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AFFECTATION1, subst. fém.
A.− Rare, vieilli. [ d'affecter; résultat de cette action (cf. affecter1).] Affectation de qqc., à qqc.Action de montrer une grande prédilection pour (une chose) (cf. affecter1A) :
1. L'herbe croît au milieu des allées, et, dans ces mêmes allées abandonnées, les arbres sont taillés artistement selon l'ancien goût qui régnait en France; singulière bizarrerie que cette négligence du nécessaire et cette affectation de l'inutile!... G. de Staël, Corinne,t. 1, 1807, p. 246.
2. La politique, qui laissait percer des ombres sous l'enjouement des convives, n'éclata qu'à la fin comme un orage. Un mot de quelqu'un contre l'affectation à l'Empire rompit la discussion philosophique qui s'était maintenue jusque-là : Cabanis et Chénier eurent de l'éloquence. Des accents tout nouveaux m'apportaient les mots de république, de liberté et de patrie. Ch.-A. Sainte-Beuve, Volupté,t. 1, 1834, p. 195.
B.− [ d'affecter; résultat de cette action (cf. affecter1).] Action d'afficher une attitude peu naturelle et le cas échéant peu sincère; p. ext., attitude qui manque de naturel ou de sincérité.
1. Emploi abs. :
3. Vallagnosc se renversait mollement sur le canapé. Il avait fermé les yeux à demi, dans une pose de fatigue et de dédain, où une pointe d'affectation s'ajoutait au réel épuisement de sa race. É. Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 451.
4. Puig m'adressa la parole en catalan. Une affectation à lui, qui veut dire : « c'est le catalan qui est la langue espagnole, et le castillan n'est qu'un patois. » H. de Montherlant, La Petite Infante de Castille,1929, 1920, p. 625.
5. ... toujours et partout, fuir le style poétique, et faire sentir qu'on le fuit, qu'on déjoue la phrase per se, qui, par le rythme et l'étendue, sonnerait trop pur et trop beau, atteindrait ce genre soutenu que Stendhal raille et déteste, où il ne voit qu'affectation, attitude, arrière-pensées non désintéressées. Mais c'est une loi de la nature que l'on ne se défende d'une affectation que par une autre. P. Valéry, Variété 2,1929, p. 103.
6. Si l'on nous objecte que l'adoption d'un tel système n'est, de la part de cette société, que l'effet d'une affectation − d'un « snobisme », − nous répondrons que, d'abord, cela ne nous est nullement prouvé, du moins d'une manière absolue, l'attachement d'un grand nombre de ses membres aux œuvres produites par ce système nous paraissant offrir des signes indéniables de sincérité; qu'ensuite, en admettant l'affectation, le fait que cette société juge flatteur d'affecter cette esthétique-là et non une autre suffit à classer ses évaluations. J. Benda, La France byzantine,1945, p. 148.
7. Affectation : ce qui est voulu dans la manifestation de notre caractère et de nos affections; mais encore à la condition que ce que nous affectons d'être tienne par quelque côté à notre naturel. L'hypocrisie n'est pas une affectation, mais on peut affecter d'être hypocrite si on l'est déjà, d'être grossier si on l'est déjà, d'être léger si on l'est déjà; on peut même affecter d'être naturel et simple. Alain, Définitions,[Les Arts et les dieux] Paris, Gallimard, 1961 [1951].
Avec affectation :
8. ... comme la fuite de Régina aurait passé pour un rapt si le nom de Saluce y avait été mêlé, Saluce résolut de revenir hardiment à Rome, comme s'il n'en était jamais sorti, de s'y montrer avec affectation dans les lieux publics et au théâtre, et de démentir ainsi, par sa présence, toute participation à l'événement dont le public allait s'entretenir. A. de Lamartine, Nouvelles Confidences,1851, p. 206.
Rem. Cette phrase est typique pour le passage du sens A au sens B.
9. Le soir, il arrivait à Sérianne. Il avait acheté en gare l'Humanité qu'il étalait avec affectation devant le nez de son père. L. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 298.
Sans affectation :
10. ... il arrive souvent que c'est une recommandation auprès de lui que de le mépriser souverainement, pourvu que ce mépris soit vrai, sincère, naïf, sans affectation, sans jactance. Chamfort, Maximes et pensées,1794, p. 39.
11. Qu'il cherche ailleurs, ce jeune homme, dans les écrits de ma jeunesse, des invitations à la joie, à cette exaltation naturelle dans laquelle j'ai longtemps vécu; elles abondent. Mais à présent je ne les pourrais réassumer sans affectation. C'est l'affectation qui me rend insupportables tant d'écrits d'aujourd'hui, et parfois même des meilleurs. L'auteur y prend un ton qui ne lui est pas naturel. C'est là ce que je voudrais éviter. La sincérité doit précéder le choix des mots et le mouvement de la phrase; ... A. Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1165.
2. [Suivi d'un compl. nom. (n. abstr.; prép. de, dans)] :
12. Affectation. Dans le langage elle affaiblit la pensée, comme l'affectation dans les manières affaiblit les grâces et la beauté. L'ignorance vaut mieux qu'un savoir affecté. Dict. des gens du monde, 1818.
