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ADULER, verbe trans.
A.− Flatter en comblant de louanges excessives ou par une admiration imméritée.
1. [L'obj. désigne le plus souvent une pers.] :
1. Ces descendants de Tartuffe sont en grand nombre parmi nous; vous en connaissez plusieurs et il est inutile que je les nomme. Ces tartuffes, on les reçoit, que dis-je? on les recherche, on les flatte, on les adule! et vous trouvez le rôle d'Orgon exagéré! E.-J. Delécluze, Journal,1825, p. 268.
2. Elle était déjà dans le monastère depuis quelques mois, lorsque Régina y fut amenée par sa grand'mère pour achever son éducation. Régina, gâtée et adulée jusque-là par sa grand'mère, et effrayée par le costume et par la vieillesse des religieuses, se jeta naturellement d'instinct dans l'idolâtrie de sa seule compagne Clotilde. A. de Lamartine, Nouvelles Confidences,1851, p. 156.
3. Le journal est bridé, muselé par des lois draconiennes; il est sous la surveillance de la police; c'est une publicité de tolérance : ses rédacteurs en chef sont des rédacteurs en carte... et chose étrange, jamais le journaliste, petit ou grand, Jouvin ou Paradol, n'a eu pareillement le pas sur l'écrivain du livre; jamais sa personnalité n'a fait plus de bruit, n'a tenu tant de place; jamais il n'a été un personnage adulé, salué, caressé par le public comme maintenant. E. et J. de Goncourt, Journal,mai 1860, p. 743.
4. ... la goule, dont les suçoirs abolissaient tous les êtres qui l'approchaient, était le pire des fléaux, et ce fléau devait être haï. Que, chez les fainéants dorés sur tranche, en haut, « dans la grande! », elle fût adulée, courtisée, léchée à cause de son faste et du crédit dont elle jouissait auprès de sa fameuse amie, la Rousse, la maligne Rousse, qui trônait insolemment là-bas, sur les bords de la Seine, à Paris, il se moquait pas mal de ça, ... L. Cladel, Ompdrailles,1879, p. 109.
5. Ainsi vont les chefs de parti, suivant moutonnement les foules qu'ils prétendent conduire. Qui osera te dire la vérité sur toi-même, ô peuple souverain, plus adulé, plus encensé, plus mystifié que les monarques absolus, tes prédécesseurs? C'est tout le problème des démocraties. G. Clemenceau, L'Iniquité,1899, p. 188.
6. Je la vois [la génération à laquelle appartient Mauclair] avec un peu de surprise devenir, à sa maturité, conservatrice, réactionnaire, dauber Wagner, aduler Ingres, se pâmer devant les clavecinistes, ... C. Mauclair, De Watteau à Wistler,1905, p. 35.
7. − « Écoute, quand tout le monde sera servi, tu n'en auras qu'à la condition de prononcer le mot comme il faut »− « Eh! bien, petit? » − « Je veux des asparges », ricana Anthime. Alors la mère rit et lui remplit son assiette. Naturellement le collège lui fut épargné; il eut pour précepteur un jeune prêtre timide et doux. Adulé, adonisé − à dix ans on l'affublait d'un chapeau de forme haute, d'une veste à brandebourgs et de bottes à la Souvarof, pour que déjà il eût l'air d'un homme! A. de Châteaubriant, Monsieur des Lourdines,1911, p. 36.
8. − Je suis même convaincu qu'ils sont tellement habitués à être flattés, adulés, encensés qu'ils croient sincèrement que c'est vrai, que c'est bien comme ça; que c'est légitime; puisque c'est établi. Ch. Péguy, L'Argent,1913, p. 1277.
En insistant sur l'idée de bassesse et de servilité qui souvent connote le mot :
9. Aduler un homme puissant, c'est la règle; mais aduler chaque jour des comédiens et des comédiennes, c'est le bas emploi des folliculaires. S. Mercier, Néologie ou Vocabulaire de mots nouveaux, t. 1, 1801, p. 12.
10. La presse était non pas seulement muselée, mais avilie. Elle n'était pas forcée seulement de se taire, elle était jalouse de s'humilier et d'aduler la puissance. Cette absence de polémique donnait aux conversations et aux préoccupations des particuliers un caractère de partialité et de commérage extraordinaire. G. Sand, Histoire de ma vie,t. 2, 1855, p. 347.
11. judith. − Où je veux prendre pied? Dans le mépris de moi-même! Dans la bassesse! ... que le Dieu des juifs et les juifs se soient occupés vingt ans à me flatter, à m'aduler, qu'ils aient abusé de ma confiance pour me lancer dans ce guet-apens, non! ma pensée ne peut accepter cette honte. Je suis perdue corps et biens dans une aventure aussi basse. J. Giraudoux, Judith,1931, II, 4, p. 152.
2. P. méton. [L'obj. désigne une entité personnifiée] :
12. − Mais, si, au lieu de ratiociner, je filais, reprit-il, en consultant sa montre. Il jeta un dernier coup d'œil autour de lui. Ce musée, se dit-il, mérite d'être adulé; malheureusement, tout y est un peu du vieux neuf; à Dijon, tout est restauré, depuis le Jacquemart, les marmousets, les fresques de Notre-Dame, les façades et les nefs des autres églises, jusqu'aux mausolées des ducs de Bourgogne et aux retables; ... J.-K. Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 308.
