APRÈS, prép.
ÉTYMOL. ET HIST.
I.− Morphème indiquant un rapport de postériorité dans le temps.
A.− Adverbe, xes. emploi abs. « ensuite » (
St Léger, 9 ds
Gdf. Compl. :
Apres ditrai vos dels aanz); fin
xives. [précédé d'une indication chronol.] (
Froissart,
Chroniques, liv. I, part. II c. 81 ds
Dict. hist. Ac. fr. t. 3, p. 549 : Si détint la ville et le châtel
tout l'hiver et l'été après qui fut l'an cinquante neuf).
B.− Préposition, 1130-60 le régime est un subst. (
Couronnement Louis, éd. Jonckbloet 170, ds T.-L. :
Apres ma mort); 1170
id. (
Rois, éd. Le Roux de Lincy, 80,
ibid. : l'endemain
après les kalendes);
ca 1175 le régime est un dém. (
Chr. de Troyes,
Chevalier lion, éd. W. Foerster, 2302,
ibid. : Et
après ce le roi pria Que...);
ca 1175 le régime est un inf. (
Id.,
ibid., 8,
ibid. :
Après mangier);
ca 1200 loc.
l'un après l'autre (
Chanson des Saxons, III ds
Littré : Et la guerre dura tante mainte saison,
Li uns rois après l'autre la reprist en son nom); fin
xives. [le régime est accompagné d'un part. passé] (
Froissart,
Chroniques, liv. I, part. I, c. 60 ds
Dict. hist. Ac. fr. t. 3, p. 543 :
Après cette paix faite, il retourna en France); 1580-92 [constr. avec un inf. passé] (
Montaigne, I, 19 ds
Littré :
Aprez l'avoir ouï); 1671 [à la circonstance de temps s'ajoute une intention d'oppos.] (
Racine,
Bérénice, III, 3 ds
Dict. hist. Ac. fr. t. 3, p. 543 :
Après tant de serments Titus m'abandonner!).
Locutions prépositionnelles, 1641
après tout « tout bien considéré » (
Corneille,
Cinna, I, 2,
ibid., p. 551 : Il est tard,
après tout, de m'en vouloir dédire); 1668
après quoi (
La Fontaine,
Fables, III, 5,
ibid., p. 544 : A l'aide de cette machine De ce lieu-ci je sortirai;
Après quoi je t'en tirerai); 1690
après coup (
Fur.).
C.− Locution conjonctive :
après que, 1200-06 [constr. avec l'indic.] (
R. de Clary,
Constantinople, éd.
Hopf 52 ds T.-L. : or avint,
après que li Franchois eurent sifaitement ouvré, que...); début
xiiies. [précédé d'une indication chronol.] (
Villehardouin, II ds
Littré : En l'an
après que cis preudoms ot commencié à parler de Dieu).
II.− Morphème indiquant un rapport de postériorité dans l'espace, la situation.
A.− Préposition [
xes. anc.
empres « près de [sans mouvement] » (
Passion, 421, Diez ds
Gdf.,
s.v. empres :
Empres lo vidren celles duaes) forme qui subsiste jusqu'au XVI
es. Brantôme,
ibid.]
1. ca 1100 [constr. avec un verbe d'action] (
Roland, 2980 ds
Gdf. Compl. : Veiz Baligant qui
apres tei chevalchet); 1170
après « près de » (
Rois, 79 ds T.-L. : serras
apres la pierre [sedebis juxta lapidem]), seulement au moy. âge;
2. fin
xiies. [constr. avec un pronom réfl.] (
Aymeri de Narbonne, éd. L. Demaison, 2030,
ibid. : Les portes ferment
après eus maintenant);
xves.
courir après qqn au fig. « poursuivre de ses ardeurs, importuner qqn » (
Charles d'Orléans,
Chansons, 57 ds
Littré : Tous jours fuyez, et
après vous je cours); 1580-92
id. « rechercher avidement » (
Montaigne, I, 191,
ibid. :
Courir aprez un beau mot);
3. p. ext. rapport de postériorité dans le rang 1160-75 (
Flore et Blancheflor, éd. I. Bekker 2362, ds T.-L. : La plus bele estoit de la tour De toutes
après Blanceflor); 1539 (
Estienne,
Dict. fr.-lat. :
Apres Dieu les hommes peuvent fort aider aux hommes); 1687 [le régime est un inanimé] (
La Bruyère,
Caractères ds
Dict. hist. Ac. fr. t. 3, p. 544 :
Après le merite personnel... ce sont les éminentes dignités et les grands titres dont les hommes tirent plus de distinction).
Locution prépositionnelle :
d'après. 1670
d'après « suivant la norme, le modèle de » (
Racine,
Préface de Britannicus, ibid., p. 548 : J'avois copié mes personnages
d'après le plus grand peintre de l'antiquité, je veux dire
d'après Tacite) [
après est attesté dans ce sens au
xvies. (
Montaigne, II, 282 ds
Littré : Quand les peintres nous tirent,
aprez le naturel, un subject...) et au
xviies. (1644,
Corneille,
La suite du menteur, II, 6 ds
Dict. hist. Ac. fr. t. 3, p. 548 : O le charmant portrait! l'adorable peinture! Elle est faite à plaire. −
Après le naturel)].
B.− Adverbe ca 1170
après « par derrière » (
Chr. de Troyes Chevalier lion, 935 ds T.-L. : Et mes sire Yvains folemant Hurte grant alëure
après); 2
etiers
xiiies. « tout près » (
Chastoiement, éd. Labouderie, XIV, 17,
ibid. : Un riches hom
après maneit).
Locutions adverbiales xiies.
poi après « un peu plus loin » (Lois
G. Le Conquerant, 5 ds
Gdf. Compl. : E cil viengne
poi après); fin
xives.
ci-asprè dr. diplomatique « plus bas dans le texte » (
Froissart,
Chroniques, liv. I, I
repart., c. 137 ds
Dict. hist. Ac. fr., t. 3, p. 551 : La parole du chevalier ne fut ouïe ni crue bien à point, dont il leur mésavint, si comme vous orrez
ci-après).
Empr. au b. lat.
adpressum « près de, proche de (domaine spatial, avec idée d'oppression) », lui-même composé de
ad « à » et
pressum, part. passé employé adverbialement « comprimé, serré » (
près*);
adpressum est attesté au
ives. dans le domaine méd. où il est empl. comme synon. de
prope (
Chiron,
Mulomedicina, chap. 7 ds Ed.
Wölfflin,
Archiv für lateinische Lexikographie und Grammatik, t. 10, p. 420, v. aussi p. 422). Le sens du b. lat. explique que l'on trouve
après au sens de « proche de » aux
xiieet
xiiies. (
cf. attest. du
Livre des Rois et du
Chastoiement d'un père, supra, hist. II).
Adpressum supplante en gallo-roman l'adv. class.
post en s'étendant dès l'orig. au domaine temporel (
Gamillscheg,
Historische französische Syntax, Tübingen, 1957, pp. 300-303;
Zeitlin,
Z. rom. Philol., t. 6, 1882, pp. 264-65).