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MÉDIOCRITÉ, subst. fém.
A. − Vx ou littér. État de ce qui se situe dans la moyenne:
1. ... l'aptitude au bonheur n'est pas égale pour tous les hommes. Elle est plus forte, autant qu'il me semble, chez les médiocres que chez les hommes supérieurs et chez les imbéciles. Il faut souhaiter aux êtres qu'on aime la médiocrité de la condition, toutes les médiocrités. A. France,Vie fleur,1922, p.543.
En partic. Condition, position sociale moyenne, état de fortune moyen. Je suis peut-être au nombre des hommes capables d'user bien de ce qu'on appelle une grande fortune, ou même d'une médiocrité facile (Senancour,Obermann, t.2, 1840, p.97).Il plaida de temps à autre, gagnant maigrement sa vie, sans paraître s'élever au-dessus d'une honnête médiocrité (Zola,Fortune Rougon,1871, p.62):
2. ... une grande armoire en noyer, le carreau bien frotté, bien reluisant de propreté, tout cela sans un grain de poussière, mais plein de tons froids, (...) un papier jadis bleuâtre et passé au ton de lin (...). Le baron embrassa tout d'un coup d'œil, vit la signature de la médiocrité dans chaque chose, depuis le poële en fonte jusqu'aux ustensiles de ménage, et il fut pris d'une nausée en se disant à lui-même: − Voilà donc la vertu! Balzac,Cous. Bette,1846, p.88.
B. − État de celui ou de ce qui se situe en-dessous de la moyenne.
1. Insuffisance d'une chose
a) quant à la quantité. Médiocrité du revenu. L'incurie du gouvernement sur l'exportation immodérée des grains, et la médiocrité de la dernière récolte, menaçaient d'une disette prochaine (Marat,Pamphlets, Dénonc. Necker, 1790, p.84).Ce qui fait la mauvaise compagnie n'est nullement la médiocrité de la fortune, mais (...) la vulgarité personnelle (Amiel,Journal,1866, p.191).
b) quant à la qualité, à la valeur, à l'intensité. Médiocrité des idées, des propos, d'un sentiment; médiocrité de caractère, de coeur; médiocrité de l'énergie; médiocrité du bonheur; médiocrité d'une existence, d'une vie; oeuvre d'une grande médiocrité. Heureux qui bat la campagne par l'effet d'une passion! et mille fois heureux qui déraisonne par amour, dans ce siècle où l'on ne déraisonne que par impuissance et médiocrité d'esprit! (Stendhal,L. Leuwen,t.2, 1836, p.333).S'il est une chose évidente pour un Français ayant habité le Danemark c'est l'impossibilité absolue de surmonter la médiocrité d'esprit et la médiocrité d'âme du monde scandinave (Bloy,Journal,1899, p.298).Ce qui abat, ce qui accable, ce qui détruit irrémédiablement l'âme, c'est la médiocrité de la douleur et de la joie (Rolland,J.-Chr., Foire, 1908, p.648).
En partic., absol. Manque d'élévation, de talents, d'aptitudes. Synon. platitude, pauvreté.J'éprouve depuis hier au soir un sentiment amer de médiocrité, d'impuissance, presque de nullité intellectuelle. Il me semble que je suis au-dessous de tout et au niveau de rien (Amiel,Journal,1866, p.164).Il sent la médiocrité l'envahir; mais qu'y faire? Il ne lutte plus; se sacrifie, replie au fond de lui ses ambitions, ses rêves, ses espoirs (Gide,Journal,1927, p.850).Je sais combien la formation du séminaire nivelle les caractères, et souvent, hélas! jusqu'à les confondre dans une commune médiocrité (Bernanos,Journal curé camp.,1936, p.1173).
P. méton. Chose médiocre. Il dit son pessimisme, les médiocrités et les avortements de l'existence (Zola,Bonh. dames,1883, p.451).Les vices, les mensonges, les médiocrités surtout de la société actuelle (...) sont dénoncés avec des exemples à l'appui, tirés des événements publics, de la littérature, des procès (Bourget,Actes suivent,1926, p.66).
2. Insuffisance d'une pers. quant à la valeur, aux capacités, aux résultats; manque d'élévation morale ou intellectuelle. L'Américain a remplacé les opérations intellectuelles par les opérations positives; ne lui imputez point à infériorité sa médiocrité dans les arts, car ce n'est pas de ce côté qu'il a porté son attention (Chateaubr.,Mém., t.1, 1848, p.345).Ils prenaient plaisir à souligner les défaillances qu'ils voyaient autour d'eux, la médiocrité d'écrivains et d'hommes d'État en vue, l'encrassement du peuple dans sa routine (Arland,Ordre,1929, p.132):
3. ... je voulais devenir quelqu'un, faire quelque chose (...); il me fallait donc m'arracher aux ornières, aux routines: mais je croyais possible de dépasser la médiocrité bourgeoise sans quitter la bourgeoisie. Beauvoir,Mém. j. fille,1958, p.188.
P. méton. Personne médiocre; ensemble de personnes médiocres. Nous avons reçu de notre académie de Rome des tableaux et de la sculpture qui n'ont eu guère à lutter ensemble que d'insignifiance et de pauvreté. On se lassera peut-être quelque jour de tant dépenser pour n'avoir ainsi en Italie de pensionnaires que les médiocrités (Mussetds R. des Deux Mondes,1832, p.779).Cette vie de bohème, mal connue des puritains du monde, décriée par les puritains de l'art, insultée par toutes les médiocrités craintives et jalouses (Murger,Scènes vie boh.,1851, 13):
4. Il est des jours où je me demande si ces monstrueux succès, les Thiers et les Scribe, cela n'est pas fait avec la conviction intime d'un chacun, de moyenne intelligence, qui les lit ou les écoute, que s'il se mettait à faire une pièce ou à écrire l'histoire, il ferait la pièce de M. Scribe, il écrirait l'histoire comme M. Thiers. Ne pas humilier le public, voilà le grand secret de ces médiocrités fortunées et comblées. Goncourt,Journal,1860, p.724.
Prononc. et Orth.: [medjɔkʀite]. Ac. 1694 et 1718: me-; 1740: me- en vedette, mé- dans l'art.: dep. 1762: mé-. Étymol. et Hist. 1. 1314 mediocrité de dureté «état moyen» (Chirurgie d'Henri de Mondeville, éd. A. Bos, 65); 2. 1669 «insuffisance de talent (d'une personne)» (J. Chapelain, Correspondance ds Hunter); 1674 «état d'insuffisance dans la qualité ou la quantité d'une chose» (Boileau, Art poétique, éd. C. H. Boudhors, chant IV, vers 114); 3. 1762 «personnes médiocres» (Chevrier, L'Observateur des spectacles, no4 (I, 169) ds Fr. mod. t.37, p.128). Empr. au lat. mediocritas «état moyen, juste milieu», «infériorité, médiocrité, insignifiance». Fréq. abs. littér.: 848. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1240, b) 865; xxes.: a) 1781, b) 1012. Bbg. Henschel (B.). Qq. dat. nouv. du 18es. Fr. mod. 1969, t.37, p.128.