13. Mais, dès qu'elle [la guerre] est présente, son orgueil est à vif, on ne gagne sa faveur, on ne la gagne, que si on la complimente et la caresse. C'est alors la mission de ceux qui savent parler et écrire, de louer la guerre, de l'aduler à chaque heure du jour, de la flatter sans arrêt aux places claires ou équivoques de son énorme corps, sinon on se l'aliène. J. Giraudoux, La Guerre de Troie n'aura pas lieu,1935, II, 4, p. 106.
3. Emploi pronom. réfl. :
14. Quel gâchis, bon dieu! − et dire que ce dix-neuvième siècle s'exalte et s'adule! il n'a qu'un mot à la bouche, le progrès. Le progrès de qui? le progrès de quoi? car il n'a pas inventé grand'chose, ce misérable siècle! J.-K. Huysmans, Là-bas,t. 1, 1891, p. 190.
Rem. 1. Aduler est gén. péj. (cf. les termes associés soulignés dans les ex.) avec parfois une idée de fausseté, il s'emploie pour désigner le sentiment qu'on porte aux pers. de qui on espère tirer avantage. L'ex. 9 montre bien les deux aspects du verbe. 2. Comme le montrent les ex., l'emploi du mot est particulièrement fréq. au part. passé ou dans les formes composées à l'aide du part. passé.
B.− Par atténuation, superl. non péj. de adorer ou admirer (un être personnel ou un de ses attributs) :
15. Elles sont enviables, se dit-il, ces âmes qui peuvent s'abstraire ainsi dans l'oraison; comment font-elles, car enfin ce n'est pas aisé, lorsque l'on songe aux misères de ce monde, d'aduler la miséricorde si vantée d'un dieu? on a beau croire qu'il existe, être certain qu'il est bon, on ne le connaît pas, en somme, on l'ignore; il est, et en effet, il ne peut être qu'immanent et permanent, inaccessible. J.-K. Huysmans, En route,t. 1, 1895, p. 128.
16. Christophe, qui la voyait silencieuse et crispée, s'absorber des jours entiers dans sa mélancolie, s'étonnait qu'elle ne fût pas heureuse. Elle était parvenue au but; elle était une grande artiste, admirée, adulée... R. Rolland, Jean-Christophe,Les Amies, 1910, pp. 1178-1179.
Rem. 1. Cf. aussi supra ex. 12. 2. Par attraction paronymique avec adorer et le mot savant dulie [culte voué aux saints], aduler semble parfois être entré dans le domaine relig. (cf. ex. sous B).
Prononc. − 1. Forme phon. : [adyle], j'adule [ʒadyl]. 2. Homon. : adulèrent (ils) et adulaire, subst. fém. 3. Dér. et composés : adulateur, adulatif, adulation, adulatoire.
Étymol. ET HIST. − 1. a) 1389 intrans. « flatter servilement » (Arbre des bat., fo11, rods Gdf. Compl. : Ils sçavent aduler et flater souefvement); 1404 id. « id. » part. prés. adjectivé (Christ. de Pisan, Charles V, 1, 5, ibid. : La haute genealogie des roys de France nous peut aydier en ceste partie comme preambule de gloire non adulant); b) fin xve.-début xvies. aduler a « id. » (Champier, Propheties des Sibilles, ibid. : Comme font les poetes qui veulent aduler a leur prince), n'est plus attesté jusqu'au xviiies., où il est noté ds Ac. 1798 comme ,,de peu d'usage``; c) fin xviiies. trans. (Diderot, Claude et Néron ds DG : Vous adulez bassement le souverain pendant sa vie); d) 1845 pronom. (Besch. : s'aduler : se flatter sottement); 2. 2emoitié xixes. par affaiblissement « témoigner de l'admiration, de l'adoration », supra. Empr. au lat. adulari attesté au sens de « flatter » en parlant des animaux dep. Accius ds Cic., Tusc., 2, 24 ds TLL s.v., 878, 16 (Jovis satelles sublime avolans [i.e. aquila] pinnata cauda nostrum adulat sanguinem), au sens 1, emploi abs. ds Cic., Lael., 99 ibid., 878, 38 (aperte... adulantem nemo non videt) d'où a; cf. part. prés. adj. : Pline, Paneg., 26, ibid., 879, 60 : adulantia verba; constr. avec datif ds Nep., Att., 8, 6, ibid., 879, 15 (Atticus... eo magis patenti adulatus est Antonio) d'où b; trans. ds Cic. De Off., 1, 91 ibid., 879, 45 (cavendum est, ne assentatoribus patefaciamus auris neve adulari nos sinamus) d'où c; dans cet emploi cf. adulater, prob. formé sur adulateur*, et attesté seulement ds Brantôme (1540-1614), Des Dames, II, éd. Lalanne, IX, 249 ds Hug.; 1 d, Tert., De paenitentia, 6 ds TLL, ibid., 879, 39 (nemo... sibi aduletur).
STAT. − Fréq. abs. litt. : 68.
BBG. − Bailly (R.) 1969. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Dup. 1961. − Kold. 1902. − Lav. Diffic. 1846. − Timm. 1892.