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ABHORRER, verbe trans.
I.− Emploi trans. Avoir pour une personne ou une chose une antipathie telle qu'on ne saurait la voir ou y penser sans éprouver un frémissement et un mouvement tendant à s'en éloigner ou à l'éloigner.
A.− [Le suj. est un n. de pers.]
1. [L'obj. est un n. de pers.] :
1. Et nous songeons à vous, les rois et les barons, Et nous vous exécrons et nous vous abhorrons! V. Hugo, La Légende des siècles,1883, p. 301.
2. Elle exposa son grand désir de pouvoir sortir de Blankenbourg, avant l'arrivée des prussiens. Elle les craignait, les abhorrait. E. Bourges, Le Crépuscule des dieux,1884, p. 28.
3. « Les incroyants me détestent, parce que je bafoue leurs sophismes, et les croyants m'abhorrent, parce que je conspue leur lâcheté. (...) » L. Bloy, Journal,1894, p. 136.
4. Ils [ces libres Autrichiens] regrettent ce Napoléon, qu'ils ont naguère abhorré. R. Rolland, Beethoven,t. 2, 1903, p. 596.
5. Je n'ignore pas combien on me déteste et combien la plupart de ceux qui m'abhorrent seraient embarrassés, si on exigeait qu'ils précisassent leurs griefs. L. Bloy, Journal,1904, p. 52.
6. Sachez que votre action mauvaise est effacée En tant qu'il est de moi, et je suis en paix avec vous, Et que je ne vous méprise et abhorre point parce que vous êtes atteint et malade, Mais je vous traiterai comme un homme sain et Pierre de Craon, notre vieil ami, que je révère, aime et crains. P. Claudel, L'Annonce faite à Marie,Version pour la scène, Prol., 1948, p. 137.
2. [L'obj. désigne une chose en relation dir. ou indir. avec une pers.] :
7. Vingt bras l'ont enchaîné comme il parloit encore. Mais d'un sang criminel, de ce sang qu'il abhore, Le peuple, déposant son glaive redouté, Ne veut point de ses mains souiller la pureté; ... J.-L. Laya, L'Ami des loix,1793, V, p. 114.
8. Ma passion pour quitter Grenoble, c'est-à-dire lui, et ma passion pour les mathématiques, seul moyen que j'eusse de quitter cette ville que j'abhorrais et que je hais encore, car c'est là que j'ai appris à connaître les hommes, ma passion mathématique me jeta dans une profonde solitude de 1797 à 1799. Stendhal, Vie de Henri Brulard,t. 2, 1836, p. 85.
9. C'est l'heure où tout l'Islam psalmodie la sourate des infidèles, et Maxence répète lentement la sombre prière, qu'il a lue dans le livre : « Souratoul et Koufar. Dis : ô infidèles! Je n'adorerai point ce que vous adorez. Vous n'adorerez point ce que j'adore. J'abhorre votre culte. Vous avez votre religion, et moi la mienne. » E. Psichari, Le Voyage du centurion,1914, p. 98.
10. Peu à peu ceux qui les [les fables] aimaient, ceux qui les goûtaient, ceux qui les pouvaient entendre disparaissent. Ceux qui les abhorraient, ceux qui les déchiraient, ceux qui les persiflaient sont morts aussi. P. Valéry, Variété 2,1929, p. 50.
3. [L'obj. désigne une chose considérée comme un être animé doué d'une certaine agressivité] :
11. Oh! Que suis-je venu chercher ici! Éternelle douleur! Larisse, Thessalie, Tempé, flots du Pénée que j'abhorre! O Polémon, cher Polémon!... « Que dis-tu, au nom de notre bon ange, que dis-tu de poignards et de sang? Ch. Nodier, Smarra ou Les Démons de la nuit,Épilogue, 1821, p. 105.
12. ... nous rejetons la hache au tas noir des épées; nous l'abhorrons; ... V. Hugo, La Légende des siècles,t. 6, 1883, p. 292.
13. Et par mille fissures invisibles, ainsi qu'une eau sombre et secrète, la fatalité qu'il abhorre est entrée dans son destin. G. Bernanos, Un Mauvais rêve,1948, p. 903.
