 245.
b) Au fig. et fam. Choses accessoires, dont on peut très bien se passer ou du moins sur lesquelles il n'est pas besoin d'insister. S'amuser, s'arrêter, s'attarder aux bagatelles de la porte (cf. Balzac, Lettres à l'étrangère, t. 1, 1850, p. 193; Zola, Contes à Ninon, 1864, p. 272; G. Courteline, Le Train de 8 h 47, 1888, p. 159).
P. anal., créations d'aut. Bagatelles du seuil (P. Loti, Quelques aspects du vertige mondial, 1917, p. 15); bagatelles du vestibule (Gide. Journal, 1917, p. 615).
Spéc., très fam. et avec une nuance de trivialité. Préliminaires de l'amour ou ébats amoureux. S'amuser, s'arrêter, s'attarder aux bagatelles de la porte (cf. Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 66) :
9. Les jupons ne le dérangeaient guère. Quand le sang lui montait à la tête, parbleu! Il était comme tous les hommes, il aurait crevé une cloison d'un coup d'épaule, pour entrer dans une alcôve. Il n'aimait pas à s'attarder aux bagatelles de la porte. Puis, lorsque c'était fini, il redevenait bien tranquille. Zola, Son Excellence E. Rougon,1876, p. 112.
Rem. Ce sens n'est attesté que ds G. Delesalle, Dict. arg.-fr. et fr.-arg., 1896 et par G. Antoine ds Mél. Delbouille (M.), t. 1, 1964, p. 27 qui relève comme une audace d'aut. l'utilisation qu'en fait A. M. Schmidt dans son Avant-propos de l'Amour noir : ,,Comme il est trop timide pour pousser ses avantages au-delà des bagatelles de la porte, un cuisant échec conclut chacune de ses téméraires initiatives.`` Monsieur Antoine ajoute que ce ,,sous-entendu galant (...) n'était nullement dans l'esprit de Balzac, ni, semble-t-il, d'aucun écrivain de son époque``. L'ex. 9 paraît infirmer cette hypothèse.
C.− P. euphém., fam., domaine du sentiment et de l'amour.
1. Vieilli. [Gén. au plur.] Galanteries, amourette :
10. Ne refusez pas ce que j'ai de meilleur, ma façon de faire la cour à une femme, de lui prodiguer les tendresses fugitives, les menus soins, les petits cadeaux, les galanteries, les bagatelles nécessaires, et de lui parler une langue inconnue d'elle. J. Renard, Comédies,Le Pain de ménage, 1899, p. 78.
2. Très fam. [Toujours au sing., et absol.] La bagatelle. L'amour physique :
11. ... la maîtresse actuelle de Jocquelet était tout bonnement une de ses camarades du Conservatoire, ... qui se destinait à l'emploi tragique et ne permettait à son amant de songer à la bagatelle qu'après lui avoir infligé le songe d'Athalie, ... F. Coppée, Prose,t. 4, Toute une jeunesse, 1890, p. 168.
S'amuser à la bagatelle. Comment voulez-vous que j'arrive à élever mon petit monde, si je m'amuse à la bagatelle (Zola, L'Assommoir,1877, p. 403).
Arg. Faire la bagatelle. Faire l'amour.
Rem. 1. Attesté ds Ch. Virmaître, Dict. d'arg. fin-de-s., 1894 et L. Rigaud, Dict. du jargon parisien, 1878 et dans le composé amour-bagatelle chez Colette, La Jumelle noire, 1938, p. 118. 2. Ce sens bien attesté n'est mentionné que sporadiquement par les dict., en partic. par ceux du xixes. (les Ac. l'ignorent, Lar. 19eprécise : ,,L'introduction de cette nouvelle acception doit faire éviter d'employer le mot dans le sens ci-dessus (galanterie, amourette) qui est devenu fort équivoque``, DG le définit comme une ,,Galanterie légère``). Les dict. qui le mentionnent lui donnent les nuances suiv. : Besch. 1845 : ,,fig. et fam.``, Guérin 1892 : ,,fam.``, Lar. 19e: ,,dans un sens plus vulgaire et plus libre``, Lar. encyclop. : ,,avec une nuance de trivialité``, Dub. : ,,fam.`` et ,,nuance triviale``.
PRONONC. ET ORTH. : [bagatεl]. Fér. Crit. t. 1 1787 propose la graph. bagatèle.
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1548 fig. « chose frivole, de peu d'importance » (Noël du Fail, Prop. rustiques, 32, Guichard d'apr. Delboulle ds R. Hist. litt. Fr., t. 4, p. 137 : Et au soir, aux rais de la lune, jasant librement ensemble sur quelque bagatelle) ce sens fig. est signalé comme étant le ,,plus grand usage`` du mot dep. Ac. 1718; 2. 1611 au propre « chose de peu de prix et peu nécessaire » (Cotgr.); 3. p. ext. 1691 « amusement galant » (Regnard, Coquette, II, 12 ds Livet, t. 1, p. 200 : Depuis deux ans ... j'ai obligé le Comte à faire lit à part, car je suis présentement bien revenue de la bagatelle). Empr. à l'ital. bagatella (Kohlm., 29; Sar., 14; Wind, 171; Brunot, t. 3, p. 220); attesté au sens 2 dep. 1554 (Bandello, I, 3 ds Batt.); au sens 1 dep. av. 1565 (B. Varchi [1503-1565] Opere, vol. II, Trieste, 1858, 161, ibid.). L'ital. bagatella est prob. un dimin. du lat. bāca (baie*) avec assourdissement de -c- en -g- caractéristique de l'Italie septentr. (Devoto, Avviamento alla etimol. ital.) par double dér. au moyen des suff. -atto, -ello, (DEI; Devoto-Oli, Vocab. ill. della ling. Ital.).
STAT. − Fréq. abs. littér. : 318. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 667, b) 460; xxes. : a) 409, b) 289.
BBG. − Antoine (G.). Babiole, brimborion, bagatelle. In : [Mél. Delbouille (M.)]. 1964, t. 1, p. 27. − Duch. 1967, § 57. − Flutre (L.-F.). Termes comm. des xviieet xviiies. R. Ling. rom. 1961, t. 25, p. 277. − Gall. 1955, p. 92. − Lammens 1890, p. 39. − Wind 1928, p. 171, 205.