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BŒUF, subst. masc.
A.− ZOOLOGIE
1. [Le mot désigne un genre] Mammifère ruminant de la famille des bovidés (bœuf, vache, taureau, buffle, yack, bison, etc.) :
1. − Oui, je dois vous prévenir maintenant que l'on mange ainsi qu'au cloître, ici. Le boucher tue, un jour, un bœuf, soyons plus exact, une vache; un autre jour, un mouton, un autre jour, un veau; la plus grosse part de ces animaux est naturellement réservée au monastère... Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 49.
2. Ce sont les espèces bovines qui aident principalement les hommes pour leurs transports au Tibet, en Chine, en Indochine, en Malaisie, en Birmanie, au Siam, dans l'Inde continentale, à Ceylan : yaks, bœufs, bœufs à bosse, zébus, ou buffles. Le bovidé est le serviteur lent et lourd, mais facile à discipliner. J. Brunhes, La Géogr. hum.,1942, p. 170.
2. [Le mot désigne une espèce] Bœufs marins sortaient des mugissemens comme d' un troupeau de bœufs marins, (Quinet, Allemagne et Italie,1836, p. 210);bœufs bossus de Tamatave le beuglement des bœufs bossus de Tamatave(Leconte de Lisle, Poèmes tragiques,L'illusion suprême,1886, p. 38);bœuf sauvage Toutes étaient riches en bœufs sauvages donc intéressantes, au point de vue chasse. (Maran, Batouala,1921, p. 116);bœuf musqué mammouth, bœuf musqué, renne : climat froid. (Ch. Combaluzier, Introd. à la géol.,1961, p. 102).
HIST. ANC. Bœuf Apis. Taureau sacré de l'ancienne Égypte. Poèmes que chantaient les enfants de Memphis autour du bœuf Apis (Barrès, Mes cahiers,t. 14, 1922, p. 37).Pique-bœuf. Échassier blanc qui se nourrit des parasites du bœuf (cf. Gide, Voyage au Congo, 1927, p. 807).Cet animal est encore appelé garde-bœuf (cf. Michelet, L'Oiseau, 1856, p. 316).
B.− AGRIC. et ALIM. Bovidé mâle, castré, pour les travaux des champs ou pour la nourriture de l'homme.
P. allus. littér. (La Fontaine, Fables, I, 3). [En parlant d'une pers. qui se « gonfle d'orgueil »] Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf.
Au fig. J'ai une tête pareille à la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf (Renard, Journal,1902, p. 762).
Rare. Couleur sang de bœuf. Un tricot couleur sang de bœuf (E. et J. de Goncourt, Journal,1891, p. 7).
Nerf de bœuf. Ligament cervical du bœuf qui est desséché et qui sert à fabriquer des cravaches, des arcs, etc. (cf. Flaubert, Madame Bovary, t. 1, 1857, p. 17).
ARCHIT. Œil-de-bœuf. Petite fenêtre ronde ou ovale pratiquée dans certaines parties d'un bâtiment :
3. Le dimanche matin, Frédéric et Antoine se levaient de bonne heure et s'embusquaient, chacun derrière un œil-de-bœuf, pour voir la femme de l'agent en corset rose et les bras nus, ouvrir ses persiennes de l'autre côté de la rue. Aymé, La Jument verte,1933, p. 183.
Rem. Désigne également a) Une pendule murale, souvent décorée, de forme ovale; cf. le cadran d'un œil-de-bœuf couronnant le chambranle supérieur de la porte accrocha son regard au passage (Courteline, Le Train de 8 h. 47, 1888, 2epart., 7, p. 178). b) [Avec majuscule] L'antichambre du roi dans laquelle se réunissaient les courtisans (cf. Chamfort, Maximes et pensées, 1794, p. 78).
1. AGRIC. Le prix des bœufs; engraisser des bœufs; le toucheur de bœufs (Lamartine, Cours familier de litt., 40eentretien, 1859, p. 288):
4. La femme parle aux bœufs du geste et de la voix; Les animaux, courbés sur leur jarret qui plie, Pèsent de tout leur front sur le joug qui les lie, Comme un cœur généreux leurs flancs battent d'ardeur; Ils font bondir le sol jusqu'en sa profondeur. L'homme presse ses pas, la femme suit à peine; Tous au bout du sillon arrivent hors d'haleine, Ils s'arrêtent; le bœuf rumine, et les enfants Chassent avec la main les mouches de leurs flancs. Lamartine, Jocelyn,1836, p. 744.
5. D'une touche légère de son aiguillon posé sur le mufle de Rossigneau, il fit tourner sur place la première paire de bœufs. − A-t-on vu! grommelait-il. Pas un compliment pour des bêtes comme les miennes! Est-ce qu'ils en ont seulement, des bœufs, les Picards! Les six bœufs se mirent en marche, à une allure de procession, et il ajouta : − Ils sont jolis, leurs bœufs de Picardie! Ça serait bon, tout au plus, pour des crèches de Noël! R. Bazin, Le Blé qui lève,1907, p. 275.
