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INDUSTRIE, subst. fém.
I. − [Désigne une faculté]
A. − Vx ou littér. Habileté à réaliser un travail, à exécuter, à faire quelque chose. Synon. adresse, art, dextérité.Industrie humaine/de l'homme; faire qqc. avec (beaucoup d') industrie. Les inventions des hommes n'ont point encore atteint à l'industrie des insectes. Les Romains bâtissaient dans l'eau avec la pouzzolane, mais les coquillages construisent leurs toits avec un ciment plus durable (Bern. de St-P., Harm. nat.1814, p. 194).Il faut cheminer très-loin vers la baie d'Hudson pour trouver maintenant des castors; encore ne montrent-ils plus la même industrie, parce que le climat est trop froid (Chateaubr., Voy. Amér., t. 1, 1827, p. 128).[Aux xieet xiies.] toute la chrétienté se couvrit d'édifices admirables dus à l'art et à l'industrie des moines (Lenoir, Archit. monast.,1852, p. 35):
1. Avant de clore ce livre (...) je veux relever une objection que manquent rarement de faire ceux à qui l'on découvre la police et l'industrie surprenante des abeilles (...) tout cela est prodigieux mais immuable (...). Voilà des milliers d'années qu'elles construisent ces rayons étonnants auxquels on ne peut rien ajouter ni retrancher... Maeterl., Vie abeilles,1901, p. 257.
B. − Littéraire
1. Savoir-faire, ingéniosité, esprit d'invention; aptitude, compétence particulière dans une activité généralement artistique, intellectuelle. Faute de savoir faire, faute d'industrie (...) j'ai manqué cinq ou six occasions de la plus grande fortune politique, financière ou littéraire (Stendhal, Souv. égotisme,1832, p. 38).L'enfant avait eu l'industrie de conserver sèche et chaude sur sa poitrine sa vareuse de matelot (Hugo, Homme qui rit, t. 1, 1869, p. 139).Le dernier roman de Conrad est remarquable (...) mais (...) c'est simplement une histoire qu'il raconte avec industrie, et avec de véritables trouvailles d'homme de lettres (Claudel, Corresp. [avec Gide], 1912, p. 191):
2. L'un de ces marauds (...) quelque caboche inventive et profonde, avait eu l'industrie d'attacher une éponge au bout d'un bâton, et il pompait ainsi le vin commodément, de trois ou quatre rangs en arrière... Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 10.
2. Gén. en mauvaise part
a) Recours à des moyens, à des procédés habiles ou adroits d'une honnêteté douteuse pour arriver à ses fins. La manière dont ils [les prêtres] parvinrent à lui enlever [à Henri III] l'opinion populaire, est un chef d'œuvre d'industrie et de calomnie (Chateaubr., Ét. disc. hist., t. 4, 1831, p. 355).[La guerre] répugne à toute ruse, industrie et stratagème, comme à un sacrilège, comme à une sophistication du combat, à une corruption de la justice (Proudhon, Guerre paix,1861, p. 90).[Manu] partit décidant qu'il obtiendrait par industrie ce qu'il ne pouvait obtenir par la force et la persuasion (Aymé, Rue sans nom,1930, p. 81):
3. La Bruyère emploie le mot industrie, je crois, avec défaveur, une légère défaveur, une défaveur naissante qui a pris tout son mauvais sens dans l'expression chevalier d'industrie. On s'élève par son industrie, par tous les moyens, les bons et les mauvais... Renard, Corresp.,1905, p. 321.
Vivre d'industrie (vx). Vivre en ayant recours à des moyens indélicats, à des expédients. Bien qu'ayant hanté les escrocs et vécu d'industrie, j'éprouvais une répugnance invincible à entrer dans cette carrière de crimes (Vidocq, Mém., t. 1, 1828-29, p. 290).
