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ILLUSOIRE, adj.
A. − Qui tient de l'illusion, procède d'une illusion; qui ne correspond pas à la réalité, est sans existence, sans valeur ou sans efficacité réelle. Synon. chimérique, faux, fictif, imaginaire, irréel, vain; anton. effectif, réel, vrai.On applique le nom de papier-monnaie à une véritable monnaie de papier qui ne stipule pas son remboursement, ou qui ne stipule qu'un remboursement illusoire qu'on n'exécute pas (Say, Écon. pol.,1832, p. 269).Ils croyaient de bonne foi avoir découvert un secret qui consolât de l'absence réelle par la présence illusoire, et s'hallucinaient à plaisir et s'extasiaient sur un vide que leur imagination surmenée bondait de merveilles, à grand renfort de volupté (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1097) :
1. Au commandement d'Alcide, péremptoire, ces ingénieux guerriers, posant à terre leurs sacs fictifs couraient dans le vide décocher à d'illusoires ennemis, d'illusoires estocades. Ils constituaient, après avoir fait semblant de se déboutonner, d'invisibles faisceaux et sur un autre signe se passionnaient en abstractions de mousqueterie. Céline, Voyage,1932, p. 189.
SYNT. Apparence, existence, monde illusoire; impression, perception, sensation, sentiment illusoire; certitude, connaissance, conviction, raisonnement illusoire; capacité, faculté, possibilité illusoire; bonheur, liberté illusoire; avantages, biens, plaisirs, satisfactions illusoires; espérances, promesses, rêves illusoires.
Loc. Il est illusoire de + inf.Il est illusoire de croire, de penser, d'espérer. Ainsi m'est-il apparu une nouvelle vérité et c'est qu'il est vain et illusoire de s'occuper de l'avenir. Mais que la seule opération valable est d'exprimer le monde présent (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 579).
Emploi subst. masc. (avec valeur de neutre). Méthode d'exercer l'intelligence, qui consiste à regarder. Application de cette méthode pour la discrimination du réel et de l'illusoire (S. Weil, Pesanteur,1943, p. 122).
B. − Qui porte à l'illusion, tend à tromper, à induire en erreur. Une proposition illusoire, contrat illusoire (Ac. 1798-1935). J'aurais compris que les femmes honnêtes usassent de ces moyens illusoires (Louÿs, Aphrodite,1896, p. 140).Ils croyaient noyer dans un vin illusoire, une bibine acide, la peur d'hier et celle d'aujourd'hui (Bernanos, Gds cimet.,1938, p. 192) :
2. On trouve dans les monts des lacs de quelques toises, Purs comme des cristaux, bleus comme des turquoises (...) Où le chamois craintif, lorsqu'il vient pour y boire, S'imagine, trompé par l'optique illusoire, Laper l'azur du ciel. Gautier, Poés.,1872, p. 269.
Prononc. et Orth. : [il(l)yzwa:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Fin xives. « trompeur » (E. Deschamps, III, 201, 57 ds T.-L.). Empr. au b. lat.illusorius « trompeur, illusoire ». Fréq. abs. littér. : 486. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 528, b) 309; xxes. : a) 636, b) 1 067. Bbg. Delb. Matér. 1880, p. 172.
DÉR.
Illusoirement, adv.D'une manière illusoire. Si la familiarité des termes ne se confondait pas illusoirement avec une connaissance exacte infaillible (Maine de Biran, Influence habit.,1803, p. 181).Mais lui aussi [le xxesiècle] s'écroulera pour n'avoir pas su concevoir qu'il étouffait dans sa carapace illusoirement solide une âme qui ne vit pas seulement avec des idées et avec des mots (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 385).[il(l)yzwaʀmɑ ̃]. Att. ds Ac. 1718-1878. 1resattest. xvies. (Rep. de la libr. de Fr. 1er, 160 ds Gdf. Compl.); 1596 (Hulsius ds Z. fr. Spr. Lit. t. 23, p. 36); de illusoire, suff. -ment2*.