6. Le joug est une autre ruse. Par la forme du bœuf, on peut dire que l'art de persuader approche ici de la perfection. Sur l'arme même, sur la corne, repose cette pièce de bois qui lie le bœuf à son frère bœuf; et il n'y a pas d'espérance que jamais le bœuf connaisse, explore, comprenne cette pièce de bois qui le tient, ... Alain, Propos,1927, p. 741.
Spéc. Char, charrette à bœufs. Char à quatre roues muni d'un avant-train, et qui sert généralement au transport des lourdes charges (cf. Barante, Hist. des ducs de Bourgogne, t. 1, 1821-24, p. 65 et T. Gautier, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 251).
BOT. Arrête-bœuf. Mauvaise herbe (dont ne veulent pas même les bœufs) qui contrarie la poussée des légumineuses (cf. Quelques aspects de l'équipement agric. en France, 2, 1951, p. 17).
Techn., MAR. et PÊCHE. Bateau-bœuf, chalut-bœuf. ,,Le chalut-bœuf est un filet tiré par deux bateaux opérant comme une paire de bœufs traînant une charrue`` (A. Boyer, Les Pêches mar., 1967, p. 54).
2. P. ext., ALIM. Chair du bœuf, de la vache ou du taureau.
a) BOUCH. Morceau de bœuf (côte, jarret, entrecôte, collier, poitrine de bœuf). Filet de bœuf (cf. E. et J. de Goncourt, Journal, 1892, p. 236); os de bœuf (cf. A. France, Les Dieux ont soif, 1912, p. 66); bifteck de bœuf (cf. Barbusse, Le Feu, 1916, p. 26).
Spéc. Bœuf gras. Bœuf très gras que les bouchers promènent, selon une coutume médiévale, en grande pompe à travers les rues de la ville durant les jours de carnaval. L'expression « bœuf viellé » se disait également parce que ce bœuf était promené au son d'une vielle (cf. l'antique cortège du bœuf gras dans Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin, t. 2, 1812, p. 64).
b) CUIS. Plat cuisiné. Pot-au-feu de bœuf, bœuf grillé, rôti de bœuf, langue de bœuf, potage à la queue de bœuf :
7. Quand on eut mangé le bœuf bouilli, on servit des quartiers de veau, des oies en daube, des fricassées de lapin et de poulet : de quoi nourrir un village pendant des semaines. Moselly, Terres lorraines,1907, p. 189.
SYNT. Un superbe morceau de corn'd-beef, bœuf à mi-sel (cf. Brillat-Savarin, Physiol. du goût, 1825, p. 82); bœuf à la mode (cf. Renard, Journal, 1893, p. 150); bœuf à la gelée (Proust, Du côté de chez Swann, 1913, p. 445); bœuf en daube (cf. Sartre, La Nausée, 1938, p. 136).
Absol. Le bœuf. Morceau généralement bouilli. Trouver le bœuf excellent Celui-ci déclarait le bœuf excellent (Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 546);après la soupe vint le bœuf (Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Une Soirée, 1887, p. 584).
C.− Au fig. et fam.
1. [En parlant d'une pers. de forte corpulence, ou douée d'une grande force de travail; ou au contraire lente d'esprit] :
8. Un gros paysan, plus lourd qu'un bœuf, fit plier les ressorts et s'engouffra à son tour dans l'intérieur du coffre jaune. Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, La Bête à Maît' Belhomme, 1885, p. 195.
a) [Le mot bœuf étant pris comme terme de compar.] Suer comme un bœuf (Zola, Une Page d'amour, 1878, p. 955); frapper comme un bœuf (Huysmans, À rebours, 1884, p. 201); créature forte comme un bœuf (cf. P. Bourget, Le Disciple, 1889, p. 211); souffler comme un bœuf (cf. Montherlant, Le Démon du bien, 1937, p. 1368).
b) [Le mot bœuf est utilisé comme symbole]
[symbole de la force] C'est un bœuf! il nous tuera (Pesquidoux, Le Livre de raison,1928, p. 87).
[symbole du travail acharné] L'homme-bœuf (Barbusse, Le Feu,1916, p. 13).
[symbole de la lenteur d'esprit] Ce bœuf, ce roi des sots (Stendhal, La Chartreuse de Parme,1839, p. 63).
c) [Le mot bœuf désigne directement une pers.] Le bœuf. Celui sur lequel repose tout le travail; celui qui reçoit tous les dommages, ou encore celui qui est la victime de quelque mauvaise farce (cf. Champfleury, Les souffrances du professeur Delteil, 1853, p. 13 et A. Delvau, Dict. de la lang. verte, 1866, p. 140).
[Dans la lang. des cordonniers et des tailleurs] Jeune apprenti en passe de devenir ouvrier et à qui l'on fait exécuter la besogne la plus ennuyeuse (cf. A. Delvau, Dict. de la lang. verte, 1867 et L. Larchey, Dict. hist. d'arg., Nouv. Suppl., 1889, p. 29).