Chevalier de l'industrie (vx), chevalier d'industrie (mod.). Individu à la moralité ou aux pratiques douteuses, ou vivant de ressources procurées par des activités malhonnêtes. Espèce, race des chevaliers d'industrie. Si par hasard vous regrettiez que le grand homme (...) le père du peuple, ait disparu, pour ne plus laisser voir qu'un administrateur inepte, un chevalier d'industrie, un ennemi public (...) ne vous en prenez pas à moi (Marat, Pamphlets, Dénonc. Necker, 1790, p. 72).Son valet le trompe (...) il est de moitié avec tous les chevaliers et toutes les chevalières d'industrie qui l'assiègent (Jouy, Hermite, t. 2, 1812, p. 16).Ces gens de l'hôtellerie et de la limonade manquent de psychologie : ils prennent un chevalier d'industrie avec de faux bijoux à tous les doigts pour un prince authentique (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 77).
b) Dans le domaine artistique ou plus gén. de la créativité intellectuelle.Recours à des procédés adroits, à des artifices, par opposition à ce qui est naturel, ce qui est du ressort du génie. Les Mystères de Paris, clos sous forme de roman, vont reprendre au boulevard sous forme de mélodrame; l'auteur s'occupe déjà à les tailler dans ce nouveau pli : industrie, industrie sur toutes les coutures (Sainte-Beuve, Corresp., t. 5, 1843, p. 265).Les répétitions des motifs dans la musique, comme la concentration de l'effet dans la peinture, petites et mesquines industries dont le commun des artistes s'empare facilement (Delacroix, Journal,1854, p. 155):
4. Quand je vois l'écrivain reprendre et empirer la véritable sensation de l'homme, y ajouter des forces recherchées, et vouloir toutefois que l'on prenne son industrie pour son émotion, je trouve que cela est impur et ambigu. Cette confusion du vrai et du faux (...) devient très choquante... Valéry, Variété 1,1924, p. 153.
II. − [Désigne l'application, les applications de cette faculté]
A. − Courant
1. Vieilli. Profession mercantile; travail généralement manuel; métier dont on tire ses moyens d'existence. On se souviendra d'avoir vu leurs pères, leurs parens [aux Grands] réduits à la plus déplorable situation, et plusieurs obligés de vivre de leur industrie (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1753).Le métier de poète est une moquerie; On ne vit pas ainsi d'oisive rêverie; Dans notre âge peu propre à cette passion Il faut une industrie, une profession (Pommier, Crâneries,1842, p. 18):
5. Sur le boulevard des Italiens (...) il fait presque nuit noire (...) quelques promeneurs vaquent à petits pas, avec des regards ennuyés, qui s'arrêtent un moment sur les nouvelles industries en plein air du jour, les marchands de cannes à épée, les marchands de gourdes, les marchands de plastrons de cuir à l'épreuve de la baïonnette. Goncourt, Journal,1870, p. 607.
2. Gén. en mauvaise part. Activité, pratique douteuse que la morale réprouve. Honteuse, sinistre, suspecte industrie; exercer une (coupable, honteuse) industrie. Il pouvait être braconnier, contrebandier, faux saunier, voleur et coupe-jarrets, honnêtes industries qu'il pratiquait les unes après les autres ou toutes à la fois (Gautier, Fracasse,1863, p. 70).Beaucoup de femmes entretenues se font immuniser par la scène. Le théâtre est une taxe qu'elles payent. Mais il dérange leur industrie (Cocteau, Gd écart,1923, p. 27):
6. Ils n'étaient pas du peuple, sans être des bourgeois (...) ils appartenaient à cette classe ambiguë, la plus vile de toutes, qui n'a ni état, ni fortune, ni même une industrie, sinon une industrie ignoble, qui n'est ni le pauvre, ni le riche, et qui a les vices de l'un et la misère de l'autre. Musset, Confess. enf.,1836, p. 80.
