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MALIN, -IGNE, adj.
A.− [En parlant d'une pers. ou d'un être surnaturel]
1. Qui est enclin à faire du mal, du tort à autrui. À voir cette peur du malin démon, il semble en vérité que les jansénistes, même quand ils élevaient Racine, aient déjà eu en idée Voltaire (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 3, 1848, p. 460).Les esprits des morts, les génies malins de toute sorte en sont [des forces religieuses mauvaises] des formes personnifiées (Durkheim, Formes élém. vie relig.,1912, p. 585):
1. Qui se délivrera de ce mot [Moi]? Il y a pourtant des fous qui ont la sagesse de parler d'eux-mêmes à la troisième personne! Tous les autres sont des possédés, habités par un esprit malin qui prétend s'appeler moi. Valéry, Mauv. pens.,1942, p. 172.
Emploi subst. masc. Satan, le démon. Depuis bien des années il est inscrit au livre des fables; mais les hommes n'en sont pas pour cela devenus meilleurs : ils sont délivrés du malin, mais les malins sont restés (Nerval, Faust,1840, 1repart., p. 104).Tandis que le mal n'exprime que l'absence du bien, ou qu'un état de péché personnel, le malin est une puissance active, indépendante de nous (Gide, Journal,1916, p. 593).
2. Qui fait preuve d'ingéniosité, de ruse, de roublardise. Jouer au plus malin; ne pas être (très) malin; se croire (bien) malin. Ils sont plus malins que vous, mais je suis aussi maligne qu'eux (Dumas fils, Ami femmes,1864, iv, 2, p. 155).Quand, comment, se formera la situation révolutionnaire?... Bien malin qui peut le prévoir! (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 65):
2. Devenu philosophe à la longue, le drôle choisissait ses types et n'eût eu garde de perdre son temps à se frotter aux Parigots, lesquels, nés malins, ainsi que chacun sait, avaient vite éventé la mèche et deviné le dessous des cartes. Courteline, Train 8 h 47,1888, 1repart., 2, p. 25.
Malin comme un singe. Vous l'avez rendue folle exprès, par vice; vous êtes malin comme un singe. Elle finira par se détruire, vous l'aurez assassinée... On en guillotine qui sont moins coupables que vous (Bernanos, Joie,1929, p. 622).
Emploi subst., rare au fém. Petit, vieux malin; faire le/son malin. Décidément, les malignes refusent le combat et me narguent (Renard, Lanterne sourde,1893, p. 78).Tout de même, c'était sa nièce, cette fille qui faisait tant sa maligne (Queneau, Enf. du limon,1938, p. 202):
3. Dès lors, le père Antoine ne sortit plus sans son Prussien. Il avait trouvé là son affaire, c'était sa vengeance à lui, sa vengeance de gros malin. Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Saint-Antoine, 1883, p. 196.
Expr. proverbiale. À malin, malin et demi*.
Rem. Dans ce sens, la forme fém. maline tend à se substituer à celle de maligne.
B.− [En parlant d'un inanimé, d'un trait du comportement]
1. Qui est suspect de malveillance :
4. Ce fut une soirée unique de magie. Le vent malin souffla la dernière bougie Devant que se fondit notre ultime sorbet. Rostand, Musardises,1890, p. 169.
2. D'un effet nuisible, nocif, pernicieux :
5. Donc, en cas de défaite, Morlot, Laboriette et Chazal, si j'ose dire, assuraient mes derrières. Cette garantie n'était pas superflue et me devenait de jour en jour plus nécessaire. Je tendais à descendre, une secrète et maligne influence m'inclinait vers les rangs inférieurs. A. France, Vie fleur,1922, p. 361.
PATHOL. [En parlant d'une affection] Qui s'aggrave progressivement et de façon inexorable. Fièvre maligne; tumeur maligne (ou tumeur cancéreuse), lympho-granulomatose* maligne (sous lympho-, ex. de Bernanos).
3. Qui révèle de l'ingéniosité, de la ruse, de la roublardise. Avoir l'air malin. Ceux qui épient d'un œil malin les défauts de leurs amis, les découvrent avec joie (Joubert, Pensées, t. 1, 1824, p. 185):
6. Il clignait de l'œil d'un air malin et entendu, et le brigadier, qu'exaspérait ce parti-pris de lui gâter par anticipation le plaisir qu'il se promettait, serra furieusement les mâchoires, pris d'une belle envie de lui coller deux jours sous le premier prétexte venu. Courteline, Train 8 h 47,1888, 1repart., 7, p. 81.
Expr. impers., fam. Ce n'est pas (bien) malin!
Ce n'est pas très intelligent. Par antiphrase. C'est malin! Une dame charmante qui ne répond pas à tes avances? Armand, rêveur : Celle-là, je ne lui ai pas fait d'avances... Isabelle, vite, avec un petit air entendu, assez puéril : C'est malin! Tu devrais pourtant commencer à les connaître, les femmes! (Martin du G., Taciturne,1932, iii, 3, p. 1325).