4. [L'obj. est un verbe à l'inf.]
a) [L'obj. est un verbe à l'inf. précédé de la prép. de )] :
14. En honnête homme qui abhorre d'exagérer, je ne sais comment faire. Stendhal,Vie de Henri Brulard,1836, p. 501.
15. Physiquement elle était devenue hideuse, au désespoir du ruiné Chapuis, qui n'aurait pas abhorré de liciter sa tendre compagne, mais qui ne pouvait plus l'offrir désormais qu'en qualité de guenille bonne à laver les dalles des morts dans un hôpital de lépreux. L. Bloy, La Femme pauvre,1897, p. 23.
b) [L'obj. est un verbe à l'inf. précédé d' une prop. complétive introd. par que ] :
16. Je lui faisais des hontes abominables. Il rougissait de haut en bas. Il abhorrait qu'on le remarque. L.-F. Céline,Mort à crédit,1936, p. 82.
Rem. La constr. a (cf. hist. I A 2) n'est illustrée dans la docum. que par 4 ex. du xixes., dont 3 de Stendhal; l'ex. 20, dans lequel se trouve attestée la constr. b est unique.
B.− P. ext. [Le suj. désigne un être ou une entité assimilés à une pers.] :
17. L'homme que je haïssais comme les ténèbres abhorrent la lumière n'est plus qu'un cadavre! P.-A. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 3, Le Club des valets de cœur, 1859, p. 543.
18. Hélas! L'astre du ciel te hait, la fleur du pré Te craint, autour de toi tous les êtres ensemble Frémissent, les clartés frissonnent, l'azur tremble L'infini te redoute et t'abhorre; eh bien, moi, Je t'apporte en amour tout cet immense effroi! V. Hugo, La Fin de Satan,Hors de la terre III, 1885, p. 927.
19. On peut dire que la métaphysique a reconquis le terrain perdu en montrant à l'homme l'illusion des prétendues solutions scientifiques et en ramenant l'esprit vers la région mystérieuse que la petite science abhorre. G. Sorel, Réflexions sur la violence,1908, p. 208.
20. Il arrivait bien à ne pas pécher contre la mesure, à garder cette attitude si perverse de « l'honnête homme » que tout le monde révérait et que Dieu peut-être abhorrait, mais au prix de quelle surveillance continuelle sur soi, de quels sacrifices renouvelés et toujours sensibles? M. Jouhandeau, Monsieur Godeau intime,1926, p. 46.
21. Ainsi l'esprit semble abhorrer et fuir le procédé même de la vie organique profonde, qui exige, au contraire, la répétition des actes élémentaires desquels dépendent les échanges vitaux. P. Valéry, Variété,1936, p. 211.
Emploi absolu (cf. hist. II, rem. 2) :
22. Vous jugez si cette âme altière, en tout extrême, Qui dans le même jour abhorre autant qu'elle aime, A l'aspect d'un écrit, que son amour jaloux Croira pour la princesse... elle entre; laissez-nous. G. Legouvé, La Mort de Henri IV,1806, IV, 4, p. 402.
23. J'aime ou j'abhorre, dans l'acception physique du mot. A. de Lamartine, Voyage en Orient,1835, p. 63.
Rem. Dans cet emploi, rare dans la docum., abhorrer s'oppose à aimer, également en constr. absolue.
II.− Emploi pronom. (cf. hist. II, rem. 1). S'abhorrer
1. Réfléchi :
24. Je m'abhorrois moi-même en pensant que, sans mon fatal amour, sa vie entière eût été aussi paisible, aussi fortunée que brillante... Mmede Genlis, Les Chevaliers du Cygne,t. 1, 1795, p. 165.
25. Oh! Combien je t'aime! Et combien je m'abhorre de t'avoir si souvent tourmentée! V. Hugo, Lettres à la fiancée,1822, p. 259.
2. Réciproque :
26. L'unité de doctrine une fois brisée, il y a des jurisconsultes, des philologues, des métaphysiciens, des théologiens, qui, tous, s'abhorrant les uns les autres, marchent fort habilement dans des directions contraires. E. Quinet, Allemagne et Italie,1836, p. 123.