B. − [Avant la révolution industrielle] Ensemble des activités, des opérations ayant pour objet la production et l'échange des marchandises ou la production de produits destinés à être utilisés ou consommés sans être vendus au préalable. Industrie domestique, patriarcale, rustique. Nous produisons tous et nous participons tous aux échanges, nous sommes tous livrés à une industrie, soit agricole, soit manufacturière, soit gouvernementale, soit commerciale, nous sommes pareillement tous marchands ou commerçants (Babeuf, Textes choisis, Paris, Éd. soc., 1965 [1795], p. 192).La petite industrie des campagnes, l'humble travail de la fileuse, est tué par la machine à lin. Le paysan, perdant ainsi, une à une, ses industries, aujourd'hui le lin, demain la soie peut-être, a grand'peine à garder la terre (Michelet, Peuple,1846, p. 70).Elles apparaissent [les corporations] dès (...) que l'industrie cesse d'être purement agricole (Durkheim, Divis. trav. soc.,1893, p. ix).Le silex n'a pas été seulement pour les hommes des anciens âges une arme taillée pour les besoins de la cause, mais une matière, dont l'industrie paléolithique (...) a su tirer des formes ciselées de haches et de poignards (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum.,1921, p. 154):
7. Les objets que la nature ne livre pas tout préparés pour satisfaire nos besoins, peuvent y être rendus propres par notre industrie. Lorsqu'elle se borne à les recueillir des mains de la nature, on la nomme industrie [it. ds le texte] agricole, ou simplement agriculture (...). Lorsqu'elle met à notre portée les objets de nos besoins (...) on la nomme industrie [it. ds le texte] commerciale, ou simplement commerce. Say, Écon. pol.,1832, p. 59.
Rem. Jusqu'au xixes. industrie désignait l'ensemble des activités économiques et concernait donc : l'agriculture, le commerce, les transports et les services, ainsi que les activités économiques artisanales ou manufacturières productrices de valeurs d'usage non agricoles. Cependant Littré signale qu'industrie se dit quelquefois de tous les arts industriels, sauf l'agriculture, par opposition à l'agriculture; cette opposition a été faite par certains auteurs dès le xviiies. Les rapports mutuels de l'agriculture, de l'industrie, du commerce, avec la constitution d'un état et sa législation (...) ne purent échapper aux regards d'un peuple ingénieux, actif, occupé des intérêts publics (Condorcet, Esq. tabl. hist., 1794, p. 58).
C. −
1. Ensemble des activités économiques (caractérisées par la mécanisation et l'automatisation des moyens de travail, la centralisation des moyens de production et la concentration de la propriété des moyens de production), ayant pour objet l'exploitation des sources d'énergie et des richesses minérales du sol ainsi que la production de produits fabriqués à partir de matières premières ou de matières ayant déjà subi une ou plusieurs transformations. En admettant (...) que la science (...) doit suffire (...) à mettre l'industrie au service de l'homme, ils ont abouti inévitablement à mettre (...) l'homme au service de l'industrie et de la technique (Maritain, Human. intégr.,1936, p. 208).Ce pays [la France] (...) a tout ce qu'il faut pour se donner la très puissante industrie métallurgique, d'où sortent locomotives, wagons, rails, navires, avions, machines, outillages, armements, charpente des bâtiments, et dont procède l'activité des entreprises mécaniques et chimiques (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 453).Dans l'industrie, la machine-outil, puis l'introduction progressive de l'informatique ont décuplé l'efficacité du travail humain (G. Marchais, L'Espoir au présent, Paris, Éd. soc., 1980, p. 14):
8. Les industries peuvent se classer de différentes manières (...). Économiquement, deux classifications ont une grande importance. La première s'attache à la structure de l'industrie en fonction de la dimension des unités productives (...). La seconde (...) permet (...) de différencier les industries de biens de production et les industries de biens de consommation. Bouv.-Ibarr.1975.
Rem. Il est quelquefois difficile de décider si industrie désigne le stade manufacturier du développement industriel que l'on peut rapidement caractériser comme étant fondé sur la division du travail à l'intérieur de l'atelier et sur l'utilisation de l'outil manuel comme moyen de travail, ou le stade faisant suite à la révolution industrielle où la production recourt à la machine. Cette ambiguïté est bien illustrée par l'ex. : Quel boucan l'industrie cause dans le monde! Comme la machine est une chose tapageuse! À propos de l'industrie, as-tu réfléchi quelquefois à la quantité de professions bêtes qu'elle engendre (...). Qu'attendre d'une population comme celle de Manchester, qui passe sa vie à faire des épingles? Et la confection d'une épingle exige cinq à six spécialités différentes! Le travail se subdivisant, il se fait donc, à côté des machines, quantité d'hommes-machines (Flaub., Corresp., 1853, p. 293).
