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COUPER, verbe trans.
I.− Emploi trans.
A.− Rompre un corps continu par l'intervention d'un instrument tranchant. Couper net; couper ras; couper aux ciseaux, avec un rasoir.
1. [L'obj. désigne une partie d'un tout] La séparer, la détacher. Couper un morceau de pain; couper des branches. Un grand matelot américain, (...) tailladait des visages, fendait des nez, entamait des joues, coupait des oreilles (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 265):
1. Gérard servit de coiffeur à Mariette, et Mariette commença à couper avec des ciseaux les cheveux de Gérard; elle en enlevait le plus qu'elle pouvait avant de se servir du rasoir, ... Champfleury, Les Aventures de MlleMariette,1853, p. 123.
Syntagmes et loc. fig.
a) Couper le foin, l'herbe. Au fig. Couper l'herbe sous le pied à qqn. L'empêcher de réussir dans une entreprise, le supplanter. Pour couper l'herbe sous les pieds à tout concurrent photographe (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 110).Couper qqc. par la racine. Le supprimer dans ses principes mêmes. Le meilleur moyen de les couper [ces abus odieux] par la racine, serait d'adopter la jurisprudence criminelle des Anglais (Marat, Pamphlets, Offrande à la Patrie, 1789, p. 30).
b) Couper les feuillets, les pages d'un livre. Séparer les pages qui sont liées entre elles. P. méton. Couper un livre.
c) Couper le fil, des liens, des attaches. Séparer une partie d'un tout ou deux choses liées entre elles en rompant ce qui les retient.
d) Couper un costume, une robe. Tailler dans une étoffe en donnant une forme déterminée.
e) [Le compl. d'obj. dir. désigne une partie du corps]
Couper l'aile, les ailes à qqn ou à qqc. Briser le développement d'un mouvement individuel ou collectif. Ils n'ont pas même eu besoin de couper à leur génie des ailes qui ne poussaient pas (Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 455).
Couper un bras, une jambe. Au fig. Couper bras et jambes. Priver quelqu'un de ses moyens, l'empêcher d'agir ou de réagir. Cette ironie, (...) acheva de me déconcerter et, je l'avoue, me coupa − bras et jambes (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Moyen de Roger, 1885, p. 996).Couper les jambes. Accabler de fatigue. Des lassitudes la prenaient, qui lui coupaient les jambes (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 113).
Couper le cou, la gorge, la tête, et en arg., couper la musette, le sifflet. Égorger, décapiter, tuer. Rappelez-lui que la république dispose d'une machine à couper le sifflet (Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 3etabl., 10, p. 1639).Au fig., fam. Couper la musette, le sifflet à qqn. L'interrompre brusquement ou le mettre hors d'état de répondre en le déconcertant. La moindre réclame me couperait la musette (Flaub., Corresp.,1879, p. 319).« Nous les agrégés... ». Ça leur couperait le sifflet, aux bougres, ce petit mot (Magnane, Bête à concours,1941, p. 278).P. méton. Couper un animal. Le châtrer. Un cochon, au moins, quand on le coupe, il gueule, il ne croit pas recevoir de l'avancement! (Vercel, Cap. Conan,1934, p. 44).
2. [L'obj. désigne une chose considérée comme un tout] Diviser en deux ou en plusieurs morceaux. Couper du bois, du pain, de la viande; couper une étoffe, un tissu.
Syntagmes et loc. fig.
a) Couper en morceaux, en petits morceaux, en quartiers; couper en deux, en quatre. Au fig. Couper la poire en deux. Adopter un moyen terme. Couper les cheveux en quatre. Raffiner à l'extrême.
b) Couper dans le vif. Utiliser des moyens très énergiques. Elle était absolument décidée (...) à couper dans le vif, à trancher net (Huysmans, Sœurs Vatard,1879, p. 300).
c) À couper au couteau. D'une extrême épaisseur ou d'une extrême intensité. De petits cigares (...) qui eurent vite fait d'emplir la pièce d'une fumée à couper au couteau (Genevoix, Avent. en nous,1952, p. 42).
3. [L'obj. désigne une chose prise dans son ensemble]
a) Entamer un corps; faire une incision, une entaille ou être susceptible de la provoquer. Un croc coupe la lèvre supérieure (Pasteur, Travaux,1886, p. 407).