Rem. 1. Assoc. très fréq., la plupart déjà attestées dans les dict. (abhorré de tous; abhorré de tout ce qui l'environne [Littré]), dans lesquelles le verbe ou l'adj. est mis en relation avec un terme exprimant la totalité : . abhorré de tous, etc. (L. Baudry des Lozières, Voyage à la Louisiane, 1802, p. 95); . (nous avons) tous abhorré... (L. Dierx, Les Lèvres closes, 1867, p. 219); . ... abhorré partout (Lautréamont, Les Chants de Maldoror, 1869, p. 146); ou l'universalité ou l'irréversibilité dans le temps : . j'abhorre à jamais (J.-L. Laya, L'Ami des loix, 1793, V, 5, p. 114); . abhorrer sans retour (P. Drieu La Rochelle, Rêveuse bourgeoisie, 1937, p. 238). 2. a) Empl. soit au prés., soit au passé (à l'imp. le plus souvent), le verbe exprime un procès qui est l'effet des dispositions affectives du suj. Cette action est exercée normalement par un être hum., moins souvent par une part. de l'être hum. (telle que l'âme, l'esprit, la chair, le cœur, la nature); par une activité ou par un état propres à l'être hum.; plus rarement par une entité ou par un être assimilés à l'être hum. sous le rapport de l'affectivité. − L'obj. de l'action (compl. d'obj. du verbe ou subst. qualifié par le part. passé-adj.) est soit une pers., soit une chose en rapport avec une pers. ou avec un ensemble de pers. (chose considérée comme part. d'une pers.; chose perçue par une pers.; produit de l'activité hum., etc.), soit une entité, un être, un obj. assimilés à une pers. sous le rapport du mouvement, de l'agressivité, de l'affectivité. On notera plus spéc., pour ce dernier cas, la présence du mot dans des cont. rel. (cf. ex. 9), chez qq. aut. des xixe-xxes. conscients du fait que abhorrer fut d'abord (cf. étymol.) d'un emploi surtout rel. avant de passer, avec une valeur très forte, dans le vocab. gén.; cette utilisation résurgente du mot n'est pas nouv., elle se rencontre au xviies. (cf. Corneille, Polyeucte, II, 6). L'obj. abhorré est ou négatif par lui-même (despotisme, etc.), ou neutre, mais senti comme négatif par le locuteur (souvenir, etc.). La motivation du procès consiste dans le fait que l'obj. abhorré dépasse les limites de l'acceptable sur le plan rel., moral, affectif, etc. Ce dépassement produit une sorte de frémissement qui fait que l'on est amené à s'éloigner de l'obj. abhorré (on abhorre les méchants) ou à l'éloigner (un malade abhorre les remèdes). Le mot a ainsi conservé les 2 éléments significatifs que contient son corresp. lat. (cf. étymol.) : ab- indique l'action de se détourner, de s'éloigner; horrere celle d'avoir horreur, primitivement avec hérissement des cheveux, sous l'effet d'une grande frayeur. b) Abhorrer fonctionne : dans des séries anton. à 2 termes (ex. 22, 23, etc.), les oppos. le plus fréquemment rencontrées étant : abhorrer / aimer (Alain, Propos, 1936, p. 940; etc.); abhorrer / mépriser (Stendhal, Lucien Leuwen, t. 2, 1836, p. 362; etc.); dans des séries synon. à 2 ou à 3 termes (ex. 1, etc.); dans ou en dehors d'une série synon., en assoc. avec un verbe indiquant la motivation ou explicitant les suites de la réaction violente exprimée par abhorrer (ex. 2, 12, etc.); qqf. en assoc. avec des verbes exprimant, comme lui, une attitude négative (ex. 10). Les 4 verbes abhorrer, détester, exécrer, haïr, expriment 4 degrés d'un même sent. L'aversion portée à l'extrême est exprimée par exécrer, l'aversion très intense, mais non portée à l'extrême, par abhorrer, ce dernier terme l'emportant en intensité sur détester ou sur haïr. Abhorrer désigne une réaction de la sensibilité et s'applique particulièrement à un mal prés. ou dont on craint la présence; détester est l'effet du jugement et de la raison, et s'applique à la cause du mal ou à un mal passé dont il subsiste des traces (aversion, regrets); dans le premier cas, on frissonne, dans le second, on repousse. Exécrer ajoute à l'idée d'horreur celle d'un mal digne de malédiction; maudire implique l'idée d'une extériorisation du sent. par la parole, le geste.
Stylistique − Le mot appartient à la lang. litt. ou soignée (cf. hist. introd. et II, rem. Brunot); il est aussi empl. hyperboliquement dans le discours fam., p. ex. dans la correspondance (Balzac, Mallarmé, cf. ex. 27) ou sous la plume d'écrivains éprouvant ou notant des sent. violents (ex. 28 et 29) : 27. Enfin, nous allons nous voir, et regagner le temps perdu l'an passé! Et ne plus écrire, car j'abhorre les lettres (que je ne reçois pas). S. Mallarmé, Correspondance, 1864, p. 121. 28. La drôlesse, que je veux croire aussi fidèle à son mari qu'à son extraction et qui m'abhorre instinctivement, jouissait de ma détresse connue, triomphait dans l'antichambre de ma ruine supposée! L. Bloy, Journal, 1892, p. 31. 29. Rentre dans la nature, fils dénaturé : connais ta faute, abhorre-la, arrache-la de toi comme une dent cariée et puante. J.-P. Sartre, Les Mouches, 1943, III, 2, p. 99. Avec une nuance d'iron. : 30. En vraie créole de Paris, MmeMarneffe abhorrait la peine, elle avait la nonchalance des chattes. H. de Balzac, La Cousine Bette, 1847, p. 101. Le mot se prête aussi à des allitérations du type abhorrer/ adorer, attesté plusieurs fois dans la docum.
