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POURRITURE, subst. fém.
A. −
1. Décomposition d'un corps organique, sous l'action de facteurs biologiques (champignons, bactéries) modifiant complètement son aspect, sa composition. Synon. putréfaction.C'était une église (...) lambrissée de chêne, qui tombait en ruines (...) on voyait de grandes taches indiquant la pourriture avancée du bois (Zola, Terre, 1887, p.57).Ces feuilles de peuplier que la pourriture automnale a purifiées, réduites à leur nervure nette et fine (Duhamel, Notaire Havre, 1933, p.26):
1. Le fruit, dès ses premiers jours, porte en lui le principe de sa pourriture; étouffé d'abord durant la période de croissance par les forces organisatrices, ce principe se démasque à la maturité et prend dès lors le dessus, jusqu'à l'entière décomposition. Renan, Avenir sc., 1890, p.446.
P. méton. Ce qui est pourri; matière formée par ce qui est pourri. Tomber en pourriture. Les puants ruisseaux des Granges, remplis de grenouilles et recouverts d'une pourriture verte (Stendhal, H. Brulard, t.1, 1836, p.185).Un fruit mûr qui a subi des modifications insensibles depuis le jour qu'il fallait le manger jusqu'à celui où il disparaît en pourriture (Flaub., 1reÉduc. sent., 1845, p.272).
Pourriture + déterm. précisant le corps d'origine.Pourriture végétale. Le plancher gondolé s'effritait en pourriture de bois (A. Daudet, Port-Tarascon, 1890, p.113).Quelque chose de funèbre et pourtant de chaud et d'attiédi, comme une odeur de pourriture de fleurs (...) traînait dans l'atmosphère (Lorrain, Phocas, 1901, p.188).
En partic. Décomposition d'un cadavre; p.méton., cadavre pourri. Synon. charogne.C'était la cuisse du cadavre que la pourriture avait séparée du tronc (Janin, Âne mort, 1829, p.57).Morte. Dans huit jours cette figure, ces yeux, ces joues ne seront plus qu'une pourriture noire, dans une boîte, au fond de la terre (Maupass., Contes et nouv., t.2, Yvette, 1884, p.542):
2. De féroces oiseaux sur leur pâture Détruisaient avec rage un pendu déjà mûr, Chacun plantant, comme un outil son bec impur Dans tous les coins saignants de cette pourriture. Baudel., Fl. du Mal, 1857, p.208.
2. P. anal.
a) Affection, maladie.
[Chez l'homme] Mal qui ronge, détruit les tissus; état qui en résulte. L'invincible pourriture allait montant toujours des extrémités vers le ventre [du malade] (Flaub., MmeBovary, t.2, 1857, p.19).La malheureuse travaillait (...) d'arrache-pied, à seule fin de pouvoir faire récurer la pourriture de ses gencives (Huysmans, Soeurs Vatard, 1879, p.99):
3. −Mon Dieu! cria-t-elle... Mais qu'est-ce que vous avez?... Pourquoi sentez-vous mauvais, comme ça?... Vous avez de la pourriture dans le corps?... C'est affreux! (...) Vous avez donc un cancer dans le nez... dans l'estomac, peut-être? Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p.312.
MÉD. Pourriture d'hôpital. Infection nécrosante des tissus qui compliquait autrefois certaines plaies de malades soignés dans les hôpitaux. Un moment, dans le pavillon des hommes, il y avait au troisième étage, l'infection purulente, au second le tétanos, et au premier la pourriture d'hôpital (Goncourt, Soeur Philom., 1861, p.113).
[Chez les végétaux] Maladie cryptogamique ou bactérienne des végétaux. Pourriture des fraises, des oignons. Et puis c'est venu le temps de la pourriture. La vigne est pourrie: une tache sur la feuille comme un doigt sale et tout se sèche (Giono, Gd troupeau, 1931, p.15).
VITIC. Pourriture grise. Pourriture des grappes de raisin due à un champignon (d'apr. Agric. 1977). Pourriture noble. Attaque légère et incomplète par un champignon, en années sèches, de certaines variétés de raisins à peau dure, qui provoque une augmentation de la concentration en sucre (d'apr. Agric. 1977). La pourriture noble, où le raisin est prêt à crever sous le doigt mais se charge incomparablement de sucre (Pesquidoux, Livre raison, 1932, p.181).
b) Dégradation de quelque chose; état de ce qui est dégradé. Le château, bien qu'en pourriture, écrase de sa haute masse tout le pâté confus des maisons (Barrès, Serv. All., 1905, p.11).
3. P. méton. Ce qui est dégradé et souillé; en partic., linge usé, sale. Aux fenêtres, le long des perches, pendent et flottent au vent les guenilles rapiécées, les chemises effilochées, les jupons sordides. Il sort de là un nauséabond parfum de vieille crasse doublé d'humidité malsaine. Les mendiants vous y assiègent avec des mines quémandeuses (...). Ils croupissent dans leur pourriture (Du Camp, Hollande, 1859, p.121).Es-tu assez mouillé! (...) Allons ôte-moi toutes ces pourritures (...) Et, d'une main (...) il lui arracha ses haillons qui se déchirèrent en charpie (Hugo, Homme qui rit, t.1, 1869, p.157).
B. − P. métaph. et au fig.
1. Fait d'avoir perdu ses qualités, son intégrité; état de ce qui est dégradé; p.méton., ce qui est dans un tel état. La pourriture de l'Empire romain vint de trois causes principales: du culte, des lois et des moeurs (Chateaubr., Ét. ou Disc. hist., t.3, 1831, p.42).Mes amies? (...) Elles sont d'un monde qui craque sous elles, et dont elles hâtent la pourriture (Zola, Renée, 1887, ii, 10, p.352):
4. ... elle n'était pas heureuse, ne l'avait jamais été. D'où venait donc cette insuffisance de la vie, cette pourriture instantanée des choses où elle s'appuyait? Flaub., MmeBovary, t.2, 1857, p.135.