Absol. Être affilé, tranchant. « Le hapchott », hachette courbe et concave en son milieu, dont le tranchant coupe comme un rasoir (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 119).
b) P. métaph. [En parlant d'une douleur, du froid, etc.] Provoquer une sensation analogue à celle d'une coupure. Des névralgies qui lui coupaient en deux la face (Huysmans, À rebours,1884, p. 113).Le petit vent coupait encore, mais les étoiles n'avaient plus l'aiguisée des nuits d'hiver (Giono, Eau vive,1943, p. 165).
c) P. ext. Progresser à l'intérieur d'un fluide (par un mouvement qui semble le « couper »). La proue du navire coupoit la masse épaisse des vagues (Chateaubr., Natchez,1826, p. 231).Je l'entends [un avion] couper l'air du tranchant de ses ailes (Morand, Eau sous ponts,1954, p. 234).
B.− [Sans l'intervention d'un instrument tranchant]
1. Diviser un ensemble, le partager matériellement ou idéalement en deux ou plusieurs parties.
a) [Le compl. désigne une chose considérée du point de vue de son volume ou de son étendue] Diviser, séparer. C'était une espèce de boîte [l'intérieur de la carriole], (...) divisée en deux compartiments oblongs par une épaisse cloison qui la coupait transversalement (Hugo, Rhin,1842, p. 41).Une route qui sortait du bois, et coupait la plaine par son milieu (Benjamin, Gaspard,1915, p. 48).
P. ext. Passer à travers, traverser, franchir. Couper une droite, une ligne, une route. La Tankadère entrait franchement dans le détroit de Fo-Kien, (...) et elle coupait le tropique du Cancer (Verne, Tour monde,1873, p. 117).Il coupait l'île par le milieu et se rendait du port à l'extrémité occidentale (Queffélec, Recteur,1944, p. 151).
[Employé absol., avec ou sans compl. prép.] Prendre un chemin de traverse, un raccourci. Jean-Louis coupa à travers les pins (Mauriac, Myst. Frontenac,1933, p. 65):
2. Courir à la voix des chiens signifie couper au plus court, en ligne droite, à travers bois, à travers champs, et se diriger vers la tête de la meute de façon à voir l'animal. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 593.
Emplois spéc.
JEUX. Couper un jeu de cartes, couper les cartes, ou absol., couper. Diviser un jeu de cartes en deux paquets et les intervertir. César bat les cartes et fait couper M. Brun (Pagnol, Marius,1931, III, 3etabl., 2, p. 160).
Au fig. [P. allus. au joueur coupant les cartes à l'endroit où un tricheur les a légèrement recourbées] Couper dans le pont, et p. ext., couper dans le panneau, couper dans qqc. Tomber dans un piège, se laisser abuser. Ceux-là sont de braves gobe-mouches, prêts à couper dans tous ces ponts patriotiques (Huysmans, Art mod.,1883, p. 78).
[Le compl. désigne une chose abstr.] Diviser en plusieurs éléments. Couper une phrase, un vers. Il m'avait chargé de couper chaque chapitre d'une manière régulière, uniforme (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 384).
b) [En parlant d'un groupe humain] Diviser, scinder un groupe. L'assassinat du duc d'Orléans coupa la France en deux (Bainville, Hist. Fr.,t. 1, 1924, p. 112):
3. ... les barbares l'attaquent de tous les côtés à la fois, coupent l'armée, et parviennent à isoler pour une nuit entière la cavalerie et les bagages. Michelet, Hist. romaine,t. 2, 1831, p. 11.
[Suivi d'un compl. introduit par de] Séparer une personne ou un groupe de personnes d'un ensemble plus vaste; isoler. Ne pas laisser couper le groupe d'armées de réserve du reste de nos forces (Foch, Mém.,t. 2, 1929, p. 15).On me coupait du monde, on me condamnait à l'exil (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 56).
2. Retrancher, supprimer une ou plusieurs parties d'un tout. Couper une pièce de théâtre, la fin d'une émission. Il a fallu couper ce passage de l'interrogatoire (Malraux, Conquér.,1928, p. 149).
3. Rompre une continuité spatiale ou temporelle; faire cesser, arrêter le cours d'une chose matérielle ou morale.
a) Couper une voie de communication, une route, un fleuve. Le (la) barrer, en empêcher l'accès. Au fig. Couper les ponts avec qqn, avec qqc. Cesser toute relation avec quelqu'un, rompre avec quelque chose. Elle [la philosophie] se libère au point de couper tous les ponts avec la pensée scientifique (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 195).