2. Expr. proverbiales ou pop. Avoir un bœuf sur la langue. Ne pas parler, avoir été payé pour ne rien dire (cf. Leconte de Lisle, Poèmes tragiques, Les Érinnyes, 1886, p. 175; Aymé, La Jument verte, 1933, p. 207).Mettre la charrue avant les bœufs. Commencer par où l'on aurait dû terminer (cf. Huysmans, L'Oblat, t. 1, 1903, p. 37; Green, Journal, 1941, p. 82).Qui vole un œuf, vole un bœuf. Être peu à peu entraîné sur le chemin du vol. On commence par voler un œuf. Ensuite on vole un bœuf. Et puis on assassine sa mère (Renard, Poil de Carotte,1894, p. 261).Donner un œuf pour avoir un bœuf. Rendre un petit service de façon à en obtenir un plus grand.
3. Jurons pop. Corne de bœuf Corne de bœuf! (Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 285).Nez de bœuf Nez de bœuf! (Dorgelès, Les Croix de bois,1919, p. 69).
4. Pop., emploi en position d'appos. avec valeur d'adj.
a) Considérable, surprenant. Un succès bœuf, un culot bœuf :
9. ... je mettrais en relief le côté aristocratique de votre oncle qui en somme fait un effet bœuf et, la première rigolade passée, frappe par un très grand style. Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,1918, p. 777.
b) En partic. Qui produit un effet de beauté. C'est rien bœuf! (G. Fustier, Suppl. au dict. de la lang. verte d'A. Delvau,1883, p. 499).
Rem. On trouve dans la docum. la forme composée boolâtre, adj. [En parlant d'une peuplade ou d'une tribu] Qui pratique le culte des bovins. ,,Certains [les Foulbés] sont même « boolâtres » est-ce un souvenir de l'ancienne Égypte?`` (Morand, Paris-Tombouctou, 1929, p. 60).
Prononc. : [bœf], plur. [bø]. Le bœuf gras se dit [bøgʀ ɑ] (cf. Barbeau-Rodhe 1930; v. également Fouché Prononc. 1959, p. 478; Grammont Prononc. 1958 admet l'hésitation; Mart. Comment prononce 1913, p. 91, rapporte le fait à ,,la règle d'autrefois``, dont il donne des ex. : un œu(f) dur, un œu(f) rouge, ... [la parenthèse indique que le f n'est pas prononcé]). Enq. : /bøf, bø/.
Étymol. ET HIST. I.− Subst. 1. a) début xiies. buef « taureau châtré » (Lois de Guill., 6 dans Gdf. Compl.); mil. xves. beuf (Villon, 90, 22 dans IGLF Litt.); 1534 bœuf (Rabelais, Gargantua 6, éd. Marty-Laveaux, t. 1, p. 26); b) fin xiies. « viande de bœuf » (Renart, éd. Méon, 10209 dans T.-L.); spéc. 1651 art culin. bœuf à la mode (Cuisinier fr., p. 50 d'apr. Rouvier dans Fr. mod., t. 23, p. 307); c) loc. proverbiale 1579 mettre la charrue devant les bœufs (H. Estienne, La Précellence du lang. fr., 136 dans IGLF Litt.); 2. fig. et fam. a) 1547 « personne acharnée au travail » spéc. dans l'expr. travailler comme un bœuf (Noël du Fail, Propos rustiques, p. 68, ibid.); b) 1661 « personne stupide et hébétée » (Molière, Éc. des maris, éd. du Seuil, II, 2, 1962, p. 148). II.− Adj. 1861 fig. arg., Éc. de Saint-Cyr (Larch. : C'est bœuf [...] est un des nombreux synonymes de C'est chic). Du lat. bos, bovis « bœuf mâle (opposé à vache) » dep. Plaute (ds TLL s.v., 2136, 21); appliqué à l'homme p. iron. (Plaute, ibid., 2141, 22).
STAT. − Fréq. abs. littér. : 2 438. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 705, b) 5 334; xxes. : a) 4 240, b) 2 650.
BBG. − Bernelle (A.). Suivons le bœuf ... à Mycènes. Vie Lang. 1965, pp. 309-310. − Brüch 1913, p. 161. − Duch. Beauté 1960, pp. 7-8; p. 142. − Gall. 1955, p. 441, 469. − Goug. Lang. pop. 1929, p. 36. − Grimaud (F.). Pt gloss. du jeu de boules. Vie Lang. 1968, p. 111. − Kemna 1901, p. 85. − Pohl (J.). Contribution à l'ét. de qq. mots. Fr. mod. 1963, t. 31, p. 298. − Rog. 1965, p. 38, 128, 182. − Sain. Lang. par. 1920, p. 124, 190, 195, 407. − Sain. Sources t. 1 1972 [1925], pp. 172-173; t. 2 1972 [1925], passim.Schroeder (W.). Die Bedingte Diphthongierung betonter Vokale im Südfranzösischen Alpengebiet. Volkstum und Kultur. 1932, t. 5, p. 186. − Tournemille (J.). Au jardin des loc. fr. Vie Lang. 1967, p. 410.