Ce n'est pas difficile à faire ou à comprendre. À présent que c'est fait, c'est pas malin, il est facile de parler d'eux [les premiers chrétiens] à la légère (Péguy, Myst. charité,1910, p. 132).
REM.
Maligner, verbe intrans.,hapax. Taquiner de façon malicieuse. M. Gerbet s'entend aussi passablement à maligner, mais il est en général plus sérieux que M. Féli (M. de Guérin, Corresp.,1832, p. 62).
Prononc. et Orth. : [malε ̃], fém. [-iɳ]. Malin esprit [malε ̃nεspʀi], mais divin enfant [divinɑ ̃fɑ ̃] (Fouché, Prononc. 1959, p. 435); fém. [-in], -ine tend à s'imposer dans A 2 (supra) p. anal. avec fin, fine et coquin, coquine et pour le distinguer de B 2 (supra). Selon Lar. Lang. fr. [-in] serait la prononc. pop. du xves. Étymol. et Hist. A. Subst. 1. 1remoitié du xiies. subst. masc. « qui se plaît à faire le mal » malignes [lat. malignus] (Psautier Oxford, 5, 5 ds T.-L.); en partic. 1530 le malin « le diable » (Lefèvre d'Étaples, Bible, Matth. 5, 37 ds Kunze, p. 174); 2. 1674 « qui a de la finesse, de la ruse, de l'habileté » (Boileau, Art. Poét., II, 182); 1854 faire le malin (cité ds Fr. mod. t. 23, 51 ds Quem. DDL t. 1). B. Adj. 1. a) ca 1170 « qui se plaît à faire le mal » en partic. li malignes esperiz « le démon, le diable » (Rois, éd. E. R. Curtius, I, XIX, 9, p. 38); b) 1536 « qui est inspiré par la méchanceté » malaingtz enseignementz (Farce nouvelle des Brus, 250 ds Rec. gén. des Sotties, éd. E. Picot, III, p. 95); 2. 1539 « qui a un effet nocif » en partic. méd. « qui caractérise une maladie grave » ulcère malingt (J. Canappe, IIIoLivre de la méthode thérapeutique ds Fr. mod. t. 19, p. 200); 3. 1761 « qui dénote de la finesse, de l'astuce » une certaine coquéterie maligne et railleuse (J.-J. Rousseau, Nlle Heloïse, VI, Lettre V ds Œuvres complètes, éd. B. Guyon, J. Scherer et Ch. Guyot, t. III, p. 661); 1867 fam. c'est malin « c'est stupide » (Meilhac, Halévy, Gde-duch. Gérolstein, I, 4, p. 190 : comme c'est encore malin ça, de venir faire la grimace à un pauvre jeune soldat); 4. 1831 fam. ce n'est pas malin « ce n'est pas difficile à comprendre ou à faire » (Sue, Atar-Gull, p. 13 : Devine ce que je fais faire de toi et de ton équipage? Bigre, ce n'est pas malin! nous piller scélérat). Empr. au lat. malignus « de nature mauvaise, perfide, méchant » dér. de malus, v. mal1; apparaît d'abord sous la forme maligne pour les 2 genres en a. fr.; sur le modèle des adj. en -in, -ine ont été refaites la forme masc. malin, ca 1460 (G. Chastellain, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, I, 35) et la forme fém. maline, xvies. ds Hug., restée jusqu'à nos jours dans la prononc. vulg. et dans les patois (Nyrop t. 1, § 335), la prononc. avec n mouillé devenant générale au xviies. Fréq. abs. littér. : 1 421. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 305, b) 1 802; xxes. : a) 3 427, b) 1 901.
DÉR.
Malignement, adv.a) Vx. D'une façon maligne, avec malignité, en portant tort à autrui. Interpréter malignement qqc. (Ac. 1798). b) Avec malice. César, dans son anti-Caton, prétendait malignement qu'ayant brûlé le corps de son frère, il avait passé les cendres au tamis pour en retirer l'or qui avait été fondu par le feu (Michelet, Hist. romaine,t. 2, 1831, p. 221).L'Italien s'inclina sans protester, et son regard sournois et impudent se coulait malignement vers le comte Franz, témoin indifférent de cette scène (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 64).− [maliŋ əmɑ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Docum. malinement (Rimbaud, Poés., 1871, p. 62). Cf. malin − 1resattest. a) 1527 « avec malignité, dans l'intention de nuire » (Le Peregrin, trad. F. Dassy, 15a, édit. 1531 ds Rom. Forsch. t. 32, p. 101); b) av. 1679 « avec ruse » (De Retz, Mémoires ds Œuvres, éd. A. Feillet, t. II, p. 18), 1828 « avec malice » (Destouches Philos. marié, IV, 6 ds Littré); de malin, suff. -(e)ment2*. − Fréq. abs. littér. : 60.
BBG. − Quem. DDL t. 1. − Spitzer (L.). Schadenfreude. In : S. (L.) Essays in historical semantics. New York. 1948, 316 p. − Väänänen (V.). Faire le malin... R. Ling. rom. 1967, t. 31, pp. 341-364.