Prononc. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [abɔ ʀe]. Barbeau-Rhode 1930, et Warn. 1968 notent encore une var. avec redoublement de l'ʀ; à l'influence habituelle de la graph. -rr-(cf. aberration*, prononc. et orth. 1) s'ajoute ici la val. affective du mot (cf. styl.). Enq. : /abo2 ʀ/. Conjug. parler. 2. Dér. et composés : abhorrable. 3. Hist. des formes. − Le mot abhorrer, de formation sav., apparaît sous sa forme actuelle au xves. (cf. étymol.). Jusqu'au xvies., il a été concurrencé par avourir, aborir, aborrir, abhorrir et abhourir que Hug. et Nicot 1606 signalent en vedette. D'apr. Fouché Morphol. 1967, p. 27, ,,Abhorrir est encore très employé pendant tout le xviesiècle, et présente naturellement des formes inchoatives; cf. 2epers. sing. ind. abhorris Maur. Scève (...); 3epers. plur. abhourrissent ibid. (...). L'impér. abhorissez est ds Rabelais (liv. II) et le part. abhorissant ds Amyot (...). Mais ces formes disparaissent peu à peu devant les formes correspondantes de abhorrer, qui ne sont pas inchoatives.`` La forme abhorrer s'impose à partir de Rich. 1680. Ac. Compl. 1842 met encore la forme abhorrir en vedette, avec le qualificatif v. lang. Besch. 1845, s.v. abhorrir précise ,,que le verbe abhorrer n'est autre chose que le verbe abhorrir sous sa seconde forme orthographique.`` Pour la prononc. de l'r. cf. aberration, prononc. et orth.
Étymol. − Corresp. rom. : de a) cat. avorrir; de b) a. prov. aborrir; ital. aborrire; a. esp. aburrir, aborrir. 1488 « avoir en horreur » (Mer des histoires, I, 36b, éd. 1491 ds Rom. Forsch., 32, 3 : Par quoy est bon de veoir ung peu des dieux des payens pour les abhorrer); prob. ant. ds Jean de Vignay, Mir. hist. (XXVII, 28), composé ca 1327, cité d'apr. éd. 1531 ds R. hist. litt. Fr. I, 179 : Les clercs d'icelle eglise abhorroient l'aspreté de son propos et de sa vie. En outre : a) xiiies. jud.-fr. avourrir « id. » (plusieurs fois attesté ds Lévy, no140; cf. Hagins le Juif, Richel. 24 276, fol. 25 rods Gdf. : il est ... hastant, couroucier et avourrissant le mal); b) 1492 « id. » (Rom. des Sept Sages, ds Fr. mod., IV, 334 : Nature aborissoit que le filz deut habiter avec la femme de son pere), prob. attesté ant. d'apr. le dér. aborrissement, xiiies. (Comm. s. les Ps., Richel. 963, fol. 232b ds Gdf. : il me mistrent aborissement, ce est hideux a eus, ce est a dire : je leur seré achaisons de hideur quant il me verront pendre en la croiz). Abhorrer, empr. au lat. abhorrere « id. » (dep. Térence, Andria, 828 ds TLL s.v., 76, 31 : adulescentulo in alio occupato amore, abhorrenti ab re uxoria). Les autres formes : a été prob. influencé par l'a. prov. de formation pop., attesté sous la forme aorrir dep. xiiies. (Breviari d'Amor, fol. 171 ds Rayn., III, 54, 3a); cf. fr.-prov. (Mornant avorri, Rive-de-Gier avari « avoir du dégoût pour une chose » ds Puitspelu, s.v.); cf. cat. avorrir, forme pop. dep. 1284 (R. Llul ds Alc.-Moll., s.v.); b demi-sav. : cf. a. prov. aborrir xiiies. (Peire Cardenal ds Lévy, s.v.); a. esp. aburrir, 1220-50 (Berceo ds Cor., s.v.), ital. aborrire, xvies. (DEI). Les formes sous a et b remontent au lat. *aborrīre (abhorrescĕre). HIST. − Mot entré dans la lang. au xiiies. (cf. étymol.). Malgré ses var. phonét. et graph. (cf. prononc. et orth.), grande stab. sém. de ce terme monosém. Très usité au xvies. (cf. Hug.), il entre dans le style noble aux xviieet xviiies. (cf. inf. II, rem. Brunot) et litt. au xixes. (cf. styl.). I.