13. Faut-il donc s'étonner si, de nos jours encore, on affecte de confondre la philosophie avec la science? Et cette affectation, il faut le dire, ne doit pas être aujourd'hui imputée aux savants, mais aux philosophes. A. Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 474.
14. ... laissant errer ses grands yeux bruns à droite et à gauche sans fausse modestie et cependant sans affectation de hardiesse, la coquette enfant s'assit auprès de sa mère avec une aisance et une souplesse élégante qui achevèrent d'exaspérer les jalousies de l'entourage. A. Theuriet, Le Mariage de Gérard,1875, p. 79.
15. − J'ai lu d'un peu plus près Desprax. De menues choses charmantes. Deux pièces à un ami mort assez audacieuses. De longues choses embêtantes et surtout un déluge de roses et de pièces genre antique, grec, Théocrite (direction Académie française), à grand renfort de « boucs puants » et « d'amours englués ». Cela me le rend très déplaisant, et aussi son affectation d'alexandrins très classiques, très faciles et très creux − entremêlés d'alexandrins brisés, à enjambements, non moins faciles. Alain-Fournier, J. Rivière, Correspondance,lettre de A.-F. à J. R., févr. 1906, p. 302.
16. − Ah! vraiment, vous supprimez la garde du château Monsieur Rouletabille! et bien, vous m'en voyez toute réjouie, non point qu'elle m'ait jamais gênée! fait Mrs Edith avec une affectation de gaieté (affectation de peur, affectation de gaieté, je trouve Mrs Edith très affectée et, chose curieuse, elle me plaît beaucoup ainsi), au contraire, elle m'a tout à fait intéressée à cause de mes goûts romanesques... G. Leroux, Le Parfum de la Dame en noir,1908, p. 113.
17. Il avait repris avec moi son affectation d'indifférence. Mais, dès cette époque, le mot affectation était peut-être impropre. C'était de l'indifférence vraie. R. Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 119.
18. Bleuler a décrit leur « rigidité affective », qui laisse une impression d'affectation, de formalisme, de solennité ou de pédantisme. Kretschmer parle de leur aristocratisme : recherche d'une langue précieuse, affectation dans les soins du corps, ou dans l'habillement, maniérisme. E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 366.
3. [Suivi d'un inf.]
Affectation à, mettre de l'affectation à :
19. Elle, ne paraissait pas autre que de coutume. Elle manœuvrait, jacassait, cousait comme d'habitude. Il remarqua seulement une certaine affectation à ne pas le voir. J.-K. Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 276.
20. Ponctuel et dur dans le service, il affectait une ignorance systématique des incidents de famille pouvant plus ou moins troubler la vie du personnel placé sous sa haute direction. Il semblait qu'à ses yeux la pâte humaine dût être exclusivement consommée sous l'espèce administrative. Il mettait de l'affectation à exiger que les congés fussent limités à leur terme réglementaire et sa manière de conduire manquait de bonté. E. Estaunié, L'Ascension de Monsieur Baslèvre,1919, pp. 7-8.
Affectation de :
21. L'affectation qui est une pédanterie (car j'appelle pédanterie, l'affectation de me parler, hors de propos, d'une robe de Leroy ou d'une romance de Romagnesi, tout comme l'affectation de citer Fra Paolo et le concile de Trente à propos d'une discussion sur nos doux missionnaires); la pédanterie de la robe et du bon ton, la nécessité de dire sur Rossini précisément la phrase convenable, tuent les grâces des femmes de Paris... Stendhal, De l'Amour,1822, p. 208.
22. Je jurerais que ce garçon est un petit roué qui a joué une vilaine comédie. Remarquez cette ostentation, cette affectation de venir le jour, c'est-à-dire dans les meilleures conditions pour être vu. L.-É. Duranty, Le Malheur d'Henriette Gérard,1860, pp. 109-110.
Rem. 1. Sur l'oppos. à/de + inf., voir ces prép. Cette oppos. est celle du subst. précédé de l'art. déf. (ou de son équivalent l'adj. dém.), qui demande la prép. de, et du subst. précédé d'un autre art. (indéf., part.) ou d'un autre adj. pronom. (poss., indéf.), qui demande la prép. à. 2. La règle pourrait aussi se formuler en termes d'équivalence : a) l'affectation de < le fait que (qqn, on, il, etc.) affecte de; b) mettre de l'affectation à < montrer une préférence ostentatoire pour. − Dans le 1ercas (a), affectation est très proche de l'aspect imperf. du verbe correspondant exprimant le déroulement de l'action, et il en garde la constr.; dans le second cas (b), l'idée imperf. a passé dans le verbe introducteur (mettre) ou s'est éteinte, affectation signifiant alors « état de quelqu'un qui affecte », et la prép., par oppos. avec l'usage précédent, est alors à. 3. Sauf dans la loc. mettre de l' (ou son) affectation à, à est obligatoire, l'oppos. est parfois subtile et le choix dépend, chez les usagers qui ont le sens de la lang., de la représentation qu'ils se font de l'affectation avant de recourir à la tournure subst. + inf. 4. Assoc. paradigm. relevées : arrière-pensée (ex. 5), attitude, formalisme, maniérisme (ex. 18), parti-pris, pédanterie (ex. 21), pédantisme, recherche, solennité. L'afféterie est un cas partic. de l'affectation.