Spéc., lang. milit. Couper la retraite à l'ennemi. Il coupa la retraite des Autrichiens (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t. 2, 1870, p. 535).Couper les vivres à une armée. Entraver les communications permettant l'apport des vivres. Au fig. Couper les vivres à qqn. Cesser de lui fournir ses moyens de subsistance. Mes commanditaires et mes bailleurs de fonds me couperaient les vivres (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 400).
b) Couper l'eau, l'électricité, le gaz; couper le contact, le courant; couper une communication téléphonique, absol., ne coupez pas! :
4. ... je tournai le commutateur et, rétablissant la communication dans ma chambre, je la coupai entre le bureau de postes et la loge du concierge à laquelle il était relié d'habitude à cette heure-là. Proust, Sodome et Gomorrhe,1922, p. 730.
c) [En parlant d'un phénomène physique ou moral] Couper l'appétit, la fièvre. Couper le souffle. Empêcher, gêner la respiration; au fig., étonner vivement, stupéfier. ... la colère Lui montait à la gorge et lui coupait la voix (Bouilhet, Melaenis,1857, p. 58).L'aspect du cheval et de la voiture coupa l'essor de mon imagination (Gide, Isabelle,1911, p. 604).
d) [En parlant d'une action, d'un entretien, d'un discours]
Couper la parole à qqn, et p. ell., couper qqn. L'interrompre brutalement. Absol., en incise. Je n'ai pas besoin que vous me remerciiez, coupa-t-il avec une sorte de brutalité insolite (Billy, Introïbo,1939, p. 123).
Couper court. Terminer hâtivement un entretien ou un écrit, abréger. Au risque de prendre un peu au hasard la liberté de couper court, je reprendrai sans transition le dessein que j'avais en entamant cette page (Bousquet, Trad. du silence,1935-36, p. 122).
Arg. Couper la chique. Rendre muet de stupeur, déconcerter. P. ell. Ça te la coupe! :
5. ... quand elle se mettait à causer ils étaient tous forcés de se taire. Ils ne savaient pas quoi lui répondre. Elle ne conversait la tante qu'à l'imparfait du subjonctif. (...). Ça coupait la chique à tout le monde. Céline, Mort à crédit,1936, p. 51.
Couper l'effet, les effets de qqn. L'empêcher de produire l'impression désirée. Swann coupa l'effet de Brichot (Proust, Swann,1913, p. 253).
e) [En parlant d'une durée] Couper le temps, la journée. En rompre la continuité. Ces réjouissances dominicales avaient cela de bon qu'elles coupaient la monotonie des jours (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 160).
f) Emplois spéc.
Rompre une unité par l'introduction d'un élément différent.
Mêler un liquide à un autre liquide. Couper du vin blanc avec du vin rouge (Littré). Frais vallon, nous couperons d'un jus rouge encore l'eau rapide et glacée de ton artère! (Claudel, Protée,1reversion, 1914, I, 1, p. 309).
[Sans compl. prép.] Couper du vin, du lait. Y ajouter de l'eau. J'ai demandé qu'on lui « coupe » son lait (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 216).
JEUX. [Dans certains jeux de cartes, avec l'idée d'interrompre une couleur] Introduire une carte d'atout quand on ne peut fournir la couleur demandée. Couper une carte, couper l'as, absol., couper, couper à carreau.
Au fig. L'idée de couper par un maître-atout la plus belle carte des Whigs (Maurois, Disraëli,1927, p. 225).
SP. Couper un coup, une balle. Briser la trajectoire d'une balle. Il avait parié couper douze balles de suite sur la lame d'un couteau (Dumas père, P. Jones,1838, I, 4, p. 133).
4. Emploi trans. indir. Couper à qqc. (un désagrément, une tâche ennuyeuse, une punition, etc.). Y échapper. La Guillaumette, (...) coupa encore à la manœuvre ce matin-là (Courteline, Train 8 h 47,1888, 1repart., 1, p. 7).Il n'y couperait pas : c'était la crise de foie (Gide, Faux-monn.,1925, p. 945).
II.− Emploi pronom.
A.− [Le pron. réfl. représente le compl. d'obj. indir.] Se couper le doigt, se couper au doigt : se couper les cheveux, les ongles. Le critique musical se coupe les ongles avec des ciseaux énormes (Renard, Journal,1907, p. 1137).
B.− [Le pron. réfl. représente le compl. d'obj. dir.]
