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ROSSE, subst. fém. et adj.
I. − Subst. fém.
A. − Vieilli. Mauvais cheval, vieux, malade ou sans vigueur. Synon. haridelle.Une rosse décharnée, efflanquée, poussive; maigre, vieille rosse; fouetter sa rosse. Quel cheval! Une misérable rosse qui semblait s'être nourrie, au lieu de foin et d'avoine, avec des cercles de barrique, tant ses côtes étaient saillantes (Gautier, Fracasse, 1863, p. 140).Sans doute, c'est pour purifier le monde que Don Quichotte quitte sa nièce et ses amis, mais son cheval est une rosse, et le sublime chevalier porte un plat à barbe sur la tête et une armure de carton (Faure, Espr. formes, 1927, p. 111).
Proverbes. ,,Il n'est si bon cheval qui ne devienne rosse. Il n'y a point d'homme si robuste, si vigoureux, ou d'un esprit si fort, qui ne s'affaiblisse par l'âge`` (Ac. 1798-1878). ,,Jamais bon cheval ne devient rosse. L'homme vigoureux de corps et d'esprit conserve jusqu'à la fin sa valeur`` (Lar. 19e-20e).
P. métaph. J'ai souvent mené en main, avec une bride d'or, de vieilles rosses de souvenirs qui ne pouvaient se tenir debout, et que je prenais pour de jeunes et fringantes espérances (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 576).
B. − Pop., fam.
1. Personne qui ne vaut pas grand-chose, qui ne cause que du souci. Synon. vaurien.Vieille rosse. Mais rien, pas plus de nouvelles de mon homme que s'il était parti au diable. Quelle rosse tu fais, grand homme! (Flaub., Corresp., 1840, p. 66).Elle les connaissait, ces deux-là, deux bonnes rosses qui faisaient la paire, n'est-ce pas? (Zola, L'Œuvre, 1886, p. 178).
[Dans une constr. appos.] Une rosse de + subst. (masc. ou fém.).Ma rosse de frère. Ces rosses de peintres, ça ne fichait rien de bon, ça crevait la faim. Qu'est-ce qu'ils seraient devenus, les sacrés fainéants, si le père Malgras, de temps à autre, ne leur avait pas apporté un beau gigot, une barbue bien fraîche, ou un homard avec son bouquet de persil? (Zola, L'Œuvre, 1886, p. 56).
P. métaph. Cette deuxième rue les amènerait en une troisième, cette troisième en une quatrième, cette quatrième en une cinquième, et ainsi de suite jusqu'à une rosse de carrefour dont il avait perdu, il y avait beau temps, l'espoir de jamais réussir à se fourrer le nom dans la tête (Courteline, Train 8 h 47,1888, p. 140).Sur le palier, je l'entendis crier en tisonnant: − Cette rosse de poêle! (A. France, Vie fleur, 1922, p. 523).
2. Personne méchante, malintentionnée, qui se plaît à tourmenter, qui cherche à nuire. Synon. teigne, vache (pop., fam.).C'est une rosse! Quelle rosse! Méfiez-vous de cet individu: c'est une rosse (Ac.1935).Son père avait une telle chance, qu'un omnibus l'avait renversé, sans seulement le dessoûler. Quand donc crèvera-t-il, cette rosse? (Zola, Assommoir, 1877, p. 685).La petite rosse, elle avait joué fin jeu, elle avait voulu le faire marcher, voilà tout! Plus maligne que les autres (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 304).
[En guise d'injure] Bougre de rosse! Sale rosse! Et n'appelle pas le patron ou je me sauve. Tas de rosses! Tous les mêmes (Hamp, Marée, 1908, p. 72).
II. − Adj., pop., fam.
A. − Mauvais, méchant. Homme, personne rosse; être bougrement rosse, avoir l'air rosse. Êtes-vous rosses tout de même [de m'avoir entraîné et fait manquer à l'usine], et moi qui avais si bien promis au patron de ne pas manquer (Poulot, Sublime, 1870, p. 66).Dame! Il souffre. Mais c'est bien son tour; dans le temps, ce qu'il a pu être rosse avec moi (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 126).
Être rosse pour + inf.Une invitation in extremis demeurait possible. Édith savait son amie assez rosse pour la laisser longtemps macérer dans l'angoisse (Mauriac, Chair et sang, 1920, p. 256).
C'est, ce serait rosse de + inf.Oui, ça, c'est embêtant. Mais ce serait rosse de rien lui donner (Montherl., Fils personne, 1943, II, 1, p. 293).
,,Il est rien rosse. Il est très méchant`` (Delesalle, Dict. arg.-fr. et fr.-arg., 1896, p. 255).
B. − Intransigeant, sévère. Un professeur, un public rosse. Ils ont été dressés, et bien dressés, par des patrons rosses. Ça se reconnaît tout de suite, et ils en sont fiers. Ils ont un peu l'orgueil du soldat qui manœuvre bien sous les ordres d'un sale capitaine « avec qui ça barde » (Renard, Journal, 1905, p. 952).
C. − Qui persifle, qui est d'une ironie mordante. Une pièce rosse, un critique rosse. La fantaisie de Sacha Guitry, appliquée dans ses premiers ouvrages à des situations très « théâtre rosse », est devenue de plus en plus libre et arbitraire (Arts et litt., 1936, p. 30-6).
Chanson rosse. La chanson rosse, presque toujours chantée sur un timbre emprunté à une œuvre très connue, appartient davantage au domaine de la déclamation qu'à celui du chant (Arger, Init. art chant., 1924, p. 209).
Écrivain rosse. ,,Écrivain qui affecte crûment le mépris des convenances sociales, et même de la morale`` (DG).
Prononc. et Orth.: [ʀ ɔs]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1460 roche (forme norm.) subst. fém. « mauvais cheval » (Guillaume Alexis, Les Faintes du monde, 202 ds Œuvres poét., éd. A. Piaget et É. Picot, t. 1, p. 85); 1596 rosse (Hulsius d'apr. FEW t. 16, p. 735b); 2. a) fin xve-déb. xvies. « vieille femme décrépite » (Nouv. rec. de farces fr. des XVeet XVIes., éd. É. Picot et Chr. Nyrop, V, 404, p. 144); b) av. 1690 « personne qui ne vaut pas grand-chose » (Poisson, Comédie sans titre, I, 3 ds Brunot t. 4, p. 583); 3. a) 1860 « personne qui aime à faire ou à dire des méchancetés » (Goncourt, Journal, p. 682); 1870 adj. « (personne) méchante, qui aime à tourmenter » (d'apr. Esn., s.v. Rossard); b) 1877 « qui est d'un réalisme cynique » (Zola, Assommoir, p. 717); 4. a) 1900 subst. « professeur très sévère » (Colette, Cl. école, p. 190); b) 1965 adj. « très sévère » (Quillet). Empr. au m. h. all.ross « cheval », prob. introd. en fr. par les mercenaires all. L'a. fr. a connu un subst. ros, rattaché par le FEW t. 16, p. 735b et T.-L. t. 8, col. 1469, 38 au m. h. all. ross, mais qu'il faut plutôt considérer comme un empl. subst. de l'adj. ros « roux », i.e. « cheval roux », comme le fait T.-L. t. 8, col. 1471, 25-32 (cf. aussi col. 1469, 49 le même ex. que ligne 38). Fréq. abs. littér.: 276. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 234, b) 420; xxes.: a) 918, b) 187. Bbg. Arveiller (R.). R. Ling. rom. 1971, t. 35, p. 218. - Darm. Vie. 1932, p. 107. - Quem. DDL t. 1, 26.