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-ESSE1, suff.
Suff. formateur de subst. exprimant de façon abstr. la qualité désignée par l'adj. de base.
A.− Le dér. exprime une qualité propre à une pers.
1. Un sentiment ou un état moral : allégresse, tendresse, tristesse.
2. Une qualité morale ou un défaut : bassesse, gentillesse, hardiesse, noblesse, politesse, sagesse, scélératesse, simplesse.
3. L'état physique d'une pers., une particularité soc. : ivresse, jeunesse, richesse, vieillesse.
B.− La qualité exprimée par le dér. en -esse est au sens propre une qualité physique.
1. Cette qualité s'applique cependant le plus souvent au domaine moral :
délicatesse désigne la qualité d'une chose (de la peau) et celle d'une personne qui agit avec élégance, finesse et sensibilité
étroitesse désigne le caractère étroit d'une chose (l'étroitesse d'une rue) et le défaut (l'étroitesse de ses idées)
finesse désigne la qualité d'un objet (ouvrage, aiguille) et au fig., celle d'une personne qui fait preuve de clairvoyance, de subtilité
justesse désigne la qualité qui rend une chose parfaitement appropriée à sa destination et au fig., la faculté d'appréciation de l'esprit (penser avec justesse que)
mollesse désigne parfois la qualité d'une chose (la mollesse des contours), mais est surtout vivant au sens de « manque de vitalité, paresse »
petitesse désigne la propriété (la petitesse d'une fourmi) et, au fig., la mesquinerie (la petitesse du procédé)
rudesse désigne la qualité physique et au fig., le trait de caractère (traité qqn avec rudesse)
sécheresse désigne la propriété physique et au fig., l'insensibilité.
2. Elle est dans certains cas prise au sens propre, mais elle résulte plutôt d'une impression produite par un certain aspect physique, et procède d'une appréciation subjective :
joliesse .« Qualité de ce qui est joli, gracieux, délicat »
prestesse .« Qualité dans laquelle se mêle une impression de promptitude, d'agilité, de légèreté, voire d'aisance et de vivacité »
robustesse .« Qualité liée à une impression de force, de résistance et même de vigueur ou d'énergie, produite par un certain aspect physique »
sveltesse .« Essentiellement qualité physique qui implique la minceur avec cependant, en général, une impression de légèreté, d'élégance, de souplesse »
3. Le dér. désigne une propriété sans idée morale : vitesse.
4. P. oppos. à un subst. désignant la qualité au sens propre, le dér. en -esse a pris une accept. spécialisée :
grandesse (/grandeur). « Dignité de Grand d'Espagne »
grossesse (/grosseur).« État d'une femme enceinte »
hautesse (/hauteur). « Titre honorifique »
Rem. 1. Les noms de qualité en -esse prennent un sens concr. en passant au plur., ou dans l'emploi avec l'art. indéf. Ils désignent a) Les manifestations de la qualité, les actes qu'elle inspire : bassesses « actions basses », délicatesses « attentions délicates », faiblesses « actions qui dénotent de la faiblesse morale ou physique ». b) La pers. : jeunesse (fam.) « personne jeune », ou le collectif : jeunesse « ensemble des jeunes », noblesse « classe des nobles », vieillesse « ensemble des vieillards ». 2. Certains subst. désignent une qualité, mais n'ont pas de base analysable : adresse (< a. fr. adrece) « qualité physique d'une personne qui fait les mouvements les mieux adaptés à la réussite de l'opération (jeu, travail, exercice) »; maladresse; détresse (a. fr. destrece « passage étroit » < lat. pop. *destrictia) « sentiment d'abandon, de solitude, d'impuissance »; liesse (ledece, loesse, xie< lat. laetitia) « joie collective »; morbidesse, vieilli (< ital. morbidezza) « grâce un peu maladive, langueur, nonchalance »; paresse (perece, xiie< lat. pigritia) « goût pour l'oisiveté »; prouesse (proëce 1080 « qualité de preux » est dér. de preux) « acte de courage, d'héroïsme ».
Productivité. -esse est un suff. en sommeil. Le seul dér. mod. est robustesse (1863). Littré signale également mignonnesse « qualité de ce qui est mignon ». La mignonnesse de ces innombrables petits cierges (E. Montégut ds Revue des Deux Mondes, 15 août 1874).Morphol. On notera pour sec l'élargissement en -eresse dans sécheresse.
Étymol. et Hist. A.− Étymol. Le suff. -esse, anciennement -ece, remonte au suff. lat. -itia dont le développement phonét. régulier aurait dû donner la forme -eise, -oise, que l'on rencontre parfois en a. fr. (richeise, richoise, prooise). En effet le groupe -ty- précédé de voyelle aboutit régulièrement au son [z] et le y se combine avec la voyelle précédente : cf. prétiat > prieyze > prise, ratione > rayzon > raison. Pour expliquer le passage de mollitia à mollesse ou de laetitia à liesse, on suppose qu'une termin. *-ǐcia s'est substituée à -ǐtia, le groupe -ky- aboutissant régulièrement au son [s] : cf. facia > face. B.− Hist. Ce suff. très productif en a. fr. (druece, genvrece, laidece, maigrece, radece, brutesse, planesse) a encore donné lieu à de nombreuses créations au xvies. grâce aux empr. à l'ital. : délicatesse (1539) morbidesse (1580) politesse (1578) prestesse (fin xvie) scélératesse (xvie) 1. À partir du xvies., beaucoup de mots en -esse ont été éliminés, plus souvent au profit de subst. en -té, -ité : agilesse/agilité, aspresse/aspreté, bellesse/beauté, duresse/dureté, fermesse/fermeté, humblesse/humilité, laschesse/lascheté, sobresse/sobriété, sourdesse/ sourdité, subtilesse/subtilité; cf. aussi lassesse/lassitude (cf. Hug. Mots disp. 1935, p. 119) et maigresse/maigreté, chichesse/chicheté qui ont tous disparu (Lew. 1960). Inversement, c'est -esse qui a triomphé de -ité (-eté) : délicatesse/délicateté richesse (xiie)/richeté sécheresse (1120)/sécheté 2. Le suff. -eur qui a remplacé -esse dans quelques cas où le subst. abstr. correspondait aux catégories sém. partic. à ce suff. : fadesse/fadeur hautesse/hauteur lourdesse/lourdeur maigresse/maigreur rondesse/rondeur Inversement, -esse l'a emporté sur -eur pour : bassesse (1120)/basseur tendresse (1319)/tendreur tristesse (1180)/tristeur vieillesse (1120)/vieilleur
BBG. − Baldinger 1950, pp. 250-258; p. 272. − Becherel (D.). La Dér. des n. abstraits en fr. Thèse, Paris-Sorbonne, 1976, pp. 226-233. − Lew. 1960, pp. 170-172, 181-183. − Lüdtke (J.). Prädikative Nominalisierungen mit Suffixen im Französischen, Katalanischen und Spanischen. Tübingen, 1978, p. 24, 161, 194, 433, 434. − Meyer-Lübke (W.). Historische Grammatik der französischen Sprache. II. 2. Heidelberg, 1966, § 99.