1. Domaine concr.
a) [Le suj. désigne un animé] Se faire une entaille, se blesser avec quelque chose de tranchant. Toute idée révolutionnaire est un outil qui a deux tranchants, l'un avec lequel on coupe, l'autre auquel on se coupe (Hugo, Rhin,1842, p. 404).
Loc. fig. Se couper en quatre pour qqn, pour qqc. Déployer tous ses efforts au profit d'une personne ou d'une cause.
Spéc. [En parlant d'un cheval] Se blesser en marchant.
b) P. anal. [En parlant d'une étoffe] S'user facilement à l'endroit des plis.
2. Domaine abstr.Se trahir, se contredire; révéler par inadvertance ce que l'on voulait cacher. Pourquoi le président essaye-t-il de le faire se couper, se contredire? (Gide, Souv. Cour d'ass.,1913, p. 648).
C.− [À valeur passive] Être susceptible d'être coupé. Il n'y a point de mal que l'herbe soit mouillée. Elle se coupe mieux (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 455).
− Domaine abstr.Pouvoir être divisé ou subdivisé. Nous devions aller au moins jusqu'à la fin de la première partie. Tel que, cela se couperait très mal (Alain-Fournier, Corresp.[avec J. Rivière], 1913, p. 362).
D.− [À valeur réciproque, en parlant de lignes, de routes, de plans] Se croiser. Si j'imagine trois droites qui se coupent, je formerai un triangle mental (Ruyer, Esq. philos. struct.,1930, p. 189).
Rem. On rencontre ds la docum. le néol. coupaison, subst. fém. Fait de couper (les raisins). C'est au contraire la vendange qui est une institution, une cérémonie, rituelle, annuelle, un anniversaire, pour emplir laquelle les raisins sont faits, cette matière, et la coupaison des raisins (Péguy, V.-M., comte Hugo, 1910, p. 687). Attesté ds aucun dictionnaire.
Prononc. et Orth. : [kupe], (je) coupe [kup]. Ds Ac. depuis 1694. Dupré 1972, p. 545, attire l'attention sur le fait qu'il faudrait écrire l'expr. couper court, « couper cours », car ,,il ne s'agit de couper court ni de couper long, mais de suspendre le cours d'un événement``. Étymol. et Hist. A. 1. « Séparer au moyen d'un instrument tranchant » a) 1remoitié xiies. « retrancher (un membre, un organe) » couper le poing (Lois de Guillaume, éd. J. Matzke, p. 10); spéc. 1678 « châtrer (un animal) » (G. Guillet, Les Arts de l'homme d'épée, 1repart., p. 65); b) mil. xiies. coper borses (Charroi de Nîmes, éd. D. Mc Millan, 1237); début xiiies. coper vergiers (Aymeri de Narbonne, 1097 ds T.-L.); 1611 fig. couper l'herbe sous les pieds à (qqn) (Cotgr.); 2. 1434 « supprimer » (Archives de Tournai ds Gdf. Compl.); 3. 1539 intrans. « être tranchant, coupant » (Est.); 4. 1679 « tailler quelque chose (spécialement un vêtement) selon certaines règles » (Rich.); 5. 1611 pronom. « se blesser » (Cotgr.). B. 1. 1539 « séparer en morceaux, en parties » (Est.); 1606 couper les cartes (Crespin); 2. fin xiiie-début xives. coper le pont (Joinville, 216 ds Littré); d'où 2emoitié xives. coper le voie « barrer le chemin » (Froissart, Chroniques, éd. S. Luce, II, 6); 3. a) av. 1475 coupper court la réponse (Chastellain, III, 58, 24 ds Heilemann); 1567 se couper « se contredire » (J.-A. de Baïf, Le Brave, II, 4 ds Gdf. Compl.); b) 1861 fam. couper à « éviter (quelque chose) » (d'apr. Esn.). C. P. ext. xves. « affaiblir un liquide en le mélangeant à un autre » (O. Basselin, XVIII ds Littré). Dér. de coup* (proprement « séparer par un coup »); dés. -er. Fréq. abs. littér. : 4 435. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 5 152, b) 7 486; xxes. : a) 7 308, b) 6 056. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, passim. Melchior-Bonnet (A.). Le Vocab. révolutionnaire. Vie Lang. 1973, p. 84. − Rog. 1965, p. 71, 236. − Sain. Lang. par. 1920, pp. 238-239; p. 455.