Industrie lourde. ,,Ensemble des industries qui produisent la matière première ou qui lui font subir une première transformation`` (Bouv.-Ibarr. 1975). Synon. industrie de base.Le machinisme et l'industrie lourde (...) bouleversent le monde aujourd'hui et le font craquer (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 184).
Industrie de transformation. ,,Ensemble des industries qui fabriquent des valeurs d'usage directement utilisables`` (Bouv.-Ibarr. 1975). Synon. industrie légère.Telle nation (...) choisira-t-elle de développer son industrie lourde ou son industrie de transformation (Perroux, Écon. xxes., 1964, p. 324).
Industrie-clef. Industrie dont dépendent de nombreuses activités économiques. Quand ces forces provoqueront une augmentation du débit d'une industrie-clef, elles provoqueront une expansion et une croissance puissantes d'un ensemble plus large (Perroux, Écon. xxes., 1964p. 150).
SYNT. Industrie agricole, automobile*, de la chaussure, chimique, des colorants, dentellière, des détergents, forestière, graphique, lainière, du liège, linière, du livre, du luxe, mécanique, minière, nucléaire, spatiale; branche, procédé, produits de l'industrie; essor, évolution, extension, naissance de l'industrie; évolution, forme capitaliste de l'industrie; développer, encourager, favoriser, fonder, protéger l'industrie; cadre, ouvrier, personnel de l'industrie.
2. Établissement, entreprise industriel(le) (vieilli). Dans une rue, sur une porte d'industrie, un nom doré qui semble rayonner de la richesse d'une fortune faite (Goncourt, Journal,1870, p. 617).
Chef/capitaine d'industrie. ,,Personne dirigeant un établissement industriel`` (Lar. Lang. fr.). Les penseurs, les politiques, les professeurs d'économie (...) et ceux que les flatteurs nomment capitaines d'industrie s'assemblent et ils découvrent que tout ne va pas dans le monde (...) comme l'exige le profit (Nizan, Chiens garde,1932, p. 202).
3. Ensemble de personnes dirigeant ou possédant une industrie. La haute banque et le grand commerce, l'industrie en jaquette et en tube (...) font ici preuve de leur patriotisme et de leur énergie (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 491).Ce petit cul ne fréquente plus maintenant que (...) la haute industrie (Aymé, Travelingue,1941, p. 52).
Prononc. et Orth. : [ε ̃dystʀi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1370-72 « habileté à faire quelque chose » (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, p. 213, 57d); 2. 1407 « pratique d'une activité manuelle » (R. de Lespinasse, Métiers et corporations de la ville de Paris, 2, 401 ds B. von Gemmingen-Obstfelder, Semantische Studien zum Wortfeld Arbeit im Französischen, p. 35); 3. a) 1543 « toute activité productive » (Déclaration ds Isambert, Rec. Gén. des anc. lois fr., t. 12, p. 810); b) 1767 (Encyclop. t. 8 : Industrie. Inventions de l'esprit en machines utiles, relativement aux arts et aux métiers); 1771 « ensemble des activités économiques fondées sur la transformation des matières premières » (Abbé Baudeau, Première Indroduction à la Philosophie Economique, D. II, p. 663 ds Brunot t. 6, p. 381, note 1). Empr. au lat.industria « activité, application », dér. de industrius « actif, zélé ». Fréq. abs. littér. : 3 278. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 7 305, b) 3 437; xxes. : a) 2 558, b) 4 326. Bbg. Ball (R.V.). Nouv. dat. pour le vocab. de l'automob. Fr. mod. 1974, t. 42, p. 356. - Dub. Pol. 1962, p. 323. - Marcellesi (J.-B.). Fr. mod. 1975, t. 43, pp. 176-178. - Quem. DDL t. 18. - Schröder (W.). Zum Bedeutungs- und Funktionswandel des Wortes industrie. Lendemains. 1975/76, t. 1, no4.