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* Dans l'article "JARGONNER,, verbe"
JARGONNER, verbe
Gén. intrans.
A. − [Correspond à jargon1A]
1. Employer le langage particulier à un groupe socio-culturel ou professionnel, à une activité. Vous payez un verre? Il en fait une soif, jargonnait-elle dans l'affreux argot des rencontres de faubourg (Lorrain, Phocas,1901, p. 362).
Emploi trans. Bussières jargonnait déjà le vocabulaire professionnel. Les mots de serge, d'alpaga, de cheviote lui venaient (Bourget, Tapin,1928, p. 28).
2. S'exprimer plus ou moins correctement, de façon plus ou moins intelligible dans une langue dont on maîtrise mal les structures et le vocabulaire. Jargonner en anglais. Du portugais, en un clin-d'œil, il passe au siamois : il en est bientôt maître, et peut jargonner et caqueter dans les deux langues (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 3, 1851, p. 440).
Emploi trans. Un vieux concierge portant moustache grise, jargonnant un français mélangé d'italien (Ponson du Terr., Rocambole, t. 2, 1859, p. 334):
J'ai dit (...) : « Il y a pourtant plus de six cents ans qu'il [Villehardouin] a écrit dans le français qu'on jargonnait alors... » Ce mot de jargonnait me chiffonne; il me donne après coup des scrupules, et je sens le besoin de faire jusqu'à un certain point réparation à Villehardouin et à nos bons aïeux de la seconde moitié du douzième siècle. Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 9, 1851-62, p. 526.
B. − [Correspond à jargon1B] Péj. Parler dans une langue étrangère que l'auditeur ne comprend pas; s'exprimer dans un langage, un style jugé obscur, hermétique, affecté. Les hommes de troupe (...) jargonnaient en hachant la paille. − La métayère ne revenait point de cela, que ne parlant pas patois, ils ne parlassent pas français (Pourrat, Gaspard,1925, p. 145).La rivalité est traditionnelle entre professeurs de français et de philosophie, les premiers accusant les seconds de « jargonner » (Le Monde,6 sept. 1966ds Gilb. 1971).
Emploi trans. Jargonner un patois. Les Mémoires, charmans d'ailleurs de la savante Marguerite ou Margot de Valois, jargonnent une méta-physique sentimentale qui couvre assez mal des sensations très-physiques (Chateaubr., Litt. angl., t. 1, 1836, p. 213).
Emploi pronom. passif. Il faut aussi la prévenir que les écrits de fantaisie, les peintures intimes (comme cela se jargonne), sont bornés (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 553).
C. − [En parlant du jars, de l'oie] Pousser son cri. Il les entendait, de sa chambre, repartir en jargonnant et en cacadant comme des oies (Morand, Flagell. Séville,1951, p. 337).
REM. 1.
Jargonnant, -ante, adj.Qui emploie un langage affecté, excessivement recherché, hermétique. Cet étudiant en sociologie parlait le langage compliqué et jargonnant de l'université (Le Nouvel Observateur,17 avr. 1968ds Gilb. 1971).
2.
Jargonnement, subst. masc.,hapax. Action de jargonner. Au fig. Un silence (...) meublé de paroles d'hommes tranquilles (...), du jargonnement d'un poêle (...), d'une pipe qui jute (Arnoux, Rhône,1944, p. 359).
3.
Jargonneur, -euse, subst. et adj.(Personne) qui jargonne. (Dict. xixeet xxes.). Le galimatias des jargonneurs (Rob.Suppl.1970).
4.
Jargouiller, verbe,hapax. Synon. péj. de jargonner, supra B.Il coupa court à toutes les réponses qu'elle jargouillait (Huysmans, Sœurs Vatard,1879, p. 123).
Prononc. et Orth. : [ʒaʀgɔne], (il) jargonne [-ɔn]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1200 gargonner « discourir en un langage étrange » (Anseis de Metz, ms. BN fr. 4988, fo215 rods DEAF, col. 260); b) ca 1225 jargonner « bavarder (en médisant) » (Gautier de Coinci, Mir., éd. V.Fr. Koenig, II ch. 9, 1447); c) ca 1460 « parler le jargon, la langue des malfaiteurs » (Villon, Balade [des menus propos] 13 ds Œuvres, éd. L. Tuasne, t. 1, p. 270); 2. 1585 « (de l'oie) pousser son cri [par rapprochement avec jars] » (A. Paré, Livre des animaux, chapitre II, éd. J.-Fr. Malgaigne, t. 3, p. 739). Dér. de jargon1*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 10. Bbg. Gohin 1903, p. 241 (s. v. jargonneur).