RÉSERVER, verbe trans.
Étymol. et Hist. 1. a) Fin
xiies. « destiner, attribuer à quelqu'un » (
Sermons St Bernard, éd. W. Foerster, p. 120, l. 14); 1533 [date éd.
Tesoro] spéc.
réserver à soi (
Brunet Latin, Trésor, éd. P. Chabaille, p. 72, additif selon divers mss et éd. 1533); 1553
se réserver « garder pour soi » (
Bible Gérard, Rom XIa4 [et non 2a4 d'apr.
FEW t. 10, p. 295a]);
b) 1651 part. passé adj.
réservé (
Corneille, Nicomède, I, 2);
c) 1738
être réservé (à qqn) « être le lot, le sort, le destin de, ce que quelqu'un fera » (
Rollin, Hist. anc., t. 5, p. 816);
d) 1788
réserver (à qqn) « préparer (pour l'avenir de quelqu'un), mettre dans la destinée (de quelqu'un) » (
Loaisel de Treogate, Passions, t. 1, p. 198);
2. a) 1337 « soumettre à un régime spécial ou à une restriction, restreindre (p. ex. un droit ou un pouvoir) en attribuant spécialement à quelqu'un ou à soi-même » (Doc. ds
Livre Roisin, éd. Brun Lavainne, p. 352);
b) 1349
réservé que « excepté que » (
ibid., p. 167);
c) fin
xives.
réservé se hauteur et sen honneur « sa grandeur et son honneur étant saufs » (
Froissart, Chron., éd. S. Luce et G. Raynaud, t. 9, p. 223); 1409
réservé « à l'exception de » (
Trésor des Chartes de Rethel, II, 621, 30 ds
Runk., p. 158);
d) fin
xives.
reserver l'iretage (
Froissart, op. cit., t. 10, p. 173);
ca 1485
biens [
...]
réservez « biens dont un testataire ne pourrait disposer à sa guise » (
Mistère Viel Testament, 1855, éd. J. de Rothschild, t. 3, p. 45);
e) 1612
cas réservés « péchés dont l'absolution ne peut être donnée que par certaines autorités ecclésiastiques ou un prêtre ayant reçu un pouvoir spécial » (
Regnier, Satyre XIII, 25,
Œuvres compl., éd. G. Raibaud, p. 172); 1718
id. « chose dont on fait mystère » (
Leroux, p. 451);
f) 1833 « retenir à l'avance, faire que quelqu'un ou soi-même disposera de, faire garder, faire attribuer » (
Balzac, Corresp., p. 359); 1839
places réservées (
Sand, Lélia, p. 448);
3. fin
xives. « garder à part, ne pas laisser voir ou connaître » (
Froissart, op. cit., t. 6, p. 83);
4. ca 1485 « mettre à part pour préserver, sauver » (
Mistère Viel Testament, 46824 et 46834, éd. J. de Rothschild, t. 6, p. 113);
5. a) 1558
se réserver à « se garder pour plus tard la possibilité de, attendre pour (faire quelque chose) » (
Bonaventure des Périers, Nouvelles récréations et joyeux devis, éd. Krystyna Kasprzyk, p. 17);
b) av. 1660
se réserver de «
id. » (
Patru, 3ePlaidoyer, p. 32);
6. 1559
se réserver à « se garder, se préserver en vue de » (
Amyot, Hommes illustres, Fabius Maximus, éd. L. Clément, p. 92); 1671 (
Pomey: Je me suis réservé pour d'autres temps);
7. a) 1559
réservé « qui se contient, discret » (
Id., ibid., Péricles, p. 13);
b) 1665 empl. subst.
faire le réservé (
La Fontaine, Contes, I, II, 96,
Œuvres, Gds écrivains de la France, t. 4, p. 71);
8. 1579 « garder (quelqu'un ou quelque chose) en vue d'un état, d'une fonction ou d'un usage déterminé » (
Garnier, La Troade, 2657,
Tragédies, éd. W. Foerster, t. 2, p. 168 ds
IGLF). Empr. au lat.
reservare « mettre de côté, garder en vue de quelque chose, conserver, sauver ».