Pourriture + compl. prép. exprimant ce qui provoque cette dégradation.Si j'avais pu vivre à Paris, vous n'auriez pas tant pleuré peut-être. Cet amour que vous trouvez que je vous refuse, il se fût en allé de votre coeur pièce à pièce, ou plutôt petit à petit, emporté chaque jour par la pourriture de l'habitude. Les arrachements que vous ressentez auraient été des délabrements (Flaub., Corresp., 1847, p.71).
[Pour exprimer son mépris à l'égard de qqn] Pourriture de + subst.«Cléricalisme» est un mot vague et lâche, une pourriture de mot que je rejette avec dégoût (Bloy, Journal, 1897, p.250).Quel fumier, cet orchestre! Il y a là une pourriture de petit flûtiste qui n'est pas fichu (...) de souffler sa note de malheur en même temps que les machines harmoniques des harpes (Colette, Cl. Paris, 1901, p.124).
[En interj.; pour exprimer un vif mécontentement] Ah misère! pourriture de sort; ça d'vait finir comme ça, vois-tu, nous avions eu trop de malheur! (Courteline, Train 8 h 47,1888, 2epart., VIII, p.192).Maintenant il pleuvait. «Pourriture!» se dit Jacques (Saint-Exup., Courr. Sud, 1928, p.37).
2. Corruption morale; état d'avilissement. Pourriture de l'âme; tomber, vivre dans la pourriture. Avec elle [une fille], la pourriture qu'on laissait fermenter dans le peuple, remontait et pourrissait l'aristocratie (Zola, Nana, 1880, p.1269).On parle de la pourriture du monde. C'est peut-être la seule qualité de l'Académie Goncourt, d'être honnête (Renard, Journal, 1909, p.1254).Rosenthal l'amusait comme échantillon de pourriture, comme spécimen de la dégradation humaine (L. Daudet, Entre-deux-guerres, 1915, p.171).
Pourriture + déterm. exprimant ce qui provoque cette corruption.Rasseneur, dont nous avons dû nous séparer, afin de sauver nos fosses de la pourriture socialiste (Zola, Germinal, 1885, p.1322).Vous tous les riches, aussi pourris que les pauvres, avec la pourriture de l'argent en plus, je vous le dis, je vous combattrai (Salacrou, Terre ronde, 1938, i, 2, p.156).
P. méton. Ce qui est vil, bas; personne corrompue ou groupe de personnes corrompues. Synon. ordure, saleté.L'affaire Stavisky, énorme pourriture. Les volés se battaient entre eux (Abellio, Pacifiques, 1946, p.31).La faune immonde décrite par Jean Cau dans le dernier Express, cette pourriture a toujours existé (Mauriac, Nouv. Bloc-Notes, 1961, p.333).V. joli II A ex. de Zola.
Pourriture de + subst.Il y avait, dans cette pourriture d'homme, un coin phosphoré qui n'était peut-être pas absolument exécrable (Bloy, Désesp., 1886, p.170).Pourriture de gamin, ça a dix-sept ans, c'est déjà vendu à la police (Aymé, Rue sans nom, 1930, p.229).
[En injure] Pop., trivial. Synon. ordure.Si jamais ma main tombe sur la pourriture qui a fait ça, on rigolera cinq minutes, je promets (Giono, Gd troupeau, 1931, p.200).Pourritures! crie en français une voix qui monte à travers la cheminée. Vous allez voir si on n'a pas assez de munitions pour vous alourdir! (Malraux, Espoir, 1937, p.778).
Prononc. et Orth.: [puʀity:ʀ]. Ac. 1694-1762: pourriture; 1798: -r-; 1835, 1878: -rr- v. -r-; 1935: -rr-. V. pourrir. Étymol. et Hist. A. 1. 1remoit. xiies. purreture «carie, gangrène (s'attaquant au corps humain)» (Cantique de Habacuc, 24 ds Psautier de Cambridge, éd. Fr. Michel, p.241); 1812 pourriture d'hôpital (Mozin-Biber); 2. ca 1145 porreture «décomposition» ici, d'un cadavre (Wace, Conception N.-D., éd. W. R. Ahsford, 1750); 3. 1174-76 «substance pourrie» vomir venim e pureture (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 3668); 4. xiiies. porriture «état de ce qui est pourri, décomposé» (Ysopet de Lyon, Fable XXXVIII ds Rec. gén. des ysopets, éd. J. Bastin, t.2, p.142); 5. 1798 «maladie cryptogamique de certains arbres» (E. P. Ventenat, Tabl. du règne végét., Paris, J. Drisonnier, t.1, p.451). B. Empl. fig. 1. fin xiilang. biblique, exprime un état d'abjection (Sermons de St Bernard, 2, 28 ds T.-L.: ti, ki vers es et porreture); 2. 1789 «corruption morale» pourriture morale (Le Tocsin, p.24, no1 ds Brunot t.10, p.49); 3. 1869 terme d'injure à l'endroit d'une personne (Littré). Dér. de pourrir* d'apr. les subst. lat. en -ura dér. de verbes en -ire (cf. norreture, nourriture); porriture, pourriture, d'apr. pourrir. Le m. fr. poreüre (1398 ds Gdf., dér. de porrir, pourrir*; suff. -ure1*) semble un hapax. Fréq. abs. littér.: 466. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 234, b) 730; xxes.: a) 1109, b) 723. Bbg. Quem. DDL t.27.