− Disparitions av. 1789. − A.− Emploi prépositionnel abhorrer de. 1. Avec un subst. xvies. (Hug. glose « ne pas s'accorder avec ») : L'usage, qui est religieusement gardé par toute la chrestienté, à nommer les jours de la semaine par le nom des planetes, monstre tresevidemment que l'influence celeste n'abhorre de la pieté chrestienne. Cholieres, 8eAp. disnée (Hug.). xviies., comme part. prés. adjectivé : Je ne suis trop abhorrant de ceste opinion. Nicot 1606. Cf. aussi Cotgr. 1611. 2. Avec un inf. xvies. : Ilz abhorrissent de frequenter la compagnie des hommes. A. du Moulin, Trad. des Complexions des hommes, 281 (Hug.). A l'époque class. : Tout homme abhorre d'être pris pour dupe. Bayle (Lar. 20e). − Rem. Cette constr. subsiste de façon isolée au xixes. chez Stendhal notamment (cf. sém.). B.− Sens du part. prés. adjectivé : abhorrent, -e « inusité », « hors du commun » (Dr.) : Les deux [abhorrir et abhorrer] viennent de ab et horror, signifiant le dernier une tremeur causée aussi de peur. Et parce qu'on s'estrange de telles choses, abhorer signifie aussi defuir et s'esloigner de quelque compagnie, selon laquelle signification l'on dit une chose estre abhorrente, quand elle est outre la commune et usitée façon de faire. Res inusitata atque a communi usu abhorrens. Nicot 1606. Cf. aussi Cotgr. 1611. − Rem. Sens mentionné chez les 2 seuls lexicogr. cités qui confondent peut-être abhorrant et aberrant. II.− Hist. du sens et des emplois attestés apr. 1789. − Cf. déf. ds sém.; est suivi habituellement d'un régime de pers. ou d'un terme à coloration abstr. 1reattest. ca 1327; mieux attesté à partir de 1488, comme verbe trans. xvies. : Innocence (...) fuit et abhorre toutes choses par lesquelles on fait tort ou injure a autruy. J. Le Maire, Œuvres, [1504], (Quem.). − Rem. Cet ex. constitue l'une des 1resattest. où le suj. désigne non une pers., mais une entité assimilée à une pers. xviies. : Les loix abhorrent le vice et embrassent la vertu. Patru, Plaidoié (Rich.). − Rem. D'après Brunot (IV, p. 586) citant Chapelain, abhorrer n'était pas à cette époque ,,exclu du bel usage`` mais on ne devait l'employer que dans ,,les fortes expressions``. Brunot précise aussi que le mot pouvait avoir exceptionnellement pour régime un nom désignant une chose concr. produite par l'homme : Les Manichéens abhorroient le vin. Bossuet, Traité de la communion, 151. xviiies., selon Brunot (VI, p. 1030), abhorrer sert de synon., dans le style noble, aux termes du lang. cour. haïr et détester : Les parricides mains d'un tyran qu'elle abhorre. Voltaire, Mérope, V, 1. Perman. de cet emploi trans. jusqu'à l'époque contemp. (Trév. 1752, Ac. 1835, Dub.). − Rem. 1. Abhorrer empl. à la forme pronom. (réfl. ou réciproque) sans différenciation de sens : 1reattest. au xviies., perman. jusqu'au xixes. inclus : Objet infortuné des vengeances célestes, Je m'abhorre encore plus que tu ne me détestes. Racine, Phèdre, II, 5, (Fur. 1701). 2. L'emploi absolu, ignoré par les dict., apparaît au xviiies. et se maintient au xixes. seulement (ex. 22, 23, toujours en opposition avec aimer, également en emploi absolu), cf. encore : Il abhorre sans cause, il aime par erreur... E. de Sénancour, Rêveries, 1799, p. 108.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 223. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 691, b) 221; xxes. : a) 211, b) 110.
BBG. − Bloch (O.). Notes lexicales. Fr. mod. 1936, t. 4, p. 334. − Gramm. 1789.