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ADJURER, verbe trans.
I.− S'adresser à quelqu'un (Dieu, homme) d'une manière plus ou moins solennelle et toujours pressante, pour le supplier (souvent au nom de Dieu, d'une personne ou d'une chose considérée comme sacrée) de faire ou dire ce que la situation commande. Adjurer qqn de faire qqc.
A.− [Cont. relig.] :
1. Il tremble devant ce Christ dont la face convulsée le regarde. Il l'adjure d'avoir pitié, le supplie de l'épargner, sanglote, pleure, et lorsque n'en pouvant plus, il gémit tout bas, il entend, terrifié, pleurer dans sa propre voix, les larmes des enfants qui appelaient leurs mères et criaient grâce! J.-K. Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 22.
2. Quand donc votre vie aura été changée et que vous serez enfin dans la lumière, je vous adjure, par le Dieu vivant et avec sa permission sainte, de vous manifester à moi. J'ai un désir immense de savoir ce que veut de moi mon Créateur et mon Sauveur et si je suis ou non dans sa voie. L. Bloy, Journal,14 févr. 1904, p. 216.
B.− [Cont. profane] :
3. Un jour, elle eut le courage d'entrer et d'adjurer solennellement le comte, au nom de sa mère, de sauver son âme en renonçant à une besogne maudite. É. Zola, Madeleine Férat,1868, p. 47.
4. Nous t'embrassons, mon cher enfant! Ta mère se joint encore à moi, encore une fois! pour t'exhorter! te supplier! t'adjurer avant ton retour d'Angleterre (...), de prendre quelque détermination courageuse... L.-F. Céline, Mort à crédit,1936, p. 319.
Rem. Des adv. (ex. 3) ou un style formulaire (ex. 2) donnent à adjurer à la fois la valeur de solennité et d'acte sacré.
Spéc., dans les formules d'exorcisme du rituel catholique (exorcisme proprement dit, ou formule d'exorcisme du baptême). [En s'adressant à l'Esprit mauvais pour qu'il quitte le corps du possédé, de l'enfant ou de l'adulte non encore baptisés, ou, dans le cas des possédés, pour qu'il dise qqc.] Sommer. Je t'adjure par le (var. au nom du) Dieu vivant, de...
Rem. Pour une ext. au culte israëlite, cf. adjuration ex. 5.
P. ext.
a) Dans les sc. occultes.Sommer un esprit (de paraître...) :
5. ... il entonna une sorte d'incantation singulière et impérative qu'il interrompait pour recommencer son sifflement adouci. Il disait : « Au nom de Dieu clément et miséricordieux, je t'adjure! Je t'adjure! Si tu es dedans, si tu es dehors, parais! Parais! Je t'adjure par le nom si grand que je n'ose le dire! Si tu veux obéir, parais! Si tu veux désobéir, meurs! Meurs! Meurs! » M. Du Camp, Le Nil, Égypte et Nubie,1854, p. 45.
6. Apparais! Apparais! Voici que je me penche comme un homme qui souffle sur le feu! Je t'adjure par la terre, par le feu! Et par la fureur de la terre qui jaillit dans la forme du feu, Comme sous une bouche qui suce, et qui est dans le vin que l'on boit, dans le chanvre et dans le pavot, et dans la frénésie qui remplit les devins et les sorcières, et dont je suis possédé! Je t'appelle, je t'appelle! P. Claudel, Le Repos du septième jour,1901, I, p. 808.
b) Rare. Sommer quelqu'un de faire quelque chose.
II.− Littér. [L'obj. désigne un être ayant un caractère sacré] Adjurer qqn ou qqc.Invoquer, prendre solennellement à témoin :
7. Dis-lui que je me meurs, que tu n'as plus de fils; Tombe aux pieds du vieillard, gémis, implore, presse; Adjure cieux et mers, dieu, temple, autel, déesse; Pars, et si tu reviens sans les avoir fléchis, Adieu, ma mère, adieu, tu n'auras plus de fils. A. Chénier, Bucoliques,Le Malade, 1794, p. 133.
8. J'adjure ce Dieu, aux pieds duquel depuis dix ans je me prosterne chaque jour, j'atteste ce Dieu que je vous avais fait le sacrifice de ma vie, et avec ma vie celui des projets qui y étaient enchaînés. A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 703.
Prononc. : [adʒyʀe], j'adjure [ʒadʒy:ʀ]. Cf. jurer. Enq. : /adʒyʀ/.
Étymol. ET HIST. − 1. xiiies. « se lier (par un serment) », emploi pronom. (Vie de S. Thom., 505 ds Michel, D. de Norm., t. III ds Gdf. : Ceo fu la fin, que tuz granterent La volenté le rei et si s'ajurerent). − 1611 (Cotgr. s.v. : ... to sweare earnestly unto), d'où xves. « Faire des injonctions impératives, conjurer » (Gloss. fr.-lat. ex Cod. 7684, ds Du Cange s.v. adjurare : Ajurer, obtestari); début xvies. « id. » (J. Le Maire, Illustr., III ds Gdf. Compl. : Par tous les Dieux, je t'adjure que tu ne vueilles tuer mon cygne); 2. 1225 « faire promettre par serment » (Lancelot du Lac, 1rep., chap. 36, éd. 1488 ds Gdf. : Gallehaut, faict messire Gauvain, qui tous nous avez ajurez, par le serment que je vous conjuray ores que y vouldriez vous avoir mis). − 1611 (Cotgr. s.v. : ... to exact an oath of, to put into his oath). Empr. au lat. adjurare, attesté dep. Plaute au sens de « promettre (avec serment) » (Menaechmi, 616 ds TLL s.v., 713, 4 : per Iovem deosque omnis adiuro... me isti non nutasse); cf. lat. médiév., 1127-1128 « id. » (Galbertus, clericus Brugensis, Passio Kardi Boni, comitis Flandriae, 47inds Mittellat. W. s.v., 198, 46 : ut... contra eum omnes... adjuraverint se nullo modo... illum in comitem... recepturos); au sens de « faire promettre par serment, conjurer (de faire qqc.) » dep. lat. chrét., fréq. dans l'Itala et la Vulgate ds TLL s.v., 713, 24-42. Noter emploi « conjurer (les esprits), les sommer de sortir du corps des possédés », Lact., Inst., 2, 15, 3 ds Blaise 1954.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 120.
BBG. − Bailly (R.) 1969. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Guizot 1864. − Spr. 1967